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Gaza - 24 juillet 2016
Par Sarah Algherbawi
Sarah Algherbawi est auteur et traductrice de Gaza.
15.07.2016 - Inas Abu Muhadi ne comprend pas qu'elle ne reverra plus jamais son père. Elle se souvient qu'il avait un scooter et chaque fois qu'elle en entend un, elle s'attend à le voir arriver à la maison. Le père de la petite fille est décédé de mort naturelle en juillet 2013. "Notre vie a été bouleversée ensuite," dit sa mère, Rajaa Abu Khalil. "Maintenant, je dois être leur père et leur mère à la fois. Le fardeau est trop lourd et je suis fatiguée." En plus de la perte du mari de Rajaa, la maison où le couple vivait avec ses six enfants, à Deir al-Balah, au centre de Gaza, a été bombardée et détruite pendant les 51 jours d'attaque israélienne de l'été 2014.
Rajaa Abu Khalil et ses enfants vivent dans un abri précaire depuis que leur maison a été détruite par les bombardements israéliens en Juillet 2014 (Ahmed Salama)
L'aîné des enfants, Muhammad, qui a maintenant 12 ans, est très nerveux et perd souvent le contrôle de lui-même.
Les traumatismes sont très répandus à Gaza, qui a enduré trois attaques israéliennes majeures depuis décembre 2008.
L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a estimé que 20% de la population de Gaza - ou approximativement 360.000 personnes - peut souffrir de problèmes de santé mentale causés par l'agression de 2014.
Rajaa et ses enfants avaient déjà évacué leur maison et s'étaient réfugiés dans une école gérée par l'UNRWA, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens, quand leur maison a été bombardée.
"Vivre dans des tombes"
La maison de la famille n'a toujours pas été reconstruite. Aujourd'hui, Rajaa et ses enfants vivent dans une caravane. "Quand nous avons aménagé ici, nous pensions que ce serait provisoire," dit Rajaa. "Mais les souffrances semblent interminables. C'est comme si nous vivions dans des tombes."
La caravane, de 8 m de long sur 6 m de large, est "un four en été et un réfrigérateur en hiver," dit Rajaa.
Quand il fait chaud, la caravane est infestée de rongeurs, d'insectes et de serpents. Les enfants ont souffert d'éruptions cutanées dues à la chaleur. Lors des fortes pluies, la caravane a été inondée.
Ses enfants trouvent stressant de vivre dans un espace aussi exigu. "J'aimerais avoir une pièce à moi, où je pourrais ranger mes livres et faire mes devoirs tranquillement," dit Ahmad, son fils de 9 ans.
"Une fois, ma mère est venue me voir et j'étais gênée de ne pouvoir lui trouver un endroit où dormir," ajoute Rajaa.
La mère de Rajaa vit à environ 5 km, dans le camp de réfugiés de Nuseirat.
Les enfants de Rajaa Abu Khalil jouent devant leur caravane (Ahmed Salama)
Plus de 142.000 maisons de réfugiés ont été endommagés pendant l'attaque israélienne de 2014 contre Gaza, selon une récente évaluation de l'UNRWA, dont plus de 9.000 totalement détruites. 9.000 autres ont subi des dégâts importants ou majeurs.
"Seules quelques centaines de maisons totalement détruites ont été reconstruites," a dit l'UNRWA à The Electronic Intifada par email.
L'Agence ajoute, pour expliquer le déficit : "Il y a deux raisons : le manque de fonds et les restrictions sur l'entrée des matériaux."
Deux mois après le cessez-le-feu d'août 2014, 3,5 milliards de dollars ont été promis par des Etats-tiers pour la reconstruction de Gaza. A fin mars, seuls 69% de ces promesses ont été déboursés.
Pendant ce temps, Israël limite l'importation à Gaza de nombreux matériaux de construction, affirmant que certains d'entre eux pourraient être utiles au Hamas ou à d'autres groupes armés.
Israël limite la quantité de béton, de barres d'acier, de matériel électrique, de tuyaux et de bois de plus d'un centimètre d'épaisseur autorisés à entrer à Gaza.
L'UNRWA a rapporté également que 8.000 familles toujours déplacées à cause de l'attaque de 2014 n'ont pas reçu "d'aide en espèce pour un hébergement provisoire" pendant le deuxième trimestre 2016.
D'après Ashraf al-Qedra, porte-parole du ministère de la Santé de Gaza, les problèmes de santé sont très répandus parmi les personnes déplacées. Il a dit à The Electronic Intifada que 300 à 400 personnes habitant dans des caravanes sont admises dans les hôpitaux de Gaza tous les mois avec des troubles respiratoires et intestinaux.
Il a ajouté que le ministère n'a pas suffisamment de ressources pour organiser des visites médicales pour ceux qui sont toujours déplacés.
Promesses non tenues
La sécurité structurelle des caravanes est aussi une préoccupation. En mai, Majdi al-Masri, 7 ans, a été tué lorsqu'une partie de la caravane où vivait la famille à Beit Hanoun, au nord de Gaza, s'est effondrée sur lui. Il venait juste de rentrer de l'école lorsque l'accident s'est produit. La maison de la famille al-Masry avait été bombardée par Israël en 2014.
Sufyan Hamad, un représentant de la municipalité de Beit Hanoun, a dit que le montage de beaucoup de caravanes dans le secteur avait été rapide et bâclé à la suite de l'attaque de 2014.
Rajaa Abu Khalil ne sait pas jusqu'à quand elle et ses enfants vont devoir vivre dans une caravane.
L'UNRWA a pris note des dégâts de sa maison, mais a été incapable de lui dire quand elle sera reconstruite.
"Il n'y a pas de ciment pour la reconstruction," dit-elle. "Jusqu'à maintenant, ce ne sont que des promesses. Rien de concret sur le terrain."
Source : Electronic Intifada
Traduction : MR pour ISM
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Sarah Algherbawi
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