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ISM France - Archives 2001-2021

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Salfit -

Abu Rabia avait raison, c'était le début de quelque chose

Par

Quand les Forces de l'Occupation Israélienne ont envahi pour la première fois le village, Abu Rabia se tenait à côté de moi sur le toit.
Je l'ai observé fermer lentement chaque petit muscle de son visage, alors qu'il regardait fixement devant lui tel une pierre : "Je suis seulement en train de penser : de quoi est ce le commencement?"
Je n'ai pas pu comprendre ce qu'il avait voulu dire alors.

Mon corps était en tel état de choc que je ne me sentais pas effrayée, même lorsque les soldats ont agité devant moi leurs armes.
Maintenant, je suis effrayée quotidiennement, et même la machine à laver peut me faire sursauter.


Abu Rabia avait raison, c'était le début de quelque chose

Je suis sûre que vous avez eu connaissance de l'attaque-suicide par la presse. Bon nombre d'entre vous m'ont écrit à ce sujet. C'est triste en effet que des civils en Israël soient morts. Mais ces attaques-suicides sont relatées d'une façon disproportionnée.

Est-ce que l'un d'entre vous a lu dans vos journaux quelque chose au sujet du garçon de 15 ans qui a reçu une balle dans la tête par la sécurité israélienne alors qu'il cueillait des raisins? Si je n'avais pas vécu dans un village voisin, je crains que je n'aie jamais entendu parler de cette tragédie.

Mais parce que je suis ici, parce que j'ai vu des maisons envahies au beau milieu de la nuit, parce que je me suis réveillée en entendant des soldats se faufiler autour de notre maison, je sais que la terreur peut survenir sous de nombreuses formes.

Si l'armée n'envahit pas notre village, il est probable que nous recevions au moins un appel d'un village voisin. A Deir Istiya, les soldats ont pris possession de deux maisons et ont enfermé à clef la famille dans la pièce de devant. Ils sont allés sur le toit et ont installé des armes à toutes les fenêtres et ont dit à la famille qu'ils utilisaient leur maison comme base militaire. Ils ont promis de repartir quand les deux hommes recherchés seraient morts.


Dans une maison, ils ont menacé de tuer les fils. Dans l'autre, ils ont uriné dans leurs bouteilles d'eau et ont volé leur huile d'olive. La femme enceinte dans la maison a eu des pertes, très probablement en raison du stress. La famille est trop pauvre pour se permettre un docteur et est trop effrayée pour laisser leurs enfants seuls à la maison, ainsi la mère continue à saigner sans aide.

La nuit passée, la famille à Deir Istiya a encore appelé. L'armée avait tenu sa promesse de partir. C'était la nuit, et aucune voiture ne pouvait nous emmener jusqu'au village. Je suis restée éveillée dans mon lit. Le mouvement me donne habituellement des nausées. Cette fois je pense que j'étais malade de mon propre calme.


Abu Rabia avait raison, c'était le début de quelque chose

Je suis allée participer à l'action à Ammateen. Je marchais devant, là où les Palestiniens avaient demandé aux internationaux de se positionner. J'étais à quelques mètres des soldats et je pouvais même reconnaître certains des visages de ceux qui avaient participé à l'invasion de Harès.
Ils ont commencé à tirer des boîtes métalliques de gaz lacrymogène.

J'ai vu Neta, évanouie alors que deux Palestiniens l'évacuaient.


Le gaz lacrymogène était si épais que j'aie commencé à avoir des hauts-le-coeur et je ne pouvait même pas voir mes mains.
Mon ami Wendy a saisi mon épaule et nous nous sommes éloignées un peu. Nous avons attendu, et puis nous avons essayé d'avancer encore. Ils nous ont repoussés. Nous avons attendu et puis nous avons essayé d'avancer encore. Ils nous ont repoussés. Ce jeu a continué jusqu'à ce que deux jeeps viennent vers nous. L'ambulance a avancé avec les blessés et les Palestiniens ont poussé des roches énormes derrière elle pour la jeep ne puisse pas la suivre.

Tout cela s'est produit sur la terre palestinienne, à plus de 20 km à l'intérieur de la Cisjordanie .

Nous sommes retournées au village et la clinique était pleine. Trente et un personnes avaient été blessées et 3 ont été arrêtés. Les femmes se tordaient les mains et regardaient le sentier en demandant : "Où est-il mon fils? Est-il derrière vous?" J'ai regardé le sol et je n'ai dit rien.

Plus tard, les soldats ont cerné la clinique et ont détenu 20 personnes. Les activistes et les femmes du village se sont battus pour empêcher qu'elles soient emmenées. L'armée a répondu en tirant du gaz lacrymogène et des balles en caoutchouc dans le village. Ce qui était le plus dur était le sentiment de défaite. L'espoir est l'arme la plus dangereuse contre l'occupation, aussi l'armée doit l'anéantir.


Abu Rabia avait raison, c'était le début de quelque chose.

J'espère que ces manifestations, où les Israéliens, les Palestiniens, et les internationaux se réunissent ensemble pour résister pacifiquement, est le début de quelque chose aussi.

Juste au cas où nous n'aurions pas reçu le message, l'armée a envahi le village le lendemain de l'action et a déclaré le couvre-feu.

Wendy et moi nous sommes précipitées pour rejoindre deux autres internationaux. Nous avons marché dans le village jusqu'à ce qu'un groupe d'hommes nous demandent de les accompagner à la Mosquée. Nous avons attendu à l'extérieur tandis qu'ils entraient à l'intérieur pour prier.
Un groupe de garçons âgés de 12 à 14 ans se sont précipités dans la mosquée, poursuivi par une jeep.

En faisant crisser leurs pneus pour s'arrêter, deux soldats sont sortis avec leurs armes et ont couru jusqu'à la porte. Ils ont fait une pause et nous ont regardé pendant que nous nous approchions lentement avec nos mains sur les côtés. Nous avons essayé de leur demander pourquoi ils étaient venus dans le village, mais ils ont continué à répéter que c'était zone militaire fermée et si nous ne partions pas, nous serions arrêtés.

Nous avons continué à poser des questions pour tenter de les retarder. Ils ont appelé la police des frontières et pendant qu'ils parlaient ensemble, nous nous sommes lentement éloignés et nous avons continué à patrouiller dans le village.

Nous sommes montés sur un toit et nous avons entendu tirer des bombes assourdissantes et du gaz lacrymogène près de la Mosquée. Nous avons plus tard découvert qu'un homme avait été frappé et que l'armée avait jeté des bombes assourdissantes dans la mosquée pendant la prière quotidienne.

Quand nous sommes revenus à la maison, nous avons rencontré trois activistes israéliens. Ils avaient entendu parler des problèmes et étaient venus pour être en solidarité avec les Palestiniens.

Quand l'une des femmes israéliennes a indiqué à une petite fille qu'elle était israélienne, la fille l'a regardée stupéfaite. Elle n'avait jamais vu que des soldats Israéliens, et cette jeune femme espiègle, gentille, parlant arabe était un genre totalement nouveau d'Israélien. Cette interaction me donne tellement d'espoir.


Quand nous sommes rentrés à la maison, nous avons reçu la nouvelle que deux personnes avaient été tuées à Salfit (la région où je vis) par un hélicoptère Apache qui a laissé tomber une roquette.

Nous n'avons toujours pas les détails sur qui a été tué ou du pourquoi. Mais nous savons que Salfit est sous couvre-feu. Nous avons entendu que l'armée était entrée dans les hôpitaux pour essayer de trouver et d'arrêter certains des hommes blessés.

Cependant, nous ne pouvons pas y aller et confirmer ces faits, parce qu'il y a plusieurs checkpoints entre nous et Salfit, et les militaires ont fermé toutes les entrées. Encore une fois, c'est l'impossibilité de réagir qui me tue.

Aussi je vais au lit, en espérant que l'armée ne me réveillera pas avant 8h du matin.

C'est la vie en Palestine.


Source : www.palsolidarity.org

Traduction : MG pour ISM

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