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ISM France - Archives 2001-2021

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Israël -

L’enthousiasme israélien pour l’initiative saoudienne

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Soudain, six ans après son lancement, les principales directions israéliennes se pressent pour saluer l’initiative de paix saoudienne. Voilà qu’Ehud Barak, le ministre de défense, déclare que les dirigeants israéliens étudient cette initiative et réfléchissent sur comment y répondre.
Quant à Shimon Perez, il s’active pour établir des négociations avec le monde arabe dans sa totalité pour arriver à un traité de paix globale.

L’enthousiasme israélien pour l’initiative saoudienne


Le journal Maariv le cite en déclarant que «C’est une erreur de commencer des négociations séparées avec la Syrie et d’autres avec les Palestiniens. Israël doit arrêter de mener des négociations bilatérales, et il doit s’orienter vers un accord de paix régional avec les états arabes et leur ligue».

C’est un changement majeur dans la position israélienne si on se limite aux apparences, car le gouvernement israélien actuel, comme tous les gouvernements précédents, a toujours fait traîner sa réponse à cette initiative, et demandé aux Arabes de normaliser en premier avant toute discussion sérieuse à ce sujet.

Il est même allé bien plus loin en demandant aux chefs arabes, dont particulièrement le roi Abdullah Ben Abdel-Aziz, de venir en Jérusalem occupée pour présenter l’initiative devant la Knesset (le parlement israélien), à l’instar du feu président Mohammad Anwar Assadat.

Nous sommes maintenant devant une nouvelle recette de cuisine pour laquelle on se prépare d’une manière accélérée, à commencer par la visite qu’effectuera le président israélien Shimon Pérez à Sharm Al-Sheikh ce jeudi (23 octobre, Ndt) pour rencontrer son homologue égyptien Hosni Moubarak « le parrain de la paix » et le chef de l’axe des états arabes modérés, qui contient son pays en plus des six états du Golfe et la Jordanie.

La question posée est de savoir quelles sont les raisons de ce soudain enthousiasme israélien pour une initiative de paix saoudienne, qui n’a rencontré que mépris et tergiversation de la part d’Israël pendant les six dernières années, en plus des nouvelles constructions de colonies en Cisjordanie et aux alentours de Jérusalem occupée, et puis du culot pour installer une synagogue juive aux esplanades d’al-Haram al-Sharif.

***

Il y a plusieurs raisons, certaines sont dictées par les changements internationaux et régionaux du moment, et quelques autres, et elles sont les plus importantes, concernent des ambitions stratégiques futures. Commençons par la première partie de ces raisons :

Premièrement : La direction israélienne est consciente qu’elle est à deux semaines des élections présidentielles et législatives à mi-parcours aux Etats-Unis. Un nouveau président sera élu, et il y a de forte chance que ce soit Barack Obama, ce qui signifie la fin de l’époque des néoconservateurs, dont la plupart sont des juifs pro-israéliens, et le départ de l’administration du président George Bush qui est considéré comme le président EU le plus proche de l’état hébreu et le plus docile pour servir ses intérêts.

Deuxièmement : La crise financière actuelle a affaibli le lobby pro-israélien qui utilise l’argent comme une arme politique pour dominer les gouvernements occidentaux. De plus, le capitalisme occidental dans sa forme actuelle a subi un coup fracassant, et cette crise a créé une faille qui s’élargit jour après jour entre les Etats-Unis, déjà soupçonnés sur les conditions de leur naissance, et les états occidentaux et européens.

Troisièmement : Il y a une certitude qui prédomine dans différents milieux EU et européens que la guerre sur le terrorisme lancée par Washington contre l’Irak et l’Afghanistan durant les sept années passées, et qui a coûté à la trésorerie EU une somme de 750 milliards de dollars jusqu’à maintenant, est l’une des plus importantes raisons qui ont conduit à l’écroulement économique du monde capitaliste, en faveur de nouvelles grandes puissances non occidentales qui émergent comme la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil.

Quatrièmement : Israël est conscient que les guerres EU en Afghanistan et en Irak sont complètement perdantes, et vont conduire à une grande défaite de l’Occident, à l’instar de la défaite de l’Union Soviétique il y a une vingtaine d’années. Cette défaite imminente entrainera un changement dans les équations stratégiques internationales, car elle apporte la preuve sur la force de la guerre de guérilla et des milices armées, et de leur capacité à faire la différence sur le terrain, et sur l’échec des armées classiques à atteindre ce même objectif en face de cette force.

Cinquièmement : La guerre de juillet 2006 au Liban a démontré la fausseté de la théorie de la supériorité militaire israélienne devant des forces de foi non classiques, et la fin du rôle de la suprématie aérienne pour gagner la guerre, devant l’évolution qualitative des capacités des missiles en face.

Sixièmement : Les Arabes, notamment ceux du Golfe, possèdent des cartes stratégiques majeures qui auront une influence internationale si elles sont utilisées intelligemment. Les plus importantes sont l’arme du pétrole qui regagne son efficacité précédente, et la possession des fortunes immenses des recettes pétrolières, actuellement estimées à des milliards de dollars par an, et ceci sans prendre en compte les autres revenus du gaz, des minéraux et des industries et produits agricoles.

***

Avec notre respect et considération de l’importance des toutes ces raisons et facteurs précédents, et de leur rôle à induire un changement dans la réflexion israélienne, nous ajoutons une raison qui semble bien plus importante, et qu’on peut résumer en l’existence d’une tendance arabe grandissante pour former une coalition arabe-sunnite en face de l’Iran chiite et d’autres membres dans son axe comme la Syrie, le Hezbollah et le Hamas.

L’objectif de cette coalition serait de neutraliser l’Iran sur le plan nucléaire, que ce soit en créant un front militaire uni pour détruire ses programmes ambitieux à ce sujet, ou bien en encourageant des mouvements de rébellion intérieurs par les minorités sunnites, arabes et non perses en général, et ceci en s’inspirant de l’expérience de l’encerclement de l’Irak avant que son régime arabe ne soit balayé.

Il y a plusieurs indicateurs qui soutiennent cette réflexion et qui commencent à émerger tout récemment. Nous pouvons les résumer en ces points :

Premièrement : L’appel du ministre des affaires étrangère du Bahreïn, le cheikh Khaled Âl Khalifah, à créer une coalition régionale incluant Israël, la Turquie, l’Iran et les Arabes, pour traiter les problèmes courants de la région, à l’instar de l’Union Européenne.

Deuxièmement : Pour la première fois une rencontre publique israélo-saoudien a eu lieu à Oxford en Angleterre à l’invitation du groupe d’Oxford. La partie israélienne a été représentée par le général Dan Rothschild, l’ex-coordinateur de la colonisation en Cisjordanie , et du côté saoudien a participé le prince Turki al-Fayçal, l’ex-directeur des services des renseignements saoudiens et l’ex-ambassadeur de son pays à Washington et à Londres.

Troisièmement : La multiplication des avis religieux exprimés par des honorables savants sunnites comme le cheik Youssof al-Qaradawi, Salman al-Odeh, et Mohsen al-Awwaji et bien d’autres, qui mettent en garde contre l’école chiite et l’accusent de prosélytisme envers les sunnites dans les pays arabes. Ceci en plus de centaines de millions de dollars investis pour financer des chaînes de télévisions, des journaux et des sites électroniques pour mobiliser les sunnites contre l’Iran et les chiites.

***

Ce que nous voulons dire c’est que l’administration américaine a clairement dit à ses alliés arabes qu’elle ne ferait pas la guerre contre l’Iran pour les débarrasser de son régime et de ses programmes nucléaires, comme elle l’a fait contre Saddam Hussein en Irak et contre le gouvernement des Talibans en Afghanistan, et qu’ils (les Arabes, Ndt) doivent compter sur Israël pour atteindre cet objectif, étant donné que l’Iran est l’ennemi des deux camps.

L’entrée dans une coalition avec Israël contre un état musulman a besoin d’une «feuille de figuier», exactement de la même manière que lorsque les Arabes sont entrés en coalition militaire avec les Etats-Unis contre l’Irak, l’état arabe musulman.

Cette feuille de figuier est l’accomplissement de la paix entre les Arabes et les Israéliens. C’est ce qu’a fait George Bush père avant sa destruction de l’Irak en 1991 sous le titre de «libération du Koweït», et c’est ce qu’a refait son fils en promettant de créer un état palestinien avant 2005 afin de terminer ce qu’avait commencé son père, c.-à-d. l’occupation de l’Irak.

Nous sommes devant une nouvelle tromperie qui pourrait s’avérer bien plus dangereuse que toutes les précédentes tromperies. Car elle va fonder un nouveau pacte dont Israël sera le président, un pacte qui va diviser les Musulmans sur des critères sectaires, et qui va allumer une guerre entre les Arabes et le Iraniens.

Une guerre qui pourrait finir par anéantir ou affaiblir les deux côtés, ce qui aboutirait au renforcement d’Israël et à sa domination complète sur la région, après qu’il ait compris que l’Occident commençait à se rendre compte quelle lourde charge cet état représentait pour lui, sur tous les plans sécuritaire, politique et économique.



NOTE DU TRADUCTEUR :

Il y a quelques semaines, dans le numéro de septembre/octobre, le magazine bimensuel Foreign Affairs a publié un article intitulé « A war to start all wars » de Shlomo Ben-Ami, où il défendait l’idée qu’Israël devait démanteler ses colonies et se retirer aux frontières de 4 juin 1967. (Une traduction française et disponible à cette adresse).

Dans cet article, l’auteur revient sur un nouveau livre «1948: A History of the First Arab-Israëli War» de l’historien israélien Benny Morris, pour nous montrer qu’en 1948 on a créé un état affamé de terres au mépris de la population palestinienne autochtone. Il y montre que l’idée d’un transfert forcé (un euphémisme d’expulsion comme il précise) a été adopté en 1937 par la commission Peel du gouvernement britannique sur la Palestine, et mise en œuvre par les forces juives durant les combats de 1948.

Cette politique est parfaitement résumée par la déclaration de Ben Gourion en 1948 : «Il ne reste qu’un seul rôle laissé aux Arabes de la terre d’Israël : Fuir». Et c’est ce qu’ils ont fait devant les différents massacres perpétrés sur des ordres comme celui de Moshe Carmel, le commandant israélien du front nord : «d’attaquer afin de conquérir, de tuer parmi les hommes, de détruire et de brûler les villages».

Shlomo Ben-Ami souligne que cet appétit pour toujours plus de terres et de nouvelles colonies, pour apporter plus de sécurité à Israël, ne tient plus aujourd’hui avec les missiles de longue portée, et que par conséquent la tradition sioniste de soutien à la colonisation doit être remise en question pour vivre comme un état normal dans ses frontières légitimes et d’avoir de bonnes relations avec la communauté internationale.

Shlomo Ben-Ami évoque alors deux solutions pour arriver à la paix : Deux états sur les frontières de 4 juin 1967, ou un seul état avec une coexistence judéo-arabe dans une seule communauté binationale sur les terres de la Palestine historique.

Il botte en touche l’état binational car, comme il le précise, Israël, avec sa puissance supérieure, n’acceptera jamais de céder le pouvoir à une majorité arabe palestinienne, comme ce fut le cas avec les Blancs de l’Afrique du Sud qui l’ont finalement fait en faveur d’une majorité noire en 1994.

En revanche, il déclare que le plan de paix proposé par la Ligue Arabe en 2002 montre que le monde arabe reconnaît la légitimité d’Israël dans ses frontière de 1967, et qu’Israël doit saisir cette chance unique pour négocier des accord de paix globale sur ces frontières, qui sont essentiellement les mêmes frontières établies au lendemain de la victoire israélienne écrasante de 1948.

Shlomo Ben-Ami n’est pas simplement un historien ou un intellectuel, mais il fut le ministre de la sécurité intérieure de l’état d’Israël dans le gouvernement d’Ehud Barak entre 1999 et 2001.

Il a aussi occupé la fonction du ministre des affaires étrangères entre 200 et 2001. En tant que ministre de la sécurité intérieure, il était responsable de la police et de la répression exercée contre les Arabes palestiniens pendant l’intifada d’Al-Aqsa. A ce titre il fut officiellement tenu responsable, par une commission d’enquête israélienne, de la tuerie de 12 Arabes israéliens et d’un Palestinien en octobre 2000.

Pourquoi alors Shlomo Ben-Ami devient subitement un homme de paix, et il appelle de ses vœux l’existence de deux états, juif et palestinien, sur les frontières de 4 juin 1967 ?

Une partie de la réponse est donnée dans son article. Shlomo Ben-Ami a peur, comme il l’explique, qu’après l’échec du processus d’Oslo, l’intifada d’Al-Aqsa et la mort d’Arafat en 2004, le nationalisme laïc dans les territoires palestiniens et dans le monde arabe soit aujourd’hui en déclin au profit d e ce qu’il appelle le fondamentalisme musulman. Il constate que la loyauté à l’état et à la nation est en train d’être supplantée par la loyauté à l’islam et que les Palestiniens s’éloignent du nationalisme pragmatique d’Arafat pour revenir à des positions révolutionnaires sur des questions comme le retour des réfugiés et la libération de la Palestine d’avant la partition.

Par conséquent, pour Shlomo Ben-Ami, tout retard dans les négociations pour mettre en place la solution de deux Etats sur les frontières du 4 juin 1967, impliquerait le renforcement de l’autre solution inacceptable d’un seul Etat binational, ou pire encore, à ses yeux, de se retrouver avec un Etat du Hamas aux frontières d’Israël.

Cependant, Shlomo Ben-Ami ne va pas jusqu'au bout dans la réflexion sur les deux États. Alors imaginons que cette solution devienne réalité. D'un coté Israël, un Etat juif sur les frontières du 4 juin 1967, et de l'autre coté la Palestine, un État arabe sur 22% des terres qui restent de la Palestine historique. Or dans cet Israël, environ 20% de la population est aujourd'hui formé de citoyens arabes israéliens. Mais les Arabes, tout le monde le sait, font beaucoup d'enfants.

Que fera alors l'Etat d'Israël si, dans 20, 30 ou 40 ans, ses citoyens arabes deviennent une majorité ? Que propose Shlomo Ben-Ami pour empêcher que ce scénario catastrophe, car on revient à l'Etat binational, ne se réalise ?

Cette motivation pour la solution des deux Etats qui était proposée par la ligue arabe en 2002, a-t-elle d’autres raisons ? Voici pour mieux comprendre l’analyse intéressante d’Abdul-Bari Atwan, le rédacteur en chef du journal Al-Quds Al-Arabi.

Source : http://www.alquds.co.uk/

Traduction : Iyad Abbara

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