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USA - 2 mai 2005
Par Junaid Alam
M. Junaid Alam est co-editeur du journal étudiant de gauche Left Hook (http://www.lefthook.org), et fait ses études à Northeastern University. On peut le joindre à alam@lefthook.org. Article paru sur Counterpunch le 29 avril 2005
Depuis des décennies, Israël tâche de fermer le cercueil qu'il a depuis longtemps préparé pour les palestiniens en enfonçant les clous de la violence politique, économique, et militaire.
Cette méthode n'a jamais suffi.
Trop crue, trop dure et trop évidente, elle n'a pas réussi à éteindre la flamme du défi palestinien et ne réussit qu'à allumer l'étincelle de l'indignation internationale.
Alors, les apologistes d'Israël ont saisi un nouveau moyen de violence intellectuelle: le canard de "l'anti-Sémitisme nouveau".
Ceci est un corbillard peu coûteux et sans valeur dans lequel l'indigène palestinien peut être jeté et enseveli hâtivement pendant que nous nous taisons aux Etats Unis.
Qui entre nous, après tout, veut être marqué du label terrifiant d' "anti-Sémite"?
Même conforté du fait que cette accusation n'est qu'une calomnie, peu nombreux sont les activistes et penseurs qui sont prêts à la contrer effectivement, se repliant souvent sur des protestations qu'ils ne sont pas, en fait, anti-Sémites.
Il est possible, néanmoins, de s'adresser contre cette accusation d'une manière qui jette la lumière sur l'attitude raciste des supporters d'Israël et qui les expose comme étant irrémédiablement concentrés sur eux-mêmes.
Le premier pas de cette démarche est de comprendre qui adresse ces accusations d'anti-Sémitisme aux activistes pro palestiniens.
Déjà nous connaissons bien la vue générale: les accusateurs sont des joueurs ayant des relations bien placées invariablement enracinées dans des cliques politiques puissantes, des groupes d'études élites, des publications de droite, et d'autres institutions de millions de dollars - autrement dit, les "alliés" habituels des victimes du racisme partout.
Mais au delà de ceci il serait bien de comprendre que les accusateurs sont, au delà de tout, des magiciens.
Tout magicien digne de ce nom peut investir l'ordinaire de pouvoirs magiques. Dès le début, le champion d'Israël agite sa baguette et réussit ce tour de force sur l'activiste pro palestinien.
Car l'activiste - un jeune étudiant, un enseignant ou tout autre citoyen concerné - perd son humble statut d'une personne plus ou moins ordinaire dès qu'il ouvre sa bouche pour défendre le palestinien déraciné et spolié.
Il est catapulté dans une sorte de force de l'histoire mondiale, faisant partie d'une conspiration, pour utiliser le vocabulaire des sycophantes pro israélien, dont le but est de "détruire Israël", "de l'attaquer vicieusement et de le démoniser", et même peut-être de "liquider les juifs".
Il n'est pas clair comment l'activiste peut devenir une grande puissance capable de confronter, sans aller jusqu'à "détruire", un état disposant des forces militaires les 4èmes au monde par leur nombre et deux cents ogives nucléaires payées des impôts de l'activiste, rien de moins.
Une telle transformation impressionnante ne s'explique que par la magie.
Ce tour de main nous amène à un autre attribut du magicien: la possibilité de faire disparaître des choses. Car, comme l'activiste devient une force omnipotente, on fait disparaître le palestinien.
Cette rhétorique terrifiante suggère que le méchant activiste veut "avoir" Israël et rejette complètement la réalité actuelle de la campagne continue d'exterminer les palestiniens en tant qu'entité nationale et politique.
Ce deuxième tour de main reprend sur le plan idéologique ce que l'ancien premier ministre israélien, Golda Meir, a déclaré sur le plan politique: "Les palestiniens n'existent pas".
Le double procès de déception :
• (1) élever l'activiste au niveau d'omnipotence d'un côté, et
• (2) dénigrer le palestinien au niveau de la non-existence de l'autre. Il est plutôt un commentaire révélateur de l'attitude des sionistes.
Si nous l'examinons de près, nous pouvons voir qu'il fournit des amples preuves des traits précis qu'ils essaient désespérément de nier: la concentration sur soi, née de la déception numéro (1), et le racisme, né du numéro (2).
Cet aspect de concentration sur soi de l'attitude sioniste semble presque axiomatique.
Après tout, comment est-il possible de tordre et de déformer les tentatives de défendre les palestiniens qui souffrent sous une occupation militaire brutale et coloniale - une occupation qui comprend les assassinats, les tortures, les abus, les destructions de maisons, les points de contrôle, et le vol des terres - comme une "attaque contre Israël" ou comme "anti-Sémitique"?
Selon cette logique spécieuse, des tentatives de défendre des noirs du lynchage par le Ku Klux Klan devient des "attaques contre les blancs" et sont "anti-blanches".
Est-ce que le lynchage des noirs devient acceptable grâce à la "blancheur" de ceux qui assassinent les victimes?
Ne serait-il également abhorrent s'il recueillait le soutien de 5% des blancs ou 95%?
Ce ne sont que des gens qui se voient comme membres d'une race de maîtres qui peuvent se permettre de croire que la moralité d'une action est déterminée par la composition raciale du groupe qui l'effectue.
En outre, aucun activiste pro palestinien ne s'intéresse à Israël ni dans un sens ni dans un autre de façon abstraite. Les sionistes se flattent s'ils pensent autrement. Israël ne figure dans la situation que du fait que les palestiniens sont fusillés, encerclés, et appauvris par Israël.
Il faut une concentration sur soi vraiment énorme de la part des apologistes pro israéliens pour qu'ils puissent éviter de constater ce fait tellement évident.
Mais il est nécessaire d'examiner plus en profondeur la chose.
Qu'est-ce qu'il y a derrière cette masse énorme de concentration sur soi?
Comment est-il possible d'oublier cette souffrance disproportionnée infligée aux palestiniens, comme font les sionistes quand ils sautent dans les hystériques au sujet des activistes "anti-Sémitiques"?
A la racine de tant de concentration sur soi est le rejet des palestiniens comme inexistants, un rejet abrégé par la "magie" sioniste selon laquelle les palestiniens sont, comme je l'ai déjà exprimé, "dénigrés au niveau de la non-existence".
Ce rejet est lui-même enraciné dans la psychologie qui accompagne toujours, et qui soutient, le colonialisme, le même colonialisme dont les sionistes clament à haute voix qu'ils ne sont pas coupables.
Car pour brutaliser systématiquement un peuple, le déraciner, lui voler ses biens, le torturer, et l'éliminer, il est d'abord nécessaire de le déshumaniser de le rendre non humain autant que possible, pour pouvoir plus facilement rationaliser les assassinats et sa destruction.
La suggestion que des êtres humains sont des bêtes affreuses conforte une conscience troublée.
Et ceci est précisément ce qu'ont fait les israéliens.
On peut citer l'ancien premier ministre israélien Menachim Begin, qui en 1982 a qualifié les palestiniens comme des "bêtes qui se promènent sur deux jambes".
Ou l'on peut citer Ehud Barak, un autre ancien premier ministre israélien, qui en 2000 a déclaré que "Les palestiniens sont comme des crocodiles".
Il y a également l'ancien chef de l'armée israélienne, Rafael Eitan, qui a dit en 1983, "Nous ferons usage de la force ultime jusqu'à ce que les palestiniens viennent vers nous à quatre pattes".
Ou pour prendre un chef militaire plus récent, il y a Moshe Ya'alon, qui en 2002 a qualifié les palestiniens de "cancer" qui nécessite ou "l'excision" ou la "chimiothérapie".
Et puis il y a également le Rabbin Yaacov Peerin, qui, lors d'une cérémonie tenue pour "honorer" Baruch Goldstein - considéré comme un héros parmi les colons israéliens pour avoir assassiné avec son fusil des civils musulmans dans une mosquée - a dit "Un million d'arabes ne vaut pas un simple ongle d'un juif".
Tout reprend maintenant sa place.
Les israéliens et leurs alliés ne peuvent aucunement comprendre pourquoi une personne de conscience peut se soucier des palestiniens - puisqu'ils n'ont aucune conscience eux-mêmes.
Ayant adopté une attitude vitriolaire et raciste envers les palestiniens comme résultat direct de leur brutalisation de ceux-ci, ils s'interdisent toute possibilité de penser clairement.
Selon leur pensée empoisonnée, qui pourrait se soucier des "bêtes bipèdes" ou des "crocodiles"?
Evidemment, personne.
Donc le seul motif "réel" des activistes pro palestiniens doit être une haine innée d'Israël.
Dans leurs tentatives hystériques de marquer les pro palestiniens comme des anti-Sémites, alors, les sionistes se révèlent comme des ultra Sémites: ils se voient racialement supérieurs à leurs victimes, et ils gardent des attitudes fondamentalement racistes envers eux.
En outre, ils prétendent que leurs victimes ne sont pas vraiment des victimes précisément parce qu'ils les considèrent des bêtes sauvages (ou pires encore) en comparaison avec eux-mêmes.
Et en conséquence de cette cécité morale, tout soutien à leurs victimes est automatiquement est instantanément compris comme une attaque contre eux, quand en fait il n'est qu'une "attaque" contre leur racisme - une attitude connue également parmi des gens normaux sous le nom de défense des opprimés.
Cette incapacité absolue de faire la distinction entre une "attaque" contre le racisme sioniste et une attaque contre le groupe ethnique - et contre la nation que le sionisme prétend représenter - indique combien les sionistes sont entrelacés dans leur racisme.
Face à l'accusation d'anti-Sémitisme, nous ne devons plus ni jamais assumer une posture défensive faible ni accepter ce canard. Nous devons plutôt appeler les choses par leur nom et insister sur notre opposition à toute forme de suprématie raciale, y compris l'ultra Sémitisme.
Cette arme idéologique est alignée sur les chars israéliens et les bulldozers et elle les dépasse tous par sa capacité de détruire. Notre tâche donc est d'y faire face de façon sérieuse et de l'exposer clairement pour ce qu'elle est: tout simplement un exemplaire de plus d'une liste infinie d'exemples du racisme sioniste.
"Quand je dis la vérité, ce n'est pas pour convaincre ceux qui ne la connaissent pas, mais pour défendre ceux qui la connaissent."
William Blake
Source : www.counterpunch.org/
Traduction : Robert Thompson
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