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Gaza - 30 décembre 2006
Par Ulrike Putz
L'Occident qualifie le Hamas d'organisation terroriste, mais dans la Bande de Gaza, l'organisation Islamiste est largement respectée pour son aide aux familles dans le besoin.
Les groupes d'aide internationale font également l'éloge du Hamas comme étant exempte de corruption.
"En fait, toutes les études ont conclu que le Hamas fonctionne sans trace de corruption. Ceci lui a permis de gagner le respect de la population au cours des années."
Etidal Sinati a sombré dans la pauvreté une nuit de mars 2003.
Les hélicoptères israéliens menaient des attaques aériennes au-dessus du camp de réfugiés de Jabalia, au nord de Gaza City et le mari d'Etidal, Mohamed, et un groupe d'autres hommes du quartier sont sortis pour évaluer les dégâts.
Mais les Israéliens n'étaient pas partis ; un hélicoptère de combat est revenu et a tiré sur les spectateurs. Le mari d'Etidal a été tué, la laissant avec sept enfants et personne pour prendre soin d'eux.
Durant la nuit, les Sinati sont devenus un cas d'assistance sociale -- et des fidèles du Hamas. Le groupe islamiste radical a pris sous son aile la famille sans ressources.
"Mon mari n'était pas un partisan du Hamas. En fait, il était pour le Fatah", dit Sinati, maintenant veuve. Il fait froid dans son deux-pièces ; un oncle attardé mental est assis dans un coin. Il rit de temps en temps tout seul et met sa couverture de laine sur sa tête. "Mais sans le Hamas, nous n'aurions pas survécu, et même avec leur soutie, ça été difficile".
La pension officielle pour l'épouse d'un "martyr" -- un Palestinien tué par l'armée israélienne -- est de 100 Euros tous les trois mois. Pour une famille nombreuse vivant à Gaza, c'est suffisant pour un bon repas de fruits de mer, mais cela ne suffit pas pour vivre.
"Donc le Hamas a adopté mes enfants", dit Etidal Sinati. La veuve reçoit 15 Euros par mois pour chaque enfant, et tous ses enfants vont gratuitement dans une école gérée par le Hamas.
"J'ai voté pour le croissant aux élections de janvier", dit Etidal qui est illettrée. Le croissant de lune est le symbole du Hamas.
Un parti pour les pauvres
À première vue, le Hamas, un parti qui s'occupe des pauvres avec son argent et des dons, semble jouer un air bien connu sur l'instrument du populisme.
D'un autre côté, toutes les principales organisations d'aide internationale chantent les éloges du groupe Islamiste quand il s'agit de la qualité de son travail.
"Dans le rapport de 2003 d'International Crisis Group, la plus importante ONG américaine a donné la note de parfait au travail du Hamas ; ils ne pouvaient pas accomplir un meilleur résultat" dit Helga Baumgarten, un conférencier à l'université de Birzeit à Ramallah.
Baumgarten pense que le succès du parti, qui est issu des Frères Musulmans radicaux en 1987, est basé sur deux facteurs : le travail fortement professionnel des agences d'aide sociale du groupe et l'intégrité souvent-citée du Hamas.
"En fait, toutes les études ont conclu que le Hamas fonctionne sans trace de corruption", dit Baumgarten. "Ceci lui a permis de gagner le respect de la population au cours des années."
Néanmoins, le Hamas n'est pas un parti modéré. Il se voit comme l'avant-garde de la résistance palestinienne contre l'occupation israélienne.
Après son étonnante victoire électorale en janvier, l'organisation a refusé de renoncer au conflit armé ou de reconnaire Israël.
Son utilisation répétée des attaques-suicides contre les citoyens israéliens depuis sa création a également contribué au fait que le Hamas soit classé comme organisation terroriste en Occident -- en dépit de ses activités caritatives au jour le jour.
Mais il est difficile de dire si le Hamas utilise délibérément son travail caritatif pour générer de la sympathie parmi la population. "L'engagement social n'est pas un moyen pour arriver à ses fins ; Je n'interpréterais pas cela comme purement de l'exploitation", dit Baumgarten. Et même si cela était, des partis dans le monde entier n'agissent pas différemment.
Construire sur la Foi
Al-Mujamma al-Islami, ou le Centre Islamique, au sud-est de Gaza City est la preuve indéniable que le Hamas construit littéralement sur la foi.
La mosquée au rez-de-chaussée du Centre nouvellement construit a fonctionné pendant des semaines, alors que les employés du centre s'asseyaient entre les boîtes au quatrième étage au-dessus de la galerie des femmes dans la salle de prière.
Le centre, fondé en 1973 par Cheik Ahmed Yassin ce qui fait de lui le centre d'aide le plus ancien de Gaza, s'était trop développé pour son ancien local. Ses 150 employés ont déménagé dans leurs nouveaux bureaux le week-end.
Au début, l'homme en chaise roulante, Yassine, qui a fondé le Hamas en 1987 et a été tué dans un assassinat ciblé aux missiles par les Israéliens en 2004, contrôlait les financements de l'organisation depuis la salle de séjour de sa modeste maison à quelques rues d'ici.
Aujourd'hui le centre s'est transformé en une institution caritative géante à Gaza, faisant fonctionner 16 jardins d'enfants, 30 écoles Coraniques, et fournissant à des milliers de familles de l'argent, de la nourriture et des vêtements. Le centre paye également un soutien d'enfant à 5.000 orphelins.
Etidal Sinati reçoit ici le paiement des aides pour ses sept enfants.
Nidal Shabana, le directeur du centre, gère actuellement un budget annuel d'environ 1 million de dollars.
En dépit de sa position, Shabana reste un homme modeste, bien qu'un soupçon de fierté pour son travail filtre quand il parle de l'équipe Islamique de ping-pong qui a récemment gagné les championnats de Gaza sous sa direction. "La modestie et l'honnêteté sont des principes qui sont particulièrement appréciés dans l'Islam", dit-il.
Quand on lui demande son avis sur la force grandissante des partis Islamistes dans le monde Arabe -- un phénomène considéré avec une grande inquiétude en Occident -- Shabana devient circonspect.
Le comportement des chefs Islamiques s'avère justement être exemplaire, dit-il, en ajoutant qu'ils ont les mains propres. D'une façon indirecte, Shabana explique qu'il considère que les chefs politiques dans les états Arabes voisins sont corrompus et moralement faibles.
Depuis les années 70, l'échec des régimes autoritaires dans le monde Arabe -- dominés par des familles dirigeantes attentives à garnir leurs propres portefeuilles et des bureaucraties gonflées et inefficaces -- a mené les groupes Islamistes à combler un vide social et politique dans les Territoires Palestiniens, au Liban, en Egypte et en Jordanie.
Le fait que le Hamas n'ait pas reçu de reconnaissance comme seul parti au pouvoir dans les Territoires Palestiniens est nullement une bizarrerie locale. La résistance à la recherche du pouvoir du Hezbollah à Beyrouth est similaire.
Ces organisations fondamentalistes religieuses sont une menace pour les régimes établis de la région ; il n'y a pas qu'Israël et ses alliés occidentaux qui soient intéressés par la maitrise des Islamistes.
Etidal Sitani se rend également compte que l'organisation qui a jeté à sa famille une bouée de sauvetage fait face à la pression à l'intérieur des Territoires Palestiniens et de l'étranger. Mais cela n'a fait que renforcer le soutien de Sitani à ses bienfaiteurs.
Son fils plus âgé a récemment essayé l'uniforme de son père. Mais tandis que le père était un réserviste dans l'une des forces de la sécurité du mouvement Fatah, le fils projette de se battre pour le Hamas.
"Je ne lui permettrai pas encore de rejoindre les milices. Après tout, il n'a que 15 ans", dit la mère. "Il pourra le faire quand il aura 20 ans".
Source : http://www.spiegel.de/
Traduction : MG pour ISM
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