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Israël - 9 novembre 2021
Par Ibrahim Hewitt
Ibrahim Hewitt est rédacteur en chef de Middle East Monitor. Il a été président du conseil d'administration d'Interpal jusqu'à la dissolution de cette association. Il vit en Angleterre. Son compte Twitter : #ibrahimhewitt56
04.11.2021 - Je suis avec intérêt les réactions à la désignation par Israël de six organisations palestiniennes de défense des droits de l'homme comme groupes "terroristes". La petite organisation caritative britannique dont j'ai été le président pendant près de 25 ans a été désignée ainsi par Israël en 1996 et par l'administration américaine de George W Bush en 2003.
Salah Hamouri, avocat franco-palestinien (harcelé par Israël depuis qu’il est adolescent et actuellement menacé d’expulsion d’al-Quds, sa ville natale), dans son bureau à Addameer, l’une des six organisations palestiniennes désignées comme « terroristes » par le régime sioniste, avec al-Haq, Defense for Children Palestine, the Union of Agricultural Work Committees, Busan Center for Research and Development et Union of Palestinian Women Committes.
Si la désignation israélienne nous était inconnue jusqu'à ce que je me rende à Tel Aviv pour une visite de terrain en Cisjordanie et dans la bande de Gaza avec deux membres du Parlement en 1998 et que je sois arrêté à l'aéroport Ben Gurion, la désignation américaine était une toute autre paire de manches.
En effet, il s'agit probablement du moment le plus décisif des années d'existence d'Interpal et pourtant, j’en ai eu connaissance par Internet. Personne dans l'administration américaine n'a pris la peine de nous faire savoir que Bush "gelait les avoirs" d'un certain nombre de personnes et d'organisations "présumées avoir apporté un soutien au Hamas". La première fois que j'en ai entendu parler, c'était sur le site de la BBC, le 22 août 2003. Parmi les noms cités, j'ai vu "The Palestinians Relief and Development Fund, ou Interpal, basé en Grande-Bretagne".
Cette décision n'a fait l'objet d'aucune procédure régulière, et malgré la gravité de l'allégation - et l'effet extrêmement invalidant sur la capacité d'Interpal à fonctionner avec des services bancaires normaux, essentiels pour toute organisation caritative - ni les autorités américaines ni les Israéliens (d'où est partie la demande d'inscription de l'organisation caritative sur la liste des "entités terroristes mondiales expressément désignées") n'ont jamais fourni l'ombre d'une preuve crédible pour étayer l'allégation. L'organisme britannique de réglementation des organisations caritatives, la Charity Commission, n'a jamais trouvé la moindre preuve d'activité illégale de la part d'Interpal.
Officieusement, on nous a dit que la décision de placer Interpal sur la liste des organisations terroristes a été prise par le Département d'État américain. "C'était une décision entièrement politique, qui nécessitera une autre décision politique pour l’annuler". Cela n'arrivera probablement jamais.
En tant que président d'Interpal, j'ai eu le privilège de parcourir le monde - les États-Unis, le Canada, l'Europe, le Moyen-Orient, l'Afrique du Sud, la Malaisie, l'Indonésie et la Nouvelle-Zélande - pour représenter l'organisation caritative ; j'ai rencontré des souverains et des ministres, et j'ai beaucoup écrit et parlé de la question de la Palestine dans mon pays et à l'étranger. Si les allégations américano-israéliennes étaient fondées, cela aurait-il été possible ? Comme l'a fait remarquer à l'époque un officier supérieur des services du renseignement de Metropolitan police [Londres] : "L'absence de toute implication de la police [dans le cas d'Interpal] est extrêmement significative".
La petite organisation caritative recevait en moyenne environ 5 millions de livres (6,7 millions de dollars) de dons par an, ce qui n'est pas grand-chose comparé aux 3 milliards de dollars que les Etats-Unis donnent à Israël tous les ans. Néanmoins, à la suite de la classification, nous avons reçu le soutien de nombreuses personnes éminentes, qu'il s'agisse de politiciens, de chirurgiens, de personnalités des médias ou de militants. Malheureusement, cela n'a eu aucun effet sur la désignation, et Interpal existe désormais sans aucun accès au secteur bancaire. Heureusement, d'autres organisations caritatives ont repris ses engagements dans les camps de réfugiés palestiniens au Moyen-Orient.
Interpal s'est retrouvé dans une situation extrêmement politisée et a dû faire face à des attaques de la part de médias et d'individus de droite. Plusieurs affaires de diffamation ont toutes été réglées à l'amiable, en faveur d'Interpal. L'organisation caritative a été décrite en Israël comme "une noix particulièrement difficile à casser", et (grâce à WikiLeaks) nous savons que les responsables américains ont demandé à leurs homologues britanniques : "En l'absence de preuves tangibles, pourquoi ne pas simplement la fermer ?" À leur décharge, les Britanniques ont expliqué que ce n'était pas notre façon de faire dans ce pays.
En 2003, un donateur inconnu en Europe a contacté Interpal pour lui dire : "Si Bush vous a mis sur sa liste de terroristes, vous devez être une force au service du bien, alors je vous envoie un don." Et il l'a fait.
Être désigné [comme terroriste] par Israël et ses laquais en Occident est pénible, cela ne fait aucun doute, mais cela reflète généralement le bon travail que font les ONG en Palestine occupée. Ce n'est peut-être pas une grande consolation pour les six groupes de défense des droits de l'homme inscrits sur la liste des "terroristes" par Israël la semaine dernière, mais cela devrait rassurer suffisamment leurs partisans pour qu'ils maintiennent leur soutien, voire l'augmentent. Dans le cas contraire, les vrais perdants ne seront pas les organisations, mais le peuple palestinien. Et on ne peut pas laisser cela se produire.
Source : Middle East Monitor
Traduction : MR pour ISM
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