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ISM France - Archives 2001-2021

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Naplouse -

Parce que je suis cinglé !

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Et un autre soldat a visé un copain suédois, Greg (c’était son premier jour avec nous), et lui est littéralement tombé dessus.
Les femmes ont fait de leur mieux pour former un bouclier mais ça n’a pas empêché le soldat aux cheveux bouclés avec un petit grain de beauté sur la joue de diriger son M16 sur la tempe de Greg.
TOUS les soldats ont remarqué cet acte scandaleux et se sont mis à crier "Dye, Dye" ce qui signifie, nous l’avons su plus tard, "Stop, Stop" en hébreu.

Les yeux embrumés et ayant peu dormi, quinze internationaux se sont réveillés ce matin à 6h45 pour préparer la journée de cueillette d’olives à Deir Al Hatab, un village très proche de Naplouse.

Après un moment de détente où nous avons joué des airs sur une guitare minuscule, nous avons pu soulager la tension croissante, nous avons fait apparaître la motivation et l’énergie nécessaires pour soutenir nos amis fermiers palestiniens menacés par la colonie israélienne de Elon Morah – la même colonie qui touche le village de Salem.
Les militants internationaux étaient nouveaux dans l’ensemble, mais ils avaient deux jours d’expérience après avoir participé à la cueillete à Beit Furik.

Nous nous sommes entassés dans la fourgonnette de notre chauffeur de taxi et nous sommes partis de notre appartement comme un troupeau de clowns dans une coccinelle VolkWagen. La fourgonnette nous a conduit au village, cahotant sur les pierres , traversantdes eaux usées, et a effacé un peu de la tension de nos cous et de nos dos. Personnellement ça m’a aidée à me dégager un peu les poumons, alors qu’ils avaient été pris par un autre sérieux rhume.

Quand nous sommes sortis du taxi, une famille attendait notre arrivée. Elle voulait continuer jusqu’à leur sa terre, qui dès 8h30 avait été occupée par les soldats.
Nous l’avons accompagnée avec enthousiasme tandis que les hommes mettaient des échelles en bois sur les épaules et que les femmes portaient les bâches en paquets sur la tête.

Les internationaux ont préparé les caméras et les téléphones mobiles pendant que nous suivions. Dès que tout a été étalé sous le premier olivier et que nous nous sommes mis à cueillir les olives, une jeep est arrivée par la route du village. Sont sortis des soldats arrogants qui, la semaine précédente, avaient essayé de nous faire tous partir de la montagne.
Trois internationaux sont allés parler avec les soldats mais pour toute réponse, un soldat leur a jeté une pierre. Heureusement, elle a raté son but.

Les soldats se sont avancés pendant que l’équipe qui négociait reculait. Immédiatement, tout le monde a respecté son poste comme prévu et s’y est tenu tandis que les soldats s’approchaient et se mettaient à nous disperser sans raison. L’homme qui s’est avéré être le chef des troupes a serré la main du fermier palestinien et lui a tapoté le dos pendant que les autre soldats flanquaient des coups de pieds et tabassaient les internationaux.

Inutile de dire que nous étions plutôt perplexes quant à leur tactique et que nous ne comprenions pas bien après qui ils en avaient.

Mais ils ont mis les choses au clair quand ils nous ont dit : « Les Palestiniens peuvent ramasser leurs olives, mais vous ne pouvez pas être ici ».

Evidemment, nous n’étions pas là pour aggraver la situation et nous étions là seulement parce que la famille nous avait demandé de l’accompagner, aussi nous avons rapidement décidé de repartir pourvu que les soldats ne fassent rien aux Palestiniens.

Alors que nous expliquions notre position aux soldats et commencions à partir, ils ont repéré l’un des coordinateurs, Ahmad et lui ont demandé sa carte d’identité.

Comme il vient du camp de réfugiés de Balata, une des cibles favorites des forces israéliennes à Naplouse, ils ont immédiatement et violemment réagi et se sont mis à le tirer par les bras et les vêtements sans autre explication que : « Venez avec nous ! » .

Pourtant les soldats n’avaient pas le droit d’arrêter les internationaux, ils n’ont le droit d’arrêter à leur guise que les Palestiniens, mais comme nous savions à quel point ils sont agressifs nous n’avons pas eu d’autre choix que de le rassurer comme nous le pouvions - sinon il aurait pu subir une torture indescriptible s’il avait été arrêté.
C’est le danger que Ahmad qui n’a que 25 ans a couru toute sa vie, surtout quand il travaille et voyage avec nous.
Pourtant il continue à combattre l’occupation par la non violence, il est une véritable source d’inspiration pour tous les militants.



J’ai été la première m’accrocher à Ahmad pendant que je lui disais que je ne le laisserais pas partir. Je me suis collée à lui, et nous donnions l’impression de nous étreindre très étroitement, mais j’ai été terrifiée quand j’ai vu le soldat l’attraper par le cou et lui bloquer la tête alors que nous tombions par terre.

J’ai pensé qu’à coup sûr, ils allaient lui briser le cou . La peur qu’on ne mette sa vie en danger m’a envahie. Mon visage se pressait lourdement sur sa poitrine à cause de ce carambolage d’internationaux, et j’étais au bord des larmes. Quand par chance il a relevé la tête, il m’a regardé et a dit avec un sourire : « Haram ! C’est le Ramadan ! ».

Nous avons éclaté de rire ensemble alors même que nous nous tenions encore serrés l’un contre l ‘autre. Il voulait dire que c’était « Haram » - contre la volonté de Dieu - que d’avoir toutes ces femmes au-dessus de lui, mais je lui ai dit qu’il devait y avoir des exceptions pour cette situation.


Notre groupe était constitué d’hommes et de femmes de tous âges et de toutes origines, et tous jusqu’au dernier,avons été une cible. Les soldats avaient la carte d’identité d’Ahmad et ne voulaient pas la lui rendre, ni ne voulaient nous laisser indemnes.

Ils ont continué à bousculer tout le monde. Et à tabasser les internationaux présents, surtout ceux qui avaient des cameras.

C’était était un véritable chaos mais le plus organisé des chaos dont j’ai jamais été témoin de la part des militants. Personne n’a craqué , personne n’a lâché, et tout le monde s’est occupé des autres, à savoir que les Palestiniens continuaient à ramasser en dépit du souk autour d’eux.
Ils étaient incroyables !


A plusieurs reprises nous avons essayé de parler aux soldats qui vérifiaient la carte d’identité d’Ahmad pour essayer de la récupérer et partir mais, pour la plupart, ça ne les intéressaient vraiment pas, comme nous le faisaient comprendre leurs visages absents et méchants.

Nous avons même essayé de nous lever et de faire partir Ahmad pendant que Kate négociait avec le capitaine mais ses copains, désobéissant ouvertement aux ordres, nous ont suivis alors que nous partions et ont remis ça pour les coups.
Mais cette fois, ils en avaient vraiment après les internationaux

Quand nous leur avons demandé pourquoi ils n’arrêtaient pas de nous tabasser, le jeune soldat aux cheveux bouclés a répliqué "PARCE QUE JE SUIS CINGLE".

Un autre a accusé un des militants d’avoir frappé un soldat au visage. Et un autre soldat a visé un copain suédois, Greg (c’était son premier jour avec nous), et lui est littéralement tombé dessus.
Les femmes ont fait de leur mieux pour former un bouclier mais ça n’a pas empêché le soldat aux cheveux bouclés avec un petit grain de beauté sur la joue de diriger son M16 sur la tempe de Greg.

TOUS les soldats ont remarqué cet acte scandaleux et se sont mis à crier « Dye, Dye » ce qui signifie, nous l’avons su plus tard, « Stop, Stop » en hébreu.
Je suppose que finalement, ils ont eu une sorte de crise de conscience ou peut-être un sursaut moral et réalisé que tirer à bout portant dans la tête d’un international n’était pas casher.

Ils ont finalement obéi aux ordres : ils se sont retirés, nous ont tous laissés partir et ils ont même rendu la carte d’identité au maire du village.

Nous étions tous désarçonnés de leur brutalité..
Les internationaux qui étaient venus là pour la première fois ont exprimé à quel point ils étaient indignés de la conduite du soldat.

Evidemment, moi je n’étais pas vraiment surprise, plutôt surprise de ce que les Palestiniens et les militants avaient rudement bien réagi. A la fin personne n’a été arrêté, les Palestiniens ont continué la cueillette et les plus graves blessures n’auront été que des ecchymoses. ; quoique je souffre d’une sensation de coups de fouet.

Ce que nous ne savions pas à ce moment là, c’est qu’il y avait au moins un journaliste qui prenait des photos du haut de la colline, mais le soldat l’a attrapé et a détruit toutes ses photos. Par chance, nos compagnons des media ont fait un bon boulot en filmant et en photographiant, et nous avons pu partir avec pas mal d’images, résultat d’une réaction rapide et d’une pratique dissimulée..

Comment je me sens après tout ça ? Personnellement, je suis simplement heureuse d’avoir pu agir dès le premier jour. Mais je dois dire que la nouvelle vague de militants me rassure : la revendication pour la liberté et la justice en faveur de la Palestine va continuer, se propager dans tous les cercles et finira par jouer positivement sur ce qu’il adviendra de la situation.

Etre remercié à la fin de cette journée par le maire du village - même si nous n’avons, en réalité, pas fait beaucoup plus que de nous faire botter les fesses - a été agréable, mais c’était encore mieux de voir la famille partir avec des sacs pleins d’olives.

Je ne peux m’empêcher de penser au symbolisme du rameau d’olivier et comme c’est atroce que les Palestiniens soient obligés de tellement souffrir même après tant de tentatives de tout le peuple palestinien pour gagner la paix .

Ce fut un jour très long mais j’espère que nos témoignages seront utiles à tous ceux d’entre vous qui ne pouvez être ici avec nous ou à ceux d’entre vous qui ne savez simplement pas ce qui se passent.

Paix !

Source : www.palsolidarity.org/

Traduction : CS pour ISM-France

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