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Gaza -

Accuser les victimes de cette accès de folie meurtrière défie à la fois la moralité et la raison

Par

> s.milne@guardian.co.uk

La tentative des hommes politiques et des médias occidentaux de présenter le carnage de cette semaine dans la Bande de Gaza comme un acte de légitime défense israélienne – ou au mieux la dernière phase d'un conflit fatiguant entre deux bords somme toute équivalents – a atteint des proportions incroyables.

Accuser les victimes de cette accès de folie meurtrière défie à la fois la moralité et la raison


Dessin de Carlos Latuff

Depuis que le vice-ministre israélien de la défense Matan Vilnai a lancé la semaine dernière son terrible avertissement que les Palestiniens subiraient un "holocauste" s'ils continuaient de tirer des roquettes artisanales sur Israël, le bilan des souffrances est devenu encore plus clair. Plus de 120 palestiniens ont été tués à Gaza par les forces israéliennes au cours de la dernière semaine, dont 1 sur 5 était un enfant et plus de la moitié des civils, selon le groupe israélien pour les droits de l'homme B'Tselem.

Pendant la même période, 3 israéliens ont été tués, dont 2 soldats qui avaient pris part aux attaques.

Quelle fut alors la réponse du Secrétaire aux Affaires Etrangères britannique, David Miliband, à cette folie meurtrière ? Ce fut de rejeter la faute des "nombreuses victimes civiles" sur "l'augmentation significative", pendant la semaine, des attaques palestiniennes à la roquette et "la réponse israélienne", de condamner les tirs de roquettes comme "actes terroristes" et de défendre le droit d'Israël à la légitime défense "selon la loi internationale".

Ce ne fut bien sûr rien de tel – pas plus qu'ont été évoquées les 40 années d'occupation israélienne des territoires palestiniens, son expansion continue des colonies ou son refus d'autoriser le retour des réfugiés expulsés.

Rien non plus de bien nouveau sur le poids unilatéral des victimes et du malheur de la semaine dernière, mais l'écart est certainement en train de se creuser. Après l'élection du Hamas il y a deux ans, Israël – soutenu par les USA et l'Union Européenne – a imposé un blocus économique punitif, qu'il a renforcé au cours des mois passés en un siège total de la Bande de Gaza, y compris le fuel, l'électricité et les fournitures essentielles.

Parce que l'évasion de masse de janvier par la frontière égyptienne a montré que la punition collective ne marcherait pas, Israël a opté pour une escalade militaire. Sur le terrain, cela se traduit par le fait qu'au plus fort de l'Intifada, de 2000 à 2005, quatre Palestiniens ont été tués pour 1 Israélien ; en 2006, c'était 30 ; l'année dernière, le ratio était de 40 pour 1. Dans les trois mois consécutifs à la conférence d'Annapolis pour la paix au Moyen-Orient, organisée par les USA, 323 palestiniens ont été tués, comparés aux 7 israéliens, dont 2 étaient des civils.

Mais la réponse des USA et de l'Europe est d'accuser les principales victimes pour une crise qu'ils ont appuyée à chaque étape. Au cours d'entretiens avec des dirigeants palestiniens ces derniers jours, les présentateurs de la BBC ont insisté sur le fait que les roquettes palestiniennes ont été "le point de départ" de la violence, comme si l'occupation elle-même n'existait pas.

En Cisjordanie , d'où aucunes roquettes ne sont tirées et où l'administration de Mahmoud Abbas soutenue par les USA maintient un cessez-le-feu, il y a eu 480 attaques militaires israéliennes au cours des 3 mois passés et 26 palestiniens ont été tués. Par contraste, les roquettes qui partent de Gaza, supposées être la justification du dernier massacre israélien, ont tué au total 14 personnes en 7 ans.

Comme n'importe quel autre peuple, les Palestiniens ont le droit de résister à l'occupation – ou de recourir à la légitime défense – qu'ils choisissent ou non de l'exercer. En dépit du désengagement d'Israël en 2005, Gaza reste un territoire occupé, à la fois légalement et dans la réalité. C'est la plus grande prison à ciel ouvert, dont les accès à la terre, à la mer et à l'air sont contrôlés par Israël, qui y conduit des opérations militaires à volonté. Les Palestiniens peuvent diverger sur les tactiques de résistance, mais la position dominante (si elle n'est pas celle d'Abbas) est depuis longtemps que sans pression armée, leur poids dans les négociations sera inévitablement plus faible. Et si on peut objecter que les roquettes sont aveugles, c'est un argument qu'Israël ne peut certainement pas mettre en avant, étant donné son palmarès effrayant de victimes civiles tant dans les territoires palestiniens qu'au Liban.

La vérité est que le contrôle du Hamas à Gaza est le résultat direct du refus des USA d'accepter le choix démocratique des Palestiniens en 2006 et sa tentative secrète de renverser par la force l'administration élue, en se servant de son homme de main du Fatah, Muhammad Dahlan. Comme confirmé par les documents révélés par le magazine US Vanity Fair – et également transmis au Guardian – George Bush, Condoleezza Rice et Elliot Abrams, le conseiller adjoint à la sécurité nationale des USA (célèbre pour l'IranGate), ont fait passer de l'argent liquide, des armes et des instructions à Dahlan, en partie par des intermédiaires arabes comme la Jordanie et l'Egypte, pour provoquer une guerre civile palestinienne.

Lorsque les preuves de l'accumulation d'armes ont émergé, le Hamas a pris les devants du plan US avec sa propre prise de contrôle de Gaza, en juin dernier. David Wurmser, qui a démissionné de son poste de conseiller en chef pour le Moyen-Orient auprès de Dick Cheney, déclare : "Ce qui est arrivé était moins un coup d'Etat du Hamas qu'une tentative de coup d'Etat du Fatah déjoué avant qu'il ne puisse se produire."

Hier, Rice a tenté de défendre la tentative US manquée de renverser les résultats des élections palestiniennes en invoquant le soutien de l'Iran au Hamas. Les attaques israéliennes sur Gaza vont vraisemblablement reprendre une fois qu'elle aura quitté la région, même si personne ne croit qu'elles arrêteront les roquettes. Certains, au gouvernement israélien, espèrent qu'elles affaibliront néanmoins le Hamas, prélude à une poussée de Gaza dans les bras réticents de l'Egypte ; d'autres espèrent ramener Abbas et son entourage à Gaza après qu'ils aient écrasé le Hamas, peut-être avec l'aide d'une force internationale intérimaire pour sauver la face du président palestinien.

Aucune ne semble être une option sérieuse, parce que le Hamas ne peut pas être écrasé par la force, même par le bain de sang que certains envisagent.

La troisième option, pleine de bon sens, soutenue par 64% d'Israéliens, est de saisir l'offre du Hamas – réitérée par son leader Khalid Mish'al pendant le week-end – et de négocier une trêve. C'est une démarche qui séduit non seulement des hommes politiques israéliens de gauche, comme Yossi Beilin, mais aussi un nombre grandissant de personnalités de droite, dont l'ancien conseiller à la sécurité d'Ariel Sharon, Giora Eiland, l'ancien patron du Mossad, Efraim Halevy, et l'ex ministre de la défense Shaul Mofaz.

Cependant, les USA sont résolument opposés à toute négociation avec ce qu'ils ont depuis longtemps étiqueté comme organisation terroriste – ou autorisent n'importe qui à faire de même, y compris d'autres Palestiniens. Comme la fuite dans les journaux américains le confirme, Rice a effectivement chargé Abbas de "faire chuter" le gouvernement d'unité nationale Hamas-Fatah à La Mecque l'an dernier, une décision prise après la prise de contrôle préemptive du Hamas.

Mais pour les Palestiniens, l'unité nationale est une nécessité absolue s'ils veulent avoir la moindre chance d'échapper à un monde de cantons emmurés, de checkpoints, de routes ethniquement séparées, à la dépossession et à l'humiliation.

Que peut faire d'autre Israël pour stopper les roquettes, demandent ses supporters ?

La réponse est on ne peut plus évidente : mettre fin à l'occupation illégale des territoires palestiniens et négocier un règlement juste pour les réfugiés palestiniens, ethniquement nettoyés il y a 60 ans – qui, avec leurs familles, représentent la majorité des 1,5 million de Gazaouis. Toutes les factions palestiniennes, y compris le Hamas, acceptent ceci comme base d'un règlement permanent ou la fin illimitée d'un conflit armé.

Entre temps, accepter la trêve, échanger les prisonniers et lever le siège. Les Israéliens semblent être de plus en plus nombreux à l'accepter – mais la réalité sinistre qui se profile, c'est que beaucoup de sang va devoir encore couler avant que ce soit accepté à Washington.

Source : The Guardian

Traduction : MR pour ISM

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