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Jérusalem - 1 mai 2005
Par Reuven Abergil
Article paru sur http://www.hagada.org.il et traduit de l'Hébreu par Mike Marshall. Reuven Abergil est un veteran des Black Panthers : http://www.kedma.co.il/Panterim/PanterimTheMovie/PanterimMovieEng.htm
"Dix mesures de beauté descendirent sur le monde : Jérusalem en a pris neuf, et le reste du monde, une seule. Il n’y a pas de beauté pareille à la beauté de Jérusalem" (Talmud de Babylone Kidsuhim 49 :2).
Les auteurs de ce texte qu’on a tellement répété et qui s’est tellement répandu n’avaient pas prévu l’abominable horreur de la conduite des faiseurs de politique israéliens à Jérusalem.
Au lieu de "Car la Torah (la loi divine) viendra de Sion" (Isaïe 2-3), ce que nous voyons de la réalité, c’est : "Car la cruauté, la violence et l’entêtement viendront de Sion."
• Première mesure
La politique d’Israël à l’égard de Jérusalem, comme à l’égard du reste du pays, peut se résumer en cette équation raciste : plus il y a de territoire israélien et moins il y a de Palestiniens.
Et tout cela recyclé sous le couvert des mots : "Juif et Démocratique"
Ce qu’ils ont fait à Jérusalem en séparant physiquement la ville du reste de la Cisjordanie , et par la même occasion en l’annexant à Israël.
Après la guerre, Israël a annexé tout l’Est de la ville avec certains villages de la périphérie, et c’est en gros, un total de 70.000 dunams qui ont été annexés au territoire de la municipalité de Jérusalem.
L’appétit d’annexion israélien est insatiable : les moyens ne sont pas toujours légitimes, les agissements ont lieu à la nuit noire, loin du regard des gens et sans transparence.
Tout est casher (Ndt : pur) quand il s’agit de prendre le contrôle de la propriété palestinienne de Jérusalem-Est.
Les requins de l’immobilier se retrouvent dans les festivités, avec les fonctionnaires, les ONG, les gens du ministère des Finances sans oublier la police des frontières (lire l'article de Meron Rappaport : "Cette terre est la vôtre, elle est la mienne")
Récemment le gouvernement d’Israël a approuvé la construction de 3500 appartements près de la colonie de Maale Adumim.
Ces constructions en masse ont pour but de relier Maale Adumim à Jérusalem en réduisant à néant toute possibilité de continuité territoriale pour un état palestinien.
Le gouvernement Sharon-Travaillistes engage un retrait et opère des annexions, opère un retrait et pleure(1), en versant des larmes de crocodiles. (2)
• Deuxième mesure
Chacun cite vainement le nom de Jérusalem quand on dit que Jérusalem est "une ville d’un seul tenant". (3)
Une ville d’un seul tenant ?
Après la chute du mur de Berlin, des murs et des barrières ont été élevés autour de la capitale d’Israël : une barrière de séparation.
Le tracé du mur de séparation suit plus ou moins les frontières municipales agrandies et annexées de la ville.
Jusqu’à ce que commence la construction du mur de séparation, il n’y avait presque aucune logique aux limites de la ville.
Le tracé du mur sépare les Palestiniens qui vivent de chaque côté du mur. Le mur affecte douloureusement les villages et les villes proches de la frontière Est de la ville : Ar-Ram, Anata, Dahiyat al-Barid, Hizma, al-Azariya, Abu Dis, Sawahrat al-Sharqiya, Sheikh Saad.
Il sépare Jérusalem Est et les villages palestiniens qui l’encadrent.
Ce retrait, c’est un sérieux coup dans le tissu de la vie des Palestiniens jérusalémites. Il ne s’agit pas de statistiques; c’est la vie d’environs 70 000 personnes.
"Une ville d’un seul tenant " sépare les gens de leurs communautés et annexe leurs terres.
• Troisième mesure
Israël est en train de créer un goulet d’étranglement autour des habitants palestiniens de la ville. Un goulet qui se rétrécit continuellement.
Un Palestinien qui veut construire une maison est pris par une pieuvre bureaucratique, des obstacles planifiés, et des obstacles juridiques et toute tentative pour obtenir un permis de construire devient mission impossible.
La municipalité de Jérusalem et le ministère de l’Intérieur opposent des difficultés presque insurmontables.
Les demandes de logement sont en hausse permanente parce que la population naturelle augmente, à quoi il faut ajouter le mur de séparation qui oblige de nombreux Palestiniens à passer par le territoire de la municipalité de Jérusalem.
La demande de logements augmentent, les autorisations de construire diminuent.
Le gouvernement impose des conditions impossibles à remplir pour les gens. Les plus nombreux en appellent au ciel; en 2003, 1376 maisons ont été construites sans permis et seulement 59 l’ont été avec un permis ! ("La Politique de démolition" (mediniut horeset) Sept. 2004 - Comité israélien contre les démolitions de Maisons
En 2004 et jusqu’en septembre, 114 maisons ont été détruites à Jérusalem Est, dont 93 par la municipalité de Jérusalem et 21 par le Ministère de l’Intérieur ("La politique de démolition")
• Quatrième mesure
Dans le but de maintenir coûte que coûte la majorité juive de Jérusalem, le gouvernement d’Israël n’a vraiment peur de rien. Toutes les ruses et tous les coups fourrés sont totalement kacher (purs) ainsi que les lois racistes.
S’inspirant visiblement des sombres régimes du passé, Israël a inventé la loi de Citoyenneté et d’entrée en Israël ("Temporary Order 5763/2003").
Cette loi raciste interdit aux Israéliens mariés à des habitants des Territoires Occupés, ou qui en épouseraient dans le futur, de vivre avec eux à l’intérieur des frontières de l’Etat.
Il faut comprendre que quand ils parlent dans ce cas "d’Israéliens", ils veulent dirent les citoyens Palestiniens (Arabes) ou les habitants (Palestiniens) de l’état d’Israël.
Les couples qui choisissent de vivre en Israël (à cette fin Jérusalem-Est est considéré comme partie intégrante d’Israël) violent la loi. Cette loi s‘applique aussi aux enfants des habitants de Jérusalem-Est qui sont nés dans les Territoires Occupés et elle les empêche d’être enregistrés comme habitants d’Israël.
Récemment à Jérusalem un nouveau musée "Yad Vashem" a été inauguré, mais visiblement les administrateurs de l’Etat n’ont rien appris et rien oublié, et sans hésitation, ils ont voté en faveur d’une loi qui casse les familles, expulse les gens de leurs maisons, et sépare les enfants de leurs parents, tout cela pour leur descendance.
• Cinquième mesure
On croit communément que la population palestinienne de Jérusalem échappe aux taxes municipales, mais ce n’est pas le cas.
Les habitants palestiniens de Jérusalem-Est paient des taxes municipales comme leurs voisins juifs et pour eux, c’est une question cruciale parce qu’elles constituent la preuve qu’ils sont habitants de la ville, avec les droits des habitants d’Israël.
Mais ils ne bénéficient pas des mêmes services que les Juifs.
Il y a des endroits où les seuls services dont bénéficient les Palestiniens, ce sont les démolitions de leurs maisons.
En 2001; la Haute Cour de Justice a rendu un jugement obligeant la municipalité de Jérusalem à construire dans les 4 ans à venir, 245 classes dans le secteur arabe de la ville.
Selon les conclusions de l’association "City of Peoples" ("Cité des peuples"), seules deux classes ont été construites.
Voir "Ils volent leur temps" ("Loghim et ha-Zman" – "Kol ha’ir" du 25 mars 2005)
Environ un tiers des habitants de Jérusalem sont Palestiniens.
Du budget de développement de la municipalité de Jérusalem pour 1999, moins de 10% a été alloué aux quartiers palestiniens.
Il y a des quartiers palestiniens entiers qui ne disposent ni de système d’évacuation des eaux usées, ni de voies pavées, ni de trottoirs.
• Près de 90% des égouts, des voies pavées et des trottoirs de Jérusalem se trouvent dans Jérusalem-Ouest.
• A Jérusalem-Ouest, il y a mille jardins publics. dans les quartiers palestiniens, il y en a 45 ;
• A Jérusalem-Ouest, il y a 36 piscines, dans les quartiers palestiniens il n’y en a pas une.
• A Jérusalem-Ouest il y a 26 bibliothèques, dans les quartiers palestiniens il y en a 2.
• A Jérusalem-Ouest, il y a 531 salles de sport, dans les quartiers palestiniens il y en a 33.
Tous ceux qui se rendent au bureau du ministre de l’intérieur à Jérusalem-Est sont assurés d’y voir des scènes tragiques.
L’attente peut durer toute une journée;
la file d’attente est bourrée à craquer;
les procédures peuvent prendre un mois avant d’être prises en compte.
On connaît bien dans le trésor idiomatique juif cette façon de s’exprimer :: "C’est dur d’être Juif"; une tournure idiomatique qu’ont peut moderniser ainsi : "Etre un Palestinien à Jérusalem, c’est sept fois plus dur".
• Sixième mesure
Sur le papier, les habitants palestiniens de Jérusalem ont des droits en raison du fait qu’ils habitent la ville.
Mais en pratique, les droits des Palestiniens s’évaporent.
En raison du fait qu’elle habite Israël, toute personne a droit à la sécurité sociale et à la protection sociale.
L’Institut d’Assurance Nationale - pour tout ce qui touche aux habitants palestiniens de Jérusalem-Est- sert d’instrument pour le contrôle de l’équilibre démographique et non d’organisme pour l’avancement de la politique sociale.
L’Institut soulève des obstacles aux demandes que lui soumettent les habitants palestiniens de Jérusalem-Est.
Des enquêtes interminables et d’innombrables entraves créent des situations telles que les droits sociaux des habitants palestiniens de la ville sont sérieusement compromis.
Le domaine de l’assurance médicale est aussi touché. (Estimations de l’association "Phsyicians for Human Rights" - Médecins pour les Droits de l’Homme.
• Septième mesure
Dans le village pastoral de al-Walajeh, proche du zoo, ils ont "copié" la politique du zoo – et c’est bien le diable s’il y a la moindre différence avec la cage de Walajeh où sont détenus les hommes !
Israël a annexé à la zone de juridiction de la municipalité de Jérusalem un quartier du village mais "oublié" de fournir des cartes d’identité aux habitants.
Les habitants du quartier sont tous des "habitants illégaux" dans leurs propres maisons. Les habitants sont desservis en eau, électricité, et pour d’autres services municipaux par la Cisjordanie .
La municipalité de Jérusalem ne fournit que les entreprises de démolition.
• Huitième mesure
Dans le village de A-Nu’man, ils ont aussi annexé la terre et négligé les gens (voir le rapport de B’Tselem "Nu’man - Jérusalem Est , la vie sous menace d’expulsion", sept. 2003)
Les habitants de Nu’man sont des habitants illégaux dans leurs propres maisons. Ils ne sont pas autorisés à rester sur les lieux qui ont été annexés à Jérusalem.
Le tracé du mur de séparation, l’expansion de la colonie Har Homa et le réseau de routes de sécurité les enferment dans leur village sans possibilité de se rendre en Cisjordanie .
Le défaut de carte d’identité israélienne empêche les habitants d’aller à Jérusalem.
Les habitants coincés du village ont soif de liberté mais aussi d’eau. Au cours des années précédentes la principale conduite d’eau du village a été bouchée.
Maintenant, ils ont installé une canalisation de 2,5 cm de diamètre, à peine capable de répondre aux besoins d’eau d’A-Nu’man
A-Nu’man est devenu dans le fond une prison pour ses habitants.
Leur crime : ils vivent dans leur village. Il y a un avantage à vivre dans une (vraie) prison : l’Etat fournit l’eau aux détenus
• Neuvième mesure
Le village de Sheikh Saad qui se situe aux marges Est de Jérusalem et est construit dans la proximité immédiate du quartier de Jabal Mukaber, à l’est de Jérusalem.
Le village est bâti sur une colline d’environ 650 mètres de haut.
A cause de sa topographie difficile, on ne peut atteindre le village que par l’ouest, par Jabal Mukaber (dans la municipalité de Jérusalem).
Le mur de séparation bloquera l’entrée et la sortie du village depuis l’Est de Jérusalem.
La topographie difficile empêche d’aller du village en Cisjordanie . Les 2000 habitants qui restent dans le village sont emprisonnés dans Sheikh Saad sans aucun moyen d’aller à Jérusalem ou en Cisjordanie (voir "Face à l’abîme", un rapport de "Bets’elem », février 2004)
Réalité difficile à digérer à quiconque est dotée d’une conscience, une situation de "A ne pouvoir ni vomir ni avaler"
Dix mesures de sagesse sur le monde, neuf pour Jérusalem et une seule pour le reste du monde.
Dix mesures de Torah sur le monde, neuf sur Jérusalem et une seule pour le reste du monde (Avot DeRabbi Natan, Schechter Edition, version B)
En politique, il n’y a ni mesure de beauté ni mesures de sagesse. La réalité suggère qu’il y a une Jérusalem d’en-haut et surtout une Jérusalem d’en-bas.
Dans une prière à la fin de Yom Kippour (N.T : la fête juive la plus importante) il est dit : "Je vois toute cité bâtie sur son propre site – tandis que la cité de Dieu s’abat dans les profondeurs de l’abîme".
Combien de temps les méchants vont-ils exulter ? (4)".
NOTES :
(1) Référence ironique à la capacité israélienne de "tirer et pleurer", c’est-à-dire chercher à gagner sur tous les terrains; tirer bénéfice de l‘oppresseur et simultanément attirer la sympathie pour les malheurs sont souffre sa belle âme pour la raison même qu’on est un oppresseur.
(2) "Jérusalem la bien bâtie, Ville d’un seul tenant" Psaume 122-3
(3) "Jérusalem bâtie, un cité unifiée" Psaume 122-3
(4) : Psaume 94-3 : Pour combien de temps Seigneur, ces impies ? Combien de temps les impies vont-ils triompher ? Ils fanfaronnent, ils disent des insolences, ils se vantent tous ces malfaisants
1 dunum = 1000 mètres carré
Source : www.kibush.co.il/
Traduction : CS pour ISM
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