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ISM France - Archives 2001-2021

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Jénine -

Palestine : délocalisation économique et sociale

Par

Cette route longue et en plein vent m'a conduit à ...?. En ce qui nous concerne, un voyage de 2 heures nous en avait pris 5, sur une rue peu fréquentée. Toute cette aventure n'est pas un cas isolé, mais bien typique de la désorganisation économique sociale et éducative subie dans les territoires illégalement occupés de Palestine.

Dans les messages précédents envoyés à la maison, j'ai parlé de désorganisation économique et sociale sans rentrer dans les détails. En fait, cette semaine un exemple parfait c'est présenté. J'essayais de voyager seul (ce n'est pas recommandé, mais je n'avais pas le choix) d'un village proche de Ramin jusqu'à Jérusalem. On m'a dit qu'il fallait que je me lève à 5 heures du matin pour pouvoir prendre un taxi au village.

Partir tôt était nécessaire car le taxi ne pouvait venir directement jusqu'ici, les barrages routiers les en empêchant. 40 minutes plus tard, nous sommes arrivés devant un fossé large et profond creusé dans la chaussée et suivi d'un tas de gravats et de béton.

Ce barrage était suffisant pour stopper un tank, encore plus un taxi. Je suis sorti et je me suis joint à un groupe de 5 personnes qui allaient rendre visite à leur famille. Nous avons dû marcher plus d'un kilomètre et demi jusqu'à une autre route, et là nous avons attendu à un carrefour. Des gens convergeaient vers cet endroit venant de plusieurs directions, jusqu'à ce que nous atteignions le nombre de 30 personnes.

La plupart étaient bien habillés, se rendaient probablement à leur travail, d'autres au collège, et 2, une fillette et son père, allaient à Jérusalem à l'hôpital pour les yeux. 30 minutes plus tard, un minibus est arrivé qui ne pouvait prendre que 15 personnes.

Les gens se sont mis à discuter pour savoir qui devait partir en premier. Le chauffeur et les passagers me choisirent, choix accepté par tous, car ils pensaient que cela les aiderait à passer les points de contrôle. Ce ne fut pas le cas. On est parti, laissant derrière nous les autres personnes. 1/2 heure plus tard, le minibus ralentit, et s'arrêta en plein milieu de nulle part; je me demandais pourquoi. Tous les passagers sortirent sauf deux personnes et moi-même. Nous avons continué, laissant les autres personnes derrière. Au virage suivant, la raison de notre arrêt soudain devint évidente. Un barrage routier temporaire avait été dressé et tous les véhicules étaient à l'arrêt.

Apres vérification de nos passeports, nous avons été autorisés à passer, ce que nous avons fait. Nous avons roulé environ 5 kilomètres et fait demi - tour pour revenir empruntant la même route. Nous nous sommes arrêtés avant d'arriver au point de contrôle.

De nouveau le minibus à fait marche arrière et a roulé environ 5 kilomètres, de nouveau, fait demi tour, et roulé en direction du point de contrôle. Cette fois, avant même que celui ci fut en vue, nous avons vu tous les autres passagers qui marchaient dans notre direction le long de la route. Nous nous sommes arrêtés et les avons pris.

Ainsi, l'excuse habituelle donnée pour les barrages- éviter les infiltrations terroristes - ne tient pas, car, en réalité, le vrai motif est apparu à travers cet incident. Si nous avions été des terroristes dans ce minibus, nous serions passés. Hors, c’est clair que les soldats ne nous considéraient pas comme des terroristes sinon ils nous auraient fouillés. C'est tout simplement pour compliquer l'existence de ceux qui avaient un passeport palestinien, rendre difficile le fait d'aller au travail, au collège, visiter des amis, ou faire ses courses.

Si le chauffeur n'était pas revenu en arrière, ces personnes auraient dû marcher plus de 30 kilomètres pour se rendre là où ils devaient aller. Cet incident n'était pas le dernier. Apres avoir roulé pendant 10 minutes sur la même route, on a rencontré un nouveau point de contrôle, et, à celui là, on a tous été refoulés. Le chauffeur a fait du mieux qu'il pouvait pour trouver un moyen de le contourner, mais a dû finalement y renoncer. Nous avons dû emprunter un chemin de traverse, faire descendre les palestiniens au village qui, lui aussi avait son fossé, son tas de gravas à escalader, et le numéro de téléphone d'une compagnie de taxis à appeler.

Nous sommes retournés au point de contrôle et nous avons été autorisés à passer. Nos compagnons de route durent ensuite grimper par dessus le tas de gravas, contourner le fossé en espérant trouver de l'autre côté de l'obstacle, une route les menant à destination. En ce qui nous concerne, un voyage de 2 heures nous en avait pris 5 sur une route peu fréquentée.

Toute cette aventure n'est pas un cas isolé, mais bien typique de la désorganisation économique, sociale et éducative subie quotidiennement dans tous les territoires occupés de la Palestine. Inutile de s'étonner s'il y a des personnes qui émigrent ou essaient de le faire. Inutile aussi de s'étonner si certains abandonnent et restent chez eux, dans leurs villes et villages.

Dans le dernier village ou j'étais, du toit en terrasse de la maison où nous séjournions, on peut voir la mer, mais aucun enfant du village ne peut aller jusqu'à la mer.

Pouvons nous en Angleterre nous imaginer cela ?

Voir la mer et les plages de sable, mais ne pas pouvoir y aller soi-même ou emmener les enfants y jouer, parce qu'une armée étrangère occupe et contrôle toutes les routes et tous les points d'accès qui y mènent !
Ce n'est pas étonnant qu'une petite minorité frustrée se venge. En fait, le plus surprenant, c'est que malgré toutes ces provocations, toute cette désorganisation, chaque palestinien, parmi les nombreux que j'ai rencontré, conserve son calme, sa dignité, sa générosité, son humour et son humanité.

Pourquoi la communauté internationale ignore- t-elle la souffrance de ces êtres humains, nos frères, dont la vie est rendue si intolérable? Si la même chose nous arrivait en Angleterre, nous voudrions que les gens parlent en notre faveur. Nous devrions faire la même chose. Ce n'est pas bien de détourner le regard, ou s'affairer sans réfléchir. Cela me rappelle une déclaration dont je me souviens vaguement. Ce qui suit ne sont pas les termes exacts de celle-ci mais, le sens en est à peu près le même.
D'abord ils sont venus chercher les syndicalistes, mais je n'ai rien fait. Je n'étais pas syndicaliste. Puis, ils sont venus pour les catholiques, et je n'ai rien dit parce que je n'étais pas catholique. Puis, ils sont venus pour les juifs, et je n'ai rien fait car je n'étais pas juif. Ensuite, ils sont venus pour les gitans, et je n'ai rien fait car je ne suis pas gitan etc. etc....

Finalement quand ils sont venus pour moi, il ne restait personne pour parler en ma faveur.

Nous sommes tous une communauté d'êtres humains. Nous devons parler en faveur de chacun d'entre nous. Nous ne devons pas laisser l'injustice et l'oppression s'installer dans le silence et l'inaction, simplement parce que cela ne se passe pas directement sous nos yeux.

Un autre monde est possible que celui qui nous est imposé par les brutes militaires et politiques qui gouvernent le monde.

Peut être que nous ne pouvons faire que peu de choses pour changer cela, mais nous pouvons essayer, et les efforts de chacun s'ajouteront les uns aux autres.

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