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ISM France - Archives 2001-2021

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Naplouse -

Voyager en Palestine

Par

> aaroninpalestine@hotmail.com

Aaron Lakoff est un volontaire de l’International Solidarity Mouvement, et journaliste indépendant de CKUT community radio à Montréal. Actuellement il voyage dans les territoires occupés de Palestine. D’autres de ses écrits et de ses photos sont disponibles sur http://aaron.resist.ca. On peut contacter Aaron à : aaroninpalestine@hotmail.com

Bien que j'aime être en Palestine, je dois admettre que je déteste y voyager.
L'idée de déplacement ici m'effraye, mais se déplacer semble être intimidant pour la plupart des gens. Prenons par exemple mon voyage d’hier.
Je suis allé en taxi avec cinq autres Palestiniens de Ramallah au camp de réfugiés de Balata à Naplouse.
Nous avons commencé le voyage en passant par le checkpoint imposant de Qalandia, une installation permanente et maintenant l'arrêt obligatoire facheux pour les voyageurs palestiniens.

Puis nous sommes passés par un checkpoint volant (point de contrôle non-permanent installé par des jeeps de l'armée sur la route), nous avons fait vérifier nos passeports et nos papiers d’identité, et puis nous avons dû sortir à un autre checkpoint cinq minutes plus tard!

Le conducteur a grogné avec tristesse pendant que nous nous retrouvions dans une file interminable de voitures. Une chaleur suffoquante était tombée sur la Palestine, et personne n'avait la patience d’attendre alors que chaque voiture était retenue par un soldat pendant au moins dix minutes. Pour ne pas avoir de problèmes, notre conducteur est sorti de la file, a fait un demi-tour de 180 degrés, et est parti pour une route alternative.

Naturellement, cette route alternative était bien moins souhaitable que la première, et elle nous a conduit à travers des villages bondés en bord de route et le long de routes poussiéreuses pleines de nids-de-poule. Ce ne fut pas un bon moment à passer. Le détour était long, chaud, et stressant.

Quand nous sommes finalement arrivés au checkpoint de Beit Iba à l’extérieur de Naplouse, nous étions épuisés et nous n’avions pas envie de nous accommoder des soldats en service. L’un d'eux a eu l'audace de nous mettre en garde contre le fait d'aller à Naplouse, en disant : "C'est votre vie... Assurez-vous d’être prudents."


C'est vraiment étrange d’entendre cela de la part du seul homme qui porte une arme dans les environs. Quoi qu'il en soit, je suis arrivé à Balata où je me suis senti en sécurité comme je ne l’avais pas été au cours des douze dernières heures.

Cela ne prend pas longtemps à toute personne pour se rendre compte que les points de contrôle ont peu à voir avec la sécurité, mais est font plutôt partie d'une structure oppressante conçue pour démoraliser systématiquement la population palestinienne.

Sur notre chemin en revenant du checkpoint de Beit Iba ce matin, un jeune homme en face de nous avait été arrêté et mis sur le côté. Je ne pouvais pas entendre ce que les soldats lui disaient, mais il était évident par l’air abattu sur son visage qu'on ne l’autorisait pas à passer. Eprouvant de la sympathie pour cet homme qui semblait être de mon âge, je suis allé lui demander ce qui se passait.

Il m'a dit, dans un bon anglais, qu'il était un étudiant de l'Université Arabe-Américaine dans la région de Jénine. Il essayait d'aller à l'école, et les soldats l'ont arrêté tout simplement parce qu'il avait oublié sa carte d'étudiant.

J'ai pensé à quel point cela semblait insensé. J'ai pensé au fait que cela pourrait être moi. J'ai pensé au fait que le soldat qui l'a arrêté avait probablement le même âge ou était plus jeune que lui. Peut-être qu’il n'avait pas eu la chance de prendre des livres avant de prendre une arme.

Seulement jeudi dernier, les forces israéliennes de l’occupation ont annoncé qu'elles stopperaient leur politique punitive de démolitions de maisons. Elles avaient constaté que ces démolitions de maisons avaient probablement fait plus d'ennemis à Israël qu'elles décidaient d’arrêter. C'est une logique de déduction vraiment étonnante qui est vigueur ici. Bien pour eux. Trois bravos enthousiastes.

Mais maintenant je me demande comment ils sont arrivés à cette conclusion au sujet des démolitions de maisons et non au sujet des checkpoints.

Si j'étais arrêté par une puissance d'occupation étrangère chaque jour à l’extérieur de ma propre ville, et forcé de prouver non seulement ma propre identité, mais également où jevis et où je vais, j’en arriverais certainement à détester mon occupant. Je pense que c'est la seule réaction normale.

Plus tard dans la matinée, nous étions en route pour une manifestation dans le village de Kafer Qadum. Après le soulèvement du deuxième Intifada, l'armée a mis une porte en métal pour bloquer l'accès à la seule route principale de Qadum.

Les colons de Kadumim, la colonie voisine, sont maintenant les seuls à être autorisés à l’utiliser. Les résidants de Qadum ont été forcés de construire une route agricole minable pour accéder à leur village. La plupart des voitures ne peuvent pas y rouler à plus de 20 km/h, et nous avons vu des camions de lait se battre vraiment dur pour s’y frayer un chemin. Les professeurs d'école doivent monter pour travailler en tracteur. Les villageois peuvent à peine sortir ou y entrer. Qadum a été transformé en ghetto.


Cependant, peu disposés à baisser les bras, et en ayant marre de l'isolement, Qadum a tenu une manifestation aujourd'hui. Sous la banderole "Libérez notre seule route", des centaines de femmes, des hommes, des enfants, des Anarchistes israéliens, des activistes internationaux, et même des médecins et des infirmières ont marché vers la porte en signe de résistance. Encore une fois, nous avons rencontré une ligne de soldats avec des M16 – le net symbole que la ghettoisation de Qadum sera imposée par tous les moyens nécessaires. Pendant que la colonie grotesque et illégale de Kadumim apparaissait menaçante au-dessus d'eux, la raison pour laquelle l’armée était vraiment là est devenue évidente.

C’est regrettable, mais Israël est bon dans toute ce qu’il fait . Sous la couverture "de protéger la sécurité nationale", il est parvenu à mettre en application un grand nombre de projets plus que choquants et moins que politiquement corrects : la colonisation progressive des terres palestiniennes.

Lors de la manifestations, une palestinienne a fait de son mieux. Elle a dit que sa famille avait utilisé les routes de Qadum depuis des générations, et que Kadumim était seulement là depuis 30 ans. Maintenant les forces de l’Occupation s'assurent que les colons sont les seuls à l’utiliser.

Se déplacer n'importe où en Palestine peut être un cauchemar. Peut-être qu’un jour, les Palestiniens abandonneront et resteront dans leurs maisons, et j'ai peur que personne dans le gouvernement israélien ne verse une larme.


Voir les photos qui accompagnent ce récit

Source : http://aaron.resist.ca

Traduction : MG pour ISM-France

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