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Israël - 10 août 2004
Par Victor Kattan
“Quand j’y étais, j’ai perdu toute foi dans l’armée israélienne. Ils te le disent en face : « Allez opprimer pour votre peuple. Et allez-y en force. »
Ils nous ont dit : « Prenez ces battes enveloppées de plastique et…ramenez le calme »…
On avait des têtes de mort sur nos casques, mec. On se baladait avec des machettes, tout un tas de trucs dingues. Des insignes de sheriff. On improvisait des solutions très spéciales. »
Voici Ehud, qui parle 12 ans après avoir servi dans les territoires palestiniens occupés. Comme des milliers avant lui, il a été para dans l’armée israélienne durant la première Intifada (1987-1993). Certaines de ces solutions improvisées incluaient d’attacher les électrodes plus et moins de la batterie d’un téléphone de campagne aux oreilles d’un Palestinien pour lui donner un choc électrique.
« On avait des tas de ‘méthodes sophistiquées’, » raconte Ehud.
Aftershock est un film sur quatre soldats—Ehud, Haïm, Omri et Haliva—qui ont servi dans les territoires occupés durant la première Intifada et qui ont été interviewés par Yariv Horowitz, qui avait à l’époque reçu de l’armée israélienne la mission de faire un film éducatif. L’armée espérait que ça remonterait le moral à Naplouse, mais quand ils l’ont vu, ils ont décidé de le censurer, car dès qu’Horowitz a commencé à filmer, « des choses ont été dites qui auraient amené des ennuis à tout le monde. »
Plus de dix ans après, Horowitz a décidé qu’il ne pouvait plus attendre. Il avait déjà attendu douze ans. Alors il a décidé de reprendre son ancien matériel et de rendre une nouvelle visite à ses anciens camarades pour en faire un film. Et le voici.
Aujourd’hui, Ehud vit en Galilée avec sa femme et leurs deux enfants. Ses cheveux lui descendent presque à la taille. Il ressemble à un hippy, roulant sa cigarette, torse nu, un tatouage au bras gauche et une boucle à l’oreille gauche. Il a reçu une éducation conventionnelle. Chez lui, il avait des tas de livres sur les paras et ses héros étaient les anciens paras Eitan Naveh et Gad Manella. En 1989, Ehud a réalisé son rêve. Il s’est engagé dans les paras et a été envoyé à Naplouse. A peu près à la même époque, Horowitz a aussi été envoyé à Naplouse. C’est alors qu’il a interviewé Ehud, qui se vantait devant la caméra de pouvoir casser la figure de jeunes palestiniens et de s’en tirer comme ça :
« On marche dans une rue et on voit un groupe de cinq ados palestiniens assis à boire le thé, à jouer au backgammon, tout tranquilles. On passe à côté, renverse leur table, et on commence à les frapper. Notre supérieur nous demande,’Qu’est ce que vous faites ? ‘Nous, on dit :’ils nous ont insultés’, pour se couvrir, et comme ça, on n’a pas d’ennuis. »
Quand Ehud rencontre son vieux pote Haïm, ancien commandant de compagnie dans la brigade d’infanterie Givati, il faut qu’il le rassure que « nous avons un avocat. »
Quand Haïm a été incorporé, l'Intifada avait juste commencé. Il raconte que feu Yitzak Rabin , allait en patrouille avec sa brigade:
"Il (Rabin) venait en patrouille avec nous, lui et Efi Fine, mon commandant de régiment.Un jour, on patrouillait Gaza, à Der-al-Balach. Eli a décidé qu'il ferait des dégats ce jour-là. On devait sortir dans la rue toutes les télés, les stéréos, les meubles, et bousiller et mettre le feu à tout ça. Et on l'a fait. On y est allés et on a tout cassé. Ils se sont mis en colère, ont commencé à nous lancer des pierres, alors on est retournés s'occuper d'eux."
Haïm poursuit :"Je ne sais pas si ce qui m'est arrivé là m'a affecté à l'époque, mais on tuait des gens, mec. Ca va jusque là. On a battu des gens à mort. Pas juste un ou deux. Au moins quatre. On faisait comme si c'était normal ."
Aftershock a été projeté en Grande Bretagne sur Channel 4 le mardi 22 juin à minuit cinq. Pas vraimment une heure de grande écoute, mais obligatoire pour quiconque s'interesse à la psychologie des soldats qui servent dans les territoires occupés. Ceux qui ont été interviewés pour le film sont d'anciens paras, commandants de compagnies, et un lieutenant-colonel (Haliva) actuellement en poste à Hébron. Pour cette raison, leurs experiences et opinions comptent. Après tout, c'était l'armée israélienne qui voulait ce film, quoique pour une raison différente.
Pour ceux qui ont été interviewés dans le film, et pour ceux qui ont filmé, l'armée était toute leur vie. Le premier souvenir d'enfance d'Horowitz fut les sirènes de la guerre du Kippour en 1973. Dans sa chambre, il avait des posters de Moshé Dayan et d'autres généraux, et des disques comme l'album "La victoire en six jours". Son père s'était battu pendant cette guerre et on lui avait appris à l'école que "libérer la Terre Sainte" était bien. Son frère s'était battu au Liban. Son enfance a été entourée d'histoires de guerre et d'héroïsme.
"Israël adore ses paras," fait remarquer Horowitz au début du film. Ceapendant, ces anciens paras n'ont rien fait de courageux ou de vaillant. Au lieu de cela, ils ontété envoyés dans les territoires occupés--que leurs pères avaient contribué à capturer-- pour réprimer brutalement une population palestinienne désirant son indépendance. Bien qu' Aftershock comprenne quelques scènes de l'occupation, il n'y a pas d'interviews de Palestiniens. Parce que l'occupation vue du côté des militaires israéliens.en est le sujet.
Ehud et ses amis ont dû subir un traitement psychiatrique après leur service. Quand Ehud est rentré chez lui, il était tellement plein de colère qu'il a tout cassé chez ses parents. Il leur a dit qu'il faisait "une fouille." Et malgré le traitement psychiatrique , et où qu'ils soient maintenant (Omri s'est enfui à Seattle), et quoiqu'ils fassent, ce que ces soldats ont fait dans les territoires occupés les hantera pour la vie. Le souvenir reste .
Production Tamuz & Blue Rose (Israël, 2002)
Ecrit et réalisé par Yariv Horowitz
22 minutes
hébreu, anglais, sous titré
Victor Kattan, correspondant de l' Arab Medie Watch et peut être contacté à
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