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Europe - 25 avril 2005
Par Laila Freivald
Discours de Laila Freivald, ministre des Affaires Etrangères, à la conférence de Stockholm le 12 avril 05.
Mon point de vue, c’est que la communauté internationale ne peut pas jouer de rôle dans ce conflit si elle, ou certains de ses membres, abandonne sa foi dans la suprématie de la loi internationale.
Quelles que soient les assurances qu’Israël a reçues à cet égard, la communauté internationale doit continuer à réclamer qu’une solution au conflit soit basée sur les résolutions pertinentes des Nations Unies.
Pratiquement, cela signifie que la communauté internationale, à commencer par les membres du Quartet, doit faire respecter les principes fondamentaux.
D’abord, laissez-moi exprimer ma gratitude et remercier les organisateurs de m’avoir invitée à cet événement important.
Les problèmes que vous avez examinés aujourd’hui sont pertinents et difficiles.
J’observe le conflit arabo-israélien depuis que j’ai commencé mes études de droit, à la fin des années 60.
La plupart du temps, les développements politiques ont été décevants. En tant qu’avocate, je me suis spécialement intéressée aux aspects juridiques.
La Résolution 181 des Nations-Unies, 1947, sur la partition de la Palestine a marqué le début d’un débat juridique qui n’est toujours pas terminé. Aussi, comme ils le sont de nos jours, la validité de l’application de la loi d’occupation, la question de Jérusalem, la quatrième Convention de Genève et les droits de l’homme étaient déjà des problèmes cruciaux.
Pour la Suède, comme pour la totalité de la communauté internationale, le conflit israélo-palestinien reste depuis des dizaines d’années le problème international majeur
En tant que partisan des principes qui fondent la loi internationale, du règlement pacifique des conflits, des droits de l‘homme et de l’autorité de la loi, il est naturel que la Suède s’engage et travaille à faire avancer la paix entre les Israéliens et les Palestiniens.
De plus, quand il y a violations des principes fondamentaux de la loi internationale, agir est une obligation.
En même temps, le conflit israélo-palestinien contient des espoirs, des rêves et des aspirations qui ne pourront jamais être analysés du seul point de vue juridique. C’est un conflit sur lequel chacun à son opinion sur ce qui ne va pas et sur ce qui est juste, sur qui a tort et qui a raison.
A la base, c’est un conflit pour le territoire et l’autodétermination.
Comme tel, c’est un conflit dans lequel il devrait être possible d’avoir recours à la loi internationale et d’obtenir l’accord des parties pour s’y plier en toute bonne foi tout comme elles sont d’accord pour entamer des négociations.
Aujourd’hui, la loi internationale recouvre un vaste espace mais exclut, tout particulièrement, le problème complexe de la définition du terrorisme.
Dans ce débat nous devons reconnaître que le gouvernement israélien a le droit et évidemment le devoir de protéger ses citoyens contre les actes terroristes, mais qu’il doit le faire dans le cadre de la loi internationale.
On ne doit jamais accepter le terrorisme qui frappe des civils.
Laissez-moi faire connaître vers le point de vue du gouvernement suédois sur les aspects juridiques du conflit israélo-palestinien.
Toute solution à ce conflit doit se fonder sur la loi internationale, qui comprend la Résolutions des Nations Unies 242, 338, et 1397. Seul un accord mutuel entre les parties peut justifier qu’on s’écarte de ces principes.
Des mesures prises sans le consentement de l’autre partie ne conduira à aucune solution durable et viable du conflit ni à la reprise du processus de paix.
Aussi, la Suède ne peut pas accepter que les colonies israéliennes soient des "faits accomplis sur le terrain", quelque chose d’inévitable qu’on devra prendre en compte quand se mettront en place les bases de la négociation.
Le retrait israélien de Gaza ne peut pas être autre chose qu’une étape vers la fin de l‘occupation israélienne, et vers un accord sur un statut final.
La Suède reconnaît que le premier ministre Sharon a pris un risque avec l’initiative de Gaza. Mais "Gaza seulement" ne rapprochera pas d’une solution pacifique et durable.
Comme Persson, le premier ministre (suédois), l’a souligné au cours d’une récente visite en Israël et dans les territoires palestiniens, le retrait de Gaza ne peut pas être un événement unique.
Une fois que tout le monde sera d’accord sur le fait que nous voulons parvenir à une solution viable, la loi internationale sera l’outil le plus important à notre disposition. Mais en l’absence de la nécessaire volonté politique de la communauté internationale et d’une autorité centrale internationale efficace, une question reste posée : comment peut-on faire appliquer les principes de la loi internationale ?
Pour être honnête, la réponse c’est que c’est impossible.
Nous pouvons exhorter et encourager les parties à accepter et respecter la loi internationale, mais nous ne pouvons pas l’imposer.
Nous pouvons encourager les parties jusqu’à un certain point, et leur offrir, mais non leur imposer, nos bons offices.
Nous pouvons et nous devons réagir, mais nous avons tous vu que même de lourdes condamnations de la part de la communauté internationale ont peu d’impact sur les parties et sur la situation sur le terrain.
Certains ont suggéré d’utiliser nos relations commerciales avec les parties pour les encourager énergiquement à changer.
Inutile de dire que toutes nos relations, y compris commerciales, bénéficieraient grandement d’une solution pacifique à ce conflit. Pourtant, comme nous l’avons vu dans bien d’autres conflits, le recours aux sanctions conduit rarement au résultat voulu. C’est dès lors une voie que nous ne pourrions envisager qu’après l’échec de toutes les autres mesures.
La loi internationale peut servir à guider ceux qui font la politique mondiale.
Je crois pourtant que ça devrait être beaucoup plus.
Les principes de la loi internationale , y compris ceux de la loi humanitaire internationale et des droits de l’homme ne peuvent être négligés à sa guise.
Ils doivent rester au cœur des efforts internationaux pour créer un monde plus sûr pour chacun. Notre rôle particulier est de le rappeler à nos partenaires. Et de les encourager à modeler leurs politique conformément à ces principes, dans le droit fil de notre détermination à construire une société internationale fondée sur les règles du droit.
Jamais peut-être cela n’a été plus important au cours de ces six dernières années du conflit arabo-israélien qu’aujourd’hui
Alors que le conflit est passé par des périodes de calme et d’espoir, et des périodes de violence extrême et de profonde défiance, il y a toujours eu consensus international autour de l’idée que seule la loi internationale peut permettre d’aboutir à une solution pacifique du conflit.
Aujourd’hui, je perçois un dangereux changement, qui se détourne de ce consensus.
Le retrait de Gaza ne doit pas autoriser une présence plus forte d’Israël en Cisjordanie . Malheureusement, le retrait de Gaza semble avoir rendu la communauté internationale moins disposée à s’intéresser à la situation en Cisjordanie et à la question fondamentale de l’occupation israélienne.
L’activité de colonisation israélienne en Cisjordanie n’a pas cessé.
Certains avant-postes, mais c’est loin d’être la totalité, ont été démantelés après de considérables pressions internationales.
Le gouvernement israélien a récemment annoncé l’extension de la colonie Ma’ale Adumim, avec pour objectif expresse de la relier à Jérusalem même.
En même temps d’autres colonies s’agrandissent sans bruit mais rapidement.
La construction de barrières de séparation continue, empiétant toujours largement sur les territoires occupés, en dépit d’ajustements mineurs.
Israël affirme que la barrière est une mesure temporaire de sécurité et n’est pas une frontière politique.
La construction d’une infrastructure très compliquée autour de la barrière et des colonies suggère autre chose.
Tout cela est très alarmant, autant du point de vue politique que juridique.
D’autant que les aménagements sur le terrain sont maintenant aggravés du fait qu’Israël n’envisage pas que les principes de base pour de futures négociations soient ses frontières de 1967.
Au contraire Israël se réfère aux accords du premier ministre Sharon et du président Bush d’avril l’an dernier.
Il est difficile d’échapper à l’impression qu’Israël n’acceptera de négocier sur le statut final qu’avec le nouvel état de fait sur le terrain comme point de départ.
Certains avaient coutume de dire qu’il n’y avait pas de partenaire palestinien pour les négociations. Je n’étais alors pas d’accord.
Aujourd’hui nous sommes dans une situation où des élections libres et honnêtes ont eu lieu et la légitimité de Mahmoud Abbas est indiscutable.
Le cessez-le-feu de facto annoncé par les factions palestiniennes est un autre pas positif et crucial.
Bien que ça n’ait pas été un préalable aux négociations, la réforme interne entreprise par les palestiniens est la preuve des nouveaux efforts du leadership pour bâtir une société basée sur la bonne gouvernance et sur la démocratie.
Cette réforme va en progressant, lentement mais sûrement. Le président Abbas doit maintenant s’attaquer à la corruption dans l’administration palestinienne, et sans équivoque.
D’autres étapes pour garantir le contrôle civil sur les forces de sécurité devront être franchies.
Les lents progrès de la réforme, couplés à l’extension continue des colonies et à la construction de la barrière, finissent par renforcer le soutien aux groupes radicaux. Ce fait est visible dans les élections parlementaires de juillet, comme nous l’avons déjà vu dans les élections locales.
Ainsi un nouveau paysage politique peut émerger avec des ramifications potentielles pour faire repartir le processus de paix.
Mais c’est aussi une occasion rêvée pour le Hamas et autres organisations de ce type.
Etant donné le passé du Hamas, ils doivent réaliser que nous avons de sérieux doutes sur le fait qu’ils soient prêts à abandonner leurs activités terroristes.
Mais il est temps pour eux de choisir ; s’ils s’engagent honnêtement dans un processus politique, avec toutes ses implications, et jouent le jeu, nous devons nous préparer à les regarder comme de futurs partenaires sur le chemin de la paix.
Mais ainsi que je l’ai dit il est temps pour eux de se décider ! Et de rejoindre ceux d’entre nous qui veulent voir deux états indépendants et démocratiques vivre côte à côte dans la paix et la sécurité.
Et à ceux qui en Cisjordanie , à Gaza et dans les pays de la région soutiennent les activités terroristes, ils doivent, eux aussi, se décider.
Le terrorisme ne pourra jamais être acceptable. Le terrorisme est une violation absolue des droits de l’homme fondamentaux et de la loi internationale.
Maintenant, laissez-moi me tourner vers les obligations de la communauté internationale.
A travers le Quartet en particulier, la communauté internationale a un rôle crucial à jouer en soutenant et en encouragent les partis à avoir du courage et de la volonté politique.
Le sommet de février dernier à Sharm el Sheik a été suivi en moins d’un an d’une première rencontre au sommet du Quartet. Ce qui a été positif. Mais ce n’était pas suffisant.
Nous, la communauté internationale devons faire plus si nous voulons continuer à être des instigateurs dignes de confiance de la Feuille de route ce qu’ont accepté les parties.
Nous devons aussi encourager et soutenir fortement toute initiative qui a pour but d’atteindre à une solution pacifique.
La seule initiative de cette importance a été la déclaration de Beyrouth de 2002.
Déclaration dans laquelle les membres de la Ligue Arabe pour la première fois unanimes, ont accordé à Israël leur complète reconnaissance en échange de son retrait total dans ses frontières de 1967.
Mon point de vue c’est que la communauté internationale ne peut pas jouer de rôle dans ce conflit si elle, ou certains de ses membres, abandonne sa foi dans la suprématie de la loi internationale.
Quelles que soient les assurances qu’Israël a reçues à cet égard, la communauté internationale doit continuer à réclamer qu’une solution au conflit soit basée sur les résolutions pertinentes des Nations Unies.
Pratiquement, cela signifie que la communauté internationale, à commencer par les membres du Quartet, doit faire respecter les principes suivants :
- Toute solution au problème des réfugiés palestiniens qui n’aurait pas été approuvée par les parties concernées dans des négociations directes ne sera pas acceptable
- Tout changement dans le statut de Jérusalem qui n’aurait pas été accepté par les parties concernées dans des négociations directes ne sera pas acceptable
Et finalement
- Tout changement des frontières d’avant 1967 qui n’aurait pas été accepté par les parties concernées dans des négociations directes ne seront pas acceptables.
Abandonner ces principes fondamentaux aurait de sérieuses conséquences pour la loi internationale.
Cela constituerait un renoncement à la suprématie de la loi internationale comme base de résolution des conflits et serait une tacite reconnaissance du droit d’acquérir des territoires par la force.
Le dommage juridique serait comparable au dommage politique. Il est hautement probable que dans ce conflit tout accord qui ne serait pas basé sur la loi internationale ne sera pas non plus juste, ni durable, mais seulement temporaire et illusoire.
Il y aurait beaucoup moins de chances de rencontrer l’approbation des Israéliens et des Palestiniens, des peuples du Proche Orient et de l’opinion publique internationale.
C’est pourquoi le futur de ce conflit, ainsi que celui du Proche Orient comme un tout, dépend de la manière dont nous et les parties concernées décideront d’utiliser les instruments qu’offre la loi internationale
Source : http://www.sweden.gov.se/
Traduction : CS pour ISM
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ONU
25 avril 2005