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ISM France - Archives 2001-2021

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Liban -

Comment le Hezbollah a-t-il vaincu Israël ? : 3ème Partie : La Guerre Politique

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Au lendemain du conflit entre Israël et le Hezbollah, un sondage d’opinion a été effectué en Egypte : on a demandé à un échantillon représentatif de la population égyptienne de citer les deux dirigeants politiques les plus admirés.
Un nombre écrasant d’Egyptiens a cité Hassan Nasrallah, le président iranien Mahmud Ahmadinejad arrivant immédiatement après…

Comment le Hezbollah a-t-il vaincu Israël ? : 3ème Partie : La Guerre Politique

Ce sondage est une répudiation manifeste non seulement du président égyptien Hosni Mubarak, qui avait exprimé sa désapprobation du Hezbollah dès le début du conflit, mais également des dirigeants sunnites, dont le roi d’Arabie saoudite Abdullah et celui de Jordanie, Abdullah II, qui ont critiqué le mouvement chiite, dans une tentative avouée de détourner le monde sunnite de son soutien à l’Iran.

"Vers la fin du conflit, ces types étaient en train de jouer des coudes pour se frayer un chemin vers les issues de secours", a déclaré un diplomate américain en poste dans la région, à la fin du mois d’août. "On ne peut pas dire qu’on entende beaucoup parler d’eux, ces derniers temps, vous ne trouvez pas ?"

Moubarak et les deux Abdullah ne sont pas les seuls à se précipiter vers la sortie – la politique étrangère des Etats-Unis au Moyen-Orient, y compris à la lumière de ses énormes difficultés en Irak, est en lambeaux.
"Ce que cela signifie, c’est que toutes les portes nous sont [désormais] fermées – au Caire, à Amman, en Arabie saoudite", a confirmé un autre diplomate américain. "Notre accès est désormais coupé. Personne ne veut plus nous voir. Quand nous appelons, personne ne soulève le combiné…"

Un camée de cet effondrement peut être vu dans l’itinéraire effectué par la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice, dont l’incapacité à persuader le président George Deubeuliou Bush de mettre fin au conflit et son commentaire au sujet du conflit marquant selon elle "les douleurs de l’enfantement" d’un Nouveau Moyen-Orient ont tout simplement détruit sa crédibilité.

Les Etats-Unis ont fait savoir qu’ils allaient tenter de recouvrer leur position en soutenant un [énième] plan de paix israélo-palestinien non encore annoncé, mais l’étranglement en cours par l’Amérique du gouvernement démocratiquement élu de l’Autorité palestinienne a fait de cet engagement un programme politique mort-né. La raison en est désormais parfaitement claire.

Au beau milieu de la guerre, un responsable européen en poste au Caire a eu ce commentaire au sujet des émotions qui secouaient les milieux politiques égyptiens : "Quand les Egyptiens rencontrent dans la rue des dirigeants politiques, ils changent de trottoir… "

L’échec catastrophique des armes israéliennes a ravivé la revendication iranienne du leadership du monde musulman dans plusieurs régions cruciales du monde.

Primo, la victoire du Hezbollah a démontré qu’Israël – et donc que n’importe quelle armée occidentale moderne et sophistiquée – peut être battue à plate couture, dès lors que c’est la bonne tactique militaire qui est employée et poursuivie sur une période prolongée. Le Hezbollah a donné le modèle de la mise en déroute d’une armée moderne.

La tactique est simple : laisser passer la première vague de campagne aérienne occidentale, puis déployer des forces équipées de roquettes visant des atouts clés, tant militaires qu’économiques, chez l’ennemi, ensuite, laisser passer une seconde campagne aérienne, plus intense et dure à supporter, puis prolonger le conflit autant que possible.

A un moment ou à un autre, comme ce fut le cas avec l’offensive d’Israël contre le Hezbollah, l’ennemi sera forcé d’engager des forces terrestres pour finir ce que ses forces aériennes n’auront pas pu achever.
C’est durant cette ultime phase – critique – qu’une force motivée, bien entraînée et bien commandée pourra infliger des pertes extrêmement douloureuse à un establishment militaire moderne, et le vaincre.


Secundo, la victoire du Hezbollah a montré aux peuples musulmans que la stratégie utilisée par les gouvernements arabes et musulmans alliés des Occidentaux – en raison d’une politique d’apaisement vis-à-vis des intérêts états-uniens, dans l’espoir [souvent vain, ndt] d’obtenir des compensations politiques substantielles (reconnaissance des droits des Palestiniens, prix équitable pour les ressources importées du Moyen-Orient, non-interférence dans les structures politiques dans la région, élections libres, équitables et ouvertes) – ne saurait fonctionner, et qu’elle ne fonctionnera jamais.

La victoire du Hezbollah apporte un autre modèle, différent, consistant à faire voler en éclat l’hégémonie états-unienne et à détruire son prestige dans la région. Des deux événements récents les plus importants au Moyen-Orient – l’invasion de l’Irak et la victoire remportée par le Hezbollah sur Israël – le second est, de très loin, le plus important. Y compris des formations [anti-américaines mais] par ailleurs anti-Hezbollah, notamment celles qui sont liées aux mouvements de résistance révolutionnaire sunnite, qui voient dans les chiites des apostats, se sentent humbles devant le Hezbollah.


Tertio, la victoire du Hezbollah a eu un impact terrible sur les alliés de l’Amérique dans la région. Les responsables du renseignement israélien ont calculé que le Hezbollah aurait été en mesure de poursuivre sa guerre jusqu’à trois mois après sa fin effective, à la mi-août.
Les estimations du Hezbollah correspondent au constat israélien, à ceci près que ni le Hezbollah, ni les dirigeants iraniens n’avaient été en mesure de prévoir quelle démarche adopter après une victoire du Hezbollah…
Pendant ce temps, les services de renseignements jordaniens se consacraient vingt-quatre heures sur vingt-quatre à ce qu’il n’y ait aucune manifestation pro-Hezbollah en Jordanie, et les services égyptiens tentaient de contrôler la colère croissante de la population égyptienne devant les bombardements israéliens au Liban.

Le soutien ouvert au Hezbollah, dans l’ensemble du monde arabe (il est piquant de noter que des portraits du chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, ont été disposé dans certaines églises où l’on célébra des messes de Te Deum) mettent en alarme les dirigeants arabes les plus liés aux Etats-Unis : l’accentuation de l’érosion de leur prestige pourrait leur faire perdre leur emprise sur leurs propres sujets.

Il semble vraisemblable que cela amènera Mubarak et les deux Abdullah à ne pas soutenir une initiative états-unienne prônant des sanctions économiques, politiques, et a fortiori militaires, à l’encontre de l’Iran.

Une guerre future – éventuellement une offensive armée des Etats-Unis contre les sites nucléaires de l’Iran – pourrait fort bien ne pas ébranler le gouvernement de Téhéran, mais au contraire ébranler les régimes de l’Egypte, de la Jordanie, voire même éventuellement de l’Arabie saoudite.

A un moment clé du conflit, vers la fin de la guerre, les dirigeants de partis islamistes d’un certain nombre de pays se demandaient s’ils pourraient conserver leur contrôle sur leurs mouvements respectifs, ou bien, comme ils le redoutaient, si l’action politique ne risquait pas d’être récupérée par des capitaines des rues et des révolutionnaires.

Singulière notion que celle qu’on rencontre aujourd’hui communément dans les milieux du renseignement des Etats-Unis : c’est Israël (et non le Hezbollah) qui recherchait désespérément, dès le 10 août, une porte de sortie du conflit !


Quarto, la victoire du Hezbollah a dangereusement affaibli le gouvernement israélien. Au lendemain de la dernière défaite israélienne, en 1973, le premier ministre d’alors, Menachem Begin, décida d’accepter
une proposition de paix du président égyptien Anwar el-Sadate. L’avancée était, de fait, plutôt modeste, les deux pays étant des alliés des Etats-Unis… Aucune percée de cette nature ne se produira au lendemain de la guerre entre le Hezbollah et Israël

Israël est convaincu d’avoir perdu ses capacités de dissuasion, et qu’il doit les recouvrer. Certains responsables israéliens en poste à Washington confirment aujourd’hui que la question posée n’est pas de savoir « si », mais « quand » Israël reprendra l’offensive. Il est néanmoins difficile de déterminer de quelle façon Israël pourrait le faire. Pour se battre contre le Hezbollah et l’emporter, Israël aura besoin de ré-équiper et de ré-entraîner son armée.

Comme les Etats-Unis après leur débâcle au Vietnam, Israël devra restructurer sa hiérarchie militaire et reconstruire ses atouts en matière de renseignement. Cela prendra non pas quelques mois, mais des années.


Il se peut qu’Israël opte, en cas de nouvelles opérations, pour le déploiement d’armes de plus en plus puissantes contre des cibles de plus en plus étendues. Mais compte tenu de ses [piètres] performances au Liban, ce recours à des armes plus puissantes risquerait de s’attirer une réponse encore plus cinglante.
Néanmoins, cela n’est nullement à exclure.

Une attaque des installations nucléaires par les Etats-Unis entraîneraient sans doute une attaque iranienne par missiles contre les installations nucléaires israéliennes – et contre les concentrations urbaines israéliennes. Personne ne peut prédire de quelle manière Israël réagirait à une attaque de cette nature, mais il est évident qu’à en juger au parti adopté par Bush durant le récent conflit, les Etats-Unis ne feraient rien pour l’arrêter.

La « maison de verre » qu’est la région du Golfe persique, si elle était prise pour cible par des missiles iraniens, ne manquerait pas de s’effondrer.


Quinto, la victoire du Hezbollah marque la fin de tout espoir de résolution du conflit israélo-palestinien, tout du moins à court et moyen termes. Même des personnalités politiques israéliennes en principe « progressistes » ont sapé leurs propres prises de position politique [en matière de relations avec les Palestiniens] en appelant de manière stridente à l’emploi d’encore plus de force, d’encore plus de troupes et d’encore plus de bombes.

Lors de rencontres privées avec des alliés politiques, le président palestinien Mahmoud Abbas a fustigé ceux qui célébraient la victoire du Hezbollah, en les qualifiant de « suppôts du Hamas » et d’ « ennemis d’Israël » [sic ! ! !].
Abbas est dans d’encore plus sales draps que Moubarak et les deux Abdullah – son peuple continue à soutenir le Hamas, et lui continue à être servilement d’accord avec George W. Bush, lequel lui a dit, en marge de la réunion du Conseil de Sécurité de l’Onu, qu’il devait mettre un terme à toute tentative de former un gouvernement d’union nationale avec ses concitoyens.


Sexto, la victoire du Hezbollah a eu la conséquence extrêmement fâcheuse de rendre aveugle le leadership politique israélien aux réalités de leur situation géostratégique.

Au plus fort de la guerre au Liban, le Premier ministre israélien Ehud Olmert a adopté le discours de Bush sur la "guerre contre la terreur", rappelant à ses administré que le Hezbollah faisait partie intégrante de l’" axe du mal".

Ses observations ont été surenchéries par Bush, dont les commentaires devant l’Assemblée générale de l’Onu n’ont comporté qu’une seule fois le mot « Al-Qa’ida », mais cinq fois chacun le Hezbollah et le Hamas !…

Les Etats-Unis et Israël ont donc désormais fait le lien entre des mouvements islamistes désireux de participer au processus politique de leurs pays respectifs et des takfiris et des salafistes entièrement voués à mettre la région à feu et à sang…

Israël ne peut plus non plus compter, désormais, sur ses soutiens les plus puissants aux Etats-Unis, c’est-à-dire sur ce réseau de néoconservateurs pour lesquels Israël est une île de stabilité et de démocratie dans la région du Moyen-Orient.
La désapprobation de la contre-performance israélienne par les néoconservateurs américains est presque palpable. Avec des ennemis tels ceux-ci, Israël a-t-il encore besoin d’ennemis ?

Ceci pour dire que le conflit israélien au Liban reflète très exactement la position des experts qui voient dans le conflit entre Israël et le Hezbollah une guerre par procuration. Notre collègue Jeff Aronson a relevé que "si cela ne tenait qu’aux Etats-Unis, Israël se battrait encore", ajoutant : "Les Etats-Unis mèneront la guerre au terrorisme jusqu’à la dernière goutte de sang israélien !"

La faiblesse persistante du leadership politique israélien, alliée au fait que ce leadership vit dans le déni de la profondeur de sa défaite devrait représenter un sujet de grave préoccupation, tant pour les Etats-Unis que pour tous les pays arabes.

Israël a montré qu’en temps de crise, il est capable de faire preuve de stratégie diplomatique imaginative et de manœuvrer habilement afin de recouvrer son prestige. Israël a également démontré qu’au lendemain d’une défaite militaire, il est capable de procéder à un auto-examen honnête, et dans la transparence.

La force d’Israël a, de tout temps, résidé dans sa capacité au débat public, même si ce débat doit remettre en cause l’institution la plus sacrée et intouchable : les Forces Israéliennes de Défense [« Tsahal », ndt].

A des moments clés de l’histoire d’Israël, la défaite a conduit à une période de réflexion et non, comme cela semble aujourd’hui malheureusement le plus vraisemblable, à une offensive militaire sans cesse plus puissante contre le Hamas – tête de turc favorite du Moyen-Orient – à seule fin de rouler les mécaniques.


"Le fait que le Moyen-Orient ait été radicalisé par la victoire du Hezbollah offre une excellente opportunité pour tuer encore plus de gens du Hamas", a récemment déclaré un responsable israélien. Cette dérive ne peut conduire qu’au désastre.

A la lumière de l’incapacité des Etats-Unis à manœuvrer les manettes du changement au Moyen-Orient, il y a un petit espoir, chez certains analystes de Washington, qu’Olmert fera preuve de suffisamment de courage politique pour entreprendre le long processus vers une véritable paix. Ce processus sera douloureux, il impliquera des discussions longues et difficiles, il peut même signifier une rupture avec le programme des Etats-Unis pour cette région du monde.

Mais si les Etats-Unis ne sont pas contraints à vivre au Moyen-Orient, c’est bien, en revanche, le cas, en ce qui concerne Israël. Même si entretenir un dialogue politique avec ses voisins peut lui paraître douloureux, cela sera toujours moins douloureux que le fait de perdre une guerre, disons… au Liban ? !


Septimo, la position du Hezbollah au Liban est incommensurablement renforcée, ainsi que celle de ses principaux alliés. Au plus fort du conflit, des chrétiens libanais ont abrité des réfugiés hezbollahis chez eux.

La chef chrétien Michel Aoun a soutenu ouvertement le combat du Hezbollah. Un dirigeant de cette formation a dit : "Nous n’oublierons jamais ce que cet homme a fait pour nous, notre génération, tout du moins ne l’oubliera pas…"
La position prise par Aoun est célébrée chez les chiites, et sa propre position politique s’en trouve renforcée.

Par ailleurs, le leadership sunnite s’est lui-même sapé de manière fatale, par sa position incertaine et son approche de propriétaire absent vis-à-vis de sa propre communauté.

Durant la première semaine de la guerre, les actions du Hezbollah furent accueillies [chez eux] par un très large scepticisme. A la fin de la guerre, le soutien sunnite était très solide, et il s’étendait à l’ensemble du spectre politique et du découpage confessionnel du Liban.

Aujourd’hui, le leadership libanais sunnite a le choix : il peut former un gouvernement d’unité nationale avec de nouveaux leaders, créant un gouvernement plus représentatif, ou bien ils peuvent réclamer des élections. Inutile d’être un génie politique pour comprendre quel choix fera Saad Hariri, chef de la majorité au Parlement libanais.


Octavo, la position de l’Iran en Irak est ressortie considérablement renforcée. Au beau milieu du conflit au Liban, le secrétaire d’Etat à la Défense Donald Rumsfeld a exprimé en privé sa crainte que l’offensive israélienne n’ait des conséquences redoutables pour la présence militaire états-unienne en Irak, laquelle est confronté à une hostilité croissante des dirigeants politiques chiites ainsi que de la population irakienne chiite, de manière générale.

La déclaration faite par Rice, selon laquelle les manifestations pro-Hezbollah organisées à Bagdad avaient été ourdies par Téhéran, a révélé son ignorance des faits politiques les plus fondamentales de la région.

Les secrétaires d’Etat et à la Défense étaient tout simplement et de manière totalement irresponsable inconscients du fait que les Sadr de Bagdad sont liés à ceux du Liban.

Le fait que le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki ne critique pas le Hezbollah et prenne pas fait et cause pour Israël dans le dernier conflit – au beau milieu d’une visite officielle à Washington, de surcroît – a été considéré choquant par l’establishment politique de Washington, alors même que le « Hezbollah d’Irak » est un des partis de l’actuel gouvernement de coalition nationale irakien !

On nous dit que ni le Pentagone ni le Département d’Etat ne comprennent toujours pas de quelle manière la guerre au Liban pourrait affecter la position américaine en Irak, étant donné que ni le Pentagone, ni le Département d’Etat n’ont été convoqués pour un briefing sur la question par les services du renseignement américains.

Les Etats-Unis dépensent des milliards de dollars, annuellement, afin de collecter du renseignement et d’analyser les activités ennemies. Autant parler d’argent jeté par les fenêtres…


Nono, la position de la Syrie ressort renforcée du conflit et le programme américano-français pour le Liban a échoué. Il n’y a aucune indication que le Liban va former un gouvernement qui soit ouvertement pro-américain ou anti-syrien.

Le fait que le président syrien Bashar el-Assad ait pu, au lendemain de la guerre, suggérer un arrangement politique avec Israël, démontre sa force, et non sa faiblesse. Le fait qu’il ait été en mesure de tirer les bonnes conclusions du conflit et qu’il pense que lui aussi, il en en mesure de s’opposer à Israël avec succès, est également possible.

Mais, ces éventualités mises à part, l’histoire récente montre que ces milliers d’étudiants et de patriotes libanais qui protestèrent contre l’implication de la Syrie au Liban après la mort de Rafiq Hariri ont vu toute l’ironie inhérente au fait qu’ils sont allés se mettre à l’abri des bombardements israéliens dans des camps de toile dressés spécialement à leur intention par le gouvernement syrien…

Rice a raison en une seule chose : le désir de la Syrie de donner asile à des réfugiés libanais était effectivement un acte de cynisme politique à l’état pur – un acte que les Etats-Unis semblent totalement incapables d’imiter.

Désormais, la Syrie a confiance en sa position politique. A une ère antérieure, c’est une confidence de cette nature qui avait permis à Israël d’esquisser une ouverture politique en direction de ses ennemis politiques les plus intransigeants.


Decimo, et c’est sans doute le point le plus important, il est désormais parfaitement clair qu’une attaque des Etats-Unis contre des installations nucléaires iraniennes ne seraient pratiquement pas soutenue dans le monde musulman. Elle provoquerait même une réplique militaire qui finirait de faire s’écrouler les derniers vestiges de la puissance politique américaine dans la région. Ce dont on pensait qu’il s’agissait d’une « donnée », voici seulement quelques courtes semaines, s’est avéré peu vraisemblable.
L’Iran ne sera pas avili.

Si les Etats-Unis lancent une campagne militaire contre le gouvernement de Téhéran, il est vraisemblable que les amis des Etats-Unis verseront dans le fossé, que les pays du Golfe arabique trembleront de peur, que les 138 000 soldats américains en Irak deviendront les otages d’une population chiite ulcérée et que l’Iran répliquera par une attaque contre Israël. Nous devons maintenant dire l’évidence : si, et quand une attaque de cette nature se produira, les Etats-Unis seront défaits.


CONCLUSION

La victoire remportée par le Hezbollah lors de son récent conflit contre Israël est beaucoup plus lourde de sens que bien des analystes tant aux Etats-Unis qu’en Europe n’en ont pris conscience.

La victoire du Hezbollah renverse en effet totalement la vague de 1967 ; il s’était alors agi d’une défaite cataclysmique pour l’Egypte, la Syrie et la Jordanie, qui avait totalement redistribué les cartes politiques au Moyen-Orient, mettant en place des régimes entièrement voués à chambouler de fond en comble leur propre politique étrangère afin de refléter la puissance israélienne et états-unienne. Cette puissance vient d’être humiliée et renversée, et un nouveau leadership est en train d’émerger dans la région.

La leçon particulièrement singulière de ce conflit est très vraisemblablement hors d’atteinte pour les échelons supérieurs des élites politiques de Washington et de Londres, ces élites pro-israéliennes, pro-valeurs fondamentales, qui s’imaginent « combattre afin de défendre la civilisation », mais elle n’est pas perdue pour tout le monde : dans les rues du Caire, d’Amman, de Ramallah, de Bagdad, de Damas ou de Téhéran, on l’a parfaitement assimilée. Il ne faudrait pas que le leadership politique israélien, à Jérusalem, passe à côté.

Les armées arabes, en 1967, ont combattu durant six jours, avant d’être vaincues. La milice du Hezbollah, au Liban, s’est battu durant trente-quatre jours, et elle a vaincu.
Nous avons vu cela de nos propres yeux en nous rendant dans les cafés du Caire et d’Amman, où de modestes boutiquiers, paysans et manœuvres, scotchés devant les postes de télévision, sirotaient leur thé, en savourant en eux-mêmes [les pertes israéliennes] : « sept », « huit », « neuf »…


Notes

Alastair Crooke et Mark Perry sont les codirecteurs de Conflicts Forum, une association sise à Londres et se consacrant à fournir une ouverture à un Islam politique.
Crooke est un ancien conseiller en matière de politique moyen-orientale auprès du Haut Représentant de l’Union européenne, Javier Solana, et il a travaillé au sein de la Commission Mitchell chargée d’enquêter sur les causes de la deuxième intifada.
Perry est un consultant politique de Washington, District of Columbia ; il est l’auteur de six ouvrages consacrés à l’histoire des Etats-Unis. Enfin, il a été un des conseillers personnels de Yasser Arafat.

Les recherches nécessitées par cet article ont été effectuées par Madeleine Perry.

(Copyright 2006 Asia Times Online Ltd. All rights reserved. Please contact us about sales, syndication and republishing .)



Traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique (www.tlaxcala.es). Cette traduction est en Copyleft : elle est libre de reproduction, à condition d'en respecter l'intégrité et d'en mentionner sources et auteurs.

Source : http://www.atimes.com

Traduction : Marcel Charbonnier

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19 octobre 2006