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Algérie - 28 juin 2013
Par El Moudjahid
Le forum de la Mémoire, initié en coordination avec l’association Machaâl Echahid, a revisité hier le parcours de ce héros mythique.
Le 28 juin 1973 à 10h45, Mohamed Boudia, moudjahid, homme de culture et militant de la cause palestinienne, est assassiné à Paris. Un crime signé. Une bombe avait été placée dans sa Renault 16 par le Mossad. Le forum de la Mémoire, initié en coordination avec l’association Machaâl Echahid, a revisité hier le parcours de ce héros mythique. A l’occasion du 40e anniversaire de la disparition de l’enfant de Soustara, assassiné en France pour son engagement pour la cause palestinienne, le chercheur et historien Mohamed Abbès et son ami et compagnon Hocine Zehouane sont revenus sur l’itinéraire de ce grand nationaliste et militant engagé dans toutes les causes justes.
L’intervention de Mohamed Abbès a ému plus d’un, surtout lorsqu’il éclata en sanglots en précisant que la mère de Boudia, bouleversée par le chagrin, avait rejoint son Créateur huit jours après l’assassinat de son fils. Mohamed Boudia est un nom intimement lié à des faits importants de la lutte de Libération. Son combat, il l’a mené sur le territoire ennemi et il a été derrière les opérations exécutées par des commandos de la Fédération de France du FLN. Après l’opération Mourepiane, il sera arrêté et incarcéré. Pendant son incarcération, il a écrit Naissances et L'olivier et traduit en arabe dialectal quelques textes dramatiques français. Il adapta notamment Molière en milieu carcéral. Selon l’historien, Mohamed Boudia a réussi, grâce à l’aide du réseau Jeanson, à s’enfuir de la prison. Et à Tunis, il avait rejoint la troupe artistique du FLN. A l’indépendance, il a été celui qui a créé la première revue culturelle algérienne Novembre, relancé le théâtre algérien et il a participé à la création du premier quotidien algérois Alger ce soir. En tant que directeur du TNA, il contribua avec Mustapha Kateb, en 1963, à la nationalisation du théâtre et à redonner au quatrième art une certaine consistance. Pour Hocine Zehouane, 1965 est une année marquée par deux faits importants ; le premier est inhérent au « redressement du 19 juin ». Mohamed Boudia comptait parmi les opposants, et de ce fait, il choisit l’exil en France. Le second événement est le fait que 1965 coïncide avec la naissance du mouvement national palestinien Fatah et le début de la résistance palestinienne. Le militant du FLN épouse alors la cause palestinienne et devient l'un des grands stratèges du Fatah.
Cela ne le détourne pas pour autant de ses activités culturelles et occupa le poste d'administrateur du Théâtre de l'Ouest parisien. Il sera derrière des opérations militaires, comme celle de Munich lors des jeux Olympiques de 1972. Il sera repéré et filé. Le Mossad, de connivence avec les autorités françaises, arrive à placer une bombe dans la voiture de Mohamed Boudia. Il sera tué sur le coup. Depuis, il repose au cimetière d’El Kettar. Hocine Zehouane dira que le plus grand souhait de Mohamed Boudia était de mourir comme Che Guevara. Par ailleurs, il a déploré qu’aucune rue ne porte son nom. Aussi, il a appelé à ce que l’école d’arts dramatiques de Bordj El Kiffan soit baptisée en son nom. C’est le plus grand hommage que l’on puisse rendre à cet intellectuel et homme de théâtre qui a marqué son époque.
Nora Chergui
Ils ont dit…
M. Hocine Abdelkhalek, ambassadeur de Palestine à Alger : « Une halte pour la reconnaissance »
Après avoir présenté ses vifs remerciements au journal El Moudjahid et à l’association Machaâl Chahid pour avoir fait du centre de presse Mohamed-Abderrahmani « une tribune » pour ressusciter la mémoire nationale et des nations, l’ambassadeur de la Palestine à Alger, M. Hocine Abdelkhalek, a d'abord salué la mémoire du défunt moudjahid algérien Mohamed Boudia.
L’ambassadeur a affirmé que ce grand militant de la cause algérienne a décidé, une fois l’indépendance recouvrée, de se consacrer entièrement à la cause palestinienne, un combat assimilé à celui mené, avant lui par l’illustre militant Che Guevara.
L’ambassadeur a souligné que le chahid Boudia avait en fait un rôle tout désigné au sein de la cause palestinienne. Mohamed Boudia agissait en France, mais également sur l’ensemble de la scène européenne, dans le cadre des stratégies et du plan de travail de la lutte palestinienne, a-t-il dit.
Poursuivant ses propos, M. Hocine Abdelkhalek a soutenu que cette journée constitue « une halte pour la reconnaissance et la gratitude envers ces frères qui ont consenti le sacrifice suprême pour une meilleure vie à nous tous. Ce militant a une place de choix dans le cœur des Palestiniens, et ce qu’a fait le chahid Mohamed Boudia exprime toute la profondeur de la relation stratégique entre les révolutions algérienne et palestinienne. Il exprime également la position réelle du peuple algérien vis-à-vis de la cause palestinienne.
L’ambassadeur, qui a assuré que les Palestiniens resteront fidèles au parcours militant du chahid Mohamed Boudia, a affirmé qu’ils arracheront l’indépendance de leur pays avec pour capitale El Quods.
S. G.
Abderrahmane Boudia, fils de Mohamed Boudia : « Je suis heureux de voir que l’on n’a pas oublié mon père »
« Cette commémoration me touche énormément. Cela coïncide avec le 40e anniversaire de l’assassinat de mon père Mohamed Boudia par le Mossad. Je suis très fier que beaucoup de personnes n'aient pas oublié qui est Mohamed Boudia. C’est un message qui est passé aujourd’hui et, croyez-moi, l’émotion est vraiment très grande de voir que les gens n’ont pas oublié qui est mon père. Je remercie l’assistance énormément en mon nom propre et au nom de mes frères et de toute la famille Boudia. Merci beaucoup. »
S. G.
Mohamed Abbès, historien : « Un intellectuel très engagé »
« Originaire de Naciria (wilaya de Boumerdès), M. Mohamed Boudia est né à Alger à Soustara le 24 février 1932. Il a étudié à Soustara et est ensuite passé par l’Institut régional de dramaturgie. C’était un homme doué. Il avait cette vocation d’homme de théâtre qui avait adopté le 4e art comme moyen d’expression mais également comme moyen de lutte. Il a fait ses preuves même en France et a travaillé avec de grands dramaturges francais. En 1954, il avait répondu à l’appel de Novembre. Il a commencé avec la Fédération de France et a fait ses preuves aussi en tant que fidaï. En somme, c’était un intellectuel très engagé. Il était très logique avec lui-même : quand il épouse une cause, il l’adopte pleinement jusqu’au sacrifice suprême. Et c’est ce qu’il a fait. Il l’a en effet démontré pour l’Algérie et pour la cause palestinienne. »
S. G.
M. Hocine Zehouane, ami de Mohamed Boudia : « Un homme de théâtre et un militant de la première heure »
« J’ai connu Mohamed Boudia après le 19 mars 1962. Je l’ai rencontré à la Casbah d’Alger, chez un coiffeur et j’ai constaté que c’était un homme de théâtre, un intellectuel et un militant. Après le recouvrement de l’indépendance nationale, Mohamed Boudia a essayé avec Mustapha Kateb de faire revivre le théâtre algérien. Chose qui a été réalisée d’ailleurs. Notre relation a été interrompue un temps, avant de reprendre le contact plus tard. A la fin des années 70, j’étais à l’étranger et j’ai de nouveau rencontré Mohamed. Cela s’est passé à Paris. On a très vite appris que les services de renseignement occidentaux en voulaient terriblement à Mohamed Boudia. On a senti le danger et on lui avait donc demandé de quitter l’Europe. Après s’être préparé pour un déplacement, il a refusé de partir avant d’assurer la scolarisation de ses enfants. Il a donc reporté son voyage, et il était parti à la préfecture de police pour une question concernant les documents de son véhicule. Juste après, il sera victime d’un attentat à la voiture piégée. »
S. G.
M. Felix Collozi, ami de Mohamed Boudia : « Il avait introduit le théâtre dans le milieu carcéral »
« Il avait réussi à introduire le théâtre dans la prison. Il avait traduit des pièces telles que Le Malade imaginaire. La pièce était jouée avec des tenues confectionnées par des prisonniers. C’était assez marrant. Il avait écrit une pièce concernant la guerre de Libération. C’était une pièce dans les locaux de la police. Les cellules du rez-de chaussée étaient munies de haut- parleurs. Donc, tout le monde pouvait écouter la pièce. Personnellement, avec mon accent, il m’avait choisi pour jouer le rôle du tortionnaire. Comme les cris s’entendaient dans toute la prison et tout l’extérieur, le directeur est descendu tout de suite : « Vous êtes en train de torturer quelqu’un ? » a-t-il crié. Ali Zaâmoum, responsable du comité, lui avait expliqué que c’était seulement une pièce de théâtre. Il avait osé faire interpréter cette pièce dans un milieu carcérale, en pleine guerre de Libération. »
S. G.
Source : El Moudjahid
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