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Israël -

Israël ne survit pas parce qu’il est fort mais parce qu’il affaiblit ses ennemis

Par

Mohammad Makram Balawi, écrivain et universitaire palestinien, vit à Istanbul. Il préside le Forum Asie Moyen-Orient.

Le résultat des derniers combats dans la bande de Gaza assiégée, lorsque l'armée israélienne a tenté de mener une opération militaire clandestine alors même que les Égyptiens en étaient à la phase finale de la médiation d'un cessez-le-feu entre des factions armées à Gaza et le gouvernement israélien, a prouvé que les Palestiniens peuvent porter atteinte à Israël comme jamais auparavant. Les médias israéliens ont fourni à cet égard des statistiques sans précédent et, d'un point de vue israélien, effroyables.

Israël ne survit pas parce qu’il est fort mais parce qu’il affaiblit ses ennemis

L'armée israélienne a tué sept Palestiniens tout en attaquant plus de 160 cibles ; la même vieille histoire habituelle. Ce qui est nouveau, c’est que, à titre de représailles, 460 roquettes ont été tirées de Gaza en seulement 25 heures. Le barrage a provoqué des dégâts considérables en Israël, faisant au moins deux morts et un nombre inconnu de blessés. Le système antimissile israélien "Dôme de Fer" a réussi, selon les médias, à intercepter une centaine de roquettes ; les autres ont atteint leurs objectifs. La différence cette fois est la précision des projectiles et leur force explosive.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a interrompu son voyage en France et a appelé à la fin de l'action militaire. Le ministre de la Défense du gouvernement de sa coalition, Avigdor Lieberman, qui a ordonné cette opération secrète bâclée, a accusé Netanyahu et le reste du cabinet israélien de lâcheté, puis a démissionné.

La réaction des êtres humains à la confrontation étant différente, il n’est donc pas vraiment judicieux de qualifier n’importe qui de lâche, car c’est souvent très subjectif, alors que d’en qualifier un groupe entier est tout autre chose. Néanmoins, nous devons prendre au sérieux l'accusation de Lieberman car elle nous aide à comprendre la mentalité et les valeurs collectives des Israéliens, notamment parce qu'un sondage d'opinion suggère qu'une majorité de Juifs en Israël s'opposent au cessez-le-feu et pensent que l'armée aurait dû bombarder Gaza encore plus.

Il ne fait aucun doute qu'Israël a toujours fait preuve d'une grande brutalité dans ses actions militaires contre les Palestiniens. Les Forces de défense israéliennes (IDF) [Forces d’occupation israéliennes, FOI, ndt] sont équipées des armes et munitions les plus récentes qui, déployées contre des civils en grande partie non armés - comme dans la bande de Gaza - peuvent tuer et tuent des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants et détruire les infrastructures civiles, notamment des écoles, des hôpitaux, des installations d’eau et d’électricité, des lieux de culte et des maisons.

La société israélienne est une société unique en son genre, édifiée sur des terres prises à un autre peuple. C’est un État créé par une résolution de l’ONU et qui suit une idéologie forgée en réponse à l’oppression en Europe et en Russie. Comment peut-on demander à des citoyens juifs qui ont ostensiblement fui l'antisémitisme dans leur pays d'origine de mettre leur vie en danger dans ce qui est de fait un pays étranger ?

La solution à ce problème a été de créer des conditions permettant aux soldats israéliens d'être bien entraînés, bien armés, considérés comme des héros et protégés de toute responsabilité légale en cas de violation des lois et conventions internationales (comme d’ailleurs l'État lui-même est protégé). Israël et ses partisans, principalement le gouvernement des États-Unis, ont toujours cherché à assurer le maintien de son hégémonie militaire au Moyen-Orient, permettant à ses troupes d'infliger la mort et la destruction à d'autres tout en étant à l'abri d'une opposition sérieuse. Ces conditions ont fait croire à de nombreux Israéliens qu’ils sont tout-puissants et peuvent agir avec arrogance envers tout le monde.

Ainsi, la mort d'un soldat ou d'un civil israélien en tant que conséquence directe de la politique militaire agressive de l'État est catastrophique pour la société, non seulement parce qu'une vie a été perdue, mais aussi parce qu'il est évident que, comme d'autres êtres humains, ils sont vulnérables. Il s’ensuit alors généralement un jeu d’accusations : les autorités accusent les « terroristes », la population accuse le gouvernement de ne pas les protéger et l'armée mène une « enquête approfondie » qui s’absoudra de tout blâme avant de déclarer que l'ennemi paiera un lourd tribut en rétablissant le facteur dissuasif de Tsahal.

Les FID [FOI, ndt] ont récemment connu plusieurs revers militaires. Contrairement aux guerres contre les armées arabes, ses offensives contre les factions palestiniennes n’ont pas autant de succès. Bien que les soldats arabes soient généralement mieux entraînés et équipés que les combattants de la résistance palestinienne, leur moral n’est pas aussi bon. Presque tous les régimes arabes sont de nature despotique et exigent la loyauté par la force, et beaucoup se préparent à la normalisation des relations avec Israël. Les citoyens ordinaires ont donc tendance à soupçonner le sérieux de leur gouvernement dans la lutte contre l'État sioniste. Les Palestiniens, en revanche, sont plus manifestement motivés par eux-mêmes et ont constitué un groupe restreint mais efficace de forces de résistance.

La politique israélienne est plus ou moins conforme à la planification depuis une vingtaine d'années. Toutes les grandes armées arabes ont été neutralisées par des traités de paix, tels que les Egyptiens et les Jordaniens, détruites comme l'armée irakienne ou complètement enlisées dans des guerres civiles, comme les forces armées en Syrie et au Yémen. Les autres sont soit intimidées, soit marginalisées par la normalisation en cours avec les pays arabes, en particulier dans le Golfe. Même s'il s'est toujours imaginé confronté à l'anéantissement des mains des Arabes, Israël est désormais en position de mener ses voisins dans une éventuelle confrontation avec l'Iran. Le gouvernement de Téhéran est désormais le principal épouvantail d'Israël, tandis que la résistance palestinienne à Gaza représente une menace plus petite mais plus coûteuse. L’opinion publique arabe pourrait soutenir une guerre contre l’Iran mais s’opposerait à une guerre contre les Palestiniens.

De plus, il y a des rumeurs selon lesquelles l'avion de Netanyahu s'est arrêté récemment au Pakistan pour se rendre à Oman. Cela a apparemment été suivi d'un discours prononcé par Asma Hadeed, du parti au pouvoir, à la Chambre basse du Parlement pakistanais, qui a été décrit comme étant « pro-juif ». Le Pakistan souffre de problèmes économiques chroniques et le gouvernement d'Imran Khan pourrait envisager ses relations avec Israël. L'Indonésie semble être sur la même voie : le vice-président Jusuf Kalla a rencontré Netanyahu à l'Assemblée générale des Nations-Unies à New-York en septembre. Il a rapidement insisté sur le fait qu'il ne s'agissait pas d'une rencontre planifiée à l'avance. Il est cependant évident qu'il n'a pas agi de son propre chef.

Avec un petit coup de pouce du prince héritier saoudien Mohammad Bin Salman, qui a cruellement besoin du soutien d'Israël après le meurtre de Jamal Khashoggi, nous pourrions voir très bientôt les plus grands pays musulmans frapper à la porte de Netanyahu. Une autre offensive militaire israélienne contre les Palestiniens à Gaza risque de mettre en péril tous ces développements auxquels Israël aspire depuis longtemps.

Néanmoins, le cessez-le-feu en vigueur à Gaza pourrait ne pas durer longtemps. Presque tous les politiciens israéliens tirent leur soutien du public en se présentant aux électeurs comme des durs à cuire, prêts, capables et disposés à empêcher un autre holocauste. Pour démontrer qu'ils sont plus capables que leurs adversaires politiques, ils doivent patauger de plus en plus profondément dans le sang des Palestiniens. Cela pourrait être essentiel pour Netanyahu s’il veut remporter la prochaine élection générale contre ses principaux opposants, Lieberman, et le ministre de l’Éducation, Naftali Bennett.

La démission de Lieberman révèle à quel point Israël est fragile. En dépit des « victoires diplomatiques » acclamées par Netanyahou, une seule confrontation militaire avec la bande de Gaza assiégée a suffi à porter un coup fatal à son gouvernement et pourrait même la faire tomber. La conclusion simple à tirer de tout cela est qu’Israël ne survit pas parce qu’il est fort mais parce qu'il arrive à affaiblir ses ennemis, peu importe le prix.



Source : Middle East Monitor

Traduction : MR pour ISM

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