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Naplouse - 9 décembre 2003
Par Silvia Cattori
Le garcon, tremblant de rage, a aussitôt soulevé sa chemise et, la poitrine a découvert, il a crié : "Tire, tue-moi si tu en a le courage, tire, moi je n’ai plus rien à perdre". A la seconde où le ciel s’est comme chargé de menace, ses compagnons le regardaient avec angoisse, avec passion. Ce garçon, engagé dans cette lutte inégale, était courageux; il résistait vaillamment, il suscitait leur admiration.
Quand je suis arrivée au check point d’Howwara, il y avait une grande tension. A cause des soldats, plus nombreux que d’habitude, et des véhicules militaires qui passaient sous votre nez à une vitesse folle, comme pour vous faire sentir encore plus vulnérable.
De l’autre côté du check point, une foule énorme attendait de pouvoir rentrer à Naplouse. Parmi les hommes en état d’arrestation j’ai reconnu Raed, étudiant à l’université, le jour, employé dans un hôtel, la nuit. Il était au désespoir car, contraint à rester là depuis plus de six heures, il n’avait pas pu se présenter aux examens. Il a encore eut le temps de me dire que les hommes qui étaient dans la fosse avec lui, étaient des étudiants universitaires. J’en ai compté trente deux. Ne pas se battre pour les arracher à leurs cruels geôliers, eut été une impardonnable lâcheté.
Je suis allée dire à l’officier - un Russe d’une trentaine d’années - que je ne partirais pas tant que ces hommes n'auraient pas recouvré leur liberté. L’officier m’a signifié que si je ne partais pas, il appelait la police militaire, et qu’il faisait son travail de vérification. Il ne vérifiait rien du tout. J’ai vu les cartes d’identités que les soldats avaient séquestrées, empilées dans un coin. Tout cela était du harcèlement et n’avait rien à voir avec la prétendue sécurité.
Ce sont des milliers de Palestiniens au-dessous de 35 ans qui sont chaque jour punis de cette manière, horrible à observer, quand ils se présentent aux 500 check points semblables a celui-ci, dans tout le pays.
Après plus de six longues heures d’immobilité sous un soleil accablant, avec interdiction de bouger, de parler, de boire, de manger, il s’est produit ce que les soldats escomptaient : que l’un ou l’autre de ces hommes captifs sorte de ses gonds, rentre en rebellion.
Un garçon s’est mis à crier contre ses tyrans violemment injustes qui crachaient leur mépris sur lui, qu’il voulait retourner à la maison, qu’il voulait ses papiers. On aurait dit qu’il était prêt à mourir plutôt que de se faire humilier davantage. Un soldat, s’est précipité sur lui avec la violence de la foudre, lui a donné un coup de pied aux fesses en hurlant : "Je te tue".
Le garcon, tremblant de rage, a aussitôt soulevé sa chemise et, la poitrine a découvert, il a crié : "Tire, tue-moi si tu en a le courage, tire, moi je n’ai plus rien à perdre". A la seconde où le ciel s’est comme chargé de menace, ses compagnons le regardaient avec angoisse, avec passion. Ce garçon, engagé dans cette lutte inégale, était courageux; il résistait vaillamment, il suscitait leur admiration.
Six soldats sont arrivés, l’ont empoigné, qui par un bras, qui par les cheveux; ils l’ont cogné à le faire s’evanouir, menotté, embarqué dans une jeep. Il s’agissait de Ra Fat Alzafadi, étudiant de l’université de Najah, âgé de 22 ans, qui cherchait dans la mort sa liberté.
Il y avait quelque chose de pathétique dans cette muette communication qui unissait les Palestiniens, plongés dans leur douleur d’hommes. Quelque chose d'impressionnant qui frémissait de tendresse, que ces brutes - dont les traitements avilissants ont continué jusqu’au soir - étaient incapables de percevoir.
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Silvia Cattori
9 décembre 2003