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Gaza - 28 avril 2014
Par Annie Vera
Participer à une brigade UNADIKUM, c’est vouloir mieux comprendre les problèmes de Gaza et les difficultés quotidiennes de ses habitants prisonniers du blocus imposé par Israël et maintenant par le gouvernement égyptien. C’est vouloir que les agriculteurs exercent leur travail sans devoir risquer leur vie. C’est aussi vivre des moments d’amitiés chaleureuses.
Dès la descente de l’avion au Caire, nous sommes attendues et accompagnées dans un hôtel où Mohamed nous accueille, jusqu’au départ pour la frontière de Rafah.
Arrivées là, après la longue traversée du Sinaï, on se rend compte de la situation réelle des Gazaouis qui souhaitent simplement rejoindre leur famille ou leur maison, sous la menace des armes des militaires égyptiens. Aucune infrastructure, toilettes, bancs, abris, pour une attente de plusieurs heures, ou plusieurs jours.
Un moment enfin, les lourdes portes s’ouvrent, les formalités longues et compliquées se terminent et après quelques heures, nous traversons les quelques centaines de mètres, jusqu’au hall d’accueil de Gaza.
Notre correspondant, Abu Amir, qui nous attend depuis plusieurs heures, nous accompagne jusqu’à notre lieu d’accueil. Pour nous, c’était un grand appartement, dans un jardin fleuri, dans le quartier du port (Mina).
Dès le lendemain matin, nous faisons la connaissance des agriculteurs de Kouza et de leur famille. Vêtus de gilets jaunes, nous nous postons entre eux et la frontière, sous l’œil menaçant des chars et blindés israéliens. Il s’agit de dire aux forces d’occupations que le regard international est là, que les agriculteurs doivent légitimement pouvoir cultiver leurs terres, déjà cruellement réduites, sans risquer d’être blessés ou tués par une balle israélienne. Ces champs dans la "zone tampon" étaient des vergers, tous détruits par les bulldozers israéliens, lors de leurs incursions brutales. « Un terroriste aurait pu se cacher derrière un palmier ! ». Ne pouvant plus irriguer, puisqu’Israël a condamné les arrivées d’eau au mépris des règles internationales, les agriculteurs cultivent le blé, moins gourmand en eau et en soins, que les légumes.
Nous sommes auprès d’eux, ils semblent rassurés, les regards, les gestes, le café et les dattes qu’ils nous offrent attestent que nous sommes plus que les bienvenus. Abu Jamal, le patriarche d’une grande famille, nous invite, après le travail dans son champ, à partager son repas dans sa maison. Il évoque la nécessité vitale pour tous les agriculteurs, de restaurer les puits détruits par les bombardements lors des différentes agressions israéliennes ; de construire un château d’eau (mais restera-t-il longtemps debout ?) pour ne pas être dans l’obligation d’acheter une eau, très chère puisque très rare.
L’eau du robinet dans la ville de Gaza est salée. La mer s’infiltre dans la nappe phréatique qui devrait naturellement être alimentée par l’eau douce qui vient de Cisjordanie . La Croix-Rouge Internationale, dont nous avons rencontré une représentante, a construit des raccordements jusqu’aux canalisations israéliennes, ainsi que stipulé dans les accords internationaux, mais les négociations avec Israël, n’ont toujours pas permis l’ouverture « des robinets », le seront-ils un jour ? Des instances internationales se décideront-elles à exercer une pression pour faire respecter ce droit universel ?
L’association UNADIKUM participe également aux manifestations et rassemblements qui revendiquent le juste droit des pêcheurs à exercer leur métier, sans craindre d’être emprisonnés, humiliés, blessés ou tués. Leurs bateaux sont régulièrement détruits ou volés. Leur problème est identique à celui des agriculteurs : on risque sa vie en exerçant son métier.
La vie quotidienne est difficile à Gaza, le chômage, la pauvreté, les coupures d’électricité, le manque de médicaments, les bombardements, l’impossibilité de voyager concourent au découragement et à des dépressions pour les habitants qui vivent sur cette petite bande de terre. Elle pourrait être paradisiaque, si Israël n’avait pas décidé de la rendre invivable, sous les regards bienveillants de la communauté internationale, si lâche et hypocrite.
Dans ce contexte douloureux, existent des oasis de paix pour les enfants ; grâce à la volonté et au professionnalisme de psychologues, d’animateurs, de bibliothécaires, d’associations parfois pas ou très peu financées, mais tellement importantes, pour cette génération qui grandit et dont on se demande quel sera leur avenir.
Avec UNADIKUM, nous avons pu rencontrer plusieurs de ces associations : une ludothèque parrainée par l’association « Evry Palestine », dans laquelle une psychologue tente d’apaiser et d’aider des enfants en difficulté ; des associations d’aide aux femmes et de défense de leurs droits ; des lieux de soutien scolaire ; des ONG qui travaillent sur le problème de l’eau. Toutes tentent de soulager un quotidien rendu insupportable par un blocus implacable et injuste.
Les habitants de Gaza, enfermés, martyrisés, sont avides de connaissance et de culture. Internet est leur fenêtre sur un monde extérieur qu’il leur est impossible de connaître autrement, puisque les voyages leur sont interdits.
Les jeunes, même éduqués, diplômés, mais sans emploi, aspirent « juste à vivre comme les autres gens ». Cette phrase, nous l’avons entendu de tous, et partout.
Ce qu’ils nous demandent, c’est de témoigner de ce qu’ils sont, de ce qu’ils vivent, de leurs justes aspirations à mener une vie décente. Ils espèrent l’efficacité de la campagne BDS ; alors qu’ils sont eux, condamnés à consommer les produits israéliens ou à mourir de faim.
Ils nous demandent de tout mettre en œuvre, pour qu’enfin, les instances internationales ouvrent les yeux, soutiennent leurs droits, prennent position et abandonnent l’attitude odieuse qu’elles adoptent, depuis si longtemps.
Ils nous demandent aussi de venir les rencontrer, juste pour leur dire « vous n’êtes pas tous seuls ».
UNADIKUM c’est aussi de belles rencontres, des discussions animées, des moments d’amitié où l’on reçoit plus que l’on ne donne.
D’une brigade UNADIKUM à Gaza, on revient ému, grandi, avec l’envie très forte de témoigner puis d’y revenir très vite.
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