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ISM France - Archives 2001-2021

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Bethléem -

Pâques à Beit Sahour

Par

En allant de maison en maison pour nos visites, je me suis demandée combien de ces gens seraient encore là l'an prochain à Pâques ?
Combien succomberaient au stress et aux maladies ?
Combien mourraient du fait d’être au mauvais endroit, au mauvais moment ?
Combien auraient émigré ?
Ce sont alors les mots du psalmiste qui me sont revenus en mémoire :
"Combien de temps, O Seigneur ? M'oublierez-vous à jamais ? Combien de temps me cacherez-vous votre face ? Combien de temps avant que la paix ne règne en Terre Sainte ? Combien de temps votre peuple doit-il encore souffrir, Seigneur ?"

Pâques devrait être une fête de joie et de célébration mais pour les Chrétiens de Beit Sahour et d'ailleurs en Palestine, c'est un moment qui met la foi à l'épreuve.

C'est un temps où on remercie Dieu au milieu des incertitudes, de l'humiliation, des enfermements interminables et de la pauvreté grandissante.
C'est un temps où on doit être en fête et avoir la foi même quand Dieu semble bien loin. Ainsi en a-t-il été ces trois dernières semaines à Beit Sahour.
Les choses étaient relativement calmes mais tendues. Tout le monde, les Israéliens comme les Palestiniens, s'attendaient aux représailles du Hamas contre l’assassinat par Israël du leader du Hamas, Sheik Yassine.

A l’arrivée au checkpoint de Bethlehem, ce premier après-midi, j’ai été étonnée de voir une énorme section en béton du « Mur » s’envolant à 8 mètres de haut ou s'enfonçant de 8 mètres à l'intérieur de ce qui fût autrefois la propriété de Bethlehem. Trois mois plus tôt, il y avait une barrière de barbelés.

Tout le district de Bethlehem est lentement étranglé par des séries de murs, de clôtures, de colonies et de routes de contournement. Quelques jours après notre arrivée un jeune Palestinien de 16 ans a été tué à un checkpoint pour un jet de pierres. Ces choses-là sont si courantes qu’elles sont rarement, quand elles le sont, rapportées en Occident.

Quand nous étions là, toute la Cisjordanie était totalement bouclée. Le bouclage est un réseau de barrages et de checkpoints autorisés par ordre de l’armée israélienne qui interdisent aux Palestiniens de circuler sur certaines routes, d’entrer dans certaines zones ou de demander les permis spéciaux pour le faire.

Cela confine, en effet, les populations locales à leur seul district et bien souvent à leur seule ville ou village.

Les Palestiniens qui travaillent ou vont à l’école ailleurs en Cisjordanie sont forcés d’essayer de trouver des chemins à proximité des checkpoints et des groupes de soldats qui vont et viennent.

On nous a raconté des histoires effrayantes d'étudiants allant de chez eux à Beit Sahour pour Pâques.

Un groupe était arrivé au premier checkpoint avec des permis, mais leurs cartes d'identité leur ont été confisquées par les soldats. On les a fait attendre au checkpoint sous bonne garde, de 15 h à 22 h cette nuit-là quand les soldats leur ont finalement rendu leurs cartes d'identité et leur ont dit de repartir. Grâce au ciel, le jour d'après, on leur a permis de passer et après des heures ils sont rentrés chez eux sains est saufs.

En tant qu'Américains nous avons pu circuler très librement. Pourtant nous avons jugé prudent de ne pas nous éloigner beaucoup du district de Bethlehem et de Jérusalem.


Nous nous sommes aventurés jusqu'à Tel Aviv tout une journée pour obtenir des visas pour la Jordanie. Comme toujours, l'Ambassade jordanienne a été très courtoise et nous a délivré rapidement nos visas.

Comme nous étions à proximité, nous avons décidé d'aller visiter la magnifique vieille ville de Jaffa qui a été restaurée et fait partie, maintenant, de Tel-Aviv.

Les petites rues étroites de la vieille Jaffa étaient bordées de charmantes boutiques, de galeries et de restaurants mais malheureusement quand nous y sommes arrivés dans l'après-midi tout était fermé et quasiment désert.
Les Israéliens, craignant un attentat suicide, restent à distance des lieux publics.


Pendant notre séjour nous avons fait quatre voyages à Jérusalem, combinant activités professionnelles et mission avec la joie d'être simplement dans la Vieille Ville.

En raison des représailles attendues de la part du Hamas, la ville grouillait de personnels de sécurité, de soldats en armes et des habituels colons avec leurs mitrailleuses.

Malgré tout, Jérusalem reste l'un des plus merveilleux endroits du monde, cette ville de paix qui ne connaît pas la paix. C'est un mélange inextricable d'histoire juive, chrétienne et islamique et de lieux saints.

Les conquérants sont venus et repartis mais cela reste. J'ai été heureuse de voir que des touristes et des pèlerins avaient bravé les terribles avertissements et mises en garde et étaient venus à Jérusalem pour Pâques. La plupart des touristes devaient venir de Grèce, de Chypre et d'Europe de l'Est. Pour la première fois depuis des années nous n'étions pas les seuls dans les églises et les lieux saints.

Les boutiquiers qui souffrent depuis si longtemps étaient relativement optimistes à l'idée qu'ils allaient pouvoir avoir vraiment un client. Nous avons fait le tour de nos rendez-vous et visites et souvent nous avons joué les touristes en visitant nos églises et nos lieux saints favoris, les boutiques et les restaurants.

Tard dans l'après-midi, nous retrouvions nos amis et notre chauffeur Hanni, près de la Porte de Jaffa où prenions un taxi pour le checkpoint du CDO à Beit Jala afin d’éviter le checkpoint principal de Bethlehem. Au checkpoint du DCO, on ne nous a jamais demandé nos passeports et nous avons vraiment vu qu'une seule fois un soldat, si important pour une sécurité absolue.


Un matin un ami nous a arrangé une visite spéciale de la Vieille ville de Jérusalem. Nous sommes arrivés tôt et avons rencontré notre guide près de la Porte de Damas. Au cours des heures suivantes, il nous a fait passer par les ruelles, les tunnels, et les petites rues de la Vieille Ville. Nous avons appris que différents groupes de colons opèrent dans la vieille ville avec pour mission de chasser les habitants palestiniens.

Petit à petit les familles chrétiennes et musulmanes qui vivaient à Jérusalem depuis des siècles sont obligées de partir par des séries de lois discriminatoires, motivées par le racisme, par la pauvreté et des tactiques de terreur. Elles n'ont aucun recours mais s'en vont et, ce faisant, deviennent des réfugiés sans Etat. Les quartiers chrétiens, musulmans et arméniens de la Vieille Ville sont repeuplés par un nombre constamment en expansion d'habitants juifs.


Les autorités israéliennes ont délivré beaucoup de permis pour les vacances de Pâques autorisant les Chrétiens à aller prier dans les églises de Jérusalem.

Mon amie intime, Suzan Sahouri, a reçu un permis et on a décidé qu'elle et ses deux filles, Salam et Luna, viendraient avec nous à Jérusalem le jeudi de Pâques. Nous voulions tous assister à la cérémonie du lavage de pieds à l'église du Saint-Sépulcre.

Suzan n'a pas eu de problème au checkpoint et on ne lui a même pas demandé son permis ou sa carte d'identité. D'autres, nous l'avons su plus tard, sont arrivés au checkpoint pour voir leur permis déchiré par les soldats et ont été obligés de repartir.

Après avoir quitté la foule de l'église du Saint Sépucle nous sommes allés à l'hôtel Americana Colony et avons pris un délicieux petit déjeuner. Suzan et les filles ont fait la plupart de leurs courses pendant que je prenais un taxi pour Yad Veshim pour aller voir un ami israélien.

Nous nous sommes retrouvés dans la Vieille ville et au déjeuner avons mangé du "Kannafa" un plat palestinien délicieux à base de fromage. C'était magnifique d'être simplement à Jérusalem avec Suzan et les filles ce qui n'avait jamais pu se faire avant.


Presque tout notre temps s'est passé dans le district de Bethlehem à visiter église, école et leaders municipaux et autres organisations, amis et relations professionnelles.

Nous avons pour mission de répertorier les besoins de la communauté chrétienne et d'essayer d'agir en liaison avec elle et les églises ici et aux Etats-Unis.

La situation en Palestine continue à se détériorer et si la communauté chrétienne doit survivre dans les poches qui subsistent ici et là et on doit les aider. Le stress constant, la frustration, l'incertitude et le confinement pèsent très lourdement sur les gens. Il n'y avait qu'une poignée de touristes à Behtlehem pour Pâques cette année, rien à voir avec le bon vieux temps quand tous les hôtels étaient pleins. Le désastre économique en Palestine continue de s'amplifier. La construction du mur continue, s’étirant profondément en Cisjordanie et emprisonnant tous les villes et les villages.

Ceux qui sont en position d'apporter la paix ont l'air de vouloir continuer le cycle de la violence et de la vengeance. Le futur paraît sinistre.


Avec l'arrivée de Pâques, l'espoir semblait revenir au milieu de toute cette tension. Les magnifiques services de la Semaine Sainte m'ont enthousiasmée et, pendant quelques jours seulement, les gens ont pu oublier leurs soucis et se réjouir dans leur foi.

Le dimanche de Pâques, la Sainte Flamme est envoyée à toute les églises de Palestine en partant de l'église du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Une voiture spéciale était venue au checkpoint de Bethlehem pour apporter la Flamme à Beit Sahour. Mon mari, moi et la plupart des gens de la ville attendions avec espoir à la municipalité de Beit Sahour l'arrivée de la Flamme.

Pendant que nous attendions, nous nous sommes chaleureusement salués et avons regardé les scouts, filles et garçons de tous âges, de différentes églises, défiler dans les rues en jouant du tambour, du cor et de la cornemuse.

Quand la voiture est enfin arrivée à la municipalité en transportant la Flamme, nous nous sommes mis à marcher derrière le Père Issa, le Maire et les responsables de l'église dans les rues sinueuses et étroites de la Vieille Ville jusqu'à l'Eglise grecque orthodoxe.


Sur le chemin, et du haut des fenêtres, des amis musulmans jetaient des bonbons aux enfants. Quand nous sommes arrivés à l'église, il y a eu une confusion organisée, lorsque tout le monde a voulu entrer dans l'église pour allumer à la Flamme sainte ses bougies et ses lanternes.

Après avoir allumé nos bougies nous avons été invités par le maire et les amis du club Orthodoxe voisin pour prendre un verre, des bonbons et des oeufs de Pâques.

Auna Issa (le Père Issa) et Fuad Kokaly, le maire, ont fait un bref discours. L'un et l'autre ont demandé aux gens de continuer de prier pour la paix et de se rappeler qu'en tant que Chrétiens ils sont appelés "artisans de la paix".

Tous les deux ont lancé un appel spécial à ceux qui prévoient d'émigrer pour qu'ils reconsidèrent leur décision et restent sur la terre natale et conservent leur foi.


Le dimanche de Pâques fût un beau jour, lumineux et chaleureux.

En Palestine, c'est traditionnellement le jour où on va voir les amis et la famille. Nous avons passé presque toute la journée avec la famille Salsaa qui allait voir ses parents et nous avons participé à un énorme dîner palestinien de Pâques.

En allant de maison en maison pour nos visites, je me suis demandée combien de ces gens seraient encore là l'an prochain à Pâques ?
Combien succomberaient au stress et aux maladies ?
Combien mourraient du fait d’être au mauvais endroit, au mauvais moment ?
Combien auraient émigré ?

Ce sont alors les mots du psalmiste qui me sont revenus en mémoire :
"Combien de temps, O Seigneur ? M'oublierez-vous à jamais ? Combien de temps me cacherez-vous votre face ? Combien de temps avant que la paix ne règne en Terre Sainte ? Combien de temps votre peuple doit-il encore souffrir, Seigneur ?"

Je n'ai pas plus de réponse que les Chrétiens de Palestine, mais ils ont foi que Dieu entende leur appel et leurs prières et qu'Il agira quand Son heure sera venue.

Source : www.imemc.org/

Traduction : CS pour ISM-France

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