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Jérusalem - 12 juillet 2019
Par Ramona Wadi
Ramona Wadi est une chercheuse et journaliste indépendante palestinienne, critique de livres et blogueuse spécialisée dans la lutte pour la mémoire au Chili et en Palestine, la violence coloniale et la manipulation du droit international.
7.7.2019 – La propension de l'administration Trump à afficher son agenda farouchement pro-israélien ne connaît aucune limite. Dimanche, l'ambassadeur américain en Israël, David Friedman, et l'envoyé américain Jason Greenblatt ont participé à l'inauguration de ce qui a été décrit comme la « route du pèlerinage » à Silwan, à Jérusalem-Est. (1)
- Photo Silwanic -
Des images de Friedman brandissant un marteau et abattant allègrement un mur dans un tunnel creusé font le tour des réseaux sociaux, dans l'incrédulité absolue devant le spectacle qui se déroule.
La cérémonie était organisée par la Fondation Cité de David, une organisation liée au mouvement des colons, défendue sans réserve par Friedman et Greenblatt.
En 2018, la fondation a décrit l'histoire et l'archéologie comme importantes pour l'expansion coloniale.
Friedman et Greenblatt ont tous deux défendu leur participation à la cérémonie de dimanche. Friedman a fustigé sur Twitter des articles de presse qui décrivait le mur comme « un carton d’invitation », les qualifiant de « fausses informations ».
Soutenant le tweet de Friedman, une porte-parole de la Fondation Cité de David a déclaré que les médias devraient plutôt se concentrent sur l'importance de l'inauguration plutôt que sur « des questions marginales telles que les marteaux et les murs ».
Greenblatt, qui a dit quelques jours avant la cérémonie qu'il préférait appeler les colonies de peuplement « des quartiers et des villes », a déclaré : « Ne pas traiter de l'histoire, ou dans certains cas la falsifier, n'a jamais aidé le processus de paix. »
Ses commentaires décrivent avec précision l'implication des États-Unis dans les récits coloniaux fabriqués par Israël, qui dépendent de l'appropriation de l'histoire de la Palestine pour revendiquer de faux droits sur la terre.
À tout le moins, les diplomates sont censés agir avec la dignité qui sied à leur fonction. Pourtant, les bouffonneries dans le tunnel ont des répercussions qui vont bien au-delà de la jubilation d'individus privilégiés et choisis qui ont estimé qu'il convenait de faire tomber des murs - cérémoniels ou autres - dans Jérusalem-Est occupée.
Trump donne suite à sa rhétorique par des actions, et ses conseillers, ses envoyés et ses diplomates choisis accomplissent leur travail.
Hanan Ashrawi, membre du Comité d’organisation de la libération de la Palestine, a décrit à juste titre Friedman et Greenblatt comme participant à une « collusion criminelle » et a appelé la communauté internationale à protéger Jérusalem.
Pourtant, les réactions constantes aux provocations américaine et israélienne ne mènent les Palestiniens nulle part. Le droit international, déjà partial en faveur de la protection d’entités impliquées dans des violations des droits de l'homme, ne suffira pas à protéger les droits palestiniens.
La communauté internationale a déjà privilégié le colonialisme au détriment des droits du peuple palestinien autochtone.
Trump agit sur les fondements posés depuis le plan de partition de 1947 et renforce le mouvement des colons en choisissant des émissaires qui leur sont favorables et en agissant politiquement pour favoriser l'expansion coloniale d'Israël.
Friedman et Greenblatt sont donc responsables de plus que de la chute d'un mur, même si ce bref extrait de la cérémonie a attiré plus d'attention que la diplomatie employée jusqu'à présent, la dernière manifestation en date étant l'atelier "Peace to Prosperity" à Bahreïn.
La reconnaissance unilatérale antérieure de Trump de Jérusalem en tant que capitale d'Israël est appuyée par des actions qui, même si elles ne sont pas dignes d'une diplomatie, mettent en exergue les objectifs consistant à s'entendre autant que possible avec Israël et le mouvement des colons, dont dépend le projet colonial.
En plus d'être un défenseur de l'expansion des colonies, Friedman est également un donateur pour les entreprises coloniales. Ses commentaires le mois dernier légitimant l'annexion de certaines parties de la Cisjordanie occupée, affirmant qu'Israël est « autorisé » à agir de la sorte, ont été condamnés par le secrétaire général de l'OLP, Saeb Erekat, qui a déclaré que la promotion de l'annexion par les Etats-Unis signifiait « la complicité avec les plans coloniaux d'Israël. »
Dimanche dernier, dans la ligne de ce qu'Israël et Trump souhaitent réaliser, Friedman et Greenblatt ont communiqué que Jérusalem est un site qui accueillera les projets américano-israéliens d'unification et de judaïsation, par l'appropriation d'artefacts et de découvertes historiques.
L'unification, cependant, est un processus qui nécessite le démantèlement du consensus actuel sur Jérusalem-Est, ainsi que la dépossession en cours des Palestiniens de la ville.
Selon les résolutions de l'ONU, Jérusalem-Est devrait être la capitale d'un futur État palestinien dans le cadre du compromis de deux États. Cela reste l'une des questions litigieuses, encore plus que l'existence d'Israël, qui a été normalisée afin de cultiver l'impunité pour les violations des droits de l'homme commises contre les Palestiniens.
En réalité, le compromis de deux États est obsolète, même s'il reste une référence pour les diplomates au sein de la communauté internationale.
Sous Trump, les États-Unis ont rompu avec le consensus international et cherchent maintenant des moyens pratiques de promouvoir l'unification de Jérusalem dans une perspective coloniale. Les États-Unis savent pertinemment qu'il n'y a pas d'opposition majeure à ses projets ; personne ne réclame l'unification de Jérusalem à partir d'un cadre de mémoire historique palestinien.
Le compromis de deux États étant le seul point de référence établissant des liens entre l'Autorité palestinienne et la communauté internationale, il est fort probable que, même si les actions des États-Unis constituent une violation flagrante du droit international, le statut de Jérusalem sera déterminé par Israël et les Etats-Unis.
Deux jours avant le spectacle dans les tunnels creusés sous la ville de Silwan, le Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien (CERIPP) a organisé une conférence de deux jours sur le thème "Préserver le caractère culturel et religieux de Jérusalem".
Parmi les questions abordées, il était à l'ordre du jour de « veiller à ce que les habitants palestiniens jouissent de leurs droits inaliénables ».
Cet événement peu médiatisé en dit long sur la manière dont la communauté internationale et ses institutions se placent en tant que subalternes du partenariat américano-israélien.
Cela prouve également que, tandis que la communauté internationale perd son temps à parler de l'impunité totale d'Israël, les États-Unis et Israël élaborent des moyens d'amener ladite communauté internationale à normaliser leurs violations des droits de l'homme et leurs entreprises coloniales.
Friedman et Greenblatt ont agi de manière odieuse, dépassant peut-être même les attentes concernant le chemin parcouru par les États-Unis pour montrer leur soutien manifeste à Israël et leur mépris total pour les droits, l'histoire et la mémoire des Palestiniens.
Cependant, il est nécessaire d'aller au-delà des scènes de maniement du marteau dans le tunnel afin d'éviter de promouvoir le spectacle qui a servi à montrer la dissociation généralisée de la situation désespérée des Palestiniens.
Des décennies après la Nakba, les institutions internationales sont encore en train de discuter de la manière dont on peut garantir aux Palestiniens leurs « droits inaliénables ».
L’administration Trump a besoin de cette approche stagnante pour aider l’entreprise coloniale à réussir son expansion pour le « grand Israël ».
(1) Voir les images de l’inauguration par les occupants sionistes et leurs alliés sur le site du Wadi Hilweh Information Center
Source : Hamas.ps
Traduction : MR pour ISM
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