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ISM France - Archives 2001-2021

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Jénine -

Depuis quand la mort de civils Arabes est-elle considérée comme un Massacre?

Par

> jenna@palnet.com

Omar Barghouti, analyste politique et culturel indépendant qui a publié des essais sur l'essor de l'empire, sur la question de la Palestine et l'art des opprimés. Il a obtenu une Maîtrise en électrotechnique à l'Université de Colombia, et est actuellement étudiant en doctorat de philosophie (éthique) à l'Université de Tel Aviv. Il a conribué à la publication du livre, The New Intifada: Resisting Israel's Apartheid (Verso Books, 2001). Il soutient la solution d'un Etat laic et démocratique en Palestine historique. Son article : ""9.11 Putting the Moment on Human Terms" a été choisi parmi les "Meilleurs de 2002" par The Guardian. Il peut être joint à l'adresse suivante : jenna@palnet.com

Les derniers rapports venant d'Irak indiquent, au delà de tout doute, que l'armée d'occupation américaine s'est embarquée dans une nouvelle "stratégie" au menu des ses atrocités, afin d'essayer de parer les attaques de la résistance irakienne contre ses soldats.
Les massacres d'Irakiens "à l'ancienne mode" sont devenus dernièrement si banals que même les "alliés" irakiens des Etats-Unis ont été forcés de les condamner sans réserves.

Parmi les gouvernements occidentaux, hélas, le silence règne. Après tout, les victimes des massacres ne sont que des Arabes. Non seulement il y a une apathie alarmante face à la l'étendue horrible de ce phénomène, mais il y a également une aversion ignoble pour l'appeler par son nom.

En même temps, beaucoup en Occident montent au créneau pour condamner le "massacre" des phoques, des baleines, des dauphins ou de quelques hommes blancs n'importe où dans le monde.


Les massacres "modernes", c'est le bombardement aveugle -- qui incluaient l'année dernière l'utilisation du phosphore – sur des zones civiles irakiennes dans des villes "indisciplinées" comme Falluja et Qa'im, et ont toujours été la stratégie habituelle des Britanniques et des Américains.

Mais ces actes high-tech de terrorisme d'Etat, "propres" et exécutés à distance ont toujours été pour le seul empire au monde et ses laquais plus faciles à défendre et à présenter comme un ciblage de "précision" "de l'ennemi," particulièrement auprès des médias pathétiquement obéissants.

Le meurtre direct et sale de civils, en particulier en leur attachant les mains et en leur tirant dans la tête, du genre exécution, n'a pas été aussi courant, bien qu'il ait été pratiqué dans plusieurs incidents constatés en Irak depuis l'invasion.

Maintenant, ils sont signalés plus souvent, mais dans un langage qui, en effet, si ce n'est pas toujours par intention, mène à les aseptiser, même à les normaliser comme étant une partie pénible mais pourtant inévitable de la "guerre",

Si cette dérobade à l'utilisation du terme massacre n'est pas délibérée, elle peut seulement refléter un racisme ancré en profondeur chez les journalistes occidentaux qui ne sont pas capables d'utiliser les mêmes normes morales ou professionnelles en effectuant des reportages sur des massacres de civils Arabes qu'ils emploient normalement lorsqu'ils s'occupent de victimes "Blanches" dans des situations comparables.

Seulement ce mois-ci, par exemple, l'armée américaine a commis au moins deux massacres, tuant de sang froid des dizaines de civils irakiens, dont quatre enfants et un bébé âgé de six mois, pourtant aucun d'eux n'a été rapporté comme un massacre.

Le 15 mars, près de Balad, la police irakienne a constaté ce qui suit :
"Les forces américaines ont utilisé des hélicoptères pour faire descendre des troupes sur la maison de Faiz Harat Khalaf située dans le village d'Abu Sifa du District d'Ishaqi. Les forces américaines ont rassemblé les membres de la famille dans une chambre et ont exécuté 11 personnes, dont cinq enfants, quatre femmes et deux hommes, puis elles ont bombardé la maison, brûlé trois véhicules et tué leurs animaux."


Un commandant de police local a dit que les autopsies de l'hôpital "ont révélé que toutes les victimes avaient reçu des balles dans la tête et sur l'ensemble du corps et qu'elles étaient menottées."

Il est crucial de noter que les forces de police irakienne sont recrutées, formées et affectées sous la surveillance vigilante des Etats-Unis.


Un massacre similaire a été commis à Haditha, en novembre de l'année dernière, en tant que vengeance après une attaque à la bombe contre une unité de la marine américaine.

Un survivant de ce crime âgé de 9 ans, qui vivait dans une maison près du lieu des massacres, a raconté au Time magazine qu'après l'explosion son père avait commencé à lire le Qur'an.
"D'abord, ils sont entrés dans la chambre de mon père, où il lisait le Qur'an, et nous avons entendu des tirs. Je n'ai pas pu très bien voir leurs visages, seulement leurs armes collées contre la porte. Je les ai regardés tirer sur mon grand-père, d'abord dans la poitrine et puis dans la tête. Alors ils ont tué ma mamie."

Au total, 15 Irakiens ont été envoyés à la boucherie dans cet incident.

Encore une fois, le journaliste du Guardian, ou le rédacteur, a choisi de ne pas appeler l'"événement" un massacre. Il a également évité tous les termes répugnants habituellement utilisés pour décrire des "incidents semblables," en particulier ceux où sont impliqués des victimes blanches.



Dimanche dernier, le 26 mars, un autre massacre américain d'Irakiens a été rapporté dans le Guardian.
Le ministre irakien de la sécurité, pas moins, l'a décrit comme suit :
"Pendant les prières de la soirée, les soldats américains accompagnés de troupes Irakiennes ont fait une descente dans la mosquée Mustafa et ont tué 37 personnes. Ils (les victimes) n'étaient pas armés. (Les soldats américains) sont entrés, ont attaché les gens et les ont tous abattus. Ils n'ont laissé aucun blessés."

En appelant le massacre de la mosquée une "descente", le Guardian a cité le lieutenant colonel américain, Barry Johnson : "Dans notre observation du lieu et des activités qui s'y passaient, il est difficile pour nous de le considérer comme un lieu de prière," en ajoutant, "Il n'était pas identifié par nous comme étant une mosquée... Je pense que c'est une question de perception."
En conséquence, l'armée américaine a conclu que "Nous ne sommes pas entrés ou n'avons endommagé aucun mosquée
."

Naturellement! Aucun être humain n'a été massacré non plus, semblerait-il, car ce n'étaient que des Irakiens. C'est, après tout, une "question de perception."


The Independent, qui est en général plus courageux dans sa couverture de l'Irak, a rapporté le même incident ainsi : "Les forces américaines ont tué 22 personnes et blessé huit autres dans une mosquée à l'Est de Bagdad."

Bien qu'il ait appelé la mosquée par son nom, The Independent n'a pas réussi à appeler l'"incident" un massacre. "Le tir," "les morts," mais pas un massacre.


Pour beaucoup d'Arabes, ces massacres en Irak évoquent la mémoire des atrocités du camp de réfugiés de Jénine en 2002, quand les Forces de l'Occupation Israéliennes ont rasé au bulldozer de nombreuses maisons et qu'elles tiraient au hasard sur tout Palestinien qui bougeait, entrainant la mort de dizaines de personnes et des centaines de blessés.

Le fait que la résistance palestinienne armée dans le camp était exceptionnellement féroce -- et héroïque, pourrait-on ajouter, entrainant la mort de plus de 20 soldats de l'occupation, a été utilisé comme prétexte pour justifier le massacre brutal de civils innocents.


Un rapport de la BBC sur les résultats initiaux d'une équipe d'investigation d'Amnesty International -- qui a visité le camp de réfugiés de Jénine juste après le retrait israélien – indiquait :
"Un expert médico-légal Britannique qui a pu accéder à la ville de Jénine en Cisjordanie dit que les preuves indiquent un massacre des Forces israéliennes.[ ] Le professeur Tour Pounder, qui faire partie d'une équipe d'Amnesty International autorisée à aller à Jénine, dit avoir vu des corps étalés dans les rues et a reçu des témoignages de décès de civils."


Le ministre israélien des Affaires Etrangères de l'époque, Shimon Peres, qui avait dit au début à Ha'aretz qu'un "massacre" avait eu lieu à Jénine, est revenu plus tard sur sa déclaration et a déclaré catégoriquement qu'en aucune circonstances, Israël ne permettrait aux enquêteurs des Nations-Unies d'accéder au camp.

En effet, Israël, soutenu par les Etats-Unis et apaisé par le Secrétaire Général des Nations-Unies, Kofi Annan, a refusé d'autoriser l'ONU à enquêter sur les atrocités israéliennes à Jénine. Les massacres aveugles qu'il a commis à Jénine, que ce soit ou non un massacre, n'ont jamais été examinés avec impartialité par l'ONU.


Mais ce que tous les rapports objectifs rendaient absolument clairs, c'est le fait qu'Israël a commis les crimes de guerre suivants à Jénine:
• "L'interdiction systématique de provisions de nourriture, d'eau, et de produits médicaux à l'ensemble de la population civile du camp de réfugiés de Jénine en dépit de son besoin urgent de ces ravitaillements;
• l'interdiction systématique de soins médicaux à l'ensemble de la population du camp alors qu'on savait que de nombreux individus avaient un besoin urgent de ces soins au vu du nombre de blessés pendant le conflit et/ou des conditions médicales indépendantes de celui-ci;
• l'utilisation délibérée de civils non-combattants comme boucliers humains pour faciliter les opérations militaires;
• la torture, l'abus, la privation et l'humiliation des hommes et des garçons arrêtés massivement seulement à cause de leur statut de résidants du camp de réfugiés de Jénine;
• les exécutions sommaires;
• l'application de la politique de tirer pour tuer contre des individus clairement identifiables comme des civils non-combattants, au prétexte de l'application stricte d'un couvre-feu prolongé maintenu sans aucune interruption;
• la destruction délibérée des bâtiments dans lesquels on savait qu'il y avait des civils non-combattants sans avertissement préalable quand la fourniture d'un tel avertissement n'aurait pas empêché des opérations militaires;
• et une large destruction des biens après la fin des hostilités militaires en tant que punition plutôt que pour des objectifs opérationnels."


Les éléments ci-dessus et la première panique des Israéliens ont mené beaucoup de gens dans les médias à suspecter l'éventualité d'un massacre.
Pourtant, sous l'intimidation, les accusations et les menaces israéliennes sans précédent, les premiers reportages dans les médias occidentaux d'un massacre à Jénine ont été rapidement retirés de la circulation.

Les sources des médias influencées par les Israéliens ont plus tard attaqué ceux qui avaient même entretenu la pensée d'un massacre, en particulier après que le nombre total de Palestiniens tués par des soldats israéliens ne s'est avéré être "que" de 56.

Que ce soit en Irak ou en Palestine, une question cruciale se pose : combien de civils Arabes doivent être assassinés pour qu'un massacre soit reconnu en tant que tel dans les médias occidentaux manifestement hypocrites?



Source : http://counterpunch.com/

Traduction : MG pour ISM

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