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Palestine - 29 juillet 2015
Par Osama Hamdan/Suraya Dadoo
Interview par Suraya Dadoo publié sur le site du Hamas en anglais le 25 juillet 2015.
Osamah Hamdan s'est rendu en Afrique du Sud en janvier 2015. L'auteur et activiste sud-africaine Suraya Dadoo a discuté avec lui de l'inspiration qu'il puise de l'Afrique du Sud et de ses mouvements de libération.
"Mandela, les mouvements de résistance sud-africains, votre lutte contre l'apartheid et aussi la campagne mondiale de boycott qui a isolé le régime d'apartheid sont une source d'inspiration," a expliqué Hamdan. C'est sur la question de la lutte armée que Hamdan pense qu'il y a une connexion forte entre le Hamas et le Congrès National Africain (ANC) en particulier.
Je lui ai expliqué que certains sud-africains se sentent offensés par la comparaison entre le Hamas et les mouvements de libération sud-africains. Après tout, ai-je argumenté, les cadres de Umkhonto We Sizwe (la branche armée de l'ANC) n'ont pas tiré de roquettes sur Johannesburg de la façon dont le Hamas a tiré ses roquettes Qassam artisanales sur Sderot ou Tel Aviv. "Est-ce qu'Israël nous a lancé des fleurs l'année dernière ?" rétorque-t-il, faisant référence aux 51 jours de bombardement et d'invasion de la Bande de Gaza par Israël - nommés "Opération Bordure Protectrice" [en juillet-août 2014, ndt] - qui ont tué plus de 2.100 Palestiniens.
La lutte armée : une réponse à l'oppression
Hamdan m'a alors rappelé que c'est l'oppresseur qui détermine le type de résistance qu'utilise l'opprimé. "Comment devrions-nous résister quand notre peuple à Gaza vit dans une prison à ciel ouvert ? Comment devrions-nous résister quand Israël calcule le nombre exact de calories nécessaires au maintien en vie de notre peuple - et n'autorise que ce montant à entrer à Gaza ? Comment devrions-nous résister quand le vice-président de la Knesset, Moshe Feiglin, appelle à l'"élimination" de Gaza et de sa population ? Comment devrions-nous résister quand notre peuple doit supplier un soldat israélien de le laisser passer un checkpoint pour rentrer chez lui ? Comment devrions-nous résister quand on nous dénie le droit de prier à la Mosquée al-Aqsa ?" riposte-t-il tranquillement.
Le droit international répond clairement aux questions d'Hamdan. Les résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies et la Quatrième Convention de Genève ainsi que ses protocoles consécutifs protègent le droit des personnes à "lutter contre une domination coloniale et une occupation étrangère" par tous les moyens disponibles - y compris la lutte armée.
"En Afrique du Sud et en Palestine, la résistance armée a démarré parce qu'il n'y avait pas d'autre moyen pour résoudre le problème. Il n'y avait pas d'autre issue," analyse Hamdan. Les opérations de résistance armée du Hamas sont des représailles aux meurtres incessants de civils palestiniens par l'armée israélienne. "Toutes les opérations du Hamas sont liées à des meurtres spécifiques israéliens de civils palestiniens ou de nos dirigeants. La résistance armée se terminera une fois qu'Israël cessera de tuer les Palestiniens," explique Hamdan.
J'explique à Hamdan que cette réponse est presque identique à une déclaration de Nelson Mandela le jour où il est sorti de prison, en 1990. En réponse à une question sur la nécessité de la lutte armée, Mandela a dit : "Si nous avions des canaux de communication pacifiques, nous n'aurions jamais songé à recourir à la violence. S'il n'y avait eu la violence de l'apartheid, il n'y aurait jamais eu de violence de notre côté."
La Charte du Hamas contre la Charte de la Liberté
Lorsque l'on compare le Hamas et l'ANC, nos discussions abordent les comparaisons entre la Charte du Hamas et la Charte de la Liberté de l'ANC. La différence entre les chartes suggère à certains que le Hamas et l'ANC ont des principes complètement contradictoires. On voit le Hamas comme un groupe "radical" dont l'objectif est de détruire Israël, alors que la Charte de la Liberté de l'ANC implique que l'ANC est une organisation ouverte et démocratique.
Hamdan explique les dirigeants du Hamas ne font pratiquement jamais référence à la Charte, ni ne la cite. "Il faut la voir comme un document historique. Ce n'est pas l'expression réelle de la vision globale du mouvement," explique Hamdan. Autrement dit, la Charte du Hamas n'a pas suivi l'évolution politique qui a eu lieu au sein du Hamas.
Je suggère à Hamdan que juger le Hamas sur sa Charte fondatrice revient à juger l'ANC d'après sa politique nationaliste africaine des débuts. Comme l'ANC, la vision politique du Hamas a évolué et le stéréotype d'un mouvement de haine du juif n'est plus de mise, convient Hamdan. "Nous n'avons pas de problèmes avec les Juifs. Etre antisémite, c'est être anti-Hamas."
Alors pourquoi la Charte du Hamas est-elle cité par certains gouvernements et médias occidentaux, plutôt que des déclarations du Hamas plus récentes ? Hamdan pense que c'est une tentative pour calomnier et ignorer le Hamas d'une manière très semblable à celle dont l'ANC en exil a été ignorée par le gouvernement d'apartheid sud-africain et les grands médias.
Conditions pour les négociations
Ainsi, le Hamas doit-il envisager de laisser tomber sa lutte armée ? "La résistance armée s'achèvera une fois qu'Israël cessera de tuer des Palestiniens," explique Hamdan. "Lorsqu'ils arrêteront, nous arrêterons. Quand ils rempliront nos conditions, nous arrêterons." Mandela aussi a exprimé des sentiments similaires en 1990. "Tant que l'Apartheid n'a pas été démantelé, il n'y a aucune raison pour que nous envisagions de suspendre, d'abandonner la lutte armée. La lutte armée continuera jusqu'à ce que les revendications fondamentales du peuple soient satisfaites.
Comme l'ANC, le Hamas aussi à sa propre série d'exigences. Selon Hamdan, le Hamas a à maintes reprises demandé la fin du siège de Gaza, la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens, la levée de l'interdiction de tous les mouvements palestiniens de libération catalogués comme "terroristes", le retour en toute sécurité de tous les réfugiés palestiniens et l'arrêt de la violence quotidienne contre les Palestiniens, l'emprisonnement et l'assassinat des dirigeants politiques palestiniens.
Si telles sont les conditions pour que le Hamas abandonne la lutte armée, que faudrait-il pour l'amener à la table de négociation ? "Nous voulons négocier la paix," dit Hamdan, "mais c'est Israël qui ne veut pas avec nous." Hamdan explique qu'Israël a répondu à la formation d'un gouvernement national d'unité entre le Hamas et le Fatah en juin de l'année dernière en mettant fin aux pourparlers de paix avec l'Autorité palestinienne dirigée par le Hamas, disant au Fatah qu'il devait "choisir entre la paix avec Israël et la paix avec le Hamas". L'"Opération Bordure Protectrice" a commencé quelques semaines plus tard.
Selon Hamdan, Israël ne veut pas sincèrement faire la paix. "Vous ne pouvez même pas appeler cela un processus de paix." Hamdan soutient qu'effectivement, l'occupation s'enracine encore davantage pendant les négociations et il a de solides arguments dans ce sens. Deux décennies de pourparlers de paix ont produit trois grandes guerres israéliennes contre les Palestiniens qui ont tué au moins 10.000 Palestiniens. Les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée et à Jérusalem Est - illégales en vertu du droit international - ont triplé pour atteindre près de 700.000 colons. Ces colonies et leurs infrastructures ont absorbé 40% de la Cisjordanie , la fragmentant en 167 enclaves. La Cisjordanie est divisée par un mur de 442 km de longueur et la liberté de circulation est entravée par 522 checkpoints. L'accès aux lieux saints musulmans et chrétiens a été restreint.
En 2007, Israël a imposé un blocus terrestre, maritime et aérien total de la Bande de Gaza, l'isolant du monde. "C'est ainsi qu'Israël montre au monde qu'il veut sincèrement la paix ? Comment pouvez-vous prêcher la paix au monde, et en même temps, faucher des gens et voler les terres ?" demande Hamdan.
Je n'ai pas de réponse à cette question ironique, alors je suggère à Hamdan que nous visitions le Musée de l'Apartheid à Johannesburg un peu plus tard dans la journée. Peut-être y trouverons-nous la réponse.
Suraya Dadoo est chercheuse à Media Review Network, un groupe de défense basé à Johannesburg. Elle est également co-auteur de "Why Israël? The Anatomy of Zionist Apartheid: A South African Perspective" (Porcupine Press, 2013).
Source : Hamas.ps
Traduction : MR pour ISM
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