Cisjordanie - 26 décembre 2009

Desmond Tutu demande la libération immédiate du leader de Bil’in Abdallah Abu Rahmah

Par ISM

Le président des Aînés, l’archevêque Desmond Tutu, a exprimé sa profonde inquiétude à la suite de l’arrestation et de l’inculpation d’Abdallah Abu Rahmah, de Bil’in, et a demandé sa libération inconditionnelle.

Les Aînés visitent le mémorial de Bassem Abu Rahmah à Bil’in, le 27 août 2009. De gauche à droite : Gro Brundtland, Mary Robinson, Fernando Cardoso, Jimmy Carter, Desmond Tutu, Mohammed Khatib, Ela Bhatt, Abdullah Abu Rahmah.

Abu Rahmah est instituteur et coordinateur du Comité Populaire de Bil’in contre le mur et les colonies, qui mène depuis cinq ans une campagne de protestation non violente et de défi légal contre le mur qui sépare Israël de la Cisjordanie .

« Mes compagnons Aînés et moi avons rencontré Abu Rahmah et son collègue Mohammad Khatib en août lors de notre visite à Bil’in, » a dit Desmond Tutu. « Nous avons été impressionnés par leur engagement pour une action politique pacifique, et par le succès de leur défi contre le mur qui sépare injustement la population de Bil’in de ses terres et de ses oliveraies. J’en appelle aux responsables israéliens pour qu’ils libèrent Abu Rahmah immédiatement et sans condition. »

Abu Rahmah a été arrêté par des soldats israéliens à 2h du matin le 10 décembre 2009 et inculpé le 22 décembre 2009 de plusieurs charges ressortant de son rôle de leader du comité Populaire. Le 15 septembre, Mohammad Khatib a été tabassé alors que l’armée israélienne lançait un raid d’arrestation contre Abu Rahmah. Depuis le 23 juin 2009, 31 résidents de Bil’in ont été arrêtés.

« L’arrestation et l’inculpation d’Abu Rahmah fait partie d’une augmentation de la violence de l’armée israélienne pour tenter de briser l’esprit de la population de Bil’in, » a dit Tutu. « Mais ils doivent réaliser qu’il n’est pas possible de briser l’esprit de ceux qui se battent pour la liberté et la justice. »

Abu Rahmah a rencontré six membres des Aînés le 27 août 2009. Les Aînés ont visité le site des manifestations hebdomadaires de Bi’lin près de la barrière de séparation et également vu le site du mémorial de Bassem Abu Rahmah, le cousin d’Abdallah Abu Rahmah, qui a été mortellement touché à la poitrine par une grenade lacrymogène lors d’une des manifestations. (voir photo)

Les aînés qui se sont rendus à Bil’in étaient Desmond Tutu, Ela Bhatt, Gro Brundtland, Fernando Henrique Cardoso, Jimmy Carter et Mary Robinson.

Pour plus d’informations, visitez le site des Aînés.

Contact : Libby Friedlander 054 245 7682
ISM Media Office : 054 344 2512

CONTEXTE

Abdallah Abu Rahmah
　 　
Abdallah Abu Rahmah a été inculpé par un tribunal militaire israélien mardi 22 décembre 2009. Abu Rahmah a été accusé de port d’arme pour avoir collecté les grenades lacrymogènes usagées tirées sur les manifestants à Bil’in par l’armée et pour les exposer chez lui. L’inculpation comprend également les accusations d’incitation et de jets de pierre.

A l’annonce de l’accusation, l’avocat d’Abu Rahmah, Gaby Lasky, a dit que « l’armée tire sur des manifestants sans armes, et lorsque ces derniers essaient de montrer au monde la violence exercée contre eux en exposant les restes des munitions ramassées sur le terrain, ils sont persécutés et poursuivis. Et puis quoi encore ? Faire payer aux manifestants les balles qu’on leur tire dessus ? »

Abdallah Abu Rahmah a été arrêté chez lui en Cisjordanie le 10 décembre, Journée internationale des droits de l’homme. Sept jeeps ont encerclé sa maison, ont forcé la porte et après l’avoir autorisé à dire rapidement au revoir à sa famille, l’armée lui a bandé les yeux et l’a emmené en garde à vue.

Abdallah est membre du Comité Populaire de Bil’in depuis sa création en 2004. Suite à la construction initiale du mur d’Israël sur les terres de Bil’in en mars 2005, Abdallah a participé à l’organisation d’actions directes et de manifestations quasi quotidiennes contre le vol de leurs terres. Attirant l’attention de la communauté internationale grâce à sa créativité et à sa persévérance, Bil’in est devenu un symbole de la résistance populaire palestinienne. Cinq ans après, Bil’in continue d’organiser des protestations tous les vendredis.

En tant que coordinateur du Comité, Abdallah a représenté le village dans le monde entier. En juin 2009, il est allé à Montréal pour participer au procès contre deux compagnies canadiennes qui construisent en toute illégalité des colonies sur la terre de Bil’in et a participé à une tournée de conférences. En décembre 2008, il a participé à une série de conférences en France et, le 10 décembre 2008, un an exactement avant son arrestation, Abdallah est allé en Allemagne au nom de Bil’in, pour recevoir la Médaille Carl Von Ossietzky pour service rendu à la réalisation des droits humains fondamentaux, remise par la Ligue Internationale pour les Droits de l’Homme.

L’arrestation d’Abu Rahmah est considérée comme faisant partie d’une escalade des tentatives de l’armée israélienne pour briser l’esprit de la population de Bil’in, sa direction populaire et la lutte populaire dans son ensemble - visant à écraser les manifestations contre le mur. Récemment, Maître Gaby Lasky, qui représente les détenus de Bil’in, a été informé par le procureur militaire que l’armée avait l’intention d’utiliser des mesures légales comme moyen de mettre fin aux manifestations.

Bil’in

Situé à 12 kilomètres à l’ouest de Ramallah et à 4 kms à l’est de la Ligne Verte, Bil’in est un village agricole qui s’étend sur 4.000 dunams (40 ha) avec environ 1.800 habitants. Alors que la construction du mur et l’opposition à celle-ci a commencé en 2005, Bil’in s’est fait exproprier de sa terre auparavant.

Au début des années 1980 et de façon plus significative en 1991, environ 56% de la terre agricole de Bil’in a été déclarée « Terre d’Etat » pour la construction du bloc colonial de Modi’in Illit (Modi’in Illit détient actuellement la plus importante population de colons de tous les blocs, avec plus de 42.000 résidents, et projette d’aller jusqu’à une population de 150.000).

En plus de l’organisation d’événements populaires, Bil’in organise depuis 2006 une conférence annuelle sur la résistance populaire qui constitue un forum où les villageois, les activistes et les universitaires discutent des stratégies de la lutte non armée contre l’occupation.

Bil’in a engagé des actions judiciaires contre Israël dans le cadre de sa résistance multilatérale au vol de ses moyens de subsistance. Le village est d’abord allé devant les tribunaux au cours de l’hiver 2004. Trois ans après qu’ils aient lancé la procédure judiciaire, la Haute Cour israélienne de Justice a statué qu’étant donné la construction illégale de Modi’in Illit, les appartements en cours de construction ne devaient pas être terminés et que le tracé du mur devait être poussé de plusieurs centaines de mètres à l’ouest, restituant ainsi 25% de ses terres au village. A ce jour, la décision de la Haute Cour n’a pas été appliquée et la construction continue.

En juillet 2008, Bil’in a lancé une action en justice devant la Cour Supérieure du Québec contre Green Park International Inc. et Green Mount International Inc. pour leur implication dans la construction, la promotion et la vente de logements à Mattityahu Est, qui fait partie de Modi’in Illit.

Pour mettre fin à la résistance populaire à Bil’in, les autorités israéliennes intimident les manifestants par la violence physique et les arrestations. Les forces armées israéliennes ont utilisé des grenades assourdissantes, des grenades de choc, des cannons à eau, des balles caoutchouc-acier, des grenades lacrymogènes, des projectiles lacrymogènes à grande vitesse et des balles réelles de calibre 0,22 contre les manifestants. Le 17 avril 2009, Bassem Abu Rahma a été touché à la poitrine par un projectile lacrymogène à grande vitesse tiré par les forces israéliennes et il est mort de ses blessures à l’hôpital de Ramallah.

Sur les 78 habitants qui ont été arrêtés en lien avec les manifestations contre le mur, 31 ont été arrêtés lors d’une campagne de raids nocturnes qui a commencé le 23 juin 2009. Les forces israéliennes envahissent régulièrement les maisons à la recherche des participants aux manifestations, et visent les leaders du Comité populaire contre le mur et les colonies ainsi que les adolescents accusés de jeter des pierres contre le mur. 13 sont toujours en détention, dont 4 sont mineurs.

Source : Palsolidarity

Traduction : MR pour ISM