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Liban - 30 juillet 2006
Par Rashid I. Khalidi
Dans quels passages de l'analyse de la guerre impliquant Israel, le Liban et la Palestine des cercles du gouvernement israélien et américain, de la machine bien-huilée des relations publiques qui travaille pour eux, et d'une grande partie des médias américains, sommes-nous informés de la lutte contre le terrorisme d'un Etat assiégé ?
Colère dans le monde Arabe et ailleurs aujourd'hui le 30 juillet 2006
L'argument de base est qu'Israël "répond à la violence terroriste", et que la seule véritable question est : Dans combien de temps l'armée israélienne, soutenue par la détermination américaine, gagnera-t-elle ?
Mais ce scénario n'a pas grand chose à voir avec la réalité au Moyen-Orient.
Il n'y aura aucune "destruction" du Hezbollah, et aucun "déracinage" de son infrastructure ou de celle du Hamas, quelque soient les résultats du siège israélien de Gaza et de ses attaques impitoyables contre le Liban.
La rhétorique au sujet du "terrorisme" a hypnotisé ceux qui la répète, les aveuglant au fait que le Hezbollah et le Hamas sont des mouvements populaires profondément enracinés qui se sont développés en tant que réponse à l'occupation--de la Cisjordanie et de Gaza depuis presque quarante ans, et du Sud Liban de 1978 à 2000.
Quoi que l'on puisse dire au sujet de l'insensibilité des deux mouvements qui visent des civils (un sujet sur lequel les partisans d'Israël n'ont pas grand chose à prêcher), les deux mouvements ont gagné des victoires impressionnantes aux élections et ont fourni des services sociaux et une protection à leurs peuples.
Le gouvernement libanais ne fera pas d'offre à Israël sur le Sud Liban. Au Liban, les divisions profondes concernant la présence militaire du Hezbollah avant le début des bombardements israéliens ont disparu rapidement.
Le premier ministre libanais Fouad Siniora, le porte-parole libanais Nabih Berri, Saad Hariri (fils du premier ministre assassiné Rafik Hariri), le Général Michel Aoun, le Président Émile Lahoud et d'autres principaux responsables du pays, de toutes confessions et de toutes tendances politiques, et l'opinion publique libanaise ont été encore une fois horrifiés par les ravages imposés à l'infrastructure et à la population civile sans défense de leur pays par Israël.
En effet, rares sont les voix libanaises qui soutiennent la position Israélo-américaine alors que cette attaque sauvage contre le Liban continue--et parce qu'elle est en grande partie absente sur les télévisions américaines, cela ne signifie pas qu'elle est invisible dans le reste du monde.
L'Iran et la Syrie, les principaux alliés du Hezbollah, ne sortiront pas plus faibles de ce conflit, même si cela se développe en guerre régionale impliquant l'un ou l'autre de ces pays. Les Etats-Unis les menacent tous les deux depuis plusieurs années, depuis que le 11 Septembre a libéré le cowboy qui était en George W. Bush.
Leurs positions ont été renforcées par la stupidité de la politique américaine envers le Hamas et le Hezbollah, ainsi que depuis qu'Israël est tombé dans le piège du Hezbollah et a réagi avec exagération à la capture de deux de ses soldats et aux blessures de plusieurs de ses civils mi-Juillet.
Une guerre avec l'un de ces pays, ou tout effort sérieux pour renverser l'un de leurs régimes répugnants, mènera à l'affaiblissement d'Israël ou des Etats-Unis ou des deux, s'ils agravent cette dangereuse crise internationale.
Les régimes Arabes pro-américains qui, au début, se sont bêtement alignés sur les Etats-Unis et Israël au sujet de la crise libanaise ont montré leurs regrets en faisant marche arrière aussi vite que possible.
L'opinion publique dans leurs pays est massivement contre leur position (Al Jazeera est en hausse ; alors que Al Arabiya dirigé par les Saoudiens est en baisse).
Heureusement pour l'administration Bush et Israël, aucun de ces pays n'a une fonctionnement démocratique.
Le résultat de cette crise, s'il en ressort un, sera un nouvel affaiblissement de ces régimes. Ils peuvent temporairement augmenter leur dépendance à l'égard des Etats-Unis. Mais ils seront plus faibles qu'ils ne l'étaient avant le début de cette crise, et leurs oppositions, que ce soit au Caire, à Amman ou Riyadh, se sont renforcées.
La puissance régionale d'Israël diminue quand celui-ci intensifie l'utilisation de la force contre les Palestiniens et les Libanais.
Cela a été le cas au cours des dernières décennies : l'invasion du Liban en 1982, le premier Intifada de 1987-90 et la victoire du Hezbollah sur Israël au Sud Liban au cours des années pré-2000 sont tous des exemples--et cela se reproduira.
Les Etats-Unis ont découvert la même chose (au moins pour la majorité de la population parmi la communauté qui se base sur la réalité, et non parmi les dingues qui dirigent notre politique au Moyen-Orient), quand une utilisation massive de la force en Irak a produit un affaiblissement de la position des Etats-Unis dans l'ensemble du Moyen-Orient.
Les Etats-Unis font l'expérience d'un déclin de leur pouvoir et de leur influence dans la région qui est inégalé depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.
Tout dépend si une guerre israélienne, américaine ou Israélo-Américaine avec la Syrie et, bien plus sérieux, si une guerre avec l'Iran peut être évitée. Si l'escalade de ce qui est déjà une guerre importante à Gaza et au Liban peut être empêchée, les effets régionaux du conflit seront atténués.
Tout dépend à quelle vitesse l'opinion publique européenne, qui se retourne rapidement, exprimera sa répulsion face à ce que se passe au Liban.
Des récits de la destruction massive et des victimes civiles sont rapportées par des dizaines de milliers d'évacués français, britanniques, italiens et allemands, dont bon nombre d'entre eux ont la double nationalité, qui apparaissent sur les télévisions françaises et britanniques et parlent des atrocités qu'ils ont vues.
Tout dépend également si l'Iran et la Syrie choisissent d'être aventureux, combien de punitions peut encaisser le Hezbollah et s'il peut encore continuer le combat, et si les Palestiniens resteront sages face à leur situation interne difficile.
Et tout dépend jusqu'où est capable de suivre ses instints l'homme à la Maison Blanche. S'il retient ses impulsions les plus sombres et celles de l'Etat-Major israélien qui dirige le show sur cette fin d'alliance, le glissement actuel vers l'abîme peut encore être stoppé.
Sinon, le Moyen-Orient et les Etats-Unis se dirigent vers une catastrophe.
Source : http://www.thenation.com/
Traduction : MG pour ISM
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