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Israël -

"Nous sommes devenus les sous-traitants de l'occupation" : B'Tselem met fin à son travail avec l'armée israélienne

Par

Jaclynn Ashly contribué à cet article depuis Jérusalem.

25.05.2016 - Après 25 ans de travail de dénonciation des responsabilités en Cisjordanie occupée, l'organisation israélienne de défense des droits de l'homme B'Tselem a annoncé mercredi sa décision de mettre fin à sa stratégie de faire rendre des comptes aux forces israéliennes pour leurs crimes contre les Palestiniens par des mécanismes militaires internes.

'Nous sommes devenus les sous-traitants de l'occupation' : B'Tselem met fin à son travail avec l'armée israélienne

En janvier 2007, B'Tselem a lancé le "Projet Caméra" et a équipé des dizaines de familles palestiniennes de caméras, pour leur permettre de filmer les attaques de l'armée et des colons qu'elles subissaient en toute impunité, faute de preuves. Comme l'on pouvait malheureusement le prévoir, la constitution et la présentation de la preuve n'ont pas permis aux Palestiniens attaqués d'obtenir justice.
Les représentants de l'organisation, qui se consacre à la collecte d'informations et la documentation des violations des droits de l'homme contre les Palestiniens en Cisjordanie occupée, a qualifié leur complicité dans les mécanismes militaires d'Israël de "moralement inacceptable" dans un communiqué de presse, mardi.

Selon un nouveau rapport (1) publié par l'organisation, l'incapacité des mécanismes militaires israéliens de rendre justice aux victimes palestiniennes a conduit l'organisation à décrire leurs activités de responsabilisation comme "une machine à blanchir" la poursuite de près de 50 ans d'occupation militaire israélienne de la Cisjordanie .

"B'Tselem a réalisé peu à peu que la façon dont fonctionne le système d'application de la loi militaire l'empêche, dès le tout début, de rendre justice aux victimes. Néanmoins, le fait que le système existe sert à donner un semblant d'application de la loi et de la justice," indique le rapport.

Le rapport argue que le vernis de légitimité juridique "rend plus facile le rejet de toute critique des injustices de l'occupation, d'autant que l'armée envoie à l'extérieur le message qu'elle considère même certains actes comme inacceptables, et elle vient en renfort de cette affirmation en ajoutant qu'elle est déjà en train d'enquêter sur ces actions."

"Ce faisant, non seulement l'Etat parvient à entretenir l'impression d'un système d'application de la loi moral et décent, mais il entretient aussi l'image d'une armée éthique qui prend des mesures contre ces actes," ajoute le rapport.

Depuis le début de la deuxième Intifada, fin 2000, sur les 739 plaintes déposées par B'Tselem pour des Palestiniens tués, blessés, utilisés comme boucliers humains ou dont les biens ont été détériorés par les forces israéliennes, environ 70 pour cent ont donné lieu à une enquête qui n'a abouti à rien, ou à aucune enquête.

Selon le rapporot, seulement 3 pour cent des cas ont débouché sur des condamnations contre les soldats.

Le chercheur de terrain pour B'Tselem Iyad Haddad a déclaré à Ma'an mardi que des ONG israéliennes et palestiniennes ont travaillé pendant de nombreuses années pour créer une "culture" de dénonciation des responsabilités [d'Israël] dans les communautés palestiniennes en proie à une méfiance profondément enracinée envers l'armée israélienne, et pour convaincre les Palestiniens de déposer des plaintes contre l'armée israélienne lorsqu'ils subissent des violations des droits de l'homme.

Photo
Elor Azria, soldat franco-israélien, charge son arme avant de tirer à bout portant dans la tête de Abed al-Fattah Yusri al-Sharif, jeune palestinien blessé et gisant à terre, le 24.03.2016 à Al-Khalil/Hébron. La vidéo, qui a fait le tour du monde et a permis de connaître les circonstances de l'assassinat, a été filmée par Emad Abu Shamsiya, membre palestinien de B'Tselem.


Cependant, dit Haddad, l'organisation est devenue complice des violations en renforçant la crédibilité d'un système incapable de fournir des résultats ou un semblant de justice pour les individus ou leurs familles.

Pendant le point de presse, Kareem Jubran, directeur de la recherche sur le terrain à B'Tselem, a dit qu'il avait "honte" de l'engagement de B'Tselem avec l'occupation, ajoutant que le processus a forcé les victimes à devenir des victimes une seconde fois, car les Palestiniens sont couramment maltraités par les enquêteurs militaires alors que leurs affaires débouchent rarement sur la dénonciation des responsabilités ou la justice.

"Nous sommes devenus les sous-traitants de l'occupation," a dit Yael, directeur de recherche à B'Tselem, lors de la conférence de presse, ajoutant que le travail de responsabilisation de l'organisation a servi à "légitimer toute l'occupation."

La décision a conduit le groupe à repenser sa stratégie de responsabilisation directe pour un travail dans "auprès de l'opinion publique" par le lancement d'une campagne de sensibilisation qui peut "dépouiller le système de sa crédibilité," a dit le directeur exécutif Hagai Elad.

Le désengagement de B'Tselem des mécanismes internes de l'occupation militaire israélienne arrive au milieu d'un glissement de plus en plus à droite du gouvernement et de nouvelles attaques contre les organisations israéliennes de défense des droits de l'homme.

Avigdor Lieberman, politicien d'extrême-droite qui vient d'être nommé ministre de la Défense, a accusé B'Tselem au début de l'année d'être financé par les mêmes groupes que le Hamas - le mouvement palestinien qui dirige le gouvernement de facto de la Bande de Gaza assiégée et qui a été désigné comme organisation "terroriste" par le gouvernement israélien - et a qualifié B'Tselem de "traitres" au public israélien.

En décembre, Ayelet Shaked, leader du parti ultra-nationaliste israélien Le Foyer Juif, a soutenu un projet de loi sur la soi-disant "transparence" qui obligerait les ONG à révéler leurs sources de financement si plus de 50 pour cent de leurs fonds provenaient d'entités étrangères, dans le but de réprimer les groupes qui reçoivent des fonds étrangers pour critiquer Israël.

L'opposition a fustigé le projet de loi, qui a été adopté en première lecture à la Knesset en février, et Zehara Galon, présidente du parti de gauche Meretz, l'a qualifié de "poursuite de la chasse aux sorcières, de persécution politique, et de censure des groupes de défense des droits de l'homme et des organisations de gauche qui critiquent la conduite du gouvernement."

Les organisations israéliennes qui dépendent de financements étrangers ayant également tendance à s'opposer aux politiques de droite du gouvernement contre les Palestiniens, la législation envisagée est largement considérée comme discriminatoire et comme une tentative d'éliminer les groupes de défense des droits de l'homme agissant pour mettre fin aux violations massives des droits de l'homme qui se produisent dans le territoire occupé.

La décision récente de B'Tselem de se concentrer sur la sensibilisation de l'opinion publique israélienne marque un changement unique dans l'approche israélienne des droits de l'homme vis-à-vis des violations contre les Palestiniens, dans un climat politique où les positions d'extrême-droite gagnent de plus en plus les faveurs du grand public, et où les attaques concertées contre les groupes de défense des droits de l'homme pourraient être considérées comme une politique du gouvernement.


(1) The Occupation's Fig Leaf: Israël's Military Law Enforcement System as a Whitewash Mechanism, publication B'Tselem en anglais, mai 2016

Source : Maan News

Traduction : MR pour ISM

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