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Cisjordanie - 9 janvier 2013
Par Khaled Amayreh
Mahmoud Abbas menace une nouvelle fois d’un effondrement de l’Autorité Palestinienne [AP] si l’attitude israélienne reste sans changement. Nombreux sont ceux qui estiment que cette fois-ci, Abbas est sérieux... Article paru sur Al-Ahram Weekly le 2 janvier 2013.
Frustré par la poursuite de l’expansion coloniale israélienne en Cisjordanie en dépit des critiques internationales, le chef de l’Autorité palestinienne de Ramallah, Mahmoud Abbas, a cette semaine menacé de dissoudre le régime palestinien d’autonomie si le prochain gouvernement israélien continuait à saboter tout espoir de paix. Des élections générales sont programmées le 22 janvier prochain en Israël, et beaucoup d’observateurs prévoient qu’elles produiront un gouvernement d’extrême-droite.
Des enfants brandissent des drapeaux palestiniens et du Fatah pendant une célébration marquant le quarante-huitième anniversaire du mouvement, le 31.12.2012, Place de la Mangeoire à Bethléem, en Cisjordanie occupée (Photo : AP)
S’exprimant lors d’une interview avec le journal Ha'aretz, Abbas a expliqué qu’il ne patienterait que quelques semaines et que si l’attitude israélienne ne changeait pas, il réservait une véritable surprise pour les Israéliens et le reste du monde.
« Si le prochain gouvernement israélien refuse d’honorer des engagements pour la paix et continue à voler nos terres et à construire des colonies, je demanderai à Binyamin Netanyahu de s’asseoir à ma place. Je lui balancerai les clés et je partirai. »
Abbas a dans le passé souvent menacé de dissoudre l’AP mais sans aller jusqu’à passer à l’acte. Mais à présent, des sources proches du chef palestinien vieillissant, aussi bien que quelques analystes sérieux, sont certains que « cette fois-ci, ce sera différent. »
« Cette fois il semble sérieux. Il semble s’être rendu compte que la situation ne peut pas continuer comme cela, Israël défiant le monde entier en volant notre terre et en tuant toute perspective d’établir un état Palestinien viable, avec Jérusalem comme capitale, » a déclaré Abbas Zaki, un officiel haut placé de l’Organisation de Libération de la Palestine [OLP] et un confident du chef de l’AP.
« La communauté mondiale nous a accordé la reconnaissance comme État observateur. Si le monde n’est pas capable de faire respecter ses propres décisions, c’est son affaire. Mais en ce qui nous concerne, nous ne pouvons plus être les complices de ce genre de supercherie. »
D’autres officiels palestiniens, s’exprimant sous la condition de l’anonymat, ont déclaré qu’Abbas commettrait un suicide politique s’il n’appliquait pas ses menaces.
« Le peuple palestinien est à présent sans illusion et il est à bout de patience, » déclare un de ces officiels. « L’heure de prendre une décision définitive est venue, et si nous continuons à nous plaindre, à répéter les platitudes habituelles et à lancer des menaces sans effet, personne ne nous croira plus, » ajoutent d’autres.
Provocations incessantes
Depuis que l’Assemblée Générale des Nations Unies a reconnu la Palestine comme État observateur en novembre dernier, Israël a pris un certain nombre de décisions tout à fait provocatrices et fortement critiquées consistant à installer des milliers d’unités d’habitations supplémentaires dans les colonies dans le secteur de Jérusalem et dans d’autres zones de la Cisjordanie sous occupation.
Les derniers projets de colonisation juive incluent une colonie énorme devant être construite entre Jérusalem Est et la colonie de Maali Adumim, quatre kilomètres à l’est. La colonie prévue diviserait la Cisjordanie en deux moitiés, coupées l’une de l’autre, et mettrait un terme à n’importe quelle continuité démographique entre la Jérusalem Est arabe et sous occupation, et le reste de la Cisjordanie . Ce serait la fin de tout espoir pour les Palestiniens d’avoir un jour un État avec Jérusalem Est comme capitale.
La direction de l'AP, comme le monde arabo-musulman, considèrent que les projets israéliens de colonies signent la mort de ce qui reste du processus de paix en panne. En outre, l'essentiel de la communauté internationale, en particulier l'Europe et les Etats-Unis, ont dénoncé les décisions israéliennes, appelant Tel-Aviv à reconsidérer ses projets d'expansion des colonies.
Mais le gouvernement israélien a réagi aux critiques internationales avec son entêtement caractéristique, le Premier ministre Netanyahu se gaussant des critiques en disant, "Nous bâtissons notre propre capitale ; ça ne regarde personne."
Selon des sources palestiniennes bien informées à Ramallah, l'attitude de défi de Netanyahu a convaincu la direction de l'AP que "Netanyahu ne sera jamais un honnête partenaire de paix." "Je pense que Netanyahu est un extrémiste. C'est triste qu'il nous ait fallu autant de temps pour nous en rendre compte," a dit Hani Al-Masri, chroniqueur basé à Ramallah et proche des décideurs de l'AP.
Une décision pas facile
Dissoudre le régime de l'AP ne sera pas une décision facile. Jusqu'à un million de Palestiniens dépendent pour leur subsistance des salaires payés par l'AP à quelques 175.000 employés et fonctionnaires, dont environ 70.000 personnels de sécurité chargés du "maintien de l'ordre". D'autres supervisent la coordination sécuritaire avec Israël, d'une importance considérable pour le régime sioniste.
Mais les partisans de la dissolution de l'AP arguent que le régime de Ramallah est déjà devenu un sérieux handicap pour la cause nationale palestinienne et la lutte pour la libération et la justice. Ahmed Qurei, ancien premier ministre de Yasser Arafat, est un ardent défenseur de la dissolution de l'AP si "il n'y a pas d'autre solution pour parvenir à notre liberté."
"Je ne pense pas qu'un seul Palestinien accepterait d'échanger l'Autorité [palestinienne] pour un Etat palestinien. Nous devons donc être disposés et prêts à dissoudre l'AP s'il faut en passer par là pour établir un véritable Etat avec Jérusalem comme capitale."
Plusieurs chroniqueurs ont toutefois critiqué la menace d'Abbas de dissoudre l'AP, l'un d'entre faisant valoir qu'Abbas n'a pas le droit de le faire. "L'AP n'est pas un bien personnel de Mahmoud Abbas dont il peut disposer comme il veut. Il doit soumettre la question au peuple palestinien," a dit Talal Okal, journaliste et analyste politique éminent.
Outre l'impasse politique résultant de l'intransigeance israélienne et de l'incapacité de la communauté internationale de faire pression ou d'obliger Israël à renoncer à son entreprise coloniale aux dépens des Palestiniens, l'AP est confrontée à une crise financière majeure sans précédent depuis la signature des Accords d'Oslo il y a 20 ans. Elle n'a pas payé les salaires, suscitant incertitude et rumeurs sur une dissolution proche. Ceci coïncide également avec une intensification des grèves et des protestations par les enseignants et autres fonctionnaires.
Le mois dernier, la Ligue arabe a promis d'aider l'AP à hauteur de 100 millions de dollars par mois pour compenser les recettes fiscales et douanières retenues par Israël comme punition pour la réalisation diplomatique palestinienne à l'ONU. Cependant, à ce jour, pas un centime de la somme promise n'a été transféré dans les coffres du régime de Ramallah.
Cette semaine, le chef de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, et le ministre égyptien des Affaires étrangères, Mohammad Kamel Amr, sont arrivés à Ramallah pour "discuter de la crise". Les deux hôtes n'avaient pas grand chose à dire pour réconforter l'AP, à part lui conseiller la patience.
Un responsable de l'Autorité a accusé l'administration Obama de "donner instruction aux régimes arabes de revenir sur leurs engagements financiers vis-à-vis de l'AP, pour l'obliger à faire davantage de concessions à Israël."
Traduction : CZ pour Info-Palestine.net & MR pour ISM-France.
Source : Al Ahram
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Khaled Amayreh
9 janvier 2013