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Syrie - 27 mars 2011
Par Khaled Saghiyeh
Article paru le jeudi 24/03/2011
"La main de l'étranger"... "les islamistes"... "Israël"... "la bande armée".... et même "les rats"..., tels sont les termes et les expressions parmi lesquels les gouvernants arabes ont puisé à loisir pour décrire les débuts des insurrections populaires dans leur pays. Cette technique s'est toutefois rapidement retournée contre eux, les places se sont remplies d'individus citoyens proclamant publiquement leur identité nationale, arabe et civique.
Des manifestants crient des slogans anti-gouvernement après la prière du vendredi à la Mosquée des Omeyyades, Damas (photo Muzaffar Salman/AP)
Mais le régime syrien s'obstine apparemment à user de ce même lexique pour décrire ce qui se passe à Deraa, comme s'il n'avait pas remarqué ce qui s'est passé en Égypte et en Tunisie, et ce qui continue de se passer en Libye, au Yémen et au Bahreïn.
On dit que la Syrie n'est ni l’Égypte ni la Tunisie, c'est vrai. Il est probable qu'aucun pays arabe ne pourra être l’Égypte ou la Tunisie après ce qui s'est passé en Libye, au Yémen et au Bahreïn.
En effet, contrairement à la destitution des régimes de Moubarak et de Benali, les insurrections des autres pays arabes ont rappelé à notre souvenir les fractures civiles et les structures tribales et confessionnelles, et aussi le pétrole, de sorte que le changement a pris divers aspects dans ces pays où l'arabité résulte d'une aspiration contagieuse à la liberté.
Quoi qu'il en soit, le spectacle du "peuple" uni tel qu'il est apparu sur Maydane al Tahrir au Caire, et qui s'est transformé en "peuples" dans les autres pays, ne peut annuler la réalité selon laquelle tout gouvernant arabe, qu'il soit toujours ou qu'il ne soit plus en poste, ne peut plus désormais faire comme si ses compatriotes étaient inconscients ou inexistants.
Le monde arabe se range aujourd'hui sous un seul intitulé : le pain, la liberté, la dignité, et pour ne pas se tromper une fois de plus, la dignité ici ne se réduit pas à affronter l'ennemi externe mais également, et principalement, le flic, l'agent des renseignements généraux et les courtisans du pouvoir.
Les implications de ce qui s'est passé à Deraa ne sont pas encore claires, mais ce que nous avons compris, c'est que par la façon dont il a géré les évènements de Deraa, le régime en Syrie n'a pas l'air d'un régime qui se prépare à entreprendre des réformes.
Est-il possible d'avaler la version officielle qui nous raconte une histoire de "bande armée" et nous propose dans une mise en scène minable des piles de billets de banque et de fusils ?
Est-il possible d'admettre que le sang coule parce que des élèves d'une école primaire ont taggé des slogans* sur les murs ?
Les sources officielles ont déclaré que "les forces de l'ordre continuent de poursuivre la bande armée qui terrorise les civils et qui commet des assassinats, des pillages et des incendies des institutions publiques et privées à Deraa".
Tout ce qu'on peut souhaiter, c'est que cette "bande" soit effectivement appréhendée, mais en attendant, le pays tout entier est fondé à revendiquer le pain, la liberté et la dignité.
* "الشعب يريد إسقاط النظام" ( Al Shaab Yourid Isqat Al Nizam) Le Peuple Veut Faire Tomber Le Régime
Source : Al Akhbar
Traduction : Nadine Acoury
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