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ISM France - Archives 2001-2021

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USA -

Un diplomate israélien s’inquiète du rôle joué par des juifs américains en France

Par

The Forward, titre légendaire du journalisme américain, et aussi une institution respectée de la vie juive américaine. Lancé le 22.04.1897, sous la forme d’un quotidien en yiddish, The Forward s’est inscrit, dans la presse immigrée de New York, comme un défenseur du syndicalisme et d’un socialisme humaniste et démocratique. Le Jewish Daily Forward ne tarda pas, toutefois, à s’élever au-dessus de la mêlée : sous la houlette de son fondateur, l’indépendant chatouilleux Abraham Cahan, Forward en vint à incarner la voix des immigrés juifs et la conscience du ghetto. Il livra le combat pour la justice sociale, aida des générations d’immigrants à entrer dans la vie américaine, fit connaître les informations de presse les plus importantes du siècle, et se tint en permanence au rang des défenseurs les plus éloquents de la démocratie et des droits des juifs de la nation américaine.

Dans une lettre envoyée au ministère israélien des Affaires étrangères, voici deux mois de cela, l’ambassadeur d’Israël en France, Nissim Zvili, mettait en garde contre les conséquences potentiellement négatives que pourrait avoir la perception de groupes juifs américains comme cherchant à influencer la politique américaine, a appris Forward. Plusieurs dirigeants juifs français se font l’écho des craintes zviliennes qu’une perception à base d’argent juif américain inondant des hommes politiques français en des temps où les sentiments anti-américains et anti-israéliens sont en vogue risquerait de finir par nuire aux juifs français.

Zvili, qui répondait à une demande d’explication du ministère israélien des Affaires étrangères après que des informations aient circulé sur ce genre d’initiative, a mis l’accent sur la nécessité qu’il y a à prendre en considération les différences fondamentales entre les mentalités et les structures politiques françaises et états-uniennes, a laissé entendre une source interne à l’ambassade. Dans son courrier, Zvili a également indiqué que des informations relatives à l’intervention de groupes de pression américains mettent mal à l’aise les dirigeants de la communauté juive de France, et que ces informations persistantes risquent d’avoir un impact extrêmement négatif sur l’opinion publique française.


Faisant état d’une crainte souvent entendue dans les milieux juifs de France, cet informateur de l’ambassade a notamment indiqué que « des fonds juifs américains finançant une campagne électorale en France auraient un impact absolument catastrophique ».


Zvili, a rapporté cette même source, a exhorté Israël à demander aux lobbies juifs américains de faire preuve de plus de tact. Elle a indiqué que le message a été reçu cinq sur cinq à Jérusalem, et qu’il a sans doute été transmis aux lobbies juifs américains.
Nos appels téléphoniques adressés à des responsables du ministère (israélien) des Affaires étrangères n’ont reçu aucune réponse.


Le gros de la controverse s’est focalisé sur un accord, conclu l’année dernière, entre le Congrès Juif Américain et une organisation pro-israélienne française tonitruante, l’Union des Patrons Juifs de France – UPJF. Des préoccupations, de même nature, sont également exprimées au sujet des activités en Europe de l’AIPAC [American Israël Public Affaires Committee], principal lobby pro-israélien de Washington, qui a développé des liens avec les organisations juives de France et d’autres pays européens, afin de soutenir dans ces pays le développement d’un lobbying (pro-sioniste) dans le style américain.


Le Comité des Juifs Américains a lui aussi boosté son rôle en Europe, au cours de l’année écoulée, mais il semble avoir échappé à la controverse autour des deux autres lobbies américains.


En vertu de l’accord conclu entre le Congrès Juif Américain et l’UPJF, l’association américaine prodiguera à son partenaire français conseils, formation et expertise, ainsi qu’un soutien financier.


David Twersky, directeur du Conseil de la Juiverie Mondiale, récemment créé par le Congrès Juif Américain, a confirmé l’aide financière (à l’UPJF), mais il a refusé d’en dévoiler le montant. Il fut imité, en cela, par le président de l’UPJF, Hervé Giaoui.


La détermination de l’UPJF à soutenir certains candidats politiques et à s’engager dans un relatif activisme politique a déclenché des clashs avec la principale institution représentative des juifs de France, connue sous son acronyme deCRIF[Conseil « Représentatif » des Institutions israélites de France]. « Tout ceci va finir par jouer contre les intérêts de la communauté juive ».
Mais tant le Congrès Juif Américain que l’UPJF mettent l’accent sur le fait que l’accord de coopération signé entre les deux organisations exclut toute immixtion dans la vie politique française.


Twersky a catégoriquement rejeté l’idée que des subsides juifs américains seraient injectés dans la vie politique française, en soulignant que l’accord entre le Congrès Juif Américain et l’UPJF exclut explicitement toute action politique de leurs activités conjointes et se concentre exclusivement sur les efforts visant à lutter contre l’antisémitisme et contre les « préjugés » anti-israéliens. Giaoui a indiqué que l’argent américain ne servirait qu’à financer des campagnes de publicité pro-israélienne et que, par conséquent, il n’était pas personnellement concerné par l’impression éventuelle que d’aucuns pourraient avoir, quant à l’immixtion de juifs américains dans les affaires intérieures françaises.
Twersky a également insisté sur le fait que l’UPJF allait, à l’avenir, conférer aux juifs français un pouvoir que des fédérations chapeautant tout le monde, tel le CRIF, ont été incapables de leur donner. « L’action politique est de la seule responsabilité de l’UPJF », a indiqué Twersky, ajoutant qu’il avait recommandé à cette association de ne pas afficher de préférences partisanes.

L’examen des déclarations de l’UPFJ semble montrer une nette et persistante tendance à soutenir des candidats de droite, reflétant ce que beaucoup d’observateurs (dont certains responsables du parti Travailliste israélien) analysent comme une plus grande sensibilité aux questions relatives à l’antisémitisme au sein de la droite française, que dans la gauche.
Dans une missive envoyée le 24 juin dernier à ses adhérents, détaillant la position de l’association sur la question du soutien qu’elle apporte à certains candidats politiques, l’UPJF s’affirmait « convaincue qu’il est impératif de s’engager dans la vie politique de notre pays, que ce soit au niveau local, au niveau national, ou encore au niveau européen ».


Cette lettre de liaison de l’UPJF entendait expliciter la décision de l’association de soutenir la candidature de Patrick Gaubert, un militant juif antiraciste bien connu, aux dernières élections européennes, ainsi que celle de Laurent Dominati, lors d’une élection législative partielle à Paris. De plus, l’association a exprimé un soutien indéfectible au présidentiable Nicolas Sarkozy. Une des fondatrices de l’association, Nicole Guedj, est une des jeunesses du gouvernement actuel. Toutes les quater, ces personnalités politiques appartiennent à l’UMP, le parti conservateur du président français, Jacques Chirac.


Giaoui, le président de l’UPJF, a fait observer que l’association avait soutenu également un candidat communiste [Nôôôn ? ndt], ainsi que François Zimeray, un ancien député européen socialiste, connu pour ses prises de position fanatiquement pro-israéliennes. Il a toutefois reconnu que l’association avait une furieuse tendance à pencher vers la droite, ajoutant que cela reflétait un glissement politique sensible au sein de la communauté juive française. Giaoui a indiqué que son association encourage ouvertement les juifs [de France] à financer des candidats pro-israéliens, afin de permettre à la communauté juive française de recouvrer son peps politique.


Certains observateurs ont relevé que le financement des partis politiques, en France, a été sévèrement limité, voici plusieurs années, par la loi, ce qui n’autorise plus que des dons modiques de la part d’individualités, et a pour effet que les hommes (et les femmes) politiques français ont tendance à dépenser moins d’argent, pour leurs campagnes électorales, que leurs homologues américain(e)s. De plus, c’est essentiellement le président de la République, en France, qui formule la politique étrangère du pays, les législateurs ayant un impact très limité, en la matière : voilà qui rend déjà moins utile le financement de candidats pro-israéliens aux élections parlementaires ou locales…

En dépit de ces obstacles (structurels) au lobbying visant à influencer la politique gouvernementale, la volonté de l’UPJF de sponsoriser des candidats et d’exhorter des particuliers à les financer a touché une corde sensible dans une partie de la communauté juive de France.

« Il est grand temps, pour les communautés juives européennes, de prendre leurs responsabilités en terme d’action politique. Nous devons accepter de jouer désormais un rôle beaucoup plus politique », dixit Zimeray, l’ex-député européen, qui a mis sur pied, l’an dernier, son propre groupe d’entrisme pro-israélien, à Bruxelles.

Zimeray a indiqué qu’il pousserait dans ce sens à l’intérieur du CRIF, où il vient tout juste d’être nommé responsable de la commission politique. D’autres responsables duCRIFdisent que l’institution doit rester neutre, en raison de son statut d’interlocuteur officiel, intermédiaire entre le gouvernement français et la communauté juive de France.

L’organisation de Zimeray – Medbridge – [qu’il faut sans doute comprendre comme « un pont sur la Méditerranée »… ? ndt] a pour principale raison d’être de vendre l’image d’Israël, grâce à son réseau de relations parmi les hommes politiques européens.
Zimeray affirme ne pas avoir reçu de soutien financier d’organisations juives américaines. En revanche, il a accueilli avec gratitude des financements d’une origine telle, destinés à des projets spécifiques. Ainsi, il a reçu quelques sous du Comité des Juifs Américains, afin de financer un voyage qui a permis à plus de deux cents membres du Parlement européen de se rendre en voyage en Israël et en Jordanie, l’an dernier.


Toutefois, visant nommément l’AIPAC , il a mis en garde contre toute singerie des mœurs américaines en matière de lobbying, en Europe : « Certains groupes juifs américains se comportent, en Europe, comme si l’Europe, c’était les Etats-Unis », dit-il. « C’est une recette pour une catastrophe annoncée. »

Depuis quelques années, l’AIPAC s’emploie activement à établir des relations avec un certain nombre d’organisations juives, à Paris et à Bruxelles, dont un nouveau groupe de lobbying pro-israélien, sis à Bruxelles, intitulé European Middle East Forum, lequel a été créé, en 2002, par deux hommes d’affaires français : Marc Grossman et Ronny Bruckner.

Un responsable de cet European Middle East Forum a expliqué que l’AIPAC avait offert gracieusement son expertise, mais qu’il n’avait pas financé le nouvel organisme. Il a ajouté que le financement du Forum provient essentiellement de donateurs privés européens, même si « un ou deux » donateurs privés américains contribuent à son budget annuel, d’un ordre de 2,2 millions de dollars.

« Nous ne voulons absolument pas devenir le bras séculier européen d’une quelconque organisation américaine », a indiqué ce responsable, qui s’exprimait sous le couvert de l’anonymat.
Il a ajouté que le nouveau lobby, qui vient d’ouvrir six branches dans les six pays européens bénéficiant des plus importantes communautés juives, se concentrait sur la publication de mémos politiques ainsi que sur l’organisation de voyages et de réunions visant à améliorer l’image d’Israël aux yeux des décideurs européens.

Le Forum encourage ses membres à soutenir des candidats politiques, au moyen, notamment, de dons financiers, mais il veille à ne pas prendre position en tant qu’organisation. [subtil, non ? ndt]
« Nous sommes perçus comme un lobby juif. Ce n’est pas très facile à porter. Mais baste… », a conclu l’officiel.

La détermination de l’AIPAC à faire de l’entrisme dans beaucoup d’associations juives a créé quelque tension avec le CRIF, qui est considéré, tant par la loi que traditionnellement, comme le porte-voix essentiel de la juiverie française.

L’année dernière, les responsables duCRIFfurent froissés, l’UPJF ayant été la seule organisation juive française invitée à la conférence annuelle de l’AIPAC . Bien que plusieurs associations juives aient été invitées, cette année, dont le CRIF, la tension était néanmoins encore palpable.

Durant un séminaire de formation d’une journée, à destination des dirigeants juifs européens (séminaire tenu parallèlement à la conférence), Cukierman [président du CRIF, ndt] quitta la salle, après que les organisateurs lui eurent refusé la possibilité de s’exprimer, ont rapporté deux personnes qui ont assisté à la scène. Ces deux témoins ont indiqué que les organisateurs avaient décidé d’accorder plus de temps que prévu à l’intervention d’European Middle Eastern Forum.

Nous avons sollicité les commentaires des responsables de l’AIPAC , qui ont refusé de répondre.


S’il est une instance (juive) américaine, en revanche, qui semble avoir réussi à esquiver les critiques, tout en étendant ses opérations en Europe, c’est bien le Comité des Juifs Américains. Non content de financer des voyages en Israël, en coordination avec des associations juives locales (européennes), tel le voyage organisé par Medbridge [l’organisation de François Zimeray, rappelons-le, ndt], le Comité des Juifs Américains a ouvert un institut transatlantique à Bruxelles, et il fournit de l’assistance technique par l’entremise de son réseau de bureaux européens, dont le plus récent a été ouvert à Paris.

David Harris, directeur du Comité des Juifs Américains, a indiqué que son organisation veillait à ne pas piétiner les plates-bandes juives locales. Ainsi, a-t-il expliqué, il a pris soin d’inviter à ses congrès des dirigeants juif européens en compagnie de responsables officiels européens, et à signer des accords de partenariat plus avec des organisations parapluies qu’avec des personnes privées.


« Nous ne voulons pas travailler de cette façon-là », a expliqué Harris. « Le lobbying à la mode américaine doit être adapté aux conditions locales. Nous autres Américains, devons toujours garder à l’esprit ce que signifient des mots tels « savoir-faire » et « nuance ».

Source : http://forward.com/

Traduction : Marcel Charbonnier

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