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Russie - 14 octobre 2009
Par Abdel Sattar Kassem
Le docteur Abdel Sattar Kassem est professeur en science politique à l’Université National An-Najah, Naplouse, Palestine occupée.
Cet article porte sur la politique russe récente vis-à-vis de la région arabo-islamique, et en particulier depuis 2001, lorsque la Russie a commencé à se sentir minée par l’influence internationale américaine en expansion, et négligée ou marginalisée par les puissances occidentales en ce qui concernait leur politique dans les Etats de l’Europe de l’Est. La Russie a senti alors qu’elle devait recouvrer un statut international et restaurer une partie de la présence internationale que l’ex-Union soviétique imposait. L’article ne couvre pas l’ensemble du monde arabo-islamique et limite son étude à la partie qui s’étend de l’Iran à l’est à l’Egypte à l’ouest, parce qu’elle est la plus fiévreuse et la plus instable. Des points chauds existent en Afghanistan et au Pakistan, mais la Russie semble être plus intéressée par cette partie vitale et centrale, du moins actuellement.
Dmitri Medvedev et Shimon Peres discutent lors de leur rencontre du 18 août dernier à Sotchi (photo AFP)
L’article traite de la politique russe dans la partie citée comme un tout, et également vis-à-vis de chaque entité qu’elle soit un Etat, comme l’Egypte ou l’Iran, ou un parti d’influence comme le Hezbollah et le Hamas. L’article n’entre pas dans les détails, mais se concentre sur les traits généraux de la politique russe considérés comme base des formulations détaillées.
A) Les inquiétudes fondamentales de la politique russe
La Russie mène une politique très prudente dans la région arabo-islamique, et s’assure que son équilibre sensible la maintienne éloignée des écueils qui caractérisent les interrelations dans la région. La question principale que se pose le décideur russe est : comment améliorer les relations avec chaque Etat de la région sans provoquer la colère des autres. La région arabo-islamique est pleine de querelles et de suspicions, et ceux qui souhaitent réussir un rapprochement dans le secteur doivent être pleinement avertis des dynamiques des relations s’ils ne veulent pas porter tort à leurs intérêts.
La Russie essaie d’améliorer ses relations dans la région pour faire avancer ses intérêts économiques et son influence. La Russie sent que pendant des années, elle a été tenue à l’écart du processus de paix entre les Arabes et les Israéliens, et elle a l’ambition, semble-t-il, de faire partie de l’activité diplomatique. La Russe aimerait utiliser ses capacités technologiques en attirant des contrats de travaux et des ventes d’armes. Et comme l’a dit un Américain, la Russie utilise ses capacités technologiques de la même manière que l’Allemagne nazie a utilisé ses compétences dans la construction de voies ferrées. (1)
Dans son entreprise de promotion de ses intérêts et de son influence dans la région, la Russie est contrainte par plusieurs considérations majeures qui semblent quelque peu contradictoires.
Ce sont :
1) Sa position envers ce qui est qualifié de terrorisme islamique est une épée à double tranchant. Elle contrariera les groupes islamiques de la résistance si elle accepte la définition occidentale du terrorisme, et si elle l’applique aux organisations islamiques de la région, elle peut sembler s’adresser aux Musulmans des parties septentrionales de son territoire et mettre en danger la sécurité intérieure russe. Cette acception conforterait tant Israël que les Etats-Unis, et serait une sorte de gratitude pour l’attitude israélienne contre ce qu’ils appellent le terrorisme tchétchène. Mais si le contraire se produit, et si la Russie décide que ces groupes islamiques se révoltent contre l’occupation et l’injustice, alors Israël, les USA, l’Europe de l’Ouest et la plupart des régimes arabes seront mécontents. Quelle que soit la position adoptée, elle est difficile et problématique.
2) La Russie aimerait établir de bonnes relations avec l’Arabie Saoudite, mais les suspicions d’un appui saoudien aux rebelles tchétchènes restent un obstacle. Les Russes accusent indirectement les Saoudiens en accusant les wahhabites (une secte musulmane adoptée par les Saoudiens) de fournir un soutien militaire et financier aux Tchétchènes. (2)
3) La Russie aimerait améliorer et développer ses relations avec l’Iran, mais les Iraniens ont besoin de l’aide russe pour paralyser la campagne américaine contre leur programme nucléaire, et veulent que la Russie empêche les Etats-Unis d’obtenir du Conseil de Sécurité l’imposition de sanctions contre l’Iran. (3)
L’autre problème est que l’Arabie Saoudite hésitera à faire des améliorations notables dans ses relations bilatérales si la Russie améliore ses relations avec l’Iran, et tourne le dos aux exigences arabes et américaines de démanteler le programme nucléaire iranien.
4) La Russie et l’Iran aimeraient voir le prix du pétrole augmenter, mais l’Arabie Saoudite et les USA voudraient que le marché pétrolier soit stable. (4)
Les USA, comme l’Arabie Saoudite, voient l’augmentation des prix du pétrole comme une grande opportunité pour l’Iran et la Russie de réaliser des avancées militaires et économiques, ce qui contrarie les politiques américaine et saoudienne dans la région.
5) La Syrie est intéressée par une amélioration des relations avec la Russie, et est prête à fournir une base navale, mais elle veut des armes sophistiquées en échange, une exigence qui, si elle était remplie, compromettrait les relations russes avec Israël. La Russie a besoin de l’aide israélienne pour mettre un frein au soi-disant terrorisme en Tchétchénie, et dans le domaine de l’équipement militaire électronique.
6) La Russie sait parfaitement bien que la région arabo-islamique est dans une large mesure la chasse gardée des USA et toute infraction à cette réalité serait une vraie provocation. La Russie n’a pas intérêt à provoquer les USA, et suivra une politique qui n’engendre pas à des tensions diplomatiques.
7) La Russie est prudente quant à la construction de relations stratégiques avec les Arabes parce qu’elle n’a pas confiance en eux. Les Arabes, pour les Russes, ont fait la preuve qu’ils n’étaient pas fiables pendant l’ère soviétique lorsqu’ils recevaient des armes et le soutien diplomatique de l’Union Soviétique mais coopéraient d’un point de vue économique avec l’ennemi, les pays occidentaux. En outre, les Arabes n’ont pas fait honneur à l’équipement militaire soviétique puisqu’ils l’ont remis dans sa totalité à Israël, soit sur le champ de bataille, soit par la trahison.
8) La Russie s’inquiète de ses intérêts dans la Mer Caspienne qui pourraient entrer en conflit avec les intérêts iraniens. L’Iran est différent de la plupart des Etats arabes et islamiques, et insiste sur ses droits, et il est sûr qu’il ne se précipitera à améliorer les relations sans s’assurer de ses intérêts. En outre, l’amélioration des relations avec Téhéran irrite beaucoup d’Etats, dont les Etats-Unis et Israël.
B) Les préoccupations principales de la Russie
On doit d’abord affirmer que la Russie, comme tant d’autres pays, adopte une politique étrangère qui satisfait ses besoins et ses intérêts, compatible avec ses capacités. La Russie a des intérêts, et l’idéologie n’est certainement pas, du moins actuellement, à l’ordre du jour de ses intérêts. La Russie aimerait probablement devenir un pouvoir polaire, mais elle n’est pas prête à copier l’expérience de l’Union Soviétique. La Russie n’a même pas, aujourd’hui, un message à transmettre à la communauté internationale, ni dans le domaine politique, ni culturel.
Quelques chercheurs et hommes politiques ont cru, à travers certaines déclarations faites par Poutine et Medvedev, que les Russes se dirigeaient vers une confrontation diplomatique avec les USA, mais il faut regarder les capacités avant de tirer des conclusions de la rhétorique. Je suis plutôt d’avis, comme Dannreuther (5), que la politique russe vis-à-vis de la région arabo-islamique est guidée par trois considérations principales :
1) La Russie a intérêt à contenir l’éventualité d’une rébellion islamique dans ses régions islamiques septentrionales, qui témoignent d’une prise de conscience islamique grandissante. Elle estime qu’il est impératif d’améliorer ses relations avec les Etats arabes et islamiques dans l’espoir que cela relâche la tension et apaise les tendances russes islamiques à la révolte. Mais la Russie doit être prudente car se rapprocher de ces gouvernements pourrait se retourner contre elle ; en effet, ils sont pour la plupart détestés par les mouvements islamiques. En d’autres termes, la Russie a besoin d’ouvrir des voies avec des organisations islamiques influentes si elle veut que ses efforts soient sensibles, appréciables, judicieux.
Les Musulmans constituent actuellement environ 15% de la population totale de la Russie, et leur nombre devrait considérablement augmenter à cause de leur taux de natalité élevé et de l’émigration des Etats islamiques voisins. En outre, la population russe d’origine slave devrait décliner à cause d’une diminution du taux de natalité. Plus simplement, les femmes slaves préfèrent une belle silhouette que la grossesse. Certains écrivains estiment que la Russie deviendra un Etat islamique en 2050 (6) parce que les Musulmans seront la majorité. Ceci est probablement exagéré, mais il est sûr que le nombre des Russes musulmans continuera d’augmenter.
Cependant, il faut noter que l’apaisement des Musulmans est surtout lié à la justice, la révolte n’est pas nécessairement leur passe-temps favori. La Russie doit regarder en elle-même au lieu de chercher la stabilité à l’extérieur.
2) La Russie a besoin d’argent pour poursuivre ses projets de développement économiques et militaires. Elle est très intéressée par la vente de son équipement militaire aux Etats du Golfe, dont on pense qu’ils sont les premiers sur la liste des importateurs d’armes. Jusqu’ici, ce sont les USA et généralement les pays occidentaux qui ont monopolisé le marché des armes du Golfe. La Russie sera-t-elle capable de briser ce monopole ? Il faut noter que ces pays ne peuvent pas se défendre, bien qu’ils aient un arsenal militaire énorme, et qu’ils sont très dépendants des USA pour la sécurité de leurs régimes. Ces Etats oseront-ils signer des contrats militaires avec la Russie sans l’accord des USA ? Ils parviendront probablement à quelques accords complémentaires avec la Russie, davantage comme instauration de la confiance que comme changement de politique.
La Russie est également intéressée par des prix élevés du pétrole et du gaz, et elle ne peut pas y parvenir sans la coopération avec les Etats du Golfe, en particulier l’Arabie Saoudite et le Qatar. Les exportations de la Russie de ces deux ressources représentent 65% de ses exportations (7). L’Arabie saoudite est le plus gros exportateur de pétrole et le Qatar le deuxième pour le gaz, mais il est douteux qu’ils aient envie d’augmenter les prix. Ces deux pays n’ont pas intérêt à mettre à mal les économies occidentales, l’Arabie Saoudite s’inquiète de l’augmentation des recettes iraniennes, et les USA, qui ont de bons liens avec les deux pays, n’aimeraient pas voir un rehaussement des capacités de la Russie et de l’Iran.
La Russe aimerait avoir un rôle dans la recherche d’une solution dans le conflit arabo-israélien, et faire partie du jeu international de modelage de la zone arabo-islamique. Elle a commencé à avoir le sentiment de son exclusion et de l’étouffement occidental graduel des alliés de l’ex-Union soviétique. Apparemment, les politiques américaines et européennes de l’ouest ont visé, depuis l’effondrement des Soviets, à pousser la Russie à l’intérieur de ses propres frontières, isolée du reste du monde. Ceci fut évident dans les avancées européennes et de l’OTAN vers les frontières russes par l’annexion des Etats européens de l’Est à l’OTAN et à l’Union Européenne. Les USA sont même allés plus loin lorsqu’ils ont décidé d’installer un bouclier anti-missile en Europe de l’Est, en particulier en Tchéquie et en Pologne. Finalement, la Géorgie a payé le prix du message russe à l’Ouest.
La Russie aimerait revenir sur la scène internationale et influencer sa politique, et c’est la raison pour laquelle elle a resserré ses relations avec le Venezuela, Cuba et la Syrie, et qu’elle essaie de ralentir la pression américaine sur le Conseil de Sécurité pour qu’il adopte une politique dure vis-à-vis de la Corée du Nord et de l’Iran. En outre, les Russes sont de retour en Méditerranée avec leurs navires de guerre, et dans l’espace Atlantique avec leurs bombardiers stratégiques. Et parce que la région arabo-islamique a une extrême importance dans la politique internationale, les Russes essaient d’y pénétrer. Bien qu’il soit risqué de se mêler de cette partie du monde, c’est essentiel pour que la Russie améliore son statut international.
Les démarches pratiques russes
Les Russes ont fait des démarches pratiques envers les différents Etats de la région. Poutine est allé en février 2007 dans trois Etats arabes satellites de l’Amérique : l’Arabie Saoudite, la Jordanie et le Qatar. Il a proposé aux Saoudiens de leur vendre des missiles antiaériens, et a soutenu la proposition iranienne de créer une organisation des pays exportateurs de gaz. Il n’a pas obtenu des résultats tangibles en termes de ventes d’armes, mais il a fait un geste amical envers les Arabes dans l’espoir de briser le monopole américain.
Poutine a critiqué les USA pour leur guerre en Irak, et a dit qu’il n’y avait aucune justification à la pendaison de Saddam Hussein. Il a refusé de considérer le Hamas et le Hezbollah comme des organisations terroristes, ce qui a irrité tant Israël que les USA. Plus important, Poutine a dit que la région n’aurait jamais de sécurité et de stabilité sans un équilibre du pouvoir international, pointant les USA comme puissance monopolistique. Il a également critiqué les Européens et les Américains pour leurs tentatives d’imposer leurs valeurs aux populations de la région.
Medvedev, le Président russe, est allé en Egypte et dans quelques Etats africains en juin 2009 et a annoncé que la Russie accueillerait une conférence sur la paix au Moyen-Orient. Il a dit que la Russie soutenait la solution à Deux Etats, a plaidé pour une cessation des activités de colonisation, mais n’a pas spécifié de solution pour Jérusalem.
Les Russes pensent peut-être que cette conférence internationale serait fructueuse, et pourrait aboutir à un résultat, contrairement aux autres conférences. Je pense que les Russes, étant donné l’équilibre du pouvoir régional et international actuel, se trompent. Israël et les USA monopolisent l’affaire et n’ont donné aux autres pays que des rôles mineurs. Les pays européens, soit individuellement soit collectivement, ont été autorisés à visiter la région et on leur a demandé de payer les factures, mais ils n’ont jamais été à même de conduire une politique indépendante. Les Européens se sont opposés à la construction de colonies en Cisjordanie , mais n’ont pu aller bien loin à ce sujet jusqu’à ce que le Président US ait exprimé une opposition verbale forte. Les Soviétiques, au temps de leur gloire, n’ont pu obliger ni les USA ni Israël à faire la moindre concession, et je ne pense pas que la Russie y arrive, même si elle le souhaite.
Les Israéliens et les Arabes iront à la conférence, mais chacun ressassera les mêmes histoires. Israël ne prendra pas la conférence au sérieux, et les Arabes n’abandonneront pas leur comportement de perdant. La conférence se terminera sans aucun résultat productif, et ses effets finiront lorsque les délégations monteront dans leurs avions pour rentrer chez elles.
Au niveau des relations bilatérales, la Russie a activement renforcé des amitiés volatiles et créé de nouvelles. Voici quelques exemples :
La Russie est très intéressée par l’amélioration de ses relations avec l’Egypte à cause de ses exportations de blé, qui s’élèvent à 14 millions de tonnes par an, soit ¼ de la production russe totale de blé (8). L’Egypte, en retour, a besoin de l’appui russe pour trouver une solution au conflit arabo-israélien, mais est mécontente de la coopération russe avec l’Iran, en particulier dans le domaine nucléaire.
La Russie a annoncé pendant sa guerre contre la Géorgie qu’elle avait saisi quelques fusils israéliens de l’armée géorgienne. A l’évidence, ceci était un message sévère à Israël. Il est cependant douteux que les Russes le poussent trop loin au risque de compromettre les relations diplomatiques avec Israël ; la Russie a toujours besoin du soutien israélien dans l’affaire tchétchène.
Dernièrement, la Russie a acheté quelques avions de reconnaissance électronique israéliens, en échange de quelque chose d’autre que de l’argent, dont on ne connaît pas encore la nature.
La Russie est partie prenante du processus de négociations en cours qui vise à résoudre la question palestinienne. Elle reconnaît Israël et elle défend ce qu’elle décrit comme son droit à la paix et à la sécurité, mais elle demande également un retrait total du territoire occupé en 1967, et la création d’un Etat palestinien. La Russie est membre du Quartet (le comité international qui supervise la paix dans la région) ce qui signifie qu’elle est en harmonie avec la vision américaine du type de paix qui devrait être établi dans le secteur. La Russie n’est pas active dans ce comité, mais le fait qu’elle en fasse partie est une indication de sa politique.
La Russie a condamné ce que la plupart des Arabes appellent les opérations martyrs (appelées attentats-suicides par les Israéliens et les Occidentaux) contre Israël. Elle a condamné à maintes reprises ce qu’on appelle le terrorisme, mais a refusé de décrire le Hamas et le Hezbollah comme des organisations terroristes, et elle a invité des dirigeants du Hamas à Moscou après sa victoire aux élections législatives palestiniennes de 2006. Les dirigeants du Hamas sont allés à Moscou et ont rencontré de nombreux responsables sociaux et religieux russes de haut rang. Mais la Russie est très prudente au sujet de la guerre contre Gaza, elle a condamné les assassinats de civils, mais a tenu le Hamas pour responsable de la guerre à cause des tirs de missiles sur Israël.
Le gouvernement russe a condamné le Hezbollah pour la capture de soldats israéliens et a pris une position distanciée sur la guerre de 2006, mais les médias russes ont été très durs envers Israël à cause de la destruction de villages libanais. Comme l’a écrit un écrivain russe, la Russie a des intérêts avec Israël en particulier dans la guerre contre le terrorisme, et il ne faut pas nourrir d’animosités cet Etat. (9)
La Russie a annoncé en septembre 2008 qu’elle rénovait le port de la ville syrienne de Tartous, qui fut une base navale soviétique, et a ajouté que la marine russe aurait une base en Méditerranée plutôt que de se cantonner à parcourir ses eaux. (10)
La Syrie a en contrepartie montré beaucoup d’intérêt à améliorer les relations avec la Russie, en particulier parce que la Syrie a besoin d’armes sophistiquées. Le Président Asad a fait une visite en Russie après la guerre contre la Géorgie et a offert des installations navales. Récemment, on a annoncé que la Russie fournirait des avions de guerre Mig 31 à la Syrie. La Russie justifie sa démarche en disant que ces fournitures militaires n’affectent pas l’équilibre des forces dans la région. (11) Cependant, de nombreux observateurs pensent que les Russes ont livré d’autres types d’armes à la Syrie. (12)
L’Amérique et Israël s’opposent aux contrats d’armes russes avec la Syrie pour plusieurs raisons : d’abord, pour pousser la Syrie à la table de négociations au lieu de penser à une confrontation militaire ; et ensuite pour tenir ces armes éloignées du Hezbollah. Selon un quotidien israélien, la Russie a décidé de geler les contrats Mig soit à cause de la pression israélienne, soit à cause de l’incapacité syrienne à les payer. (13)(14)
Certains observateurs disent que les relations russo-syriennes ont repris de l’élan après les attaques sur New-York en 2001. La Russie pensait que les USA avaient pris un coup sévère et qu’il était temps de créer un nouvel ordre international dans lequel la Syrie jouerait un rôle important. (15) Lors de sa tournée, le président syrien a annoncé pendant sa visite à Moscou en 2008 que la Syrie pouvait jouer un rôle dans le renforcement de la sécurité russe (16). Une indication des intérêts des deux pays dans une coopération sécuritaire.
Il est évident que la Russie hésite à rehausser considérablement ses relations avec la Syrie, à cause de ses conflits d’intérêts. Elle veut conserver son amitié avec la Syrie mais ne veut pas d’antagonismes avec Israël et les USA. C’est également la caractéristique de l’approche russe vis-à-vis de l’Iran.
Conclusion
La Russie a des intérêts dans la région arabo-islamique mais n’est pas encore prête à satisfaire les exigences de certains pays. La Russie n’a pas intérêt à une confrontation, car elle n’a pas les capacités ni économiques ni militaires de s’y impliquer. Satisfaire les besoins et les exigences tant de l’Iran que de la Syrie mettrait à mal ses relations avec Israël, les Etats-Unis et de nombreux Etats arabes.
La région arabo-islamique est maintenant divisée en deux axes non déclarés : l’un est conduit par les USA et inclut Israël et plusieurs Etats arabes comme l’Egypte et l’Arabie Saoudite, l’autre conduit par l’Iran, qui inclut la Syrie, le Hezbollah et le Hamas.
La Russie n’a bas besoin et ne veut être aux côtés ni des uns ni des autres, mais elle a des intérêts à sauvegarder et n’a pas d’autre choix que de manœuvrer avec précaution. Les autres parties connaissent parfaitement les capacités russes, et chacune d’entre elles ne souhaite pas voir la Russie passer de l’autre bord.
Ainsi tous ont intérêt à maintenir des liens corrects avec la Russie dans l’espoir qu’elle reste neutre. Ce qui signifie que dans la situation actuelle, les intérêts de la Russie ne seront jamais totalement satisfaits, et qu’elle ne sera jamais un acteur majeur dans la détermination de l’avenir de la région.
La Russie n’est pas à même de jouer un rôle majeur dans la construction de la paix entre les Arabes et les Israéliens, et son approche faite de bonnes intentions ne convient pas à la région. Les Américains et les Israéliens pensent que seuls un Israël fort et des Arabes faibles peuvent faire la paix, et ils ne sont pas disposés à reconnaître le droit national palestinien à l’autodétermination. Ces deux pays continuent de penser que tout autre pays qui tente d’aider est un intrus, et à moins que les Russes n’œuvrent à bousculer l’équilibre des forces dans la région, ils ne seront pas considérés. S’ils ne le font pas, ils ne pourront que faire quelques gestes qui les maintiendront dans les journaux télévisés.
Notes de lecture :
1. Cohen, Ariel. “Putin’s Middle East Visit: Russia is Back,” March 5, 2007.
2. Startfor Global Intelligence. “US, Saudi Arabia Holding the Chechen Card,” Aug. 14, 2008.
3. Peterson, Scot. “Russia, Iran Harden against US”, Christian Science Monitor, Oct. 18, 2007.
4. Saudi-US Relations Information Service. “President Putin’s Historic Visit,” Feb. 12, 2007.
5. Dannreuther, Roland. “Russia and the Middle East: Towards a New Cold War,” Feb. 18, 2009.
6. Russian Article Index. The Coming Republic of Russia, 2006.
7. Manwarren, LeighAnne. “Energy-Rich Russia Moves to Become World Power Again,” The Daily, Dec. 3, 2008.
8. Egypt Daily News. “Russia Eyes Long Term Wheat Contracts with Egypt”, June 23, 2009.
9. Dzieciolowski, Zygmont. Russia and the Middle East: Post Soviet Flux, Aug. 14, 2006.
10. Associated Press. “Russia Seeks Stronger Ties with Syria”, Sep 13, 2009.
11. RIA Novosti. “Russian Syrian Cooperation No Threat to Middle East Stability, Sep 29, 2008.
12. Cohen, Ariel. "Swords and Shields: Russia Shields Syria," UPI, Oct. 16, 2008.
13. Haaretz. “Russia Won’t Sell Syria Fighter Jets due to Israëli Pressure”, May 20, 2009.
14. RIA Novosti. “Russia Freezes Warplane Contract with Syria”, May 20, 2009.
15. Klein, Aaron, "Russia and Syria Sign Major Weapons Deal", Jan 28, 2005.
16. O’flynn, Kevin and Hider, James. Fear of new Middle east ‘Cold War’, The Times, August 21, 2008.
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Abdel Sattar Kassem
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