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Palestine 48 - 20 juillet 2009
Par Ran HaCohen
Les Israéliens qui pensent de manière critique - une minorité négligeable - connaissent déjà la tendance: peu importe à quel point notre nouveau Premier ministre est extrême, dans quelques mois, les médias le décriront comme le leader raisonnable, modéré et pragmatique du centre politique. Si même le guerrier Général Sharon a pu renaître comme «un homme de paix», pourquoi pas Netanyahou?
Le moment décisif fût son "discours à Bar Ilan" du 14 Juin, après quoi les chroniqueurs des principaux médias israéliens, avec à leur tête le pathétique Ari Shavit (Haaretz) et son frère jumeau très terre-à-terre Yaïr Lapid (Yedioth Achronot), ont eu recours aux termes ridicules de Renaissance, Révolution, et Rubicon pour le soi-disant nouveau dirigeant pacifique israélien.
On ne peut pas s'attendre à grand chose d'autre de l’Israélien moyen, rendu aveugle par des décennies d'endoctrinement et d'intérêts, ou du président israélien Peres, dont le lexique politique n'a jamais inclut le V de Vérité. Mais le monde doit être averti.
Contrairement au Liban ou à l’Iran, Israël n'a pas fait un seul pas en avant dans l'ère Obama. Au contraire: avec le trio de voyous, Netanyahou, Barak, et Lieberman, Israël est actuellement gouverné par le gouvernement le plus nationaliste, raciste et fanatique qu'il n’ait jamais eu. En plus de cela, le principal parti d'opposition, dirigé par l'ultranationaliste Livni et le soldat professionnel opportuniste, Mofaz, offre encore une copie conforme du récit gouvernemental, de sorte que le discours public est élaboré par deux jumeaux idéologiques et politiques, et n’offre aucune autre alternative.
En fait, l'extrême-droite israélienne compte aujourd'hui plus de 80 pour cent des sièges à la Knesset - le reste étant les partis Arabes, le Meretz, et une faction dissidente douteuse au sein du parti Travailliste. Ainsi, le consommateur de médias israéliens n'est exposé à rien d’autre qu’à un lavage de cerveau anti-palestinien, anti-paix, pro-occupation nationaliste au mieux, raciste au pire.
Ne vous y trompez pas: Netanyahu est un homme de l'occupation, comme il l'a toujours été. Écoutez le mentor idéologique de Netanyahou, son père, le Professeur Benzion Netanyahu, qui a ouvertement déclaré que son fils n’accepterait jamais un Etat palestinien; comme M. Netanyahu l’a dit à son père, il a posé de nombreuses conditions à son offre de Bar Ilan, afin de le rendre inacceptable pour les Palestiniens.
Il reste à voir si la stratégie anti-paix de Netanyahou sera d’éternels pourparlers de paix qui ne vont nulle part, ou s'il tentera une manœuvre "démasquée" à la Barak. Mais, abandonner les territoires occupés et mettre fin au colonialisme d'Israël n'est donc pas à l'ordre du jour.
Juste deux semaines avant le discours "historique" des deux Etats de Netanyahou, la Knesset avait approuvé une décision contre un Etat palestinien, qui avait mis en colère les Jordaniens en affirmant que la Jordanie était l'Etat palestinien.
En effet, l'initiateur ne venait pas de la coalition de Netanyahou mais d'un parti fasciste encore plus à droite, mais son projet de loi, massivement approuvé par 53 voix contre 9, a été proposé à peine quelques jours après une conférence à la Knesset sur «des alternatives à la solution à deux États », organisée par un membre du parti du Likoud de Nétanyahou.
Par conséquent, s'attendre à ce qu’Israël arrête ou même gèle sa colonisation juste parce que le président Obama le dit est tout aussi irréaliste que s'attendre à ce qu’al-Qaïda dépose les armes pour la même raison.
Les esprits les plus malhonnêtes d'Israël - et surtout ministre de la Défense, Ehoud Barak - font de leur mieux pour trouver une "formule" qui leur permettrait de poursuivre le vol organisé de terres israélien en Cisjordanie - que ce soit pour une «croissance naturelle», «des blocs de colonies", "un gel temporaire ", ou des mensonges similaires. La dépossession ne doit pas être arrêtée. Après tout, les colonies sont de loin le projet le plus capital de l'État d'Israël, et elles l’ont été au cours des quatre dernières décennies, ce qui représente les deux tiers de l'histoire d'Israël, à un tel point qu’Israël est clairement devenu un problème en raison de son propre colonialisme.
La nouvelle vieille cible : les Palestiniens Israéliens
En ignorant les vents nouveaux qui soufflent depuis Washington, les fanatiques israéliens sont tellement sûrs d'eux qu'ils considèrent l'occupation comme un fait accompli: ils ne doutent pas que, tout comme Israël a réussi à duper le monde et doubler le nombre de colons illégaux depuis que le "Processus de paix» d'Oslo a commencé, il réussira à maintenir les Palestiniens occupés – mis en cage et appauvris en Cisjordanie , réduits à l’esclavage et affamés à Gaza - sous la botte abusive d'Israël au cours des prochaines décennies. Leur optimisme pourrait être justifié: Obama a beaucoup de chemin à faire avant de prouver qu'il est sérieux.
Compte tenu de cette confiance en soi, et compte tenu du fait que la lutte armée palestinienne a été contenue, les énergies de haine d’Israël sont maintenant tournées vers un autre ennemi: les Arabes israéliens, la minorité de Palestiniens d’environ 20% à avoir la citoyenneté israélienne. Israël est engagé dans une campagne à part entière visant à délégitimer et à ensuite exclure les Israélo-palestiniens. La tendance n'a pas commencé avec Netanyahu, mais elle peut désormais compter sur un Parlement et des dirigeants très favorables.
Le discours de Netanyahou à Bar-Ilan était symptomatique, en introduisant une nouvelle demande capitale aux Palestiniens occupés comme condition pour leur laisser avoir un Etat (castré): ils doivent d'abord reconnaître Israël "en tant qu'Etat juif." Cela a l'air idiot: Est-ce qu’Israël a besoin d'une entité extérieure pour définir son propre caractère?
Mais les véritables objectifs derrière cette condition sont les Israéliens Palestiniens. En demandant aux Palestiniens occupés de reconnaître la judéité d'Israël sert à les monter contre les Palestiniens Israéliens: Vous voulez votre propre Etat? Tournez d’abord le dos à vos frères de l'intérieur d'Israël et contrecarrez leurs revendications d'égalité en Israël.
Si même Abou Mazen déclare qu’"Israël est un Etat juif," les Arabes Israéliens ne pourront pas demander une totale égalité, et s'ils le font, nous leur dirons de se casser de l’autre côté de la frontière. Comme condition préalable à toute discussion sur la fin de la colonisation, les Palestiniens doivent se soumettre à la stratégie coloniale classique du diviser pour mieux régner.
Mais la nouvelle condition de Nétanyahou est destinée principalement aux oreilles des Juifs israéliens: elle tourne l'attention des territoires occupés vers Israël « proprement dit » (ndt : Palestine 48), laissant entendre que «notre vrai problème" est à l'intérieur, avec ces fondamentalement déloyaux «Arabes israéliens». C'est là que Netanyahou rejoint et reprend le slogan électoral fasciste de Lieberman "Pas de loyauté, pas de citoyenneté».
Le discours de Netanyahou n'est que le sommet de l'iceberg. La guerre contre les Israéliens Palestiniens est bien plus large que cela. Il est ressentie dans le système judiciaire, quand par exemple un fermier juif qui a tiré dans le dos de cambrioleurs arabes alors qu'ils tentaient de s'échapper de sa ferme, tuant une personne et en blessant une autre, a été acquitté (et est maintenant fêté comme un héros national). Comme Orly Noy écrit (Ynet, en hébreu), "Etant donné l'atmosphère judiciaire et publique en Israël ces temps-ci, rien n'est plus prévisible que l'acquittement d'un Juif qui a été violent, même de façon extrême, contre un citoyen arabe."
Dans une autre affaire, un Juif qui a assassiné un chauffeur de taxi juste parce qu'il était arabe a été jugé «inapte à être jugé." Un officier supérieur de l'armée qui ont ordonné à son soldat de tirer à bout portant sur un Palestinien menotté, les yeux bandés, a été simplement accusé de "conduite inappropriée". Cette accusation a été jugée déraisonnable, même par la Cour Suprême israélienne.
Bien sûr, la discrimination contre les Arabes israéliens n'est pas nouvelle ; même l’officielle Commission Or israélienne a déclaré en 2003 que «le gouvernement responsable du secteur arabe avait été essentiellement négligent et discriminatoire". Mais alors qu’au début des années 2000, on pouvait avoir l'impression que la discrimination était en diminution, ces dernières années indiquent un mouvement inverse.
Le moment décisif semble être la modification de la loi sur la naturalisation de Décembre 2003 qui interdisait les Palestiniens des territoires occupés d’obtenir un statut de résidence ou de citoyenneté en Israël par un mariage avec un citoyen israélien, les empêchant ainsi de vivre en Israël avec leur conjoint. Fortement critiquée par les organisations de Défense des Droits de l’Homme israéliennes et internationales, la loi vise exclusivement la minorité palestinienne d'Israël, dont les membres se marient souvent de l’autre côté de la Ligne Verte.
Le nombre de lois et de règlementations contre les Arabes israéliens ont augmenté de façon exponentielle. Il y a un an, une réglementation oubliée du Mandat Britannique de 1939, interdisant l'importation de livres imprimés en pays ennemi, est réapparue soudain, fermant les portes à l'importation de manuels scolaires en arabe et de toutes sortes de littérature imprimées au Liban (un centre d'éditions importantes, en arabe) et dans d’autres pays arabes. Aucun problème de sécurité n’est en jeu: tous les livres importés sont soumis à la censure de toute façon.
Une provocation analogue est le récent ordre du Ministre des Transports demandant d’effacer les noms de lieux arabes de la signalisation routière et de les remplacer par leurs noms en hébreu. Ainsi, les noms des lieux, y compris ceux des villes mixtes ou arabes comme Yaffa (Jaffa) ou Shafa'amr, devraient être publiquement orthographiés en arabe (!) sous leur forme hébraïque - Yafo ou Shefar'am. Alors que partout dans le monde, du Canada à l'Australie, les ex-pays colonialistes reconnaissent et respectent le patrimoine culturel, les droits et les torts causés aux minorités autochtones, l’Israël colonialiste est impatient de les faire disparaître - politiquement, culturellement et physiquement.
Une nouvelle attaque contre la minorité israélo-palestinienne est la loi proposée visant à interdire la commémoration de la Nakba, la Catastrophe de 1948 où des centaines de villages palestiniens ont été détruits et des centaines de milliers de Palestiniens sont devenus des réfugiés. Bien que sa forme originale, y compris l'emprisonnement des personnes qui la commémorent, a été assouplie par une formulation interdisant seulement aux organes soutenus par un public de commémorer l'événement, l'intention est claire - comme ce fut le cas de la loi (actuellement rejetée) exigeant une déclaration de loyauté à chaque citoyen israélien.
L'attaque contre la minorité palestinienne d'Israël a de profondes racines idéologiques dans le purisme nationaliste extrême, mais elle a surtout des motivations politiques. Les Arabes israéliens, en dépit de six décennies de discrimination, ont été une minorité incroyablement loyale.
La droite israélienne souhaite manifestement mettre un terme à cette loyauté, en espérant que l'incitation conduira les Arabes israéliens à utiliser une certaine forme de résistance violente, de la violence de la rue à des attaques terroristes.
Cela permettrait de créer l'atmosphère souhaitée de suspicion, de peur et de haine dont le fascisme a toujours besoin pour s'épanouir. Une Intifada israélo-arabe est le rêve de nombreux Israéliens d’Extrême-Droite : au niveau national et international, cela leur permettrait de présenter une nouvelle fois Israël comme une victime menacée de la persécution Arabe/Musulmane/Gentile (ndt : non-juifs), non pas comme l’Etat paria, la puissance coloniale régionale qu’il est vraiment.
Source : http://original.antiwar.com/
Traduction : MG pour ISM
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