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Jenin - 1 décembre 2013
Par Ola al-Tamimi
Cet article, publié le 29 novembre 2013, est une traduction de l'édition en arabe.
La reprise des négociations entre l'Autorité palestinienne et le gouvernement israélien en juillet a donné plusieurs résultats : 17 martyrs palestiniens (dont trois mardi dernier tués par les troupes israéliennes), 400 Palestiniens arrêtés par Israël et 50 Palestiniens arrêtés par l'Autorité palestinienne. Pendant ce temps, l'activité de colonisation se poursuit sans relâche à Jérusalem et dans les autres villes de Cisjordanie, sans aucun égard pour les promesses faites par l'intercesseur des négociations, l'administration des Etats-Unis, pour obtenir que l'Autorité palestinienne revienne à la table des négociations.
Octobre 2013 - Les habitants palestiniens du camp de réfugiés de Jenin, Cisjordanie occupée, aux prises avec les forces de la sécurité palestinienne (AFP)
L'expression de la moindre opposition aux négociations par l'opinion publique ou les groupes politiques palestiniens est devenu tabou. En conséquence, des dizaines de personnes ont été détenues par l'Autorité palestinienne pour garantir que les négociations puissent se poursuivre sans incident.
Report de la "Feuille de Route"
En raison des changements qui se sont produits sur le terrain, la faction Fatah opposée aux négociations a augmenté la pression sur le président de l'AP Mahmoud Abbas. Les réunions du Comité central du mouvement ont vu quelques discussions orageuses sur l'utilité des négociations, ainsi que sur les pouvoirs conférés à l'équipe de négociation, qui n'en réfère directement qu'au président, ce qui la met à l'abri d'avoir à rendre compte.
Ceci coïncide avec les transformations radicales des factions de la résistance qui ont eu lieu en Cisjordanie depuis 2005 : l'amnistie pour les fugitifs recherchés, l'intégration des combattants au sein des services de sécurité et des salaires élevés en échange du dépôt des armes ont suffi à créer un nouvel équilibre du pouvoir qui penche en faveur du Président Abbas au sein du Fatah.
Cependant, cette situation n'a pas émergé du néant et elle est en fait considérée comme l'essence du plan "feuille de route pour la paix". En vérité, sans ces mesures, aucune des dispositions du plan ne pourrait être mise en oeuvre.
Entre 2002 et 2005, a émergé au sein de l'Autorité palestinienne une nouvelle faction qui envisageait avec enthousiasme de réaliser le rêve des généraux d'Israël, à savoir mettre fin à l'Intifada et éradiquer les groupes de résistance armée à l'intérieur des zones contrôlées par l'AP. C'était une des exigences de la "feuille de route", qui demandait explicitement aux Palestiniens de mettre un terme à ce qu'elle appelait "la violence et le terrorisme", appelant les services palestiniens de sécurité à combattre tout acte de résistance contre les Israéliens.
Le démantèlement de l'infrastructure des mouvements de résistance fut une sorte de tentation offerte à Abbas pour renforcer son autorité. Au fur et à mesure que le temps passait et que les services palestiniens de sécurité n'arrivaient pas à éliminer complètement l'infrastructure de la résistance, en particulier dans les camps de réfugiés, la résistance est devenue un véritable fardeau à éliminer.
En 2009, ce fardeau s'est alourdi lorsque Abbas est entré en pourparlers avec l'ancien Premier ministre israélien Ehud Olmert sur la question des frontières. Un accord a été atteint sur le déploiement d'une force internationale de paix sur la frontière entre la Palestine et Israël, stipulant que l'Etat palestinien devait être démilitarisé, à l'exception des armes nécessaires à une force de police.
Cependant, Olmert a démissionné avant qu'un accord final soit atteint sur les frontières. Le gouvernement de Benjamin Netanyahou n'a pas reconnu l'accord de sécurité entre Abbas et Olmert, et a demandé que les négociations reprenne de zéro.
Les camps de réfugiés : un fardeau sécuritaire
Les négociations sont revenues à la case départ, avec un premier round entre les deux parties à Jérusalem occupée après un gel de trois ans. Néanmoins, des responsables en Israël ont rapidement annoncé qu'ils allaient intensifier la construction des colonies juives en Cisjordanie et à Jérusalem Est occupée.
Du côté palestinien, après la réception d'un programme d'aide de 4 milliards de dollars destiné à aider l'AP à surmonter sa crise financière, il a fallu monter la scène d'un point de vue politique pour la reprise des négociations, avec l'aide de l'équipe de sécurité des Etats-Unis créée en 2005 pour aider l'AP à rétablir ses services de sécurité et à démanteler l'infrastructure de la résistance. Peu de temps après, une campagne de sécurité a commencé contre les activistes anti-négociations.
Cela a été corroboré par le commandant des Brigades des Martyrs d'Al-Aqsa à Jenin, Zakaria al-Zubaidi, dans un entretien du 4 septembre avec le journal israélien Maariv. Zubaidi y déclarait que l'AP arrêtait les membres ouvertement opposés aux négociations.
S'adressant à Al-Akhbar, Jamal Huwail, membre du Conseil législatif palestinien, a déclaré : "Le camp de Jenin restera partisan de la résistance, et se défendra contre les violations et les raids constants de l'occupation." Il a dit également : "Les négociations accompagnées des infractions continues de l'occupation ne peuvent pas continuer. L'Autorité palestinienne doit interrompre les négociations."
A son tour, le chef du Jihad islamique palestinien Ahmad al-Mudallal a dit à Al-Akhbar : "L'Autorité palestinienne et ses services de sécurité parachèvent le rôle de l'occupation israélienne en persécutant la résistance, en parallèle avec l'intensification des campagnes de judaïsation contre les lieux saints islamiques et chrétiens à Jérusalem occupée."
Mudallal tient les services de sécurité en Cisjordanie pour pleinement responsables des vies des combattants de la résistance qui sont pourchassés par l'Autorité palestinienne à Jenin. Il a appelé ensuite les "combattants de la résistance dans le camp de Jenin à résister à la répression, et à essayer d'empêcher par tous les moyens les services de sécurité de pénétrer dans les maisons des résistants et des citoyens pour les arrêter ou les liquider."
Les remarques de Zubaidi, d'Huwail et de Mudallal montrent que le camp et les négociations se déplacent le long de deux voies qui ne peuvent pas converger. Mais en même temps, l'une doit inévitablement triompher sur l'autre.
La présence d'activistes anti-négociations est bien sûr quelque chose qui ne plait pas à l'équipe de sécurité US, qui n'est pas propice à l'imposition d'une solution politique sur le terrain et qui accentue sans doute la pression sur l'AP pour qu'elle se débarrasse du fardeau. En d'autres termes, les choses sont en bonne voie pour exploser et échapper à tout contrôle.
La politique du statu quo
Avec Israël donnant le feu vert à plus de 20.000 nouvelles unités de logement à Jérusalem et en Cisjordanie , la confiscation de centaines d'hectares par l'Etat juif et le déplacement de dizaines de familles palestiniennes, la crise entre les côtés palestinien et israélien a atteint de nouveaux paliers. C'est du moins ce que les médias pro-Autorité palestinienne ont affirmé, tandis que l'équipe palestinienne de négociations a annoncé qu'elle démissionnerait après avoir participé au 20ème round de négociations depuis juillet 2013.
En outre, l'opposition aux négociations est forte, tant au Fatah que dans l'opinion publique palestinienne en général, ce que les services palestiniens de sécurité n'ont pas réussi à influencer de manière décisive. Tout ce qui reste à Abbas, c'est de maintenir le statu quo, donc continuer les négociations même après la démission du négociateur en chef palestinien Saeb Erekat.
La démission des négociateurs palestiniens ne fera pas capoter les négociations. Abbas pourrait émettre un décret présidentiel nommant une nouvelle équipe qui continuerait les pourparlers. Pendant ce temps, la répression contre les activistes anti-négociations se poursuivrait, servant à contrecarrer l'opposition populaire plus large qui pourrait se transformer en une Intifada à grande échelle.
La presse palestinienne alimente la répression sécuritaire
Lorsque le gouverneur de Jenin, le major-général Talal Dweikat a annoncé le lancement de la campagne sécuritaire dans le camp de réfugiés de Jenin pour "éliminer l'anarchie", la presse palestinienne a rapidement soutenu la répression comme un "mal nécessaire". Pendant des jours, des programmes radiophoniques l'ont rejointe dans une tentative d'isoler les combattants de la résistance et les militants anti-négociations, diabolisant ces derniers comme étant des éléments subversifs qu'il faut appréhender.
Un sondage effectué par le Centre de Jérusalem pour l'Information et la Communication a montré que 50,5 pour cent des Palestiniens pensent que la décision de l'Autorité palestinienne de reprendre les pourparlers avec Israël est "mauvaise". Le même sondage a montré que 68,7 pour cent des sondés croient que les négociations ne parviendront pas à un accord avec Israël, contre 20,8 pour cent qui pensent l'inverse.
Source : Al Akhbar
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