Envoyer cet article
Grande Bretagne - 21 décembre 2006
Par War on Want
“Tirer profit de l’occupation” est un rapport édité par War on Want en juillet dernier, dans lequel l’organisation caritative militante basée à Londres examine la complicité des entreprises dans les crimes d’Israël contre la population palestinienne.
Photo Stop The Wall : Usine d'emballage d'Agrexco installée dans la vallée du Jourdain
La guerre est l’une des causes principales de la pauvreté. La guerre peut saper les projets de développement d’un pays, en détruisant les écoles et les hôpitaux et en stérilisant la terre pour de longues années. 80% des 20 pays les plus pauvres du monde ont connu la guerre dans les 15 dernières années, et le préjudice sur les humains continue longtemps après.
9 des 10 pays qui ont le taux de mortalité infantile le plus élevé ont eu à souffrir de conflits dans les années récentes (1).
Pourtant, la guerre n’appauvrit pas tout le monde. Beaucoup d’entreprises prospèrent grâce aux conflits, soit par la fourniture de matériel militaire aux forces armées, ou aux armées de mercenaires agissant pour le compte des états combattants.
D’autres alimentent le conflit par leurs opérations dans les zones de guerre, comme les compagnies pétrolières dans des pays explosifs comme la Colombie et l’Irak, ou par leur commerce ininterrompu de matières premières.
D’autres tirent profit du financement de l’effort de guerre.
Ce rapport fait partie d’une nouvelle campagne de War on Want pour dénoncer ces entreprises qui profitent de la guerre.
Le but de la campagne est de montrer les nombreuses et différentes façons selon lesquelles le secteur marchand est impliqué dans les conflits, et de suggérer des actions publiques qui demanderont à ces entreprises de rendre des comptes.
La campagne complète le soutien de longue date de War on War à nos partenaires dans les zones de conflits : quelques-uns des hommes et femmes les plus courageux au monde, en première ligne dans la lutte pour les droits de l’homme.
Ce rapport examine l’investissement des entreprises dans l’occupation militaire de la Palestine, se centrant en particulier sur les trois secteurs de la construction, la vente au détail et le transport.
En même temps qu’il fournit des informations sur les activités de ces entreprises, le rapport appelle les lecteurs à agir pour leur demander des comptes.
C’est, plus largement, la mission de War on Want : soutenir les peuples des pays en développement dans leur lutte pour la survie, mais également inciter les peuples des pays riches à remettre en cause les causes premières de la pauvreté dans le monde.
Louise Richards, présidente de War on Want.
Crises humanitaires, complicité des entreprises
La Palestine est en proie à une catastrophe humanitaire. Les Nations Unies rapportent que 70% des Palestiniens vivent maintenant dans la pauvreté, un chiffre qui n’ira qu’en augmentation si les conditions actuelles perdurent.
L’économie palestinienne s’effondre, avec un PIB qui a chuté de 27% à la fin de 2006. La Banque Mondiale qualifie 2006 de "année la pire de la sombre histoire économique récente de la Cisjordanie et de Gaza". (2)
Cette crise est le résultat direct de l’occupation militaire israélienne de la Palestine et de l’intensification récente des actions d’Israël contre le peuple palestinien.
Comme le décrit le rapport, Israël resserre son nœud coulant autour des Palestiniens vivant en Cisjordanie par l’expansion continue des colonies et la construction du Mur de Séparation sur la terre palestinienne occupée.
La suspension des aides des Etats Unis et de l’Union Européenne au gouvernement palestinien nouvellement élu et le refus d’Israël de restituer les recettes fiscales dues à l’Autorité Palestinienne ont exacerbé le problème, comme l’ont fait les restrictions renforcées imposées par Israël sur la mobilité des Palestiniens. Comme ont averti les Nations Unies, "l’extension de l’effondrement ne doit pas être sous-estimée".
Cependant, en dépit de cette crise sans précédent, de nombreuses compagnies soutiennent activement l’occupation israélienne de la Palestine au travers de leurs activités commerciales.
De très grandes enseignes sont directement impliquées dans des projets qui contribuent à la misère du peuple palestinien, et qui menacent de prolonger ses souffrances dans les années à venir. Ce rapport constitue pour la première fois un catalogue des soutiens des entreprises à l’occupation de la Palestine, dans les trois secteurs de la construction, de la vente au détail et du transport.
Pour le premier secteur, les bulldozers fournis par des entreprises comme Caterpillar, Volvo et Daewoo sont utilisés par l’armée israélienne pour détruire les maisons, les écoles, les oliveraies et les vergers palestiniens.
Le matériel de ces entreprises et du groupe de construction JCB est également utilisé pour la construction du Mur israélien de Séparation, déclaré illégal par la Cour Internationale de Justice mais dont la construction se poursuit malgré tout.
Les Nations Unies ont condamné une telle complicité des entreprises dans la violation des droits humains palestiniens, mais aucune action officielle n’a été entreprise pour y mettre un terme.
Dans le secteur de la vente au détail, les supermarchés britanniques Tesco, Waitrose et Sainsbury’s vendent de produits venant des colonies israéliennes installées en Cisjordanie et sur les Hauteurs du Golan.
Ces colonies sont illégales au regard de la loi internationale et pourtant, les supermarchés vendent leurs produits sous le label "Fabriqué en Israël", cachant le fait qu’ils sont en réalité fabriqués dans des territoires sous occupation militaire.
Ce rapport cible en particulier le vin fabriqué dans les colonies et vendu dans les supermarchés britanniques, et sur l’agence d’exportation Agrexco, qui est responsable de l’exportation des deux tiers de la totalité des produits venant des colonies de Cisjordanie .
Le troisième secteur du soutien des entreprises à l’occupation concerne la compagnie française de transport Connex, dont le nom est familier parce qu’elle gère les trains qui arrivent et partent de Londres.
La Connex est un partenaire central dans la construction actuelle du tramway à Jérusalem, qui va relier la ville aux colonies illégales de Cisjordanie . Le réseau de rails sera construit sur la terre palestinienne occupée, en contravention avec la loi internationale.
Dans les trois cas, les entreprises en question aident à créer "un fait accompli" qui empêchera toute possibilité d’un Etat palestinien viable. Elles peuvent être considérées, par le résultat de leurs opérations en territoire palestinien occupé, comme complices de la violation des droits humains palestiniens.
Pourtant, les gouvernements occidentaux n’ont engagé aucune action pour arrêter l’investissement corporatif dans l’occupation de la Palestine, bien qu’ils aient l’obligation de le faire selon la Quatrième Convention de Genève. La mise en place d’action demandant des comptes à ces entreprises est laissée aux seuls particuliers.
Construction, destruction
Pour les consommateurs européens, Caterpillar est bien connu pour ses bottes, sacs et habits solides.
Volvo construit des voitures fiables et robustes pendant que Daewoo occupe le créneau "sans prétentions" du marché de l’automobile.
Pourtant, ces trois marques ont une chose en commun : leurs bulldozers sont utilisés par l’armée israélienne pour détruire les maisons, les écoles, les oliveraies et les vergers palestiniens, et leur matériel construit le Mur israélien illégal de Séparation.
Selon les Nations Unies, environ 4.500 maisons palestiniennes ont été détruites par l’armée israélienne depuis septembre 2000. Le Comité Israélien contre la Démolition des Maisons (ICAHD) a calculé qu’Israël a démoli quelques 12.000 maisons palestiniennes depuis 1967, que ce soit dans des actions militaires punitives ou simplement parce que les autorités israéliennes ont décrété qu’ils n’avaient pas les permis adéquats (appelées démolitions "administratives").
Plus de 70.000 personnes ont vu leurs demeures détruites dans de telles opérations, et beaucoup d’autres ont vu raser leurs fermes, leurs arbres fruitiers et leurs oliviers.
Les Nations Unies ont pointé du doigt en particulier Caterpillar pour sa complicité dans la violation des droits humains palestiniens.
Alors que le matériel Volvo et Daewoo est utilisé par des contractants employés par l’Etat israélien, Caterpillar vend ses bulldozers directement à l’armée israélienne comme armement dans le cadre du programme Ventes militaires à l’étranger des USA.
Les bulldozers blindés D9 de Caterpillar sont devenus une partie indispensable de l’arsenal militaire israélien, et sont utilisés dans toutes les opérations militaires importantes en Palestine occupée. Selon un commandant militaire israélien, les bulldozers Caterpillar sont devenus "l’arme clef" de la guerre urbaine. (4)
Outre leur utilisation dans la destruction des maisons et des fermes palestiniennes, les bulldozers Caterpillar, Volvo et Daewoo servent à la construction du Mur israélien de séparation.
En dépit de l’avis de la Cour de Justice Internationale, en juillet 2004, selon lequel le Mur est illégal au regard de la loi internationale, et la résolution subséquente de l’Assemblée Générale des Nations Unies appelant Israël à respecter ses obligations juridiques, le gouvernement israélien a donné son accord pour un nouveau tronçon de 676 Kms en février 2005. Jusqu’à maintenant, plus de 275 Kms sont terminés et 160 Kms sont en voie de l’être. (5)
75% du Mur de Séparation sont construits sur les territoires palestiniens plutôt que sur la frontière israélienne, la Ligne Verte. Ce qui signifie que le Mur annexera de fait 10% de la Cisjordanie , dont les colonies qui hébergent les trois quarts des colons israéliens.
En dépit de leurs protestations initiales affirmant que le Mur était une mesure sécuritaire, les dirigeants israéliennes ont commencé à reconnaître qu’il servait un projet politique en incluant les colonies au territoire sous contrôle israélien.
L’ancienne Ministre de la Justice Tzipi Livni a déclaré publiquement en novembre 2005 que le Mur constituerait "la future frontière de l’Etat d’Israël" et que les avis de la Haute Cour sur le Mur "dessinaient les frontières du pays".
Le Bureau du Ministère Public a confirmé en juin 2006 que le tracé du Mur avait, bien sûr, des "implications politiques" pour l’avenir. (6)
Le Mur de Séparation a d’ores et déjà causé un immense préjudice au peuple palestinien. Le Mur passe au milieu des villes et villages palestiniens, isolant les communautés et séparant les gens de leur famille, de leurs écoles et de leurs hôpitaux.
Les Palestiniens rencontrent de plus en plus de difficultés pour accéder à leurs terres dans la "zone fermée" derrière le Mur parce qu’Israël a renforcé son réseau de clôtures.
Dans son rapport de mai 2006 à l’Assemblée Générale des Nations Unies, le Secrétaire Général Kofi Annan confirmait : "Le système israélien de clôtures est une des causes principales de la pauvreté et de la crise humanitaire dans les territoires palestiniens occupés, et restreint l’accès des Palestiniens aux services de santé et d’éducation, à l’emploi, aux marchés, et aux services sociaux et religieux." (7)
L’utilisation des machines fournies par Volvo, Daewoo et Caterpillar pour la construction du Mur de Séparation et la démolition des maisons palestiniennes implique ces entreprises dans les activités illégales d’Israël.
L'enquête de War on Want en Palestine a confirmé les rapports précédents qui indiquaient que l’entreprise de construction britannique JCB travaille au Mur de Séparation.
Dans tous ces cas, les compagnies concernées doivent prendre des mesures pour s’assurer que leur matériel ne sert pas les crimes de guerre qu’Israël commet contre le peuple palestinien.
Des colonies aux étagères des supermarchés
De nombreux grands magasins britanniques stockent des produits qui viennent des colonies israéliennes situées sur le territoire palestinien occupé.
Ces colonies représentent la réalité physique de l’occupation telle que les Palestiniens la vivent quotidiennement, et les revenus d’exportation sont importants pour le soutien de leur économie. Les magasins qui vendent les produits des colonies renforcent de fait l’occupation.
Israël a construit un réseau extensif de colonies sur les terres volées pendant la Guerre des Six Jours, en 1967. Il y a actuellement 135 colonies officielles en Cisjordanie et à Jérusalem occupée, plus 100 autres colonies non officielles, ou "postes avancés".
Ces colonies hébergent maintenant plus de 450.000 israéliens, dont les villes et cités sont bâties sur les territoires palestiniens occupés et qui exploitent des milliers d’hectares de la meilleure terre palestinienne.
Le Conseil de Sécurité des Nations Unies a qualifié les colonies israéliennes de “violation flagrante” de l’article 49 de la Quatrième Convention de Genève, qui interdit le transfert de population vers un territoire occupé en guerre. (9)
Selon l’Ordonnance de Rome de la Cour Pénale Internationale, ces transferts de population sont également un crime de guerre.
Au cours des 40 dernières années, les Nations Unies n’ont cessé d’exhorter Israël à respecter la loi internationale et démanteler les colonies, à la place de quoi Israël n’a cessé de les développer de manière exponentielle.
Plus récemment, Israël a intensifié l’expansion dans le but explicite de créer un "fait accompli" sur lequel il sera impossible de revenir lors de futures négociations, rendant impossible la création d’un Etat palestinien viable.
John Dugard, le Rapporteur spécial des Nations Unies, a qualifié cette politique de “parfaitement inacceptable par la communauté internationale”.
L’impact des colonies sur la vie quotidienne des Palestiniens va bien au-delà de la confiscation de leur terre et la destruction de leurs maisons. Ensemble, Israël et ses colonies utilisent 83% de l’eau des nappes phréatiques de Cisjordanie , ne laissant que 17% aux habitants palestiniens.
La construction d’un réseau de routes "seulement pour les colons" a considérablement restreint la liberté de mouvement des Palestiniens, en même temps que les restrictions imposées aux checkpoints militaires ont été comparées aux "lois sur le laissez-passer" de l’Afrique du Sud de l’Apartheid. (11) (11.1)
Les colons sont protégés par l’armée israélienne et profite de cette protection pour commettre des actes de violence contre les Palestiniens en toute impunité. Selon les Nations Unies, la violence des colons est en augmentation. (12)
Provenant d’une terre illégalement occupée, les produits des colonies ne devraient pas bénéficier du traitement préférentiel dont jouissent les exportations israéliennes vers le Royaume-Uni, selon l’Accord d’Association Union Européenne/Israël.
Pour venir à bout du fait que les produits des colonies ont traditionnellement étaient labellisées "fabriqué en Israël", l’Union Européenne demande maintenant aux exportateurs israéliens d’indiquer le lieu d’origine de leurs marchandises, de manière à ce que les taxes d’importation correctes leur soient facturées.
Dans le cas des fruits et légumes, les produits des colonies sont souvent mélangés avec des produits israéliens, les rendant impossibles à détecter.
Dans quelques cas, cependant, des grandes enseignes vendent clairement des produits originaires des colonies, et non d’Israël.
Le cas d'Agrexco, l’importateur le plus important de produits venant des colonies, est étudié en détail ci-dessous.
Des supermarchés comme Tesco et Waitrose proposent ouvertement des articles connus comme originaires des colonies, tels les biscuits de Beigel et Beigel fabriqués dans la colonie de Barkan située en Cisjordanie et recommandés comme étant "délicieux, nutritifs et exempts de culpabilité".
Selfridges vend Ahava, une gamme de produits de soins pour la peau et les cheveux, qui sont fabriqués dans la colonie de Mitzpe Shalem, en Cisjordanie .
Argos, Tesco et Sainsbury’s vendent les produits Soda Stream, qui proviennent de la colonie Mishor Adumim, à l’extérieur de Jérusalem Est.
Le vin fournit un exemple clair de la vente des produits des colonies dans les supermarchés, en dépit des demandes répétées pour qu’ils cessent.
Tesco, Selfridges et Sainsbury ‘s vendent le vin Barkan, qui vient de la colonie citée plus haut.
Selon les recherches du groupe israélien Gush Shalom, l’entreprise produit son vin à l’intérieur de la zone industrielle Barkan, pour pouvoir bénéficier du statut et des primes des "zones de développement".
Elle commercialise ensuite le vin depuis son bureau de vente du Kibbutz Hulda, en Israël, masquant ainsi son lieu d’origine aux consommateurs outre-atlantiques, ainsi qu’au nombre croissant de consommateurs israéliens qui ne souhaitent pas acheter les produits des colonies.
Agrexco et la Vallée du Jourdain
Agrexco est l’exportateur israélien principal de produits agricoles frais.
Créée en 1956, la compagnie appartient pour 50% à l’Etat israélien, et les 50% restant à part égale entre le comité des producteur agricoles du pays et la coopérative Tnuva, l’entreprise de produits alimentaires la plus importante d’Israël. Toutefois, le gouvernement a annoncé en juin 2006 qu’il privatiserait Agrexco en revendant sa part de l’entreprise aux producteurs, mais cette vente pourrait prendre des années. (15)
Agrexco surfe sur la vague du succès que les exportations israéliennes de produits frais connaissent depuis ces dernières années. Entre octobre 2004 et octobre 2005, ces exportations ont totalisé 860 millions de dollars, soit une augmentation de 72% en seulement trois ans. Agrexco représente environ 70% des produits frais israéliens vendus à l’étranger, et il est prévu que les ventes annuelles de la compagnie atteignent 750 millions de dollars en 2006. (16)
Au Royaume-Uni (ndt : et en France), Agrexco est connu sous la marque Carmel, dont les produits sont vendus dans tous les principaux supermarchés.
Le Royaume-Uni est de loin le marché étranger le plus important pour les légumes israéliens, représentant 60% de toutes les exportations (par ordre d’importance, viennent ensuite les Etats-Unis, qui représentent seulement 20% des ventes de légumes israéliens).
Agrexco exporte une large gamme de produits frais au Royaume-Uni, dont le poivre, les tomates, les fraises, les fines herbes, les épices, les fleurs et les avocats, et a enregistré une augmentation considérable des ventes britanniques au cours des dernières années. (17)
En plus d’avoir le monopole de l’exportation des fruits et légumes israéliens, Agrexco est également le principal exportateur des produits des colonies pour la vente outre-atlantique.
En janvier 2006, au cours du procès de sept militants accusés d’avoir fait le blocus du centre de distribution Agrexco-UK pour protester contre ses opérations en Palestine occupée, Amor Orr, le directeur général d’Agrexco-UK a affirmé que son entreprise gère 60 à 70% de tous les produits exportés depuis les colonies israéliennes.
Il a également été demandé à Orr de fournir à la Cour la liste des importations d’Agrexco-UK venant d’Israël et des Territoires Occupés, ce qui a permis de lister des transactions avec les colonies de Tomer, Mehola, Hamra, Ro’i, Massua, Patzael, Netiv Ha-Gdud et Bet Ha-Arava, toutes situées en Cisjordanie . Les protestataires ont été acquittés.
Agrexco a été particulièrement actif dans la Vallée du Jourdain, qui est devenue une zone-clef du plan israélien pour le développement de ses colonies et empêcher la création d’un Etat palestinien viable.
En juin 2005, le Ministre de l’Agriculture israélien a annoncé un programme destiné à doubler du nombre de colons dans la Vallée du Jourdain en deux années par la construction de nouvelles habitations et la fourniture de subventions pour le développement agricole à hauteur de 22 millions de dollars.
Dans une interview à la télévision en février 2006, le Premier Ministre israélien Ehud Olmert a confirmé le projet de son gouvernement d'annexer la Vallée du Jourdain à Israël et couper ainsi le futur Etat palestinien de liens directs avec tout pays voisin. (18)
La Vallée du Jourdain est une des zones les plus fertiles de Cisjordanie , parfaitement adaptée à la production de fruits, de fleurs et de légumes.
Au début du plan d’annexion d’Olmert, les destructions de maisons se sont multipliées et les restrictions de mouvement des Palestiniens ont été aggravées.
Seuls les Palestiniens titulaires d’une carte d’identité de la Vallée du Jourdain peuvent passer les checkpoints militaires qui ont été placés dans la région, et de nombreux propriétaires ne peuvent maintenant plus accéder à leurs terres.
Selon une enquête sur le terrain menée par le groupe israélien pour les droits de l’homme B’Tselem, Israël a de fait déjà annexé la Vallée du Jourdain. (19)
Les actions d’Israël sont la cause de la crise humanitaire que subissent les Palestiniens vivant toujours dans la Vallée du Jourdain. Israël prive les résidents palestiniens d’eau pour satisfaire les niveaux élevés de consommation des colonies et de leur agriculture.
Des villages palestiniens comme Tammun et Jiftlik se sont vus délibérément interdire l’accès à l’eau courante alors qu'en même temps, Israël construit de nouveaux réservoirs en prévision d'une augmentation de la présence de ses colons.
La colonisation de la Vallée du Jourdain, illégale selon la Quatrième Convention de Genève, constitue un crime de guerre selon la Cour Internationale de Justice et les activités d’Agrexco font partie de cette colonisation.
Connex et l’annexion de Jérusalem Est
Connex est un nom familier pour les banlieusards du sud-est de l’Angleterre ; la compagnie a géré les trains qui arrivent et partent de Londres pendant sept ans, avant qu’il soit mis fin à sa franchise, en 2003, pour sa mauvaise gestion financière.
On sait moins que Connex est le partenaire principal d’un nouveau système de tramway de 500 millions de dollars, qui doit relier Jérusalem aux colonies illégales de Cisjordanie occupée. Connex joue donc un rôle clef dans la tentative israélienne de rendre irréversible l’annexion du territoire palestinien de Jérusalem Est.
En 2002, le consortium CityPass, constitué des compagnies françaises Connex et Alstom ainsi que deux entreprises israéliennes, a remporté le contrat de 500 millions de dollars pour construire et mettre en service le tramway de Jérusalem.
Le projet doit être achevé d'ici 2020 ; Alstom doit fournir les trains et Connex sera responsable du fonctionnement de la ligne pendant une période de 30 ans.
Le tramway partira de l’ouest de la ville et desservira les principales colonies israéliennes de French Hill, Ya’akov et Pisgat Ze’ev, avec les lignes supplémentaires vers les colonies de Gilo (près de Bethlehem) et Ramot. Toutes ces colonies sont situées dans Jérusalem Est.
Pourtant, comme l’a réaffirmé le Rapporteur spécial des Nations Unies John Dugard, “Jérusalem Est ne fait pas partie d’Israël. Au contraire, c’est un territoire occupé, assujetti à la Quatrième Convention de Genève. Malheureusement, la tentative illégale israélienne d’annexion de Jérusalem Est a caché cette vérité. »
Plus spécifiquement, Israël a poursuivi un programme intensif d’expansion dans et autour de Jérusalem Est, construisant des blocs de colonie où habitent maintenant 200.000 colons.
Le programme d’expansion massif du gouvernement israélien appelé "E-1" a pour but de relier Jérusalem Ouest israélienne à la colonie de Ma’ale Adumim située en Cisjordanie , via un couloir qui couperait Jérusalem Est palestinienne du reste de la Cisjordanie .
Le professeur Jeff Halper, du Comité Israélien Contre la Démolition des Maisons, a écrit : "Parce que 40% de l’économie palestinienne sont réalisés à Jérusalem grâce au tourisme, le plan E-1 coupera réellement le cœur économique de tout Etat palestinien, faisant de lui rien de moins qu’une réserve d’indiens non viable." (21)
En novembre 2005, les chefs des missions de l’Union Européenne à Jérusalem et Ramallah ont préparé un rapport interne sur les opérations israéliennes à Jérusalem Est.
Le rapport déclare : "L’Union Européenne, comme la plupart du reste de la communauté internationale, ne reconnaît pas l’annexion unilatérale d’Israël et considère les "environs" de Jérusalem Est comme des colonies aussi illégales que n’importe quelles autres – mais ceci n’empêche pas Israël de poursuivre leur expansion."
Le rapport conclut que l’Union Européenne devrait faire une déclaration claire appelant à l’arrêt immédiat de l’expansion des colonies ; les ministres de l’UE ont toutefois refusé de publier ce rapport. (22)
Le gouvernement israélien a clairement dit que le système de tramway Connex fait partie de son programme d’achèvement de l’annexion de Jérusalem Est.
Lors de la cérémonie de signature du contrat du tramway le 17 juillet 2005, le Premier Ministre israélien d’alors, Ariel Sharon, a fait l’éloge du "travail exceptionnel" réalisé par la municipalité en promouvant le projet, ajoutant : "Tout ce qui peut être fait pour renforcer Jérusalem, la construire, l’étendre et la soutenir pour l’éternité comme capitale du peuple juif et capitale unifiée de l’Etat d’Israël, doit l’être."
Conséquence de son rôle dans la construction du tramway pour les colonies israéliennes de Jérusalem Est, la Connex est directement impliquée dans l’occupation illégale du territoire palestinien.
Comme l’ont noté les chefs de la mission de l’Union Européenne, "la politique israélienne réduit la possibilité d’arriver à un accord de statut final sur Jérusalem acceptable par tout Palestinien."
En tant que représentant actif de ces politiques, la Connex sape toute chance d’une paix juste pour le peuple palestinien.
AGISSEZ
War on Want pense que les entreprises doivent rendre des comptes sur leur complicité des crimes d’Israël sur le peuple palestinien. Finalement, il doit y avoir un cadre international obligatoire de régulation qui oblige les compagnies à rendre des comptes sur leurs activités de par le monde.
Actuellement, ce sont des initiatives individuelles qui font pression sur les entreprises concernées et sur le gouvernement. Les lecteurs sont donc encouragés à mettre en œuvre les actions suivantes, pour soulever la question de la complicité commerciale dans l’occupation.
1. Ecrire aux entreprises
Ecrivez aux entreprises citées dans ce rapport et exprimez votre inquiétude sur l’occupation militaire d’Israël en Palestine. Nous vous suggérons d’écrire en particulier à :
En France :
• M. Alchasov, Agrexco. 16, Rue du Séminaire 94153 Rungis Cedex
Télécopie : 01 46 86 95 70
• Maria Stenström, Volvo Automobiles France, 34 r Croix de Fer - 78100 St Germain en Laye
• Bock Yong Choi, Daewoo France, Chevrolet France SAS, 33/49, Av. du Bois de la Pie – ZAC Paris Nord II - 95947 Roissy CDG Cedex
• Françoise Rausch, JCB SA, Rue de Vignolle - Zone d'activités - 95 842 Sarcelles Cedex
Fax : 01 39 94 06 62
En Grande Bretagne :
• Amos Orr, General Manager, Agrexco, Carmel House, 4F Swallowfield Way, Hayes, Middlesex UB3 1DQ
• Tony Helsham, President, Volvo Construction Equipment, Clayton Road, Birchwood, Warrington, Cheshire WA3 6PH
• Lee Tae-Yong, Daewoo International, 216 Melton Road, Leicester LE4 7PG
• Sir Anthony Bamford, Chairman, JCB, Rocester, Staffordshire ST14 5JP
2. User de son pouvoir de consommateur
Comme indiqué dans ce rapport, les supermarchés n’ont pas à distinguer les produits faits en Israël et ceux faits dans les colonies israéliennes des territoires palestiniens occupés – même si la distinction est faite par les douanes pour appliquer correctement les taxes d’importation.
Demandez au directeur de votre magasin local s’il peut confirmer que tous les produits portant la mention "Fariqué en Israël" viennent vraiment d’Israël, et non des colonies illégales israéliennes situées en Palestine occupée.
S’il ne peut le faire, demandez lui de vérifier auprès de son fournisseur.
3. Demander un étiquetage convenable
A la suite de ce que nous indiquons plus haut, nous demandons également que l’étiquetage face la distinction entre les produits en provenance d’Israël et ceux venant des territoires palestiniens occupés.
Comme l’indique le Secrétariat à l’environnement, la nourriture et les affaires rurales dans ses conseils pour la labellisation des produits cultivés dans les territoires occupés, le but des règles de labellisation de l’Union Européenne est "d’éviter de tromper le consommateur".
Pour ce qui concerne les produits en provenance de Palestine occupée, nous risquons de rester dans le noir.
• Ecrivez à Rt Hon David Miliband MP, Secretary of State for Environment, Food and Rural Affairs, DEFRA, Nobel House, 17 Smith Square, London SW1P 3JR en lui demandant d’agir pour résoudre cette question.
4. Demander au gouvernement d’agir
Le Royaume-Uni est signataire de la Quatrième Convention de Genève et, à ce titre, obligé de s’assurer que les dispositions de cette convention soient respectées. Cette obligation a été réaffirmée par la Cour Internationale de Justice, dans son avis de juillet 2004 sur le Mur de Séparation.
• Ecrivez à Rt Hon Margaret Beckett MP, Foreign Secretary, Foreign and Commonwealth Office, King Charles Street, London SW1A 2AH
en lui demandant quelles sont les actions envisagées par le gouvernement britannique pour faire respecter ses obligations vis-à-vis de la Quatrième Convention de Genève, concernant les entreprises qui soutiennent l’occupation israélienne de la Palestine.
Notes :
1. International cooperation at a crossroads: Aid, trade and security in an unequal world, UNDP Human Development Report, New York, 2005; chapter 5
2. Revised Emergency Appeal, Occupied Palestinian Territory, United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs (OCHA), Jerusalem, 31 Mai 2006;
The Impending Palestinian Fiscal Crisis, World Bank, 7 Mai 2006
3. Assessment of the future humanitarian risks in the occupied Palestinian territory, United Nations, 19 April 2006
4. Alon Ben David, ‘Israël – Double Jeopardy’, Jane’s Defence Weekly, 17 November 2004; for more information, see Caterpillar: The Alternative Report, War on Want, 2005
5. Humanitarian Impact of the West Bank Barrier. Crossing the Barrier: Palestinian Access to Agricultural Land. United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs (OCHA), Jerusalem, January 2006
6. Yuval Yoaz, ‘Justice minister: West Bank fence is Israël’s future border’, Haaretz, 1 December 2005; Donald Macintyre, ‘Sharon “sees wall as Israël’s new border”’, Independent, 2 December 2005;
Yuval Yoaz, ‘State to High Court: Fence route has “political implications”’, Haaretz, 14 June 2006
7. Economic and social repercussions of the Israëli occupation on the living conditions of the Palestinian people in the occupied Palestinian territory, including Jerusalem, and of the Arab population in the occupied Syrian Golan, UN Doc A/61/67-E/2006/13, 3 May 2006
8. ibid.
9. UN Security Council resolution 465 (1980) of 1 March 1980. The illegality of the settlements was reaffirmed by the International Court of Justice in July 2004.
10. Report of the Special Rapporteur of the Commission on Human Rights, John Dugard, on the situation of human rights in the Palestinian territories occupied since 1967, UN Doc E/CN.4/2006/29, 17 January 2006
11. Par exemple, déclarations du Rapport Spécial des Nations Unies, John Dugard (lui-même Sud Africain) dans son rapport du 7 Decembre 2004 à la Commission sur les Droits de l'Homme, UN Doc E/CN.4/2005/29.
12- Economic and social repercussions of the Israëli occupation on the living conditions of the Palestinian people in the occupied Palestinian territory, including Jerusalem, and of the Arab population in the occupied Syrian Golan, UN Doc A/61/67-E/2006/13, 3 May 2006; see also the reports on settler violence from Israëli human rights centre B’Tselem: www.btselem.org
13- Amiram Barkat, ‘Sweden labels Golan wines: Made in occupied Syrian land’, Haaretz, 9 June 2006; Ilya Meyer, ‘Israëli wine labelled as coming from “occupied territory”’, European Jewish Press, 13 June 2006
14- Aluf Benn, ‘Olmert has every reason to be satisfied’, Haaretz, 13 June 2006; Jon Henley, ‘Diary’, Guardian, 15 June 2006
15- ‘Agrexco set for privatisation’, www.freshinfo.com, 9 June 2006
16- ‘Israël racks up record exports’, www.freshinfo.com, 14 August 2005
17- ‘Agrexco turnover soars in UK’, www.freshinfo.com, 8 October 2004
18- Apartheid et Agrexco dans la Vallée du Jourdain, Lena Green, Electronic Intifada, 4 Septembre 2005;
Chris McGreal, ‘Israël unveils plan to encircle Palestinian state’, Guardian, 8 Février 2006
19- ‘Israël a annexé de facto la Vallée du Jourdain, B’Tselem, 13 Février 2006
20- Rapport du Rapporteur Spécial de la Commission des droits de l'homme, John Dugard, sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés par Israël depuis 1967, UN Doc E/CN.4/2006/29, 17 Janvier 2006
21- Jeff Halper, ‘E-1 : La fin d’un état palestinien viable', ICAHD, 29 Mars 2005
22- Responsables de Mission à Jerusalem et Ramallah Heads, Rapport surJerusalem-Est, Novembre 2005
11.1- Ndt. "Pass Law", loi contraignant tout "non-Blanc" d’Afrique du Sud à posséder un passeport intérieur précisant sa race, le lieu de son assignation à résidence et son employeur
12- ‘PM Sharon’s Statements at the Ceremony for the Signing of the Light Train Agreement’, Prime Minister’s Office, 17 July 2005
Avertissement d’ISM-France :
Bien que le rapport de War on Want concerne les entreprises britanniques, nous le publions car il contient des informations intéressantes sur les échanges commerciaux entre Israël et un pays de l’Union Européenne ainsi que sur l’organisation du mensonge sur l’origine des produits israéliens vendus en Europe destiné à tromper le consommateur vigilant.
Pour une utilisation hexagonale, ce rapport peut être facilement adapté au contexte français (liste des compagnies, entreprises, marques, etc.).
Voir sur le site ISM-France :
Appel aux Sanctions et au Boycott contre Israël
Distributeurs et groupes industriels français
Source : War on Want
Traduction : MR pour ISM
Afin d'assurer sa mission d'information, ISM-France fait appel à votre soutien.
L'ISM a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Proche Orient. Les auteurs du site travaillent à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui leur seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas l'ISM ne saurait être tenu responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont il n'a pas la gestion, l'ISM n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
9 novembre 2021
Le fait d'être désigné comme "terroristes" par Israël illustre le bon travail des ONG en Palestine9 novembre 2021
L’Art de la guerre - Les nouvelles armes financières de l’Occident5 novembre 2021
Israa Jaabis : De victime à criminelle, du jour au lendemain3 novembre 2021
La normalisation est le dernier projet pour éradiquer la cause palestinienne1 novembre 2021
Kafr Qasem reste une plaie béante tandis que les Palestiniens continuent de résister à l'occupation30 octobre 2021
Voler et tuer en toute impunité ne suffit plus, il faut aussi le silence14 octobre 2021
Tsunami géopolitique à venir : fin de la colonie d’apartheid nommée ’’Israël’’12 octobre 2021
La présentation high-tech d'Israël à l'exposition de Dubaï cache la brutalité de l'occupation9 octobre 2021
Pourquoi le discours d'Abbas fait pâle figure en comparaison du fusil d'Arafat à l'ONU6 octobre 2021
Comment la propagande israélienne s'insinue dans votre divertissement quotidien sur Netflix : La déshumanisation et la désinformation de FaudaGrande Bretagne
Boycott
War on Want
21 décembre 2006