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ISM France - Archives 2001-2021

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France -

La politique de l’antisémitisme : dangers réels ou dangers factices ?

Par

> mneumann@trentu.ca

Michael Neumann est professeur de philosophie à l’Université Trent, dans l’Ontario, Canada. Ses opinions ne sont pas représentatives de celles de son université. Son livre What's Left: Radical Politics and the Radical Psyche vient d’être republié par Broadview Press. Il a contribué à l’essai « What is Anti-Semitism » [Qu’est-ce que l’antisémitisme ?] ainsi qu’à l’ouvrage édité par CounterPunch : The Politics of Anti-Semitism.

Pour un juif non pratiquant et antisioniste, la soudaine apparition en France d’une piété d’état anti-antisémite, peureuse et maladroite, ne peut qu’agacer. C’est une chasse à la culpabilité qui ne mène qu’à la censure.
On s’acharne à faire pénitence pour les péchés de la Collaboration, commis par des compatriotes pour la plupart déjà morts.

Si, en Angleterre, il est licite d’écrire avec compréhension, voire sympathie, au sujet de l’irritation ressentie par les Allemands devant ceux qui tentent de discerner dans leurs traits l’ombre du nazisme, en France on s’acharne à se faire passer pour des Nazis manqués.

Serait-ce pour ne pas avoir à se repentir des péchés biens plus récents commis contre les beurs, les sales Arabes et autres bougnoules ?
Serait-ce pour mieux s’autoriser de telles appellations qu’on consacre tant d’efforts, tant de compassion myope à faire taire ceux qui parlent des sales juifs ?



On prétend découvrir une crise majeure, on signale un accroissement des incidents antisémites. On pourrait certes souhaiter que notre monde fût tellement civilisé, si bien ordonné que de tels incidents signalent une crise urgente.

Mais en cette époque de massacres, de génocides, de guerres civiles et ethniques, en un temps où l’on parle de trois millions de morts au Congo, il convient de poser la question : combien de morts, combien de mutilés, combien de viols parmi tous ces « incidents » ?

Bien sûr, la France n’est pas obligée d’attendre que de telles atrocités soient effectivement commises avant d’agir. Mais sommes-nous dans l’expectative ?

Attendons-nous même de l’être ?

On recense un bon nombre d’actes de vandalisme ainsi que quelques douzaines d’affrontements dont la gravité n’excède guère celles de milliers d’altercations comparables à travers l’hexagone. Il y a une police efficace qui combat les malfaiteurs, appuyée par la pleine puissance de l’Etat. Contre cela, ni milices ni grandes forces antisémites au sein de la culture politique française.

Est-on vraiment «de retour vers le futur» ?

Est-on réellement revenu aux années trente ?



On nous rapporte que les juifs en France se sentent mal à l’aise et c’est regrettable. De même, il est regrettable que les pauvres en France, que les Arabes en France et que les noirs en France ressentent eux aussi un malaise. Mais il ne s’agit pas d’une crise.

Et si la situation est vraiment si périlleuse pour les juifs de France, si la culture française a tant besoin d’une mobilisation anti-antisémite, on se demande bien pourquoi un dirigeant duCRIFaccueillait, il n’y a pas si longtemps, le succès d’un Le Pen comme étant un « message aux musulmans leur indiquant de se tenir tranquilles ».

Qu’est-ce à dire ?

Où sont les angoisses d’antan ?

En vérité cette crise, cette tempête de mauvaise foi, tire ses origines non pas des faits du présent, non pas des solides leçons de l’histoire, mais d’une sorte d’anthropologie sentimentale qui nous présente un peuple juif français toujours souffrant, toujours persécuté, toujours menacé et déçu par les condamnations déraisonables de son beau sanctuaire sioniste..

On lit trop Némirovsky et Wiesel et pas assez les ouvrages d’un Yakov Rabkin, (au nom de la Torah : Une histoire de l’opposition juive au sionisme), qui dépeignent une autre communauté juive, refusant de se prêter à un culte de la victimisation et ne demandant rien mieux - y compris pour combattre l’antisémitisme - que d’être aidée dans sa lutte contre les crimes israéliens, commis au nom du peuple juif tout entier, avec l’appui d’organisations soi-disant juives comme le CRIF, lequel ne représente pas le peuple juif mais le sionisme.

Si l’on veut condamner une propagande vraiment dangereuse pour les juifs - qui «incite à la haine» - on la trouvera sans peine dans les prétentions cyniques du gouvernement israélien, qui présente ses abus comme étant ceux du peuple juif, et dans celles des soi-disant «organisations juives» qui ne sont en fait que des institutions sionistes et qui n’ont aucun droit de s’exprimer au nom du peuple juif.



Jamais on n’assisterait en Israël, comme on le voit actuellement en France, à une abdication quasi-universelle de tout esprit critique par rapport à la politique de l’antisémitisme.

Dans un rapport au ministre de l’Intérieur, le docteur Rufin nous informe, avec plus de ruse que de sagesse, que toute forme d’antisionisme « radical », même sans contenu explicitement antisémite, est de fait antisémite, parce qu’elle tendrait à provoquer la haine contre les juifs. Certes, de nos jours la raison n’est plus tenue en haute estime : mais n’est-il plus permis d’en référer au sens commun ?

On peut démontrer que les sévères critiques dirigées contre l’intégrisme musulman, voire simplement les reportages sur les violations de droits de l’homme en Egypte ou en Syrie, ou les témoignages sur la corruption en Arabie saoudite ou la répression en Algérie, tendent également à « provoquer la haine », cette fois contre les Arabes.

On peut même aller plus loin : il est hors de doute qu’un récit au ton parfaitement neutre relatant la destruction par les Talibans des statues bouddhistes de Bamiyan provoquera une réaction de haine contre les Arabes, bien que les Talibans ne soient pas arabes. Va-t-on alors interdire tout cela ?

Avec la menace de peines infamantes à la clé, allant jusqu’à l’emprisonnement ?

La liberté d’expression ne peut être, on le sait, absolue ; il y a des provocations directes qu’on ne saurait tolérer. Mais si l’on va interdire tout propos dont on prévoit des conséquences dangereuses, c’est un silence de plomb qu’il va falloir imposer. La seule question encore en suspens est celle du degré de mauvaise foi entachant les mobiles de ceux qui proposent des lois aussi insensées.



Mais le pessimisme n’est pas forcément de mise. Il se peut après tout que cette hystérie anti-antisémite, que ces démarches ignobles auprès de Sharon, ne soient qu’autant de précautions pour parer aux inévitables accusations d’antisémitisme pendant une période où la France multiplie les efforts en vue de régler une crise qui n’a rien d’imaginaire : l’oppression meurtrière des Palestiniens.

Le succès d’une telle politique serait le meilleur remède contre l’antisémitisme à travers le monde.

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