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Palestine occupée -

Réconciliation palestinienne : une histoire de documents

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Publié le lundi 28 avril 2014

La semaine dernière, des représentants de factions rivales palestiniennes ont annoncé un accord de réconciliation nationale. Ce n'est pas la première fois qu'une telle annonce est faite. Depuis près d'une décennie, divers accords promettant la fin de la division entre le Hamas et le Fatah sont apparus et repartis, laissant derrière eux des espoirs déçus et une apathie larvée. Sera-ce différent cette fois ?

Réconciliation palestinienne : une histoire de documents

Février 2011, Ramallah - Manifestation de masse pour exiger la fin de la scission entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie
La mort subite de Yasser Arafat le 11 novembre 2004 a marqué le début d'un conflit violent entre deux grandes factions politiques : le mouvement politique islamique connu sous le nom de Hamas et la vieille garde du Fatah, composées d'administrateurs de l'Autorité palestinienne (AP) basée en Cisjordanie .

La lutte pour le pouvoir dans la période post-Arafat est comparable à une guerre de tranchées. Chaque faction se cramponne à sa position, incapable de dominer l'autre, et sans être influencée par les nombreux défis internes qui ont émergés périodiquement.

Depuis sa victoire aux élections démocratiques de 2006, le Hamas a survécu à une tentative de coup d'Etat, à une suspension de l'aide monétaire arabe et internationale, à de multiplies invasions militaires israéliennes, à un renforcement du blocus égypto-israélien, à la montée et à la chute rapide des Frères musulmans égyptiens, pour ne citer que quelques événements importants. Pourtant, le Hamas gouverne toujours la Bande de Gaza assiégée.

De l'autre côté, le Fatah, sous couvert de l'Autorité palestinienne, a survécu à une série de raids militaires israéliens, à l'éruption de la colonisation sioniste, à la déconsidération grandissante, au déclin de sa légitimité et à un mécontentement palestinien latent après une série de scandales, de corruption généralisée et de capitulations. Pourtant, le Fatah garde le contrôle des quelques terres qu'il gouverne dans une Cisjordanie en diminution permanente.

Entre les deux il y a les Palestiniens - pris au piège à Gaza, sous occupation dans les enclaves de Cisjordanie , et les réfugiés dans la région et à l'étranger. Ils sont paralysés par la fracture, observant impuissants les tentatives incessantes de réconciliation nationale échouer les unes après les autres.

Afin de vraiment comprendre les chances de succès de ce dernier accord d'unité nationale annoncé par le Hamas et l'OLP le 24 avril 2014, il faut entreprendre un voyage historique qui examine l'évolution de la lutte Hamas-AP, du point de vue de documents et accords produits tout au long de cette sombre décennie.

Le moment et le lieu de ces accords ne reflètent pas seulement le déplacement des dynamiques politiques de pouvoir parmi les factions palestiniennes, mais ils mettent même en lumière les facteurs régionaux en jeu.


Accord du Caire (mars 2005)

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Le texte des Accords du Caire, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


En mars 2005, 13 factions palestiniennes, rejointes par le ministre syrien des Affaires étrangères Wali Mouallem, se sont réunies au Caire. La rencontre a eu lieu plus d'un mois après que le sommet de Sharm al-Sheikh entre le président de l'AP Mahmoud Abbas et le Premier ministre israélien de l'époque Ariel Sharon a proclamé la fin de la Deuxième Intifada.

Les Palestiniens portaient les stigmates de la mort et de la dévastation pendant le soulèvement contre l'occupation israélienne, et les Israéliens renforçaient leur colonisation et leur occupation en construisant un mur qui serpentait en Cisjordanie , s'appropriant davantage de ressources en terres et en eau, parmi toute une série d'actions oppressives. En plus de l'intensification de l'oppression israélienne, la mort de Yasser Arafat en novembre 2004 a provoqué un énorme vide au niveau du pouvoir qui a entraîné des affrontements entre les différentes factions palestiniennes.

Au cœur du conflit intra-palestinien se trouvait l'attrait croissant de la population palestinienne envers le Hamas. Il avait acquis une réputation favorable en tant que mouvement de contestation de l'occupation israélienne et était farouchement opposé aux accords d'Oslo, généralement considérés comme catastrophiques pour les droits palestiniens. Le Hamas était aussi vu comme une alternative viable au Fatah, qui était noyé dans des allégations d'inefficacité et de corruption massive parmi les cadres supérieurs.

Naturellement, le mouvement islamiste est devenu un rival puissant à la main-mise continue du Fatah sur la vie politique palestinienne, en particulier au sein de l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), et il a peu à peu exigé d'avoir son mot à dire dans le processus décisionnel. Ce qui a conduit à l'Accord du Caire de 2005.

Le vocabulaire des articles de l'Accord du Caire de 2005 reflètait le désir du Hamas d'ouvrir l'OLP aux autres factions, comme on le voit dans les articles 4 et 5 qui réclamaient une réforme de l'appareil politique de manière à inclure toutes les factions palestiniennes avant les élections parlementaires prévues pour l'été.

Plus encore, il réaffirmait le langage de la résistance, celui qui reste engagé dans le droit à résister et le droit au retour, comme l'indiquait le caractère direct du premier article qui mentionnait l'adhésion aux "constantes palestiniennes".

Il est clair que l'accord du Caire de 2005 n'a pas mis fin aux tensions, mais il a donné un moment de répit aux factions palestiniennes en conflit alors que la Deuxième Intifada tirait à sa fin. L'attention était maintenant tournée vers les élections législatives à venir, et le renforcement des d'armes pour la prochaine bataille.


Le Document des Prisonniers (juin 2006)
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Le texte du Document des Prisonniers, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


Le Document des Prisonniers, annoncé en mai et modifié un mois plus tard, a été rédigé par cinq prisonniers palestiniens incarcérés dans les geôles israéliennes, représentant cinq partis palestiniens : Hamas, Fatah, Jihad islamique, Front populaire de Libération de la Palestine et Front démocratique de Libération de la Palestine.

Quelques mois avant, le Hamas avait gagné les élections législatives et remporté 74 des 132 sièges, mettant fin à des décennies de monopole politique du Fatah. L'un des leaders politiques du Hamas, Ismail Haniyeh, a alors été choisi comme Premier ministre pour former un nouveau gouvernement.

Presque instantanément après l'annonce des résultats des élections, les Etats-Unis, l'Union européenne et leurs alliés ont pris des sanctions contre le nouveau gouvernement. Israël a restreint davantage la mobilité dans les territoires occupés et retenu les recettes fiscales dues à l'Autorité palestinienne, tout en accélérant la construction du mur d'apartheid et des blocs de colonies. Pour Israël et ses alliés occidentaux, le Hamas représentait une organisation "terroriste" qui ne capitulerait pas complètement devant les exigences et les intérêts de l'occupation. Son ascension politique a marqué un recul massif pour Israël et les intérêts occidentaux.

Finalement, les tentatives d'unité se sont effondrées sous le poids de la discorde entre le Hamas et le Fatah, en particulier sur qui commanderait les forces de sécurité.

Peu de temps après les élections, le Hamas avait créé la Force exécutive, une force para-militaire qui était une opposition militaire à la garde présidentielle de l'AP soutenue par l'Occident. Rapidement, Mahmoud Abbas a condamné cette formation, pour des raisons constitutionnelles que le Hamas a balayées.

Dans ce contexte, le Document des Prisonniers tentait d'atténuer l'animosité entre les parties, d'autant que l'agression israélienne atteignait son apogée.

Le document faisait référence à l'Accord du Caire de 2005, considéré comme la base principale de cette unité. Comme l'Accord du Caire, le Document des Prisonniers demandait la réforme et l'extension de l'OLP, ainsi que des autres appareils politiques et sécuritaires. Mais contrairement à l'accord précédent, le Document des Prisonniers appelait également à un front militaire commun pour combattre l'occupation.

De plus, la formulation du Document des Prisonniers prenait grand soin de combler le fossé idéologique entre le Hamas et le Fatah en reconnaissant aux deux le droit de résister et de négocier.

Le sort des milliers de Palestiniens emprisonnés dans les geôles israéliennes constituait la grande préoccupation des auteurs de ce document. Ils exigeaient leur libération immédiate, en plus de l'octroi aux réfugiés palestiniens - qui restaient sans voix - de davantage d'instances dans la prise de décision.

L'appel est finalement tombé dans l'oreille de sourds.


Accord de la Mecque (février 2007)
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Le texte de l'Accord de la Mecque, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


La Déclaration des Prisonniers n'a pas eu beaucoup d'impact, probablement parce qu'elle émanait des prisonniers palestiniens, enfermés dans les prisons israéliennes, incapables d'influencer les forces en présence en Cisjordanie et à Gaza.

Alors que 2006 se terminait, la dispute sur le partage du pouvoir pour décider qui aurait autorité sur la sécurité s'est intensifiée, aggravant les divisions entre les deux groupes politiques.

A mi-décembre, Mahmoud Abbas a appelé à des élections anticipées, une tactique que le Hamas a considérée comme une tentative d'invalidation des résultats électoraux. Les forces de sécurité de l'AP ont réprimé les rassemblements pro-Hamas organisés en Cisjordanie . C'est aussi pendant cette période que des hommes armés du Fatah fidèles à Mohammed Dahlan à Gaza ont tenté d'assassiner Ismail Haniyeh. D'intenses combats ont éclaté dans la Bande de Gaza entre les groupes liés à chaque parti, interrompus par des moments de cessez-le-feu qui s'effritaient aussi vite qu'ils étaient décidés.

Dans le même temps, l'Arabie saoudite a cherché à réaffirmer son pouvoir régional et sa légitimité qui avaient été mis à mal par son soutien à la guerre d'Israël au Liban pendant l'été 2006, et à contrer l'influence financière croissante de l'Iran parmi les groupes de la résistance palestinienne. Les principaux dirigeants palestiniens ont répondu à l'appel au rassemblement de la monarchie saoudienne. Mahmoud Abbas et Mohammed Dahlan, représentants du Fatah, ont rencontré Ismail Haniyeh et Khaled Meshall, pour le Hamas, à la Mecque le 1er février et ont négocié pendant huit jours.

Le résultat fut une promesse de mettre fin à la violence et de mettre immédiatement en place un gouvernement d'union nationale, décrit en détail dans 8 sous-sections qui ont été publiées après l'annonce de l'accord.

Les ministères seraient répartis entre le Hamas et le Fatah.

Le Hamas détiendrait les sièges de Premier ministre, les ministères de l'Education et de l'Enseignement supérieur, du Waqf islamique, du Travail, du Gouvernement local, de la Jeunesse et des Sports, de la Justice, des Télécommunications, de l'Economie et un siège supplémentaire de ministre d'Etat. Il aurait également la possibilité de nommer des personnalités indépendantes aux ministères de l'Intérieur, du Plan.

De l'autre côté, le Fatah garderait le pouvoir exécutif, le siège de vice-Premier ministre et les ministères de la Santé, des Affaires sociales, des Travaux publics, des Transports, de l'Agriculture, des Affaires des Prisonniers et des Affaires étrangères.

La résistance et les négociations selon les dispositions des traités internationaux signés antérieurement furent reconnues comme moyens légitimes pour réaliser les droits palestiniens, et les documents de réconciliation nationale précédents furent réaffirmés, ainsi que les réformes promises au sein du Conseil législatif palestinien dans les domaines sécuritaires et judiciaires. Au sujet de la sécurité, point de discorde majeur, l'accord suggérait vaguement la formation d'un conseil national de sécurité qui ne ferait que suivre les décisions de la classe politique, reportant la décision finale après la mise en place d'un gouvernement d'unité nationale.

Le 17 mars, un gouvernement d'unité était formé. Il n'a duré que trois mois.


L'Initiative du Yémen (février 2008)
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Le texte de l'Initiative du Yémen, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


En dépit de l'Accord de la Mecque et de la formation d'un gouvernement d'unité, les hostilités ont persisté entre le Hamas et le Fatah sur qui dirigerait les forces de sécurité.

D'après les documents confidentiels ayant fait l'objet de fuite, connus sous le nom de "Palestine Papers", Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne ont travaillé dur avec leurs alliés locaux tels que l'Egypte et la Jordanie pour soutenir l'appareil militaire du Fatah dans le but de renverser le Hamas à Gaza. Ils ont dépensé des millions de dollars en équipement et en formation dans un plan dirigé par le coordonnateur de la sécurité des Etats-Unis, le lieutenant-général Keith Dayton. Entretemps, le Hamas a élargi la taille et la portée de sa Force exécutive pour la faire correspondre aux changements militaires du Fatah. Le résultat fut une confrontation et des affrontements toujours en cours entre les deux, en particulier en Cisjordanie où les forces sécuritaires de l'AP répriment les mouvements de résistance armée contre Israël.

Les luttes intestines ont culminé en juin, lors d'un conflit de cinq jours appelé "Bataille de Gaza". Tous les responsables du Hamas et du Fatah, militaires ou politiques, furent la cible d'attaques de représailles tandis que les combats se propageaient dans tout Gaza. Une fois le calme revenu, le Hamas a pris le contrôle total du territoire.

Le gouvernement d'unité national a été dissous, et Abbas a décrété l'état d'urgence, limogeant Haniyeh de son poste de Premier ministre et le remplaçant par Salam Fayyad. En réponse, le Hamas a condamné Abbas et le Fatah pour tentative de renversement du gouvernement. Une scission de fait -politique et physique- a été établie entre Gaza et la Cisjordanie .

A partir de là, les deux partis ont cherché activement à déraciner et à réprimer l'autre par les arrestations, les tortures et les discours hostiles. Des affrontements ont fréquemment éclaté. En plus de ces événements, le blocus israélien sur Gaza a été resserré, et le soutien financier international a cessé d'être versé aux institutions gouvernementales contrôlées par le Hamas, pour n'être versé qu'au Fatah.

Dans cette situation, Ali Saleh, dictateur du Yémen, a sauté dans la mêlée diplomatique. Il a invité les responsables du Hamas et du Fatah dans la capitale yéménite, Sana, où ils ont rapidement écrit un nouvel accord promettant la réconciliation.

L'Initiative du Yémen demandait le retour au statu quo d'avant juin 2007, la formation d'une commission régionale pour superviser les efforts d'unité nationale palestinienne et il réaffirmait l'engagement aux Accords du Caire et à l'Accord de la Mecque. Comme précédemment, le document réitérait la nécessité pour les institutions politiques palestiniennes d'inclure toutes les factions.

Mais comme les tentatives précédentes, aucune des parties n'a fait de véritables efforts pour mettre en œuvre les promesses de l'Initiative yéménite. Des disputes ont éclaté à peine quelques heures après son annonce, le point de discorde se situant dans le quand et comment les négociations entre les factions se produiraient.

Alors que les tensions perduraient, Israël a déclenché une attaque dévastatrice de trois semaines sur Gaza, connue sous le nom de Opération Plomb durci, que le Fatah a subtilement soutenu, à la fin de l'année 2008. Plus de 1400 Palestiniens ont été tués, et une grande partie de l'infrastructure civile a été anéantie.

Pourtant le Hamas a maintenu son contrôle sur le territoire, tandis que le Fatah, avec l'aide d'Israël et le soutien étranger, a renforcé son emprise sur la Cisjordanie .


Les Accords du Caire (mai 2011)
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Le texte des Accords du Caire de 2011, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


Différent de l'Accord de la Mecque, l'Accord du Caire de 2011 fut un document qui décrivait en quelque sorte la structure et la nature de ce qu'entraînerait un gouvernement d'unité nationale.

L'accord, négocié par le renseignement égyptien, a eu lieu dans le contexte de la première année de soulèvements arabes. Il est possible que le Fatah et le Hamas, sentant tous les deux la pression au sein de leurs rangs et en externe, aient été motivés par l'instinct de préservation.

Le Fatah avait perdu un allié majeur en la personne du dictateur égyptien Hosni Moubarak, qui fut chassé du pouvoir après 18 jours de manifestations immenses dans toute l'Egypte. L'organisation chancelait déjà sous le poids de son inutilité, sa légitimité trébuchant sur l'échec complet du processus de paix avec Israël.

Le Hamas pour sa part, ne sachant quelle position prendre vis-à-vis des protestations en Syrie, s'est senti renforcé par la poussée de ses frères spirituels et idéologiques, les Frères musulmans, sur la scène politique égyptienne. Pendant un instant, il a semblé que le blocus paralysant sur Gaza allait prendre fin, et avec lui l'isolement du Hamas.

Les Accords du Caire de 2011, officiellement signés par Abbas et Meshaal le 4 mai, reflétaient cette dynamique à l’œuvre. En particulier le langage du document, au ton plus diplomatique et conciliant, suggérait un changement des positions du Hamas contre le Fatah en acceptant qu'Abbas reste à la tête de l'Etat, en plus d'accepter de travailler dans le cadre juridique mis en place par les Accords d'Oslo qui régissent le fonctionnement de l'OLP dans les territoires palestiniens occupés.

Pourtant, comme le fondateur et rédacteur en chef d'Electronic Intifada, Ali Abunimah, l'a noté dans son analyse des accords, une bonne partie de l'accord était constitué de clauses vagues et laissait complètement tomber les demandes précédentes de réforme de l'OLP. Plus préoccupant, le document lui-même représentait une transformation du Hamas d'un point de vue politique, plus qu'évidente comparée aux problèmes soulignés par les Accords du Caire de 2005.

De même que cet accord n'a jamais mentionné quoique ce soit en ce qui concerne les droits palestiniens, les luttes contre l'occupation ou le droit au retour.

Sans doute l'Accord du Caire de 2011 est-il un retour à la case départ car il met de côté la répartition des ministères et autres appareils de gouvernement, comme indiqué par l'Accord de la Mecque. Les décisions finales pour les sièges ministériels, ainsi que l'administration sécuritaire, étaient simplement laissées à un "consensus" sans beaucoup de précisions.


La Déclaration de Doha (février 2012)
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Le texte de la Déclaration de Doha, en anglais (cliquer ici pour voir la page en format normal)


La Déclaration de Doha a été rédigée au moment où le Qatar était au sommet de sa puissance régionale. Au cours de la première année du soulèvement arabe, le Qatar a joué un jeu agressif. L'émirat a jeté tout son poids en soutien aux Frères musulmans en Egypte alors qu'ils réussissaient à prendre le contrôle des pouvoirs exécutif et législatif du gouvernement égyptien. Doha a également joué un rôle clé dans le renversement du dictateur libyen Mouammar Kadhafi, et était parmi les soutiens croissants aux divers groupes d'opposition combattant le régime syrien.

De plus, le Hamas avait décidé de transférer son bureau politique de Damas à Doha, signe qu'il souhaitait reconsidérer ses alliances et restructurer son idéologie à un moment où le Qatar semblait souverain.

La Déclaration de Doha fut une tentative de re-dynamiser les Accords du Caire de 2011, qui stagnaient en raison d'un désaccord sur la direction du gouvernement de transition. Le Fatah avait avancé la candidature de Salam Fayyad, rapidement refusée par le Hamas, et n'était pas décidé à proposer un autre choix. La répression des membres du Hamas en Cisjordanie et des membres du Fatah à Gaza continuaient, et le projet d'élection semblait inaccessible en raison du fait que la tenue d'élections démocratiques sous l'occupation israélienne, qui restreignait les déplacements et arrêtait les candidats, était impossible.

La Déclaration de Doha n'a rien offert de fondamentalement nouveau autre qu'un engagement du Fatah à libérer les prisonniers Hamas en Cisjordanie , pendant que le Hamas promettait d'autoriser des élections dans la Bande de Gaza.

Mais la déclaration a été entravée par la réticence de chacun à faire le premier pas nécessaire. Un autre accord a été signé au Caire près de quatre mois plus tard, qui voulait promouvoir la Déclaration de Doha en commençant par le processus d'inscription des électeurs dans la Bande de Gaza et planter progressivement les bases d'un gouvernement intérimaire.


L'accord de Gaza (avril 2014)
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Le texte de la Déclaration de Doha, en arabe (cliquer ici pour voir la page en format normal)


Depuis la Déclaration de Doha, et l'Accord du Caire qui a suivi, les tensions entre le Hamas et le Fatah se sont considérablement réduites. Les efforts de réconciliation ont également été motivées par un nouvel assaut israélien sur Gaza, appelé Opération Pilier de Défense, en novembre 2012, et le succè des responsables de l'AP dans le rehaussement du statut de la Palestine à l'ONU en décembre 2012.

Les deux partis ont réduit les mesures répressives et autorisé des rassemblements en soutien à leurs rivaux dans leurs territoires respectifs. Des discussions de réconciliation ont été annoncées, sous le parrainage du président égyptien d'alors Mohammed Morsi.

De nouveaux défis ont surgi au cours de cette année, ce qui a peut-être contraint les parties à prendre les choses au sérieux.

Après une lune de miel avec l'Egypte sous le court règne des Frères musulmans, le Hamas a été confronté à une armée égyptienne particulièrement combative - qui a pris le pouvoir lors d'un coup d'Etat qui a renversé les Frères - et qui menaçait d'attaquer Gaza. Le blocus, toujours en vigueur, est devenu encore plus drastique.

Le Fatah, pour sa part, a été confronté à un gouvernement israélien d'ultra-droite dirigé par Benjamin Netanyahou, qui n'était simplement pas intéressé à faire avancer le processus de paix. Il a considérablement augmenté les colonies en Cisjordanie et a exprimé publiquement sa réticence à l'existence d'un Etat palestinien libre et souverain.

Ces facteurs, avec d'autres, ont abouti à l'annonce d'un nouvel accord de réconciliation nationale le 24 avril 2014, signé à Gaza-ville. Les pourparlers n'ont commencé que deux jours plus tôt, et la rapidité avec laquelle un accord a été conclu a révélé un sentiment de désespoir des deux partis désireux de remporter une victoire plus que nécessaire.

Alors que ce dernier accord recycle les promesses de donner suite aux accords précédents, en particulier les Accords du Caire de 2011, il diffère du reste en précisant la formation d'un "gouvernement de technocrates" d'ici cinq semaines, et la tenue d'élections législatives et de l'exécutif dans six mois, au lieu d'un an, comme indiqué précédemment.

Comme les déclarations antérieures, l'Accord de Gaza renouvelle les appels à une réforme immédiate de l'OLP afin d'inclure le Hamas et ses alliés dans le processus formel de prise de décision, ainsi que la mise en œuvre rapide des autres articles présentés dans les Accords du Caire de 2011.

Dès que l'Accord de Gaza a été annoncé, les Américains l'ont condamné comme "décevant" et "inutile" pour la paix, tandis qu'Israël lançait une série de frappes sur Gaza. C'est une rhétorique et une tactique ordinaires des Américains et des Israéliens chaque fois qu'une réconciliation entre les factions palestiniennes semble à portée de main.

En un sens, cela pourrait être un retour des difficultés similaires rencontrées par les factions palestiniennes après les élections de 2006, avec des sanctions étrangères, des attaques militaires et des menaces d'isolement.

Malgré ces défis, le Fatah et le Hamas semblent décidés à faire avancer l'accord cette année, probablement à cause d'une convergence d'intérêt à garder leur pertinence et leur légitimité aux yeux de la population palestinienne.

L'accord ne propose cependant aucune clarification sur la façon d'aborder les différends vis-à-vis des négociations ; il n'offre aucune alternative à l'opposition israélienne et occidentale devant la réconciliation palestinienne, et son engagement vis-à-vis de la cause palestinienne, notamment au droit au retour, n'est pas clair.

Avant, c'était des problèmes de politique et de sécurité qui mettaient fin à la démarche de réconciliation. Aujourd'hui, l'échec ultime des tentatives de réconciliation palestinienne pourrait dépendre de la question primordiale : les tentatives du Hamas et du Fatah de se réconcilier et de former un gouvernement d'unité sont-elles obsolètes et déconnectées des objectifs initiaux de la cause palestinienne ?

Source : Al Akhbar

Traduction : MR pour ISM

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