Israël - 11 mai 2005

Un diagnostic difficile et douloureux

Par Yonah Bargur

Traduit de l’hébreu par : Daniel Breslau L’auteur de ce texte est le père du défunt capitaine Ziv Bargur

Mais pourquoi serions-nous surpris ? Pourquoi protesterions-nous ?
Après tout, c’est le même gouvernement qui utilise la force et envoie ses unités d’élite contre des gens non violents, qui manifestent contre la construction du mur et contre l’enfermement de milliers de familles palestiniennes dans des ghettos à l’intérieur même de leurs villages, ce même gouvernement qui ne veut pas, et peut-être n’en est-il pas capable, s’occuper de la violence des ultra orthodoxes contre l’extension de la route N°6.

Ziv était chef de section dans le Bataillon 202 de Parachutistes. Il a été tué dans l’exercice de ses fonctions, il y a eu un an cette semaine.

Si sa vie n’avait pas été emportée aussi tôt, si vainement et si tragiquement, et s’il avait choisi de continuer dans l’armée, Ziv pourrait très bien être aujourd’hui commandant du Bataillon 202.

Mais ce ne sont que des "si seulement", des rêves impossibles et de vains fantasmes.

Ziv est parti. C’est un fait !

Le lieutenant colonel Guy Hazut est le commandant actuel du Bataillon 202. C’est un fait !

C’est lui le commandant du bataillon qu’un colon de la colonie de Brecha a blessé. C’est un fait !

Les gens, excepté certaines personnes intégres, acceptent ça avec résignation. C’est un fait !


En réponse à cet incident, un officier supérieur a déclaré qu’il prenait cette attaque très au sérieux et qu’il diligenterait une enquête sur l’incident dans les jours à venir.

Mais le colon déchaîné et ses compagnons ne risquent rien. Les Forces Israéliennes de Défense se contentent de prendre cette attaque au sérieux. Mais pas trop, et ils ne répondront sûrement pas sérieusement.

Le colon, ses amis et ses supporters, sont en sursis, pour quelques jours, simplement parce qu’ils appartiennent à cette population qui clame haut et fort que : "Des Juifs n’expulsent jamais des Juifs".

Mais des Juifs ont le droit, et ils y sont même encouragés, d’expulser des Arabes, de les harceler, de les maltraiter, et de les humilier.

Et le chef du conseil régional de Binyamin ne paraît pas trop déprimé par cet acte criminel.

Et le ministre Eldad peut déjà observer les résultats de son appel à la désobéissance civile ;

et certes il n’y a pas de condamnation de la part de ce groupe respecté qu’on appelle "The Yesha Rabbis".

La seule contribution du ministre Efraim Sneh, c’est que "les colons de Brechah et d’Yitzar ont franchi les lignes rouges", comme si jusqu’à présent ils n’agissaient que dans les limites du consensus.

Comme si déraciner des oliviers, confisquer des terres, attaquer des habitants palestiniens, harceler des soldats des IDF étaient du domaine des comportements légitimes.


Alors pourquoi devrions-nous nous inquiéter d'une attaque contre un commandant de bataillon de parachutistes. ?

Même si ce même commandant a osé attaquer le général du commandement central lors d’une conférence des officiers des IDF, il y a seulement un mois, en disant : "Nous n’avons aucun soutien. L’honneur des IDF est foulé aux pieds ici." (à Yitzar).

Et c’est ce même courageux chef de bataillon qui s’est dressé pour s’opposer à un de ses chefs de section, dans la haute tradition des parachutistes, quand le Général (le général de Division Yair Naveh, qui a défendu les colons de Yitzar après un autre incident) a soutenu les colons de Yitzhar.

C’est le même chef de combat, qui savait de quoi il parlait quand il disait "Je ne crains pas autant d’entrer dans un village palestinien comme je crains d’entrer à Yitzhar."


Mais pourquoi serions-nous surpris ?

Pourquoi protesterions-nous ?

Après tout, c’est le même gouvernement qui utilise la force et envoie ses unités d’élite contre des gens non violents, qui manifestent contre la construction du mur et contre l’enfermement de milliers de familles palestiniennes dans des ghettos à l’intérieur même de leurs villages, ce même gouvernement qui ne veut pas, et peut-être n’en est-il pas capable, s’occuper de la violence des ultra orthodoxes contre l’extension de la route N°6.

La blessure du lieutenant commandant Guy Hazut était lègère, mais elle a apporté un douloureux pronostic (le mot hébreu pour pronostic est : hazut) pour un état qui permet à un secteur entier de violer la loi, de vivre en marge, de prôner la désobéissance civile, d’attaquer les soldats et les commandants des IDF avec le soutien des rabbins, et même (celui de certains) à l’intérieur des IDF.

En vérité il n’y a plus de pronostic à faire : Le Yesha, cet acronyme pourrait vouloir dire : "Juifs pour promouvoir l’injustice" ou "Juifs qui détestent les Arabes" est déjà là. Depuis quelques temps déjà.

Et la question qui commence à me hanter c’est si nous allons continuer à soutenir cet état quand le sang des meilleurs de nos enfants coule au bénéfice des colons.

Ou une autre idée, pire que la précédente : peut-être vaut-il mieux que cet abîme vers lequel nous roulons ait été épargné au défunt capitaine Ziv Bargur, notre fils aimé.

Source : http://www.kibush.co.il/

Traduction : CS pour ISM