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Palestine occupée -

Le vaccin COVID-19 : un autre visage hideux de l'apartheid israélien

Par

28.12.2020 - Près de 400.000 Israéliens ont déjà été vaccinés contre le coronavirus, et des dizaines de milliers d'autres sont en passe de l’être dans les semaines à venir. Israël a été l'un des premiers pays au monde à commencer à vacciner sa population contre le COVID-19, et selon la publication en ligne de l'université d’Oxford, Our World in Data, il est actuellement le deuxième pays au monde en nombre de vaccinations par habitant.

Le vaccin COVID-19 : un autre visage hideux de l'apartheid israélien

Désinfection des rues de Gaza par des bénévoles - La lutte contre le virus à Gaza en images.
Le ministère israélien de la Santé envisage de vacciner 100.000 Israéliens par jour dès cette semaine, ont rapporté les médias israéliens, et le Premier ministre Benjamin Netanyahu a affirmé avec audace qu'Israël serait sorti d’affaire « d'ici quelques semaines ».

Le mois dernier, Israël a obtenu 8 millions de doses du vaccin Pfizer - assez pour couvrir près de la moitié de la population israélienne de 9 millions d'habitants, car chaque personne a besoin de deux doses. Parmi les personnes éligibles pour recevoir le vaccin du gouvernement israélien, se trouvent les près de 2 millions de citoyens palestiniens d'Israël.

Toutefois, les personnes qui ne peuvent recevoir le vaccin sont les plus de 5 millions de Palestiniens qui vivent sous le contrôle de l'occupation israélienne en Cisjordanie , à Jérusalem-Est et dans la bande de Gaza.

Les disparités entre les Palestiniens vivant sous l'occupation israélienne et les citoyens israéliens sont constantes, et sont tout simplement un fait de la vie quotidienne en Israël et en Palestine - les lois qui favorisent les Israéliens par rapport aux Palestiniens, et les systèmes qui discriminent activement ces derniers sont monnaie courante, et largement documentés.

Le système d'apartheid dans lequel Israël opère à l'intérieur du territoire occupé ne pourrait cependant pas être mieux représenté que dans le cas du vaccin COVID-19 - qui reçoit le vaccin et qui ne le reçoit pas est une simple question de nationalité.

« Premièrement, il faut être très clair : avec l'occupation militaire en Cisjordanie et à Gaza sous contrôle israélien, Israël est légalement obligé par le droit international de fournir des soins de santé aux Palestiniens », a déclaré à Mondoweiss le Dr Yara Hawari, analyste à Al-Shabaka : The Palestinian Policy Network.

« Israël est légalement tenu de fournir ce vaccin aux Palestiniens sous occupation. Nous savons qu'ils [Israël] ne l'ont pas fait », a-t-elle déclaré, ajoutant qu'Israël fait porter cette responsabilité à l'Autorité palestinienne en tant que fournisseur de services aux Palestiniens.

« C'est une vraie préoccupation », a dit Y. Hawari à Mondoweiss. « Nous savons qu'il est probable que ce sera un processus très lent si on le laisse à l'AP. »

La paralysie du système de santé palestinien

Contrairement au gouvernement israélien, l'Autorité palestinienne (AP) n'a pas été en mesure d'obtenir la quantité de vaccins nécessaire pour traiter les plus de 3 millions de Palestiniens vivant en Cisjordanie et les 2 millions de Palestiniens vivant dans la bande de Gaza.

Bien que les responsables de l'AP aient déclaré qu'ils s'attendaient à recevoir des vaccins dans les deux prochaines semaines par l'intermédiaire de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), ils ont déclaré qu'il pourrait s'écouler des mois avant que le vaccin ne soit distribué à la population.

Le type et la quantité de vaccins que les Palestiniens recevront sont encore inconnus, car ils dépendent fortement des dons internationaux pour leur approvisionnement, et le gouvernement palestinien n'a pas la capacité infrastructurelle pour stocker des vaccins comme celui de Pfizer aux basses températures requises.

Pendant ce temps, les Palestiniens continuent de vivre des périodes interminables de confinement, alors que le virus fait rage dans le territoire palestinien occupé, avec des taux d'infection quotidiens de plusieurs milliers et des taux de mortalité quotidiens à deux chiffres.

L'incapacité de l'AP à se procurer et à stocker des vaccins, ainsi que son système de santé défaillant, sont révélateurs des dommages que l'occupation israélienne a causés aux infrastructures palestiniennes depuis des décennies, a déclaré Mme Hawari.

« On connait cette histoire courante et récurrente qui insinue que si le système de santé palestinien ou d'autres systèmes comme l'éducation sont inefficaces et ne font pas leur travail, c’est dû à l'incompétence d'une partie du peuple palestinien ou de sa culture - cette idée qu'ils sont stupides et ne peuvent pas gouverner », a déclaré Mme Hawari.

« Ce n'est évidemment pas le cas. Le régime israélien a systématiquement ciblé le système de santé palestinien et a contribué à sa décroissance », a-t-elle déclaré. « Les Palestiniens ont été forcés de dépendre de l'aide extérieure et ont été empêchés d'être autosuffisants par l'occupation [israélienne], avec la complaisance de la communauté internationale ».

L'exemple le plus frappant, a déclaré Mme Hawari, est celui de Gaza, où le système de santé est au bord de l'effondrement depuis des années et n'a pas pu surmonter les années de bombardements et d'offensives israéliennes.

« Les hôpitaux de Gaza ont été incapables de prendre en charge les blessures et les maladies pendant des années. Ils ne pouvaient pas y arriver avant la COVID, et maintenant le COVID a exaspéré la situation et l'a rendue dix fois pire ».

L'apartheid en action

Alors que les Palestiniens vivant sous occupation israélienne en Cisjordanie et à Gaza ne recevront pas de vaccins du gouvernement israélien, les centaines de milliers de colons israéliens vivant illégalement en Cisjordanie se font vacciner chaque jour.

Les militants palestiniens et leurs partisans ont tiré la sonnette d'alarme sur la disparité flagrante entre ceux qui se font vacciner et ceux qui ne le font pas, en affirmant que cela n'équivaut à rien de moins que l'Apartheid.

Quand on parle de choses comme le vaccin COVID-19, « il semble y avoir une fausse séparation entre Israël et la Palestine », a déclaré Mme Hawari. « En réalité, c'est une seule entité où les gens sont traités de manière inégale dans cet espace. »

« Il y a énormément d’interactions entre les populations, mais des niveaux de pouvoir totalement déséquilibrés », a poursuivi Mme Hawari, en pointant du doigt les dizaines de milliers de travailleurs palestiniens qui travaillent chaque jour en Israël et dans les colonies.

« L'économie israélienne dépend de cette main-d'œuvre. Vont-ils aussi recevoir le vaccin ? » demande-t-elle. « Si ce n'est pas le cas, cela représente un risque pour Israël. Nous sommes des populations tellement imbriquées, comme c'est le cas dans les populations coloniales ».

« Cela nécessite de fournir le vaccin à tout le monde, et cela ne devrait pas être exceptionnel pour la Palestine. Quelqu'un l'a parfaitement dit : nous ne sommes pas en sécurité tant que tout le monde n'a pas accès au vaccin. Ce n'est pas un virus qui connaît de frontières ».

Alors que les responsables israéliens ont évoqué la possibilité de fournir certains vaccins à l'AP si nécessaire, Hawari miet en garde contre les manifestations faussement généreuses d'Israël : « Nous savons qu'ils présenteront cette démarche comme un grand acte de bienveillance et de coopération internationale, mais ils ne remplissent même pas les exigences minimales du droit international ».

Hawari a souligné le fait qu'en pleine pandémie, les Palestiniens ont « vu très peu de choses de la part du régime israélien en termes de fournitures et de soutien aux Palestiniens et à leur lutte contre le virus. Et lorsqu'ils se sont finalement coordonnés pour permettre les dons internationaux de fournitures, cela a été salué comme une merveilleuse forme de coopération, alors que c'est le minimum qui est exigé d'eux ».

« Nous avons vu Israël faire cela pendant des décennies - Israël est constamment félicité pour avoir laissé entrer à Tel-Aviv des patients de Gaza atteints du cancer pour qu'ils y soient soignés, mais il impose le siège qui empêche des centaines de Gazaouis de recevoir le traitement nécessaire en premier lieu », a-t-elle déclaré.

« C'est une façon très maline de manipuler quelque chose qu'ils sont censés faire, mais qu'ils ne font pas. »

En plus des questions concernant la position des Palestiniens du TPO sur le vaccin, les militants et les groupes de défense des droits des Palestiniens ont exprimé leurs inquiétudes quant à la marginalisation potentielle des communautés palestiniennes en Israël lorsqu'il s'agit de se faire vacciner.

Au début de la pandémie, des groupes comme Adalah ont critiqué le gouvernement israélien pour avoir mis à l'écart les communautés palestiniennes dans des endroits comme Jérusalem-Est, où les cliniques de dépistage du coronavirus étaient rares, voire inexistantes.

Hawari est convaincue que « nous reverrons ces façons de faire » au cours du processus de vaccination.

« Il est encore tôt et la campagne de vaccination vient juste d'être lancée, mais si vous regardez la mise en œuvre, ils [Israël] vont commencer dans les cliniques. Et nous savons que les villes et villages palestiniens en 1948 sont démunis en termes de système de soins de santé et qu'il y a donc moins de cliniques et de professionnels de santé, ce qui ralentira la vaccination dans ces régions », a-t-elle déclaré.

« Il sera facile pour le gouvernement israélien de passer outre et de dire que ‘tous les citoyens israéliens sont traités sur un pied d'égalité’, mais si nous regardons la géographie, ces communautés palestiniennes ont été exclues à dessein lorsqu'il s'agit d'installations sanitaires, de cliniques et d'autres institutions essentielles. »

La Palestine et le Sud global

Alors que des dizaines de pays dans le monde, comme Israël, les États-Unis, le Royaume-Uni et des pays de l'UE commencent à distribuer leurs vaccins à la population générale, des endroits comme la Palestine et d'autres pays du "Sud global" sont laissés pour compte.

COVID a mis en évidence les structures d'inégalité dans le monde entier.

Avant même que les vaccins n'arrivent sur le marché, les pays riches ont commencé à constituer des stocks de certains des vaccins les plus prometteurs contre le coronavirus. Selon des organisations comme Amnesty International et Oxfam, on estime que, bien qu'elles n'abritent que 14 % de la population mondiale, les nations riches ont déjà acheté 54 % du stock total des vaccins les plus prometteurs du monde.

Amnesty International a déclaré que d'ici la fin 2021, les pays riches auront acheté suffisamment de doses de vaccin pour « vacciner trois fois toute leur population », tandis que quelques 70 pays pauvres « ne pourront vacciner qu'une personne sur dix contre le COVID-19 ».

« Ce qui se passe au niveau mondial est très révélateur des inégalités structurelles qui existent dans le monde », a déclaré Mme Hawari. « Des endroits comme Gaza, où il est difficile de maintenir les conditions sanitaires et sociales de base, devraient être prioritaires afin de prévenir la propagation. Mais bien sûr, ils ne le seront pas en raison des structures d'oppression qui prévalent ».

« Le COVID a mis en évidence les structures d'inégalité dans le monde entier », poursuit Mme Hawari, qui pense « qu'il est presque impossible d'avoir une justice et une égalité en matière de santé au sein de ces structures ».

« Un pas dans la bonne direction, en particulier en ce qui concerne la Palestine, serait que les Palestiniens reçoivent immédiatement le vaccin, car leurs vies sont vulnérables, et ils sont une communauté vulnérable », a déclaré Y. Hawari. « Cette priorité ne devrait pas être exclusive aux Palestiniens, mais aussi à d'autres pays du Sud. L'accès aux soins de santé ne devrait pas dépendre du fait que vous puissiez vous le permettre ou non ».


Source : Mondoweiss

Traduction : MR pour ISM

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