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ISM France - Archives 2001-2021

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Gaza -

Le retrait des colons n’a été qu’un spectacle cynique

Par

> j.steele@guardian.co.uk

Comparez la couverture médiatique, énorme, mondiale, particulièrement celle de la télévision, du départ des colons israéliens de Gaza, avec les reportages minimes des évictions plus générales et plus brutales des mois précédents.
Quand les bulldozers sont entrés dans Rafah, il n’y a pas eu de "sensibilisation" des troupes israéliennes, pas de bus pour emmener les gens expulsés de chez eux, pas de généreux délais pour se préparer, ni de confortables compensations pour leurs maisons, et aucune promesse de nouveaux logements subventionnés par le gouvernement.

Juste à cêté des colonies de Gush Katif qui ont été traitées avec une telle douceur cette semaine, les familles de Rafah avaient généralement cinq minutes maximum pour partir avant que leurs maisons ne fussent écrasées avec tout ce qu’ils possédaient.

Beaucoup n’ont même pas eu le temps de monter à l’étage ramasser des affaires quand les aboiements des hauts parleurs leur ont donné l’ordre de sortir, parfois avant l’aube. Fuyant dans la nuit avec leurs enfants, ils risquaient de se faire tirer dessus s’ils se retournaient ou traînaient en route.


Dans la bande de Gaza, quelque 13 350 Palestiniens ont été chassés de leur maison dans les 10 premiers mois de l’an dernier par les bulldozers blindés géants Caterpillar—plus au total que les 8500 qui ont quitté les colonies israéliennes cette semaine.

Seulement à Rafah, d’après les chiffres fournis par l’UNRWA,l’agence de l’ONU qui s’occupe des réfugiés, le taux de démolition des maisons est passé de 15 par mois en 2002 à 77 par mois entre janvier et octobre 2004.


Certaines parties de Rafah ressemblent maintenant à des quartiers de Kaboul ou de Grozny. Face à des tours de guet de l’armée israélienne et au mur de béton qui court le long de la limite méridionale de la bande de Gaza, des rangées de gravats et de maisons en ruines s’étendent sur des centaines de mètres.


La maison où j’ai habité il y a trois ans, qui se trouvait à un rang en arrière de la ligne de front, n’existe plus. Ainsi que trois autres rangées de maisons derrière elle, grâce à la politique impitoyable d’Israël de nettoyer la zone pour des raisons de "sécurité", même après que Sharon ait annoncé son plan de quitter Gaza.


Les Palestiniens qui visitent les ruines ou essayent de se servir d’une ou de deux pièces ayant survécu à l’attaque risquent leurs vies sous les balles israéliennes. Un tir d’avertissement a retenti lorsqu’un habitant m’a emmené sur son toit en plein jour le mois dernier pour jeter un coup d’œil sur cette scène de désolation. Nous sommes redescendus au plus vite.


On a bien sûr parlé de ces cruelles évictions, et quelques étrangers qui essayaient de les empêcher, ou de les enregistrer, comme Rachel Corrie, Tom Hurndall et James Miller, ont payé de leurs vies au cêté de dizaines de Palestiniens assassinés.

Mais la couverture n’a jamais été aussi complète ou intense que le retrait forcé des Israéliens cette semaine. Sharon voulait que les médias mondiaux voient la douleur prolongée des colons, pour prouver l’argument (fallacieux) que s’il est dur de faire que 8500 colons quittent Gaza, en faire se retirer 400 000 de Cisjordanie et de Jérusalem ouest sera impossible.
Quelque soit la sincérité des colons forcés de partir de chez eux, pour les organisateurs c’était un spectacle des plus cyniques.


Cette insistance exagérée sur les évictions des colonies a certains avantages. Ceux qui clament, sincèrement ou non, que les médias mondiaux sont partiaux en faveur des Palestiniens ont cette semaine vu leur argument s’effondrer. Les téléspectateurs du monde entier ont aussi eu l’occasion de voir l’attitude endémique du fondamentalisme religieux dans toute sa laideur.


Alors qu’on les entraînait de force, certains fanatiques israéliens n’avaient pas honte de minimiser l’Holocauste, comparant absurdement la police israélienne sans armes à la Gestapo.
D’autres proféraient des insultes racistes.

"Les Juifs ne chassent pas d’autres Juifs", criaient-ils, sous-entendant probablement que seuls des non-Juifs le font. Ils ne se rendaient probablement pas compte que la plupart des gens y détecteront une ironie en termes d’évènements contemporains plutêt qu’historiques – "Les Juifs ne chassent pas d’autres Juifs…Les Juifs chassent les Arabes."


Ce qui était peut-être le plus laid dans la conduite des colons a été la corruption de leur jeunesse, les parents poussant leurs enfants à s’envelopper dans des châles de prière et à sangloter ou à pousser des cris de défi.


Quiconque passe quelque temps à Gaza ne peut s’empêcher de ressentir de le tristesse devant l’insistance omni présente des armes, qui détourne aussi les enfants de grandir normalement. Elles figurent partout sur des graffiti, avec les noms et les visages de ceux qui ont eu une mort violente, dans des attaques suicides, ou abattus par le feu des Israéliens.

Chaque adolescent, ou presque, aspire à se servir d’une Kalachnikov ou d’une grenade. Lors d’un récent mariage, j’ai vu une mère qui dansait avec un fusil dans chaque main au dessus de la tête, comme des bâtons de majorette.


Enfermés dans le ghetto que leur impose Israël, les gens de Gaza peuvent au moins clamer que ce militarisme délétère que l’on retrouve partout est le résultat d’un mouvement de résistance nationale qui défend depuis dix ans la terre qui leur appartient.

L’Islam fait partie du tout, mais la religion vient après le drapeau national. Pour de nombreux colons israéliens de Gaza, la dynamique était inversée. La religion était leur motivation principale, et il n’avaient nul droit, individuel ou national, à la terre sur laquelle ils avaient construit leurs camps armés.


Les pires pratiques israéliennes de Gaza vont sans doute maintenant se retrouver en Cisjordanie .

Les restrictions aux libertés fondamentales s’y resserrent inexorablement depuis quelques années. De nouvelles routes ont été fermées. De nouveaux check-points sont apparus.

Les murs et les barrières s’étendent, défiant la décision de la Cour Internationale de Justice de la Haye qui les a déclaré illégaux.

Cependant, même avec cette oppression rampante, la vie n’a jamais été aussi contrêlée et restreinte en Cisjordanie qu’à Gaza.


Cela va sans doute changer. Sharon—dont un des surnoms est, de manière appropriée, le Bulldozer—veut étendre les colonies de Cisjordanie et démolir de nouvelles maisons palestiniennes autour de Jérusalem. Si cette stratégie unilatérale n’est pas bloquée, les évictions prendront peut-être des proportions telles qu’on en a vu à Rafah.


Le démantèlement des colonies va apporter aux habitants la liberté de mouvement à l’intérieur de leur étroite enclave, mais cet avantage sera peut être contrebalancé par des inconvénients supplémentaires en Cisjordanie .

Un des pires endroits de Gaza était le passage de Abou Holi, un tunnel où les véhicules palestiniens devaient passer en-dessous de la route menant aux implantations de Gush Katif.
A tout moment, les Land Rovers ou les tanks israéliens arrivaient pour bloquer le tunnel, forçant les Palestiniens à attendre sur ce qui était la seule route reliant le Nord de Gaza avec le Sud.
Des femmes enceintes sur le point d’accoucher ne pouvaient atteindre l’hêpital. Certains manquaient des cérémonies de mariage. Des étudiants rataient leur examens faute de pouvoir s’y rendre.


Israël a l’intention de construire au moins 12 "portes" en Cisjordanie . C’est une chose que d’avoir des routes ségréguées—un pas que le Sud Profond des Etats Unis et l’Afrique du Sud de l’apartheid n’ont jamais franchi, mais insister pour avoir le droit de bloquer même les routes allouées aux Palestiniens est grotesque.(1)

La Cisjordanie va être coupée en une série de ghettos que les forces israéliennes pourront isoler à volonté. Quelque soit la justification sécuritaire, au final c’est une punition collective qui est imposée à tous les Palestiniens.

Personne ne devrait s’étonner si, devant une telle injustice, la colère et la résistance palestiniennes montent.



1 - Carte : Routes pour colons seulement

Source : The Guardian

Traduction : Jean-Luc Mercier

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