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ISM France - Archives 2001-2021

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Naplouse -

Vie de tous les jours à Naplouse et ses environs.

Par

Photo non contractuelle

Malgré le grand nombre de personnes qui attendaient dans la file, les gens passaient plus rapidement que d'habitude, mais un soldat en particulier se montrait pénible. Il marchait d'un pas nonchalant, paraissant jeune et immature, sa position et son fusil lui donnant clairement du pouvoir. Il hurlait sur les gens, les menaçait, les poussait, criait.

Vie de tous les jours à Naplouse et ses environs.

Il y a deux nuits, l'armée est entrée dans le camp de Balata vers 22h30. Je me suis réveillé en raison du bruit des sirènes et j'ai pensé que j'étais à Asira à y guetter une nouvelle diminution de la présence armée, pendant qu'ils déclaraient le couvre-feu.



En reprenant mes esprits, je me suis rappelé que j'étais à Balata, j'ai entendu une grosse explosion et tout le monde dans la pièce aussi.

Nous nous sommes demandé ce que c'était : la démolition d'une maison ? Un obus tiré d'un tank ? Une bombe ?

Plus tard, après s'être posés des questions pendant des heures, il s'est avéré que tout cela venait de l'armée israélienne, peut-être une grenade jetée dans la rue. Des soldats avaient commencé à tirer partout dans le camp, à jeter des grenades assourdissantes, à faire marcher/éteindre leurs sirènes, à crier dans leur hauts-parleurs, etc.....

Nous avons pu compter 3 jeeps et un tank, mais il se peut qu'il y en ait eu plus. Une demi-heure après, ils ont garé deux jeeps près de notre maison. Nous tremblions de peur derrière la fenêtre parce que le fait même de regarder à travers une fenêtre close fait courir le risque de se faire descendre. Ils ont tambouriné à la porte du voisin et ont forcé la famille à sortir dans la rue.

La situation était très tendue, nous avons parlé de sortir. Certains étaient d'accord d'autres pas, certains étaient sur la défensive dont moi. La peur de se faire tirer dessus avant même d'avoir été identifié nous faisait hésiter.

Finalement ils sont partis plus loin dans la rue, ont tambouriné aux portes et, je suppose, ont obligés encore plus de familles à sortir dans la rue, à la poursuite probablement d’un homme soi-disant recherché,sans le trouver.

Environ une heure et demi après, ils sont partis et nous avons respiré, osant à nouveau regarder par la fenêtre sans être paralysés de peur à l'idée qu'un adolescent israélien en uniforme et à la gâchette facile pourrait nous tirer dessus.

Hier, l'armée et la police des frontières ont fini par lever le couvre-feu à Asira, après dix ou douze jours, avec quelques répits temporaires de 3 ou 4 heures, que les gens utilisaient pour aller chercher de la nourriture, des médicaments, etc.

Nous croyons qu'il y a un nombre croissant de personnes qui ont besoin d'un suivi en milieu hospitalier, mais ils ne peuvent toujours pas quitter la ville en raison des soldats qui patrouillent aux sorties et enferment tout le monde à l'intérieur de la ville.

Il y a des patients sous dialyse et d'autres personnes qui ont besoin de soins d'urgence. Hier, pour les enfants d'Asira, c'était aussi le premier jour d'école depuis dix ou douze jours.

Il y a deux nuits,ils ont fini par faire autre chose qu'imposer le couvre-feu, ils ont arrêté quatre hommes vers 5 h 30 du matin et les ont emmenés. Il est possible d'être emprisonné un certain temps pour avoir jeté des pierres sur les jeeps et les tanks, cependant, je ne sais pas ce que ces hommes ont fait.

Le dernier jour où ils ont imposé le couvre-feu, c'était le vendredi du Ramadan, et beaucoup de musulmans vont à la mosquée ce jour-là pour prier toute la nuit (dans la nuit du jeudi) mais l'armée est allée dans chaque mosquée d'Asira, en tirant partout, si bien que personne n'a osé y aller.

Vendredi beaucoup d'hommes sont allés discrètement à la mosquée pour le service de 11 heures et nous sommes restés dehors, nous attendant à voir surgir l'armée. J'ai été étonné de voir plusieurs dizaines de paires de chaussures, bien en vue, ne comprenant pas comment tant de gens avaient pris ce risque. Les prières se sont terminées très vite et les hommes ont commencé à sortir en groupe. J'ai été étonné quand j'ai vu sortir de la plus grande mosquée au moins 300 ou 400 hommes.

Nous avons remonté la rue jusqu'au centre-ville où deux jeeps attendaient. Les hommes ont filé et dépassé les jeeps tandis que les soldats criaient sans conviction «couvre-feu, couvre-feu», mais ils n'ont pas essayé d'intervenir, se contentant de vérifier brièvement deux cartes d'identité. Tandis que les hommes rentraient chez eux, les deux jeeps ont fini par quitter la ville, une victoire mineure, peut-être.

Une femme nous a demandé de l'accompagner au nouveau checkpoint entre Asira et Talluza pour l'aider à aller récuperer sa fille qui y était retenue, alors que les soldats israéliens vérifiaient les cartes d'identité par radio, un procédé qui prend d'habitude plusieurs heures. Nous y sommes arrivés vers trois heures et nous avons trouvé 7 ou 8 hommes détenus et plusieurs véhicules. Les soldats ont dit que non seulement nous ne pouvions pas passer mais que nous ne pouvions pas non plus retourner chez nous puisqu'ils avaient, entre temps, déclaré que la route était fermée.

A 17 heures, au moment de rompre le jeûn, nous sommes allés chercher de l'eau et ils ont partagé tout ce qu'ils avaient à manger, des gaufrettes je crois. A la nuit tombée, nous avons allumé un feu pour nous tenir chaud. Les soldats ont finalement relâché la plupart des gens après les avoir retenus de 3 à 5 heures, à l'exception de deux hommes. Les soldats se sont préparés à partir (parce qu'après 18h30 le fait de passer par là n'est plus un "risque pour la sécurité"), puis sont partis en emportant avec eux deux cartes d'identité.

Après être repartis chercher de la nourriture, nous avons attendu avec l'un des hommes,l'autre ayant pris le risque de partir sans sa carte d'identité. Nous nous sommes assis autour du maigre feu, sommes allés chercher du bois et avons bu une bouteille du thé que nous avions acheté.
La nuit tombée, une demi-douzaine de personnes ont marché en direction d'Asira pour rentrer chez eux, des hommes d'affaires avec leurs sacoches, d'autres travailleurs qui ramenaient des provisions de Naplouse pour leur famille, tous pressés, redoutant les conséquences de se faire attraper la nuit par l'armée.

Nous avons fait quelques tentatives pour obtenir qu'on nous rende les cartes d'identité mais sans succès. Finalement une jeep venant de la base surplombant Naplouse est descendue vers 20h/20h30, avec, nous l'espérions, les cartes d'identité, et le soldat s'est arrêté surpris de notre présence.

Nous avons essayé d'expliquer cette histoire de cartes d'identité,mais le soldat ne cessait de répondre «et alors» et «alors quoi", puis s'est vite éloigné avec son véhicule pour se diriger vers la route, 800 m plus bas, suivi par les soldats qui tiraient aux abords d'une ferme.

Je pense qu'ils poursuivaient des véhicules qui était passés par là, les uns poursuivant les autres. Ils sont revenus une demi-heure plus tard, les mains vides, alors qu’ils regagnaient directement leur base. Vers 22h30, nous sommes partis sans avoir obtenu qu'ils rendent les cartes d'identité. Nous nous sommes mis d'accord pour nous retrouver le lendemain à 8 h mais, le jour suivant,il y avait un sévère couvre-feu.

Dans l'après-midi, nous sommes descendus avec des Israéliens qui travaillaient avec nous ce jour là pour obtenir des informations sur les cartes d'identité, mais, comme le barrage n'était plus surveillé par les soldats, nous sommes rentrés bredouilles. Sans leurs cartes d'identité,les hommes sont cloués à la maison.

Hier, nous avons organisé un tour d'observation au checkpoint d'Huwara, au moment où des centaines de gens essayaient de rentrer chez eux pour être avec leur famille pour la fin du ramadan. 8 taxis étaient là,confisqués, des gens faisaient la queue, environ 200 ou plus un moment donné, entre 50 et 100 arrivant toutes les 5 à 15 minutes. Des hommes ,étaient détenus debout sous le soleil,l'un d'eux a eu besoin de soins médicaux sous l'effet couplé du soleil et du jeûn, et il a été emmené en ambulance.

Malgré le grand nombre de gens qui attendaient dans la file, les gens passaient plus rapidement que d'habitude, mais un soldat en particulier se montrait pénible. Il marchait d'un pas nonchalant, paraissant jeune et immature, sa position et son fusil lui donnant clairement du pouvoir. Il hurlait sur les gens, les menaçait, les poussait, criait. Je l'observais, alors qu’il frappait son mégaphone qu'il utilisait pour hurler, sur une barricade en béton ce qui a provoqué l'éjection des piles.

Il s'est tourné instantanément vers le Palestinien le plus proche et a commencé à hurler, terrifiant sa petite fille, avant de les renvoyer au bout de la file. Tous les hommes qui essayaient de partir mais n'étaient pas autorisés à le faire, devaient attendre sur le côté, retenus par ce soldat.On nous a dit que les gens qui avaient la carte d'identité du village ne pouvaient pas sortir parce que les soldats prétendaient qu'ils s'y étaient infiltrés!!

Seuls les hommes de plus de 35 ans, les femmes et les enfants eurent le droit de passer. Je regardai le soldat qui ne se contrôlait pas, donner un coup de casque sur la tête d'un Palestinien , dans ce qui semblait être un geste d’avertissement. Nous avons négocié avec les soldats pour pas grand chose.

J'ai vu la couverture d'un enfant s'accrocher aux barbelés et un autre petit enfant lutter le long d'une étroite saillie rocheuse pour passer en s'accrochant aux barbelés afin de ne pas perdre l'équilibre.

Beaucoup de soldats nous disent que c'est l'armée la plus humaine du monde.

Source : www.palsolidarity.org

Traduction : CS

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