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ISM France - Archives 2001-2021

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Israël -

Une absence qui vaut copie blanche‏

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Il ne va pas y aller.
C’est presque sûr, il a décidé de snober l’invitation du chef de l’État – dont on peinera à dire qu’il est encore le plus puissant du monde. (1)
C’est sûr, il n’y est pas allé.
S’agit-il d’une simple bouderie à la mode shutzpah (2) en réponse à l’accueil très froid voire irrévérencieux que Netanyahu avait reçu de B. H. Obama quand celui-ci est sorti dîner en ville avec sa famille et a laissé son hôte avec des subalternes pour le recevoir à la Maison-Blanche, suite au camouflet infligé à Biden pour le gel des colonies ?

Une absence qui vaut copie blanche‏


Manifestation anti-israélienne à Istamboul, le 16 janvier 2009.

Pas seulement et surtout pas essentiellement.
Cette absence rappelle celle de l’élève qui se fait porter malade car il a insuffisamment préparé ses examens et fait le choix stratégique de ne pas avoir de note plutôt qu’un zéro pointé ou une appréciation très médiocre.

Le ban et l’arrière-ban, 47 nations en tout, ont été invités à discuter pour le 11 avril de l’avenir du nucléaire avec en arrière-plan le prétendu nouveau projet étasunien pour le nucléaire assorti d’un accord START II signé à Prague le 8 avril de limitation des armes offensives entre les US(a) et la Russie.
Start II, dont les avancées en terme de réduction sont d’une piètre ambition, est loin d’avoir reçu l’aval du Congrès qui requiert les deux tiers des élus, 67, alors que les démocrates ne sont plus que 59. Du côté russe, il apparaît qu’il sera inapplicable en raison du codicille introduit par les négociateurs de la Russie de l’obligation pour les US(a) à renoncer au dispositif anti-missiles qu’ils comptent installer en Europe de l’Est. Ce dispositif est interprété à juste titre par Moscou comme menaçant sa sécurité et sa souveraineté.

Par un effet mécanique presque indépendant de la volonté des acteurs en présence, l’intransigeance (3) du gouvernement de Tel Aviv, qui refuse tout gel de l’avancée inexorable des colonies depuis 1967, a déclenché une dynamique de désaveu implicite de la ‘seule démocratie’ du Moyen Orient. Les États ‘modérés’ de la région, ceux qui ont capitulé, ont tous souscrit à l’initiative de Abdallah ibn Abd Aziz, devenu roi depuis, soit l'échange d'un établissement d’un État palestinien dans les frontières d’avant 1967 contre une normalisation des relations avec tous les pays arabes. Ils ne peuvent décemment se dédire de ce programme déjà bien minimisé pour la libération de la Palestine.

De plus, l’inertie habituelle des pays comme l’Égypte à sortir de sa servilité vis-à-vis de l’entité sioniste depuis la signature d’une paix séparée à Camp David a fini par être ébranlée par l’évidence d’une modification de la donne géostratégique.

La Turquie est devenue depuis le massacre de Gaza en décembre 2008-janvier 2009 le champion de la cause palestinienne, voire de la nation musulmane. La position turque a été encore rappelée cette semaine passée par le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan alors qu’il inaugurait une nouvelle chaîne télévisuelle : « Nous ne pouvons assister au meurtre des enfants palestiniens de Gaza dans l’indifférence. Nous ne pouvons non plus être indifférents au devenir du monde musulman et de Jérusalem. Les Turcs et les Arabes sont frères et partagent les mêmes valeurs ». Le rôle du négociateur privilégié de l’Égypte, jusque-là l’interlocuteur obligatoire entre les puissances occidentales et les Arabes du front du refus, est en train de lui échapper au profit d’une Turquie qui assoit avec finesse et fermeté sa posture de puissance économique et politique plus que moyenne.

Les Turcs ont-ils été les premiers à avoir compris et à avoir fait passer dans leur pratique politique les effets de la fin de la guerre froide ?

Dès la décision des US(a) d’envahir l’Irak (sous des prétextes allégués plus faux et plus fous les uns que les autres), le gouvernement turc, sous la pression d’une Chambre des Représentants elle-même encerclée par des manifestants qui exigeaient la non-participation à l’occupation armée d’un pays voisin, a refusé de prêter son territoire aux manœuvres militaires états-uniennes dans la région. Cette décision est liée avant tout au fait qu’une déstabilisation à sa frontière entraînerait de facto la résurgence d’une velléité kurde d’autonomie sur son flanc, celle-ci alimentée de longue date par les Israéliens.

Ils ont mesuré le poids croissant de la Russie, en tant qu’acteur autonome sous l’impulsion patriote de Poutine et évalué les gains à étendre pacifiquement et commercialement leur influence sur les ex-Républiques soviétiques turcophones. Ils dépendent d’elles pour 60% de leur importation de gaz naturel.

Les possibilités d’intégrer l’Union de l’Europe se rétrécissant sous les poussées de l’extrême-droite qui n’a cessé de gagner du terrain sur le vieux continent, un recentrage sur ses intérêts bien compris s’est opéré. Les militaires turcs et la nébuleuse des Loups Gris plus ou moins actionnée depuis les think tank néocons-sionistes n’ont plus qu’à bien se tenir.

Le jeu électoral démocratique a permis l’arrivée et le maintien au pouvoir d’un parti non inféodé à une Alliance Atlantique en voie accélérée de vétusté depuis l’effondrement de l’URSS qui lui dictait sa politique étrangère. Les tentatives de déstabilisation se sont bien sûr répétées avant même une proposition de levée de l’interdiction du voile à l’Université, elles ont failli déboucher sur une révolution colorée. Il s’en est fallu de peu que le parti au pouvoir, démocrate musulman, l’AKP, n’ait été considéré anticonstitutionnel.

À l’acmé de la crise de l’été 2008 lorsque la Géorgie sous la férule du ministre de sa Défense d’origine israélienne avait provoqué la Russie en tentant de réinvestir de façon intempestive l’Ossétie du Sud, territoire en attente de son autonomie depuis de nombreuses années, en plein milieu des jeux olympiques de Pékin, Erdogan a fait une visite éclair le 13 août à Moscou.

La Turquie s’est déclarée solidaire de la Russie pour la question de l’Ossétie du Sud. Techniquement, cela revenait à tenir comme irrecevable l’éventuelle demande de passage immédiat des porte-avions étasuniens par les détroits du Bosphore et des Dardanelles. De fait, le navire amiral US Mont Whitney ne pénétrera la Mer Noire que le 4 septembre acheminant « 17 tonnes d’aide humanitaire ».

Et dès le 16 août 2008, Abdullah Gül, interrogé par le Guardian fait le constat de l’avènement d’un monde multipolaire qui ne peut être contrôlé depuis un seul centre. Le conflit suscité par la Géorgie sonne théâtralement le glas d’une politique imposée au monde depuis le seul point de vue étasunien. Qui d’autre que Tayyep Erdogan pouvait quitter la scène du Forum économique mondial à Davos quand Shimon Peres faisait son apologie des crimes sionistes à Gaza le 29 janvier 2009 ?

En réponse au refus par la Turquie d’effectuer des exercices militaires aériens conjoints avec Israël en octobre 2009, la réaction de l’entité sioniste va se traduire par un lobbying intense du Congrès étasunien. Celui-ci ‘reconnaît’ nuitamment par une résolution le génocide arménien par l’État turc entre 1915 et 1917 dans un contexte de guerre mondiale dont l’un des objectifs est le démantèlement de l’Empire Ottoman. Cette intervention d’Israël quasi-directe dans la politique étrangère des US(a) vient contrecarrer les plans de l’administration de B.H. Obama qui a besoin de son allié turc dans le problème iranien et le bourbier afghan. Par ces manœuvres, il est escompté d’empêcher la lente réconciliation qui se construit entre l’Arménie et la Russie au travers de nombreux gestes échangés.

La rupture entre la Turquie et Israël est engagée sur un plan plus que symbolique.
Ankara a fini par recevoir début février 2010 six drones Heron de l’ Israël Aerospace Industries après deux années de tergiversations, pour un montant de près 180 millions d’euros. Ces petites unités sans pilote et télécommandées ont montré une efficacité très approximative pour la précision de leurs tirs et ne peuvent être employés que contre des populations civiles démunies des rudiments de défense anti-aérienne comme en Afghanistan et dans certaines zones du Pakistan. Elles peuvent en revanche être utiles dans les guerres civiles contre des insurrections par exemple.

La Turquie s’est tournée par contre vers la Russie et la Chine pour l’acquisition de ses systèmes anti-missiles, refusant d’acheter les Arrow à l’IAI qui en espérait un marché de 2 milliards $US.

Pendant tout ce temps, l’ancien pays des Pharaons perpétue son allégeance aux sionistes. Et ce n’est pas en enterrant un mur qui va interdire l’entrée de toute denrée à Gaza et aggraver la remontée des eaux saumâtres qu’il peut prétendre à un quelconque leadership auprès des Arabes.

C’est bien contrainte par le déploiement turc qui se projette en Syrie et au Liban que l’Égypte va donner de la voix contre le programme nucléaire israélien, bel et bien existant, bel et bien pointé sur Le Caire, Téhéran et Djeddah.

L’option d’un Orient dit Moyen exempt de toute arme nucléaire va être à l’ordre du jour de ce sommet international sur la sécurité nucléaire, soutenu par les pays concernés [moins l’absent].

Dans sa philosophie générale, Hegel énonçait le principe de la nécessaire humanisation de l’histoire par le travail créateur de la néantisation de l’Esclave qui détruit son état de servitude. Le Maître a failli à réaliser une Conscience de Soi satisfaisante car il n’est parvenu à se faire reconnaître dans sa Lutte à mort pour le prestige que par un non Humain, l’esclave chose à peine être non encore sorti de l’animalité.

Dans sa quête -perdue- pour se faire reconnaître comme création légitime dans l’Orient arabe par les Dépossédés de leur terre mais pas de leur patrie, le gouvernement de Tel Aviv peut-il répondre de qui est l’Esclave, qui est le Maître ?

Qui est le Pharaon, qui est le peuple qui cherche sa libération et construit l’Histoire ?

Maintenant, la résurgence d’une volonté ottomanique va faire lever le silence sur les deux cents têtes nucléaires détenues par l’entité sioniste, alors qu’aucune certitude ne peut être avancée quant à l’état de leur fonctionnement. Les jérémiades à propos des menaces d’une arme iranienne encore inexistante vont se faire plus sourdes quelques semaines ou quelques jours.

Badia Benjelloun
11 avril 2010


(1) Netanyahu n'assistera pas au sommet nucléaire à Washington, al-Manar, 10.04.2010.

(2) shutzpah : synonyme d’arrogance, qualité revendiquée par les citoyens juifs d’Israël comme caractéristique de la nouvelle identité juive.

(3) Ce terme d’intransigeance est purement journalistique occidental car il occulte l’essence du sionisme qui est la guerre et la conquête perpétuelles.

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