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Gaza - 25 janvier 2009
Par Nicolas Lalande
Aujourd’hui, nos quotidiens nationaux se font plus silencieux sur Gaza et ses décombres. L’esthétique des images qui nous ont été transmises depuis presqu’un mois laisse place un drôle de silence, ou plutôt au vacarme assourdissant de l’investiture Obama.
Dimanche 18 janvier, invités par le criminel de guerre Olmert à Jérusalem, N. Sarkozy et J.L. Zapatero, chef du gouvernement espagnol. Pas trop effondrés par les 1300 morts de Gaza, semble-t-il.
Le bruit des applaudissements pour celui en qui tout le monde fonde un espoir inconsidéré couvre désormais celui des pleurs des mères et des enfants de Gaza. Aujourd’hui les armes se taisent, mais la fabrique de l’oubli, elle, se met en branle.
Comme en 2006, après l’épisode libanais, il faudra probablement quelques jours seulement pour que la chape de plomb, durcie par des années de propagande, ne s’abatte une nouvelle fois sur cette terre et sur les malheurs de ces habitants.
Comme en 2006 où on a bien vite relégué dans les oubliettes de l’histoire, les massacres de la ville de Cana, on ne parlera plus de tous ceux qui sont morts si injustement dans les tombes que l’armée israélienne leur avait creusées. Beit Zeitoun où une maison a été bombardée après que "Tsahal" ait elle-même conseillé à ses habitants de s’y réfugier ; l’école de l’UNRWA, elle aussi, pilonnée alors que femmes, enfants et personnes âgées y trouvaient refuge….et combien d’autres exemples d’exactions commises dans l’impunité la plus totale pour cette seule campagne de Gaza. Cette usine a tout oublier, a déjà commencé son travail de sape ; des missiles contre la mémoire commencent à fuser de toute part.
Le gouvernement israélien commence à recruter des volontaires afin de tisser sur la toile son réseau d’agents destructeurs de souvenirs. L’objectif annoncé : lutter contre toutes les idées ou écrits visant à nuire à l’image de l’Etat d’Israël. Quand on connaît l’importance des moyens que cet Etat est capable de mettre en œuvre pour mener une campagne de propagande, on peut être certain qu’il y parviendra sans mal. Des plateaux de télévision sont déjà squattés par de pseudo spécialistes, historien du dimanche et journalistes de comptoirs vomissant tous leur petite leçon bien apprise d’histoire officielle.
Et puis, il y a la crème de la République, représentée par notre vénéré Bernard Henry Levy qui n’hésite pas à dégainer l’arme si méprisable de la suspicion antisémite pour balayer d’un revers de texte la mobilisation en France comme à l’étranger contre cette guerre . Ne doutons pas un seul instant qu’un seul texte de celui qui se prétend l’ami de peuples, a bien plus de poids auprès de médias, que n’importe quelle preuve intangible mettant en cause l’Etat d’Israël. Alors quand il écrit, tout le monde se tait pour écouter le grand sage de la République. Ses missiles si sophistiqués, bourrés des dernières technologies de la propagande pro-israélienne, sont imparables et font mouche presque tout le temps. Ils creusent plus profondément encore l’abîme mémoriel dans lequel sont plongés les dizaines de milliers de femmes, d’enfants et de vieillards morts sur leur terre, sous les obus de Tsahal, coupables d’être Palestiniens.
Au sortir de cette usine quel produit aurons-nous ? Que vont retenir de ces événements les livres d’histoire de nos chères têtes blondes ? Il ne fait guère de doutes que ce mois de ravages et de crimes sera résumé en quelques lignes tout au plus, comme le sont aujourd’hui encore les massacres de Sabra et Chatila.
Quelques lignes résumant l’opération « plomb durci », une vaste campagne militaire en réponse aux attaques meurtrières du Hamas sur les villes du Sud d’Israël… Nous aurons probablement quelques chiffres reflétant, avec leur froideur habituelle, le nombre de victimes et le montant des dégâts collatéraux. Il y aura sûrement des références aux gesticulations diplomatiques stériles d’une Europe incapable de juguler la fureur militaire d’un pays avec qui elle vient de resserrer officiellement ses relations. Tout cela est pourtant si loin de l’horreur, si loin de la réalité vécue par ce million de Palestiniens parqués comme des animaux sur un territoire d’où ils ne peuvent fuir.
Pour qu’il y ait un après Gaza et que la population palestinienne ne soit pas de nouveau laissée seule avec son désespoir, nous nous devons d’inscrire la mobilisation de ces 3 dernières semaines, dans le temps. Les manifestations monstres qui ont eu lieu ne doivent pas être un coup d’épée dans l’eau. Face à l’indifférence qui commence à poindre, à la propagande politico-médiatique qui n’a d’autres objectifs que de faire table rase du passé, cette mobilisation doit servir à construire une mémoire qui ne permettra plus aux dirigeants israéliens de bénéficier d’autant d’impunité. Lors du conflit qui enflamma les Balkans, certains élus décidèrent de renommer des rues ou places de leur ville en souvenir des victimes du nettoyage ethnique. Pourquoi pas en faire autant pour les femmes, les enfants et tous les innocents de la Bande de Gaza ?
Mettons en place des centres de ressources virtuels recensant et centralisant témoignages, chiffres et autres données afin de mettre en lumière la vérité de ces 3 semaines de massacres délibérés.
Parce que nous ne devons plus rien attendre ni espérer des pays arabes étouffant leur opinion publique et attendant comme des loups affamés le partage de la dépouille, il est urgent de ne pas laisser la torpeur reprendre pied dans nos esprits.
Pour les victimes gazaouies, la mémoire et l’histoire s’écrivent maintenant…veillons ensemble à ce qu’elle ne soit pas une nouvelle fois broyée par les rouleaux compresseurs de la Fabrique de l’oubli….
Source : El Kalam
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