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ISM France - Archives 2001-2021

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Jérusalem -

Le Syndrome de l’Intifada

Par

Le traumatisme des soldats d’élite

S., un ancien parachutiste qui a été sous traitement lors des 3 derniers mois raconte : « Nous sommes allés dans les maisons, nous avons vu pleurer les enfants et les personnes agées. Nous avons tiré sur leurs télévisions. Au début, vous ne faites pas de pitié, vous faites le travail. Mais plus tard, lorque vous rentrez à la maison, vous commencez à comprendre que vous avez fait des choses qui vous ont choqué. »

Ils étaient très motivés et se sont enrolés dans les unités d’élite. Ils ont servi dans l’IDF pendant 3 ans et parfois plus. Ils ont combattu dans les batailles les plus dures de l’Intifada, mais ils étaient également obligés de s’occuper de la population civile Palestinienne. Maintenant, après avoir été libérés, les difficultés, les problèmes personnels, les cas de conscience remontent à la surface. L’étendue du phénomène est effrayante : des dizaines d’entre-eux sont partis avec leur sac à dos en Extrème-Orient où ils sont devenus accros aux drogues telles que l’héroine ou la cocaïne. Certains ont essayé de se suicider ou de se blesser.

A la lueur de ce grave phénomène, le Lieutenant Colonel (res.) Omri Frish, officier d’unité de combat et travailleur social de formation, a décidé de faire quelque chose et d’essayer de sauver ces routards. Lui et ses amis, tous officiers de haut rang, ont fondé Kfar Izun [littéralement, village d’équilibre -INT] près de Caesarea. L’objectif : recueillir et traiter autant de routards que possible lorsqu’ils rentrent d’Inde, “complètement cuits, totalement indifférents et sans aucun sens de la réalité”.

“Quand nous avons commencé, il y a un an et huit mois, nous voulions aider les routards qui étaient devenus accros aux drogues” raconte Omri, “mais au fur et à mesure que le temps passait, nous nous sommes apercus que le gros problème était avec les soldats libérés. Nous avons alors décidé de répondre aux demandes effectuées par les parents des soldats libérés qui, soit revenaient d’Inde, soit étaient en Israël, en état de dépression nerveuse. Nous avons été stupéfiés par le nombre d’appels que nous avons reçu.
Nous avons reçu plus de 900 demandes de parents avec des histoires épouvantables. Des affaires de drogue, des tentatives de suicide, des dépressions nerveuses. Nous parlons des vétérans de la plupart des unités d’élites telles que Sayeret Matkal, le Commando Naval, Duvdevan, Duhifat."


Le problème majeur qui revient dans les conversations avec les vétérans est l’Intifada. « Les soldats pleurent, se reprochent d’avoir abusé des Palestiniens, de cruauté, de les avoir déhonorés et humiliés. Maintenant, alors qu’ils ont été libérés, tout leur revient à l’esprit comme un cauchemar. Le soldat, le combattant, celui qu’on appelait « Rambo » dans l’armée, part en Inde et il y fait l’expérience d’une nouvelle vie de calme et de tranquilité. Quand il revient, il comprend ce qu’il a fait. Il essaye d’échapper à la réalité en fumant de la drogue mait il ne peut pas s’en sortir », explique l’un des docteurs du village.

C’est difficile de désigner précisément les dégats émotionnels causés. Un officier nous a dit « ce n’est pas une psychose traumatique. Ce n’est pas un post-trauma. C’est simplement une sérieuse dépression nerveuse, c’est une réelle bombe à retardement. »

L’un des traits les plus récurrents qui revient dans le traitement des soldats libérés, le plus souvent chez les vétérans des unités d’élite, est celui de l’échec. « Ils ne sont pas préparés à la possibilité d’un échec. On leur enseigne que l’échec, ou terminer quelque chose à 90%, c’est pour les unités normales, » explique Omri. "A l’âge de 18, 19 ou 20 ans, vous pouvez encore le croire. Ensuite, ils se dégrisent mais c’est trop tard. Quand des soldats sont préparés pour une situation dans laquelle il n’y a pas de place à l’échec, lorsqu’ils échouent, ils craquent. Alors, ils affrontent une grave crise émotionnelle et s’adonnent à la drogue. Pourquoi la drogue ? Parce que la drogue a un grand avantage : quand vous êtes drogué, vous créez votre propre réalité."

Un autre problème que doit affronter l’équipe de Kfar Izur est le sentiment qu’il n’est pas permis de craquer, de pleurer ou de demander de l’aide. Omri raconte : « Les soldats disent : « Ils font de nous des surhommes, et les surhommes ne demandent pas de l’aide », ensuite ils tournent en rond avec un terrible sentiment de culpabilité, qu’ils sont nuls et cela va les accompagner leur vie entière ».

S., un ancien parachutiste qui a été sous traitement lors des 3 derniers mois raconte : « Nous sommes allés dans les maisons, nous avons vu pleurer les enfants et les personnes agées. Nous avons tiré sur leurs télévisions. Au début, vous ne faites pas de pitié, vous faites le travail. Mais plus tard, lorque vous rentrez à la maison, vous commencez à comprendre que vous avez fait des choses qui vous ont choqué. »

Des centaines de parents ont appelé le village pour des demandes d’aide. A aujourd’hui, 120 personnes ont été traitées au village, 100 d’entre eux étaient des ex-soldats. "Les problèmes sont sérieux : des soldats qui ont tué des Palestiniens, des soldats qui ont tué leurs camarades accidentellement, des soldats qui ont échoué sous la pression. Ils essayent de faire face à la vie et partent en voyage en Inde, en Extrème-Orient. Quand ils rentrent, que nous leur parlons et que nous leur demandons pourquoi ils ont fait cela, ils vous disent : "Je ne sais pas comment je l’ai fait, quelqu’un d’autre était en moi" explique Omri.

Un petit nombre d’anciens soldats deviennent accros aux drogues dures. Les résultats sont, à long terme, horribles. « Un officier d’une unité d’élite qui s’était battu contre les Palestiniens pendant 2 ans est parti en ThaIlande » dit Omri. « Il a essayé d’échapper à ce qui lui était arrivé dans les territoires, il n’a pas réussi et a pris de la drogue. Il rentra en Israël et prit des drogues encore plus dures, tel que la cocaine. Ses parent s’en occupèrent. Quelques jours plus tard, ils le trouvèrent mort.
Personne à ce jour ne sait de quoi il est mort. »


Un ex-combattant partit en Amérique du Sud où il prit de la drogue San Pedro (qui est extrait d’un cactus). Il but la drogue, s’installa dans une pièce où il se cacha sous la table pendant 12 heures. On lui demanda "que fais-tu ?" et il répondit : "je suis en embuscade".
Quelques heures plus tard, ils voulurent lui donner à manger et à boire et il leur répondit : « Je suis en embuscade et en embuscade, on ne mange pas et on ne boit pas ». Il rentra en israel, reçut un traitement et aujourd’hui il essaie de se réhabiliter et de travailler.

Un autre exemple difficile est l’histoire de ce soldat d’une unite d’élite qui a terminé son service militaire pendant l’Intifada. Il partit en Inde, prit du LSD et entra dans une carverne pour servir d’intermédiaire. Il vit tout à coup des photos de l’Intifada : des terroristes et des hommes armés du Hamas et du Jihad Islamic. Il a été évacué vers Israël avec l’aide de ses parents et fut envoyé au village pour traitement.

Un autre exemple fut le cas de ce soldat de l’unité secrete Duvdevan, qui a participé à une série d’opérations lors des derniers mois : “Nous sommes allés dans les maisons, nous avons eu des accrochages avec les Palestiniens, nous avons tué des civils – certains d’entre-eux étaient innocents” raconte-il. "Tu fais le travail et tu ne penses pas que cela va te traumatiser plus tard. On te dit que c’est le devoir. Aujourd’hui je regrette certaines choses que j’ai faites. Maintenant, je suis à la maison toute la journée, je reste assis et regarde des dessins animés. Je me frappe la tête contre les murs. Je n’ai pas de travail et personne ne me parle.”

Un autre soldat raconte : "J’ai servi dans les territoires pendant 3 ans. Nous avons tué des dizaines de terroristes. J’ai vu mes amis mourir. Je suis devenu un type irritable. Il y a quelques mois, j’ai pris la voiture de mes parents pour faire une virée, quelqu’un m’a doublé. Je l’ai poursuivi, j’ai ouvert sa porte et je l’ai massacré."

En plus des soldats qui souffrent de dépressions nerveuses et d’abus de drogue suite à l’Intifada, certains vétérans du Liban sont également venus au village.

Un ancien soldat qui était basé à Givati et qui a été suivi par un psychologue, nous a ranconté cette histoire incroyable : "Je mange encore des rations militaires. La nuit, je prenais une fausse arme à feu et je tirais sur les guerilleros du Hezbollah. Je me levais la nuit et frappais ma petite amie. J’ai essayé de prendre des drogues mais mes parents m’ont attaché sur mon lit à la maison. Je ne peux pas surmonter ce traumatisme". Il a été soigné par un groupe de 3 psychologues et est aujourd’hui étudiant à l’université.

L’IDF est au courant de ce phénomène mais c’est difficile de le soigner. « Nous ne pouvons pas le contrôler. Nous ne pouvons pas soigner chaque combattant qui prend de la drogue, qui est en dépression nerveuse ou qui passe quelque temps dans un monastère en Inde.

"Nous sommes au courant de la situation difficile des combattants et des soldats qui tombent en dépression. Il y a des groupes de soutien, et nous apprécions la création du village qui fait un travail merveilleux" a commenté le Général Elazar Stern, officier responsable de l ‘éducation, qui est au courant de la détresse que rencontrent les anciens soldats. Il a promis de nous aider autant qu’il pourrait.
Parmi les amis du village, il y a Orit, la femme du nouveau Ministre de la Défense Shaul Mofaz.

Un des officiers qui est attaché à Kfar Izun et qui est au courant de la détresse des soldats a dit : “C’est une bombe à retardement. Je connais des cas très difficiles dans lesquels des soldats qui ont terminé l’Intifada sont tombés dans de terribles détresses : la drogue, la bagarre, la violence, l’impatience – et on ne peut rien faire pour les aider.
Je parle des soldats qui ont des accrochages avec la population civile Palestinienne, et qui, lorsqu’ils sont libérés, comprennent qu’ils ont eu tort. C’est une forme d’auto-réprimande. Quand ce genre de soldats viennent et demandent de l’aide, nous essayons de les aider mais nous n’avons pas de listes.
Nous avons des informations au sujet des anciens soldats qui viennent se faire soigner et qui sont prêts à parler d’eux, et nous essayons de les aider. Mais il y en a des centaines qui se rongent avec le sentiment qu’il n’y a aucune raison de vivre et le chemin vers le suicide et la drogue est très facile. Nous avons peur que des anciens soldats commettent des crimes en réponse à leur détresse".

N° de telephone de Kfar Izun : 04-6100992.


Doctor : "Il y a un lien clair et direct"
Ma'ariv (p. 14) par Eitan Rabin
"Il y a un lien direct et clair entre l’Intifada et la détresse des soldats qui prennent de la drogue,” dit le Dr. Ron Levy, qui est l’ancien directeur du département des Sciences Comportementales du personnel de l’IDF et commandant du département de la Santé Mentale du Corps Médical de l’IDF.

« Un soldat qui accomplit son travail dans les Territoires est obligé plus d’une fois à offenser la population civile Palestinienne. Parfois il tue, parfois il blesse. Quand il est libéré et qu’il part à l ‘étranger pour se détendre, il rencontre une culture qui permet un accès facile aux drogues et il l’utilise pour s’échapper. Des parents m’ont parlé de leurs fils qui étaient soldats et qui restent assis à la maison fixant le mur et ne voulant pas sortir ».
Dr. Levy a souligné l’importance du role des parents dans l’identification des signes de depression.


Les résultats désastreux d’un assassinat couronné de succès
Ma'ariv (p. 14) par Eitan Rabin


L’un des exemples les plus choquants révélés lors du traitement d’anciens soldats à Kfar Izun est l’histoire d’un groupe de soldats qui avaient pris part à l’assassinat d’un important homme recherché lors de l’Intifada.

Il y a un an et demi, le terroriste Iyad Batat a été assassiné dans les territoires. Au début, naturellement, il y avait de la joie en raison de la réussite de l’action. Cependant, plus tard ce fut épouvantable. Les soldats avaient pris des photos du corps démembré du terroriste qui souriait et riait. Certains avaient même pris des parties de son corps.

« Quelque semaines plus tard, l’officier responsable des opérations vint et leur demanda les photos, » raconte l’un des anciens soldats. « Il a brûlé toutes les photos, puis tout nous est revenu. Nous avons réalisé, tout d’un coup, ce que nous étions en train de faire ».

Peu de temps après avoir brûlé les photos, le degré des dégats émotionnels causés aux soldats vint au premier plan. « Deux de mes amis allèrent à une acid partie et commencèrent à prendre des drogues et de l’ecstasy," raconte le soldat. "Ils vinrent rejoindre l’unité complètement drogués. Nous les avons mis dans une pièce et ne les avons pas laissé sortir. Nous avons pris leurs armes, avons appelé des psychologues et avons pris soin d’eux. L’un de mes amis a même essayé de se suicider. Il restait là à rire et crier : 'Mohammed, Mohammed, Mohammed.' Il se promenait tout nu. L’Intifada a eu raison de lui."

Intifada Syndrome
Ma'ariv (p. 12)

Source : Maariv

Traduction : MG

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