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France - 16 février 2008
Par un palestinophile sexagénaire
Les mots que nous utilisons plutôt que d'autres pour défendre une cause peuvent sensiblement modifier, consciemment ou non, en positif ou en négatif, la conceptualisation de qui nous lit ou nous écoute et donc éventuellement stériliser nos efforts. L'écrivain sioniste plus ou moins pacifiste David Grossman l'a bien compris, qui se sert de cette prise de conscience contre les Palestiniens.
En effet, le premier ennemi de la cause palestinienne, ce sont peut-être ceux qui, involontairement généralement, la théorisent sans suffisamment définir ou peser leurs mots-clés. Peut-être parce qu'ils considèrent à tort que tout le monde les conceptualise comme eux-mêmes ou parce que la qualité de leur scolarité et de leurs professeurs ne leur a pas permis d'écouter et de lire et d'expliciter également avec un sens suffisamment critique des idées exprimées ne serait-ce déjà que dans leur langue maternelle. Pour ne faire qu'évoquer le célèbre « tradutore traditore » (Le traducteur trahit... souvent).
Vous trouverez donc ci-dessous quelques exemples, certes éventuellement discutables ou subjectifs, mais qui peuvent utilement vous faire changer de vocabulaire.
Le défaut le plus fondamental de la communication, c'est l'utilisation inappropriée de LES au lieu de DES. Si je dis « Les Israéliens sont complices des crimes de leurs gouvernements sionistes successifs », il est absolument incontestable que c'est faux, puisque non seulement il y a des Juifs israéliens qui désapprouvent totalement leurs gouvernements, mais encore parce que 20 % de la population israélienne est composée de ceux qu'on appelle « les Palestiniens de 48 » parmi lesquels on trouve peut-être quelques collabos, mais qui ne sont heureusement pas majoritaires ; et c'est pareil quand on écrit « Les Français » ou encore « Les Usaméricains ». Le mauvais usage du « Les » et du « Des » est sans doute la cause principale de la dyscommunication ambiante dans le monde entier… quand cette distinction existe dans la langue en question évidemment.
Le second défaut, c'est l'absence fréquente de souci de préciser sa pensée par un adjectif ou un adverbe, probablement parce que l'école et le collège n'apprennent plus à bien parler et rédiger ; certes l'usage de ces deux précieux outils de bonne communication nuancée rallonge le texte et donc le temps de lecture, mais il limite sensiblement le risque de croire que votre interlocuteur vous a exactement compris, voire qu'il est d'accord avec vous. Comment bien communiquer sans ce souci fondamental, sauf à parler avant tout narcissiquement pour s'écouter parler ?
Plus spécifiquement, le discours sur le drame palestinien mérite d'utiliser tel mot plutôt que tel autre pour en accélérer la fin. Vu qu'il faut espérer que vous n'en parlez pas en intello, pour le plaisir de jouter ou d'étaler votre exact ou inexact savoir historique (que l'ouverture future d'archives contredira peut-être, il est vrai).
« Juif » qui doit toujours s'écrire, si c'est un nom, avec une majuscule comme un Arabe ou un Noir, ne signifie pas « pratiquant de la religion judaïste ou judaïque ». On peut être juif et athée ou chrétien (comme le Cardinal Lustiger) ou théo-spiritualiste. On peut même être juif et mal dit « anti-sémite » par des sionistes intégristes qui parlent alors de « Juif ayant la haine de lui-même ».
« Antisionisme » ne signifie pas automatiquement, « anti-juivisme » et encore moins « antisémitisme », surtout que les Palestiniens sont aussi des Sémites, alors qu'il y a des rabbins antisionistes qui estiment que toute évocation biblique non intrinsèquement géographique de Jérusalem doit être prise au sens figuré.
« Sionisme » peut couvrir deux approches, l'une athée, l'autre religieuse qui n'utilisent pas forcément les mêmes arguments et n'ont pas les mêmes motivations. Même si les « sionistes » s'utilisent réciproquement pour constituer une majorité.
Mais justement, nous ne devrions jamais utiliser le nom "sionistes", sinon l'adjectif sans lui accoler un qualificatif. Déjà il y a les « sionistes religieux » et les « sionistes politiques », certains s'avérant être les deux à la fois. Mais parmi ces derniers, il serait didactique de distinguer les « sionistes criminels » (ce qui inclut les électeurs des meneurs) et les « sionistes pacifistes » qui dénoncent les crimes des autres sionistes, mais souhaitent néanmoins, paradoxalement, que l'état d'Israël, juif ou laïc, perdure à jamais à côté d'un état palestinien à droite d'une fluctuante et plus ou moins clairement définie par eux « Ligne verte » mal dite de 67, alors que déjà il faudrait dire de 49. Leur position ne tient pas à l'analyse puisqu'un sens théoriquement commun de la justice, de l'éthique et de la logique réunies suffit pour estimer que la création de l'état d'Israël ne répondait absolument pas à ses critères.
En réalité seuls sont vraiment défenseurs du peuple palestinien, et en particulier de sa majorité déshumanisée actuellement jour et nuit, les Israéliens d'ascendance juive qui sont déjà disposés à devenir citoyen palestinien à part vraiment entière, pas comme sont actuellement soi-disant israéliens ceux qu'on appelle les « Palestiniens de 48 » et que les sionistes criminels appellent avec mépris « Les Arabes israéliens ».
Le "drame palestinien" n'est pas une "guerre", vu que ce terme désigne généralement un conflit à armement plus ou moins égal, ce qui n'est vraiment pas le cas avec le drame palestinien qui n'est même pas vraiment un conflit tant est disproportionné le nombre de résistants palestiniens (de tous poils, de barbe ou pas) armés par rapport aux effectifs des militaires actifs ou réservistes de Tsahal. Même si moralement beaucoup de Palestiniens gardent le courage de résister, à côté de ceux qui, volontairement ou non, sont des indicateurs ou pire des collaborateurs des sionistes criminels.
" Traité de paix " est un terme plus ou moins inadapté, s'il ne met pas fin effectivement à une guerre – officiellement déclarée ou non - entre deux états reconnus par ce qu'il est convenu d'appeler la « communauté internationale » Mais si précisément on trouve logique de ne pas parler de guerre, il faut alors parler de « traité de non agression ou de fin d'occupation ».
On parle de « colons » et de « colonie », ça n'est pas pertinent quel que soit le sens qu'on donne à colonie (sauf dans le sens colonie d'oiseaux et encore !), car en fait les intégristes ou les pauvres Juifs israéliens – de fraîche ou de vieille date !!! - - qui habitent dans des maisons neuves sur des terres volées aux Palestiniens depuis 1949 sont des occupants plus ou moins civils (puisqu'un juif israélien est longtemps militaire réserviste), des Is-rat-élo-sionistes qui grignotent peu à peu les terres palestiniennes avec la bonne conscience de membres du « seul peuple élu de Dieu ».
« Nous exigeons » est quasi une rodomontade si nous ne détenons aucun pouvoir ou très peu. « Nous nous insurgeons » est déjà un terme mieux pesé. « Nous adjurons » peut-être ? « Nous dénonçons » en connaissance de cause ! « Nous allons traîner en cour de justice internationale » est peut-être la seule menace qui peut avoir du poids, si on le fait comme c'est le cas en Belgique à propos de l'agression israélo-sioniste du Liban en été 2006.
Etc., etc.
D'autres exemples « bienvenus » sont ajoutables qui tous pourront peut-être faire prendre conscience que nous ne faisons pas attention aux poids de nos mots et à leur impact sur nos conceptualisations.
N.B. Si maintenant vous pouvez relire quelques longs textes sur le drame palestinien, il y a fort à parier que vous ferez des découvertes. Par exemple que l'auteur n'a pas pesé ses mots, peut-être même volontairement pour vous tromper ; ou encore que vous n'aviez pas compris le propos comme vous le conceptualiserez désormais. En souhaitant qu'à l'avenir, vous-même, vous pesiez vos mots et ayez le souci de nuancer vos propos pour être mieux compris, quitte à être contredit et donc mieux convaincre ... ou être convaincu.
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