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Liban - 27 janvier 2017
Par Sabah Ayoub
Au Liban on ne critique pas les discours surtout lorsqu’ils sont émis par une personnalité officielle qui représente un Etat impérialiste. Tous les comportements issus de ce type de personnes sont autorisés, quand bien même ils porteraient atteinte à la souveraineté du pays et à l’honneur de ses citoyens (les proclamations et les agissements des ambassadeurs américains successifs le prouvent amplement), au point qu’on en arrive à croire que la plupart des personnalités officielles en visite au Liban savent à l’avance que leurs hôtes seront plus préoccupés par la qualité des mezzés qu’ils vont leur servir que par la teneur des discours qu’ils vont entendre, de sorte que ces personnes se permettent de s’exprimer en toute liberté en toute impunité.
Emmanuel Macron en visite au Liban les 23 et 24 janvier 2017. Ici avec le Premier ministre libanais Saad Hariri (EPA/MAXPPP / WAEL HAMZEH)
Le dernier visiteur de ce genre et en provenance de la France est Emmanuel Macron, ex-ministre de l’Economie et actuel candidat à la présidence, qui a visité Beyrouth il y a deux jours dans le cadre d’une « tournée moyen-orientale » qui devait inclure également la Jordanie. Macron, jeune (39 ans) politicien de formation financière est le nouveau visage que les Français ont découvert en 2014 lorsqu’il est devenu ministre après avoir œuvré dans les coulisses de l’administration Hollande, qu’il a quittée pour créer son propre parti. Nous ne nous étendrons pas sur son profil financier et bancaire ni sur ses échecs et réussites. Rappelons seulement qu’il est actuellement accusé d’avoir utilisé l’argent (public) du ministère de l’Economie pour financer la campagne de son parti « En marche ! » qu’il a lancée après sa démission de son poste en août 2016.
Toutes ces données n’ont évidemment eu aucun impact sur la fameuse « hospitalité libanaise ». Les organisateurs de la visite de Macron se sont efforcés de lui attribuer un caractère officiel électoral quoique l’identité des personnes à l’origine de ce déplacement et l’objet de la visite soient restés mystérieux, et parce qu’au Liban vous pouvez être considéré comme un président avant d’avoir été élu, le candidat à la présidentielle a été reçu comme un président par Michel Aoun, président de la République libanaise, Saad Hariri, premier Ministre et le patriarche maronite Bechara Ra’i, et « s’est déplacé en convoi blindé » (!) selon un média français.
D’autres médias français ont indiqué que « Hollande et le ministère des Affaires étrangères français avaient discrètement préparé la visite de Macron », information aussitôt démentie par l’Elysée hier. Le candidat « progressiste » comme il se définit lui-même, a fait des promesses électorales et insisté sur la reprise des relations économiques et des projets communs lors de sa rencontre avec Hariri. Il a également, à des fins clairement électorales, rendu visite en compagnie des journalistes qui l’accompagnaient à un centre de réfugiés syriens à Aïn el Remmaneh.
Macron a de plus décidé d’exploiter le caractère ouvert du terrain libanais pour afficher des positions politiques sur la région, il s’est ainsi exprimé sans honte aucune à deux reprises lors de la conférence qu’il a animée à l’Ecole Supérieure des Affaires (ESA) sur la campagne internationale Boycott Désinvestissement Sanctions (BDS) et déclaré qu’il ne lui reconnaissait ni justification ni légitimité. Il a rappelé la décision de la France en 2015 de criminaliser le boycott de l’entité sioniste et affirmé : « il est hors de question de revenir sur cette décision ». Le candidat à la présidentielle, qui avait brandi le slogan « La paix et l’humanité » dans sa campagne électorale, a développé sa position sur le conflit arabo-israélien et déclaré, à partir de la terre libanaise qui est toujours en guerre contre l’ennemi sioniste, qu’il était « contre la reconnaissance par la France de l’Etat palestinien en l’absence d’un accord de paix entre les deux parties ». Il a également indiqué qu’il était « contre l’exercice de la moindre pression sur Israël ». Ces propos ont été rapportés par le média israélien I24 et certains médias français. Macron ne veut pas reconnaître la Palestine, refuse de reconnaître le droit de boycotter économiquement et académiquement l’entité, et rejette toute pression à son égard.
Le candidat à la présidentielle française a sans aucun doute des considérations électorales à prendre en compte, mais on peut se demander à qui incombe la responsabilité de lui permettre de faire de telles déclarations publiques et officielles dans un pays qui continue aujourd’hui à payer le prix de l’occupation israélienne avec le sang de ses enfants.
Emmanuel Macron, votre outrecuidance n’est ni bien vue ni bienvenue chez nous.
Source : Al Akhbar
Traduction : NA
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