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ISM France - Archives 2001-2021

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Gaza -

La feuille de route passe par l’occupation de Gaza

Par

> nghemraoui@eurekainfo.com

Le 23 septembre dernier, le quartette, réuni en marge de l’assemblée générale des Nations-Unis, a dressé un sombre bilan du processus de paix au Proche-Orient. Faisant suite à une série de déclarations reclamant le départ de Yasser Arafat (Georges Bush, Colin Powell), ou son assassinat (Arial Sharon), le communiqué constate qu’ "aucun progrès significatif n’a été réalisé sur la feuille de route", plan supposé conduire à la création d’un Etat palestinien à l’horizon de 2005.

Le groupe "note avec une profonde inquiétude qu'une action véritable est toujours nécessaire en vue d'avoir un Premier ministre (palestinien) doté de forts pouvoirs", afin qu'il soit "mis fin sans équivoque à la violence et au terrorisme"[1].


Le message semble avoir été bien reçu et décodé par Ariel Sharon. Une semaine plus tard, le jeudi 30 septembre, il lance l’opération "Jours de Répentir" et envahit la bande de Gaza.

Pendant les 3 premiers jours, cette "action véritable" pour "mettre fin au terrorisme" fait 58 morts parmi les Palestiniens !

L’armée attaque avec des tanks, des buldozzers, des hélicoptères et des drones.
L’opération est annoncée "de grande envergure" et vise une occupation prolongée et "sans limitation de durée" dans le but annoncé de créer une "zone de sécurité" et empêcher les tirs de roquettes sur les colonies de Gaza et des villes du sud israélien.


Le vaste plan de guerre conduit, en ce moment, par l’armée israélienne pour applatir et soumettre la bande de Gaza, est-il la réponse programmée pour sortir la "feuille de route" de son sombre bilan ?

Lorsque le quartette se déclare "préoccupés" du blocage de la situation sur le terrain, il faut y lire le constat d’un échec, non pas du processus de paix, mais des objectifs réels, officiellement annoncés, de la première phase du plan : porter un coup dur à la résistance palestinienne et installer un pouvoir au serivce de l’occupant.

Un an et demi après la mise en orbite officielle de la feuille de route, aucun de ces deux objectifs n’a été atteint. Pour Georges Bush, comme pour Ariel Sharon, une "action véritable" devenait nécessaire : il leur faut, pour "débloquer" la situation, aller jusqu’au bout de la logique de guerre.



Depuis début septembre, une campagne orchestrée a déchaîné une série de déclarations hostiles et nerveuses désignant Yasser Arafat comme l’obstacle à éliminer.


Acte 1>. Le 14 septembre, Ariel Sharon déclare au quotidien "Yediot Aharonot" : "Arafat sera expulsé des territoires".
Il rajoute "Nous avons agi contre Ahmed Yassine et Abdel Aziz Rantissi au moment qui nous a paru propice. Au sujet de l'expulsion d'Arafat, nous procéderons selon le même principe : nous le ferons au moment qui nous sera propice".
A la question de savoir s'il ne voyait pas de différence entre Cheikh Yassine, Rantissi et Yasser Arafat, Sharon a répondu : "Je ne vois aucune différence. Ils ont tous opté pour une politique de meurtre. Nous agirons avec Arafat de la manière dont nous avons agi contre d'autres assassins"[2].


Acte 2. A la tribune de l’assemblée générale annuelle de l’ONU, mardi 21 septembre, Georges Bush appelle les dirigeants mondiaux à "arrêter tout traitement de faveur et tout soutien pour les dirigeants palestiniens qui ne servent pas leur peuple et trahissent sa cause".

Il ajoute "Le peuple palestinien, qui souffre depuis longtemps, mérite mieux. Il mérite des véritables dirigeants capables de créer et gouverner un Etat palestinien libre et pacifique"[3].
Nous pouvons noter l’extrême devouement de Georges Bush pour la cause palestinienne.



Acte 3. Le type de dirigeant que Georges Bush veut imposer aux Palestiniens est illustré par un événement sans précédent, le lendemain, au siège de l’ONU.

Parmi les centaines de poignées de main échangées entre les chefs d'Etat présents, une seule a été particulièrement remarquée, celle du ministre israélien des Affaires étrangères Silvan Shalom avec le "Premier ministre" par intérim irakien Ayad Allaoui. Les deux pays, l’Irak et Israël, étaient placés l’un à côté de l’autre.

A son arrivée au siège des Nations unies, Silvan Shalom avait été interrogé sur la question de l'Irak : "Nous aimerions ne plus être la seule démocratie du Moyen-Orient", avait-il dit.

"Nous serions très contents si l'Irak nous rejoignait, et ensuite le reste des Etats. Cela apporterait une plus grande stabilité à la région et une plus grande stabilité dans le monde entier"[4].


Ce qui est frappant dans de cette déclaration c’est la globalisation des méthodes et des discours. Comme en Irak, on promet la démocratie en Palestine, suivant le même modèle, il s’agit de renverser un régime et d’amener l’équivalent d’un gouvernement Alaoui palestinien.

Le discours prépare le terrain à une future guerre justifiée d’avance par la promesse d’un Grand Moyen-Orient libre et démocratique.

Les clés de la politique israélienne ne se trouvent plus cantonnées aux dimensions directes de la guerre contre les Palestiniens, mais se projettent de plus en plus dans la géostratégie régionale. Et comme contre l’Irak, une guerre totale contre Gaza doit être menée pour applatir cet obstacle et y bâtir un régime de fer au service de l’occupant.


Acte 4. Le jour de la poignée de main entre Iyad Alaoui et Sylvain Shalom, Ariel Sharon prononce des nouvelles menaces.

A la question de savoir si Arafat pourrait connaître le même sort que Ahmad Yassine et Abdelaziz Al-Rantissi, Sharon répond : "Chacun subira ce qu'il mérite"[5].



Acte 5. Jeudi 23 septembre. Le secrétaire d'Etat américain Colin Powell précise les exigeances.

Il demande que l'Autorité palestinienne donne suffisamment de pouvoir au Premier ministre palestinien, Ahmed Qorei, pour gérer la Bande de Gaza après le retrait israélien, estimant que Yasser Arafat en serait incapable.

Ahmed Qorei doit être considéré "comme quelqu'un qui a l'autorité d'agir au nom du peuple palestinien" et qui peut travailler avec Israël, les Etats-Unis et l'Egypte.
"Le président Arafat n'est pas capable d'agir de cette façon et donc nous allons continuer à l'encourager à donner l'autorité à un Premier ministre".



Acte 6. Quelques heures plus tard, le quartette rejoint le concert et réitère les exigeances américaines et israéliennes.

La réunion a rassemblé le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, le secrétaire d'Etat américain Colin Powell, le chef de la diplomatie néerlandaise Bernard Bot pour l’Europe, et le ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov.

La position du club des quatre est scandaleuse. Elle permet aux Américains de se dégager de l’échéance de la promesse d’un Etat palestinien, prévu pratiquement dans 4 mois.

La responsabilité du sombre bilan constaté est très vite rejettée sur les Palestiniens qui n’ont toujours pas mis en place un "Premier ministre doté de forts pouvoirs" et qui sont à nouveau appellé à mettre "fin sans équivoque à la violence et au terrorisme".

Le communiqué fige et reprend les termers du discours de Georges Bush prononcé il y a plus deux ans à l’ONU (le 22 juin 2002) et qui a servi de base pour la rédaction et la conduite de la feuille de route, parallèllement à l’invasion de l’Irak.


Ariel Sharon, lui, reçoit les encouragements du quartette pour ses projets de retrait de la bande de Gaza. Quand au mur, jugé illégal par la Cour Internationale de Justice en juillet 2004, le quartette se contente de réaffirmer ses "préoccupations" au sujet du tracé qui empiète sur la Cisjordanie . Il n’exige ni son démantèlement, ni même la modification immédiate du tracé, puisqu’il exhorte Israël de faire en sorte que "cette barrière ne préjuge pas d’un règlement final négocié".

Il faut rappeller que dans la logique de la feuille de route, aucune négociation n'est prévue avant la création du futur Etat palestinien qui devrait être établi dans des "frontières provisoires".

Le communiqué du quartet cautionne l’unilatéralisme de la feuille route et laisse clairement entendre que ces frontières provisoires seront déterminées, entre autre, par le tracé du mur. Pour résumer, le quartet approuve officiellement la possibilité d’un futur "Etat" de bantoustans, donne un bon point à Sharon pour son projet de retrait de Gaza, et insiste dans l’immédiat sur la nécessité d’en finir avec le "terrorisme".



Acte 7. Colin Powell est satisfat. Le quartette a cautionné la thèse de non responsabilité des Américains.

Il hausse alors le temps et s’adresse directement à Arafat : "Mr le président, combien de temps pouvez-vous attendre ? Combien de temps pouvez-vous conserver cette position alors que les Palestiniens souffrent, qu'il est difficile d'avancer vers les objectifs de la feuille de route, qu'il est difficile d'atteindre ce dont vous parlez comme de votre rêve : un Etat pour le peuple palestinien ?"[6]
(Powel n’a pas déclaré pour autant vouloir participer aux prochaines manifestations pro-palestiniennes de New York).

Pour lui, enfin, les quatre médiateurs commençaient à en avoir assez de devoir attendre les réformes promises par la direction palestinienne.


Cette logique de la feuille de route permet la juxtaposition de tous les paradoxes : on vous promet un Etat palestinien démocratique, mais vous nous laissez choisir vos chefs !
On engage avec vous un processus de paix, mais il n’est prévu de négocier qu’à la fin !
On vous promet un retrait de Gaza, mais vous nous laissez d’abord l’occuper et la soumettre !


1. AFP. 23 septembre 2004.
2. AFP. 14 septembre 2004.
3. AFP. 21 septembre 2004.
4. AP. 22 septembre 2004.
5. AFP. 22 septembre 2004.
6. Reuters. 24 septembre 2004.




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