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Bilin - 10 septembre 2005
Par ISM
Ecrit par des Palestiniens et des volontaires de l'ISM.
Ce fut une journée de chaos pour les villageois de Bil'in qui a commencé juste avant l'aurore par un siège militaire, et a fini avec l'odeur des bombes lacrymogènes, des pneus brûlés et l'arrestation d'un leader communautaire des manifestations non violentes contre l'occupation.
Bil'in est devenu un point central dans la bataille entre des soldats israéliens lourdement armés et un mouvement de Palestiniens employant des stratégies non violentes contre l'occupation.
Chaque vendredi à 13h les villageois ont employé des costumes et du théâtre au sein de leurs manifestations contre le vol de terres palestiniennes pour la construction de la barrière d'annexion illégale d'Israël.
La portion de mur qui doit être construite à Bil'in va prendre au village plus de la moitié de ses terres agricoles, les laissant à la merci d'une expansion des colonies.
Vendredi dernier les militaires ont été humiliés par le nombre de couvertures de presse montrant la brutalité des soldats à l'encontre des villageois.
Les vidéos, les photos et la couverture en direct ont eu comme résultat des plaintes de membres de la Knesset et un éditorial pointant du doigt l'armée pour son usage excessif de la force. Ce que l'armée a retenu de cette leçon : continuer d'attaquer des gens désarmés, mais commencer plus têt dans la journée.
Des véhicules militaires ont pénétré dans Bil'in à 5 heures du matin pendant que des soldats annonçaient par haut parleurs que la zone était déclarée "zone militaire fermée" et qu'un couvre feu allait être mis en place.
A 6h., l'armée avait encerclé la maison de Abdullah Abu Rahme, un coordinateur du Comité Populaire de Bil'in contre le Mur.
Une partie de sa maison est réservée au logement des militants du Mouvement de Solidarité Internationale (ISM).
Les soldats ont annoncé par haut parleur que tous les militants israéliens et internationaux devaient quitter les lieux.
Abdullah a répondu en fermant toutes les portes et en les verrouillant.
Le commandant de l'armée a alors dit a Abdallah qu'il avait 15 minutes pour dire aux internationaux et aux israéliens de partir.
Une heure plus tard, le commandant disait "OK; vous avez 15 minutes de plus".
La manifestation ne devait pas commencer avant 13h, et à 7 heures du matin il devint clair que nous devions agir pour tenter de retarder l'usage inévitable de la violence par l'armée israélienne alors qu'une partie d'entre nous se préparait pour l'action du jour.
Ce qui était prévu pour cette manifestation était de prendre des plants d'oliviers et de tenter de les planter le long de la barrière d'annexion.
Pendant que certains préparaient les plants et fabriquaient des affiches, des militants israéliens et internationaux sont allés sur les toits de maisons dans le village et ont joué des percussions sur les réservoirs d'eau. Une vieille femme debout avec un bébé sur un bras frappait un caisson sur le toit de sa maison avec un tube en métal aussi fort qu'elle pouvait.
Les militaires ont répondu au rythme en envoyant des gaz lacrymogènes et des bombes sonores sur les palestiniens qui avaient commencé Ã défier le couvre feu pour protester contre le traitement infligé aux visiteurs de la zone.
Au bout de quelques minutes, un Palestinien a été blessé Ã la jambe par un tir.
Les soldats sont aussi allés à l'encontre de la liberté de religion dans le village, en informant les gens dans la mosquée que la prière de l'après midi ne serait pas autorisée.
Un peu après 10 heures du matin, nous avons déployé deux grandes banderoles et un drapeau palestinien et les avons attachés en haut de l'appartement. La police israélienne des frontières s'est montrée avec un grand fourgon-prison ; et nous étions une vingtaine de militants à rester sur les toits en chantant.
La presse a commencé à arriver vers 10h. Alors que des journalistes entraient dans la maison d'Abdullah et montaient les escaliers pour rejoindre le toit et observer le spectacle, la police des frontières israélienne a fait une manÅ“uvre pour arrêter un Palestinien. Les villageois se trouvaient en grand nombre dans les rues pour protester contre l'incursion du matin.
En chantant et en marchant dans de nombreuses rues du voisinage, ils ont bloqué les routes avec des pneus en feu pour ralentir l'arrivée de toujours plus de véhicules de l'armée. Des colonnes de fumée noire ont commencé à apparaître a travers le village.
Nous avons descendu les marches pour essayer d'empêcher l'arrestation du Palestinien.
En moins de 10 minutes, la police avait pris 5 militants pacifistes israéliens et 3 internationaux. (qui furent tous relâchés plus tard dans l'après midi).
"Ils tentent d'arrêter tout le monde", a dit une volontaire de l'ISM, Greta Berlin.
"Tout le monde d'un coup. Ils ont eu tout le monde, ils les mettent dans le fourgon maintenant."
Mohammed Al Khateb, un coordinateur avec le Comité populaire de Bil'in contre le Mur, a été battu par les soldats et souffre de plusieurs blessures.
Pendant ce temps, pour la troisième fois, Abdullah Abu Rahme était arrêté un vendredi à Bil'in.
A ce moment-là , Abdullah était en train d'être interviewé devant sa maison par la TV égyptienne.
Au milieu de l'interview, les soldats se sont saisis de Abdullah et l'ont entraîné a part. Il a été accusé d'avoir brisé le couvre feu. Il maintient qu'il avait le droit de se tenir devant sa propre maison pour l'interview.
Une canette de gaz lacrymogène touchera plus tard le van de la TV égyptienne. L'un de leurs cameraman a été blessé et emmené dans un hêpital a Ramallah.
Des rapports indiquent que Abdullah a été transporté à la prison militaire d'Ofer, ou il avait déjà été emmené précédemment pour avoir participé à des manifestations non violentes contre le Mur.
Au moment de sa libération en Juillet, Abdullah avait signé comme condition un engagement à ne pas participer à des manifestations. Au moment de son arrestation, il ne participait pas aux événements en cours autour de lui.
Les militants détenus ont été emmenés sur une colline près du site de construction du Mur. Il est intéressant de voir que les soldats travaillent si dur à empêcher chaque semaine les manifestants d'atteindre la zone ou les terres sont confisqués, mais les y emmèneront directement une fois arrêtés.
Pendant ce temps, au milieu des manifestations et du chaos, ceux qui avaient prévu d'aller a la prière de l'après midi se sont dirigé vers la Mosquée.
Un peu après 13h, ceux d'entre nous qui n'avaient pas été arrêtés ont décidé de rejoindre les palestiniens et de prendre part à la manifestation.
Nous nous sommes retrouvé devant la mosquée, face aux soldats, Ã la police, aux bombes sonores, aux gaz lacrymogènes, et aux balles en caoutchouc. Beaucoup ont été blessés, par des coups, des coupures, le bruit, et l'inhalation de gaz lacrymogène, et ont été soignés par le Croissant rouge palestinien.
Ce fut avec émotion que nous avons vu arriver une cinquantaine de militants israéliens à travers les oliviers juste après 13h. Ils avaient marché sur une longue distance pour arriver jusqu'ici, et ils sont immédiatement postés devant les soldats en commencant à leur crier dessus.
Vers 15h, environ 150 Israéliens ont réussis à passer à travers les checkpoints, et ont rejoint la manifestation devant la mosquée.
D'après d'autres sources, 200 autres ont été arrêtés en tentant de pénétrer dans Bil'in. 20 membres du Holy Land Trust sont aussi venus depuis Beit Sahour.
Ils ont été rejoints par plusieurs membres du Parlement palestinien ainsi que par des députés israéliens de la Knesset qui avaient été invités par le "Comité populaire de Bil in contre le mur".
Beaucoup d entre eux ( une liste complète sera donné dans un prochain message) ont passé un long moment a invectiver les soldats en les sommant de donner des explications sur cette entrave aux actions de résistance non violente dans le village.
Avec l'arrivée d'une vague d'Israéliens (dont certains hommes politiques), les soldats ont commencé Ã battre en retraite.
Beaucoup de soldats sont montés dans leurs jeeps et sont partis sur les chapeaux de roue. De leur coté, ceux qui partaient a pied nous lançaient tout ce qu'ils avaient sous la main dans leur arsenal.
Une femme espagnole a été blessée a la cheville par une "rubber bullet". La majorité d'entre nous a pu éviter les blessures graves, ce qui ne nous a pas empêché d'inhaler une quantité importante de gaz lacrymogène lâché par les bombes qui volaient autour de nous.
Une femme palestinienne de 80 ans est restée hors de sa maison et a jeté une pêche sur un groupe de soldats israéliens battant en retraite. Ils sont aussitêt venus pour l'arrêter et alors qu ils restaient devant sa porte elle les a frappé avec une bouteille d'eau.
Ceux qui parmi nous étaient restés avec elle ont fait honte aux soldats jusqu'a ce qu'ils partent.
Cette fois les Palestiniens ont gagné. Ils ont passé outre le couvre feu militaire, ils sont allés à la mosquée et ils ont manifesté en dépit de l'ordre qu ils ont reçu de ne pas sortir. Des membres des gouvernements israéliens et palestiniens ont pu témoigner de ce que vivent les gens de Bil in.
Cette occupation un jour cessera. Les gens de Bil in entreront alors dans le livre d'histoire de la Palestine comme un exemple de la force de la résistance non violente face à la 4e puissance militaire du monde.
Source : www.palsolidarity.org
Traduction : VV pour ISM
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