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ISM France - Archives 2001-2021

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Bilin -

L'un est sorti d'Ofer, l'autre git sur un lit d'hopital à Naplouse

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C'était un cocktail vraiment étrange de soulagement et d'inquiétude que j'essayais de concilier en rentrant de la soirée chez Abdullah Abu Rahme dans le village de Bil'in lundi soir. Il venait juste d'être libéré de sa cellule d'une prison militaire mais pendant ce temps, il y a un type qui est à Naplouse avec une mâchoire brisée et plusieurs dents en moins après avoir été touché au visage par une boîte métallique de gaz lacrymogène tirée à courte distance.

L'un est sorti d'Ofer, l'autre git sur un lit d'hopital à Naplouse


Ahmad Al Shakur, 22 ans, git sur un lit d'hêpital à Naplouse avec une mâchoire brisée et un certain nombre de dents en moins après avoir été touché au visage par une boîte métallique de gaz lacrymogène tirée à courte distance..

C'était un cocktail vraiment étrange de soulagement et d'inquiétude que j'essayais de concilier en rentrant de la soirée chez Abdullah Abu Rahme dans le village de Bil'in lundi soir.

Il venait juste d'être libéré de sa cellule d'une prison militaire pour avoir participé à une protestation non-violente contre ce mur construit par un gouvernement étranger dans son village.

Pendant ce temps, il y a un type qui est à Naplouse avec une mâchoire brisée et plusieurs dents en moins après avoir été touché au visage par une boîte métallique de gaz lacrymogène tirée à courte distance.

Abdullah et sa famille ont une jolie maison située le long de la rue principale de Bil'in. Du toit, on peut voir avec des jumelles les colonies voisines de l'autre cêté des champs, ou le travail de construction sur le mur.

Pour mon troisième jour à Ramallah, je suis allé chez Abdullah pour assister à l'une des protestations du village. Sa maison est un batiment de 3 étages qui abrite une grande famille étendue et quelques appartements en location.

Une des parties de sa maison a été transformé en quartier général de l'International Solidarity Movement (ISM) à Bil'in, et les villageois y travaillent avec les volontaires de l'ISM pour coordonner les protestations créatrices et colorées presque chaque vendredi qui ressemblent parfois à des défilés, mais finit habituellement en arrestations et des blessés et avec le parfum du gaz lacrymogène répandu dans les rues.

Imaginez une ligne de vieux types avec des chapeaux de Shriner conduisant ces voitures miniatures vers un groupe d'adolescents et une vingtaine de soldats qui attendent l'ordre pour tirer des balles en caoutchouc — ou des balles réelles à l'occasion — vite pour pouvoir être libres le reste de l'après-midi.

Ces types, la foce de combat dont Israël est fier, ne sont pas là pour les perturbateurs inventifs, parce qu'ils ont trop à penser à eux. Les soldats savent comment traiter les shebabs, ces garçons que vous voyez toujours sur les photos de l'AP que lançent des pierres avec ces frondes du genre "David contre Goliath". Dans la réalité du monde "pierre-papier-ciseaux", la balle bat la pierre.

C'est dur d'avoir affaire à Abdullah. Lui et ses camarades activistes du Comité Populaire Contre le Mur marchent vers eux. Pourtant, les militaires tirent sur eux. Souvent.

C'était grande réunion Abdullah. Ce type passe tout son temps libre à protéger sa ville contre quelque chose qui est aussi inévitable que ce Mur d'Apartheid. C'est difficile de ne pas tomber dans une certaine sorte de bavardage euphorique, mais je manque de capacité à écrire une prose sucrée, donc si vous me lisez toujours, vous allez devoir supporter des observations potentiellement ineptes mêlées de cynicisme.

Après tout, je suis cynique, et la Palestine est un bel endroit pour alimenter le cynicisme. Abdullah et les activistes comme lui aident à l'atténuer.

La première fois que je suis venu chez Abdullah, je suis monté sur le toit de sa maison pour observer les soldats qui se préparaient à se bagarrer avec les manifestants non armés, alors qu'il était dans une prison de la base militaire d'Ofer, c'était le 23 juillet. Il avait arrêté une semaine avant pour une soi-disant agression.

On ne sait pas comment mais il était parvenu "à agresser" un type qui portait son équipement militaire et tenait un M-16. Un groupe d'internationaux ont été arrêtés avec lui. L'enregistrement vidéo les a faits sortir de prison dans les heures suivantes. Mais c'est une procédure de tribunal civil.

Les internationaux et les Israéliens ont accès à cette procédure. Tout Palestinien vivant dans les Territoires Occupés est envoyé devant un système de tribunal militaire, ce qui signifie, un système censé maintenir les gens derrière des barreaux aussi longtemps qu possible, peu importe s'ils font partie des Brigades Al-Aqsa ou s'ils portent des banderoles demandant "Arrêtez le Mur".

Abdullah a été libéré de prison lundi après-midi. Il a été arrêté le 15 juillet pour avoir participé à une manifestation non-violente dans son propre village. La cour l'a libéré sous caution, et à condition qu'il cesse de manifester contre le mur. Il a déposé une caution de 6.000 NIS et un ami israélien a signé en tant que tiers-caution pour un montant de 10.000 NIS..

Cette dernière somme devra être payée si Abdullah ne respecte pas ses conditions. Tout cet argent payé et ces conditions sont absurdes. Abdullah n'a rien fait d'autre que marcher sur les terres de son village.

Cette nuit, feux d'artifice, beaucoup de thé sucré et de café également sucré et des collations encore plus sucrées étaient servies alors que la ville affluait dans la maison d'Abdullah pour une fête de bienvenue.
Il était bouleversé par les conditions de sa libération, mais alors qu'il faisait sauter sa petite fille sur ses genoux au milieu de toute sa famille et ses amis, il était évident qu'il trouvait le contrêle strict de ses mouvements à la maison préférable au fait de rester à Ofer.

Voici un homme responsable de famille qui a travaillé dur et s'est levé pour sa communauté et qui a payé -- et qui paiera encore – le prix fort.

Imaginez un édifice gargantuesque installé dans votre propre voisinage. Un édifice qui vous couperait de votre famille, de vos amis et de vos myons d'existence. Que l'on vous dise que vous ne pouvez vraiment rien y faire.
Pourtant, ne feriez-vous rien? La plupart des gens ne feraient rien. Il y a de fortes chances que je ne pourrais pas faire grand chose si, par exemple il coupait Olympia d'Est et en Ouest en plein milieu. Ne faire rien est le problème.

Nous aimons les gens qui font quelque chose dans les films ou les romans. Nous sommes moins à l'aise quand cela nous arrive parce que cela engendre un certain auto-examen de nos propres actions ou de notre manque d'action.
Abdullah, et quelques autres à Bil'in et ailleurs dans les villes de Cisjordanie ont fait quelque chose.

Ils ne se sont pas levés et ont été frappés ou été la cible des balles des soldats pour être des héros ou parce qu'ils pensent qu'une marche ici ou là va mettre fin à l'occupation. Ils le font parce que c'est l'outil le plus efficace à leur disposition pour faire connaître leur problème au monde extérieur. Ils le font parce que c'est chez eux.

C'est pour nous, qui pourrions se demander pendant une minute ou deux : "Que se passe-t'il là-bas?" Que faisons-nous? Je reviens avec rien. Prouvez-moi que j'ai tort."

Pendant que la fête continuait dans la cour, que l'air devenait plus frais et que le narguilé passait plusieurs fois, c'était difficile de tout oublier et de célébrer la liberté récemment gagnée bien que limitée d'Abdullah. Alors que j'étais impressionné par son contrêle et son désir de revenir face à la ligne des soldats dès qu'il pourrait, j'étais préoccupé au sujet d'un autre type que je n'avais pas eu la chance de rencontrer, mais dont j'avais lu et écrit des informations toute la journée au bureau de l'ISMedia.

Pendant que nous faisions la fête à Bil'in, Ahmad Al Shakur, 22 ans, gisait sur un lit d'hêpital à Naplouse avec une mâchoire brisée et un certain nombre de dents en moins.

C'est ce qu'il a obtenu pour avoir participé à une manifestation dans le village cisjordanien de Kifl Haris contre la destruction des oliveraies locales pour la construction d'une route de contournement pour Israéliens-seulement, ce qui signifie qu'elle va permettre aux colons de se déplacer rapidement et sans problème entre la colonie d'Ariel et Israël. C'est illégal pour les Palestiniens d'utiliser n'importe quelle section de cette route ou de la traverser même pour parvenir à leurs terres de l'autre cêté.

C'est fou que les gens dans le monde entier – en particulier les "amoureux de la liberté" aux États-Unis. – aient pu réussir à faire plier l'Afrique du Sud au sujet de l'Apartheid, ou prendre des mesures énergiques contre la liberté politique dans des endroits comme Cuba ou faire partir les quelques fermiers blancs qui dirigeaient le Zimbabwe, mais semblent n'avoir aucun problème avec un peuple entier opprimé à ce point pendant aussi lontemps par notre "allié stratégique". Israël est celui qui opprime.

Avant que les manifestants atteignent la route des colons avec leurs banderoles et leurs pancartes, avant même qu'ils se soient éloignés du centre du village, un peloton de soldats israéliens à foncé sur eux et a ouvert le feu avec des boîtes métalliques de gaz lacrymogène.

Les soldats ont visé à bon escient les têtes des personnes et ont tiré. Une boîte métallique s'est écrasée contre le visage d'Ahmed, a ricoché et a heurté la tête de sa nièce âgée de 7 ans pendant qu'elle regardait son oncle tomber à terre, du sang plein la bouche.

Une autre boîte métallique de gaz lacrymogène tirée directement sur la foule a atteint à la poitrine un homme de 35 ans, Imad Hammad, qui a rejoint Ahmed à l'hêpital de Naplouse pour soigner ses cêtes cassées. Deux autres ont souffert des blessures mineures après avoir été touchés ou avoir respiré trop de gaz.

Selon les règles d'ouverture du feu de l'armée israélienne, il est interdit de tirer des boîtes métalliques de gaz lacrymogène directement sur les individus composant une foule. En dépit de cela, les soldats israéliens visent et tirent régulièrement des boîtes métalliques directement sur les manifestants non-violents causant des blessures sérieuses.

Ces incidents font rarement l'objet d'enquêtes de la part de l'armée, favorisant une atmosphère où les soldats se sentent libres d'utiliser les armes 'non-mortelles' de façon plus dangereuse et potentiellement plus mortelle.

Imaginez des tubes en acier tirés sur des protestataires pendant une manifestation de droits civiques. Pensez aux soldats britanniques qui frappaient les manifestants non-violents pendant l'expérience coloniale de l'Angleterre en Inde. Si vous pensez qu'il y a une différence entre ces situations et celle-ci, ne dites pas ça aux Palestiniens. Arrêtez-vous et demandez-vous quelle est la logique cinglée qui vous empêche de les voir de la même façon.

Un jour, dans plusieurs années, les réalisateurs d'Hollywood produiront un film à grand budget, nominé aux Oscars avec une star du genre Tom Hanks qui s'avèrera être justement aux cêtés d'un groupe de Palestiniens de la CGI.

Peut-être que dans un siècle, les gens déploreront la tragédie de la situation, de la même manière qu'aujourd'hui ils achètent des films comme "Danse avec les Loups" ou "Le Dernier Samurai" en même temps que des repas chez Burger King.

Pendant qu'ils laisseront descendre la dernière frite graisseuse dans leur oesophage, ils pourraient même penser que c'est une bonne chose de vivre à leur époque où de telles choses ne pourraient jamais se produire.

Qui sont les Indiens américains de cette ère? Qui seront les Palestiniens de la prochaine ère? Et si les gens n'attendaient pas une épopée de Daniel Day Lewis pour commencer à s'inquiéter de l'existence d'un peuple entier?

Le "Désengagement" de Gaza, les prétendues "Barrières de Sécurité" en Cisjordanie , le maintien de plus d'un million de Palestiniens dans des camps de réfugiés ignobles en Jordanie, au Liban, etc. en état d'exil permanent, voilà les actes d'un gouvernement, représentant soi-disant un peuple autrefois sans terre et essayant de créer d'autres personnes sans terre.
Nous le payons en ce moment.

Ce serait peut-être une bonne idée d'en apprendre plus au sujet de ces gens pour lesquels nous payons un autre gouvernement afin de les mener en exil avant d'acheter un ticket de 10 € pour voir un film et obtenir des informations sur eux.

Ils payent assez pour cela, donc la moindre des choses est que nous leur devons au moins cela.


Venez en Palestine.



Source : www.palsolidarity.org

Traduction : MG pour ISM

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