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Gaza - 5 novembre 2002
Par Kristen Ess
Kristen Ess est une journaliste free-lance de New-York City. Elle se trouve en Cisjordanie et Gaza depuis mars 2002 où elle écrit entre autre pour le magazine américain LeftTurn, la radio américaine Free Speech Radio et l'e-magazine palestinien The Electronic Intifada Diaries
Dans la partie la plus au sud de la Bande de Gaza un palestinien est assis près de sa jeune fille et me raconte que l’armée israélienne ne l’a pas prévenu avant de détruire sa maison.
Son voisin a frappé à sa porte, criant que les soldats arrivaient.
L’homme dit que la seule chose qu’il pouvait faire, était de rassembler ses enfants et de sortir de la maison.
Il était 1h du matin. Il est resté dans la rue avec 75 autres nouveaux sans-abris jusqu’à 5 heures, ne savant pas où aller.
Il dit que tous les biens de sa famille sont sous les décombres.ils sont partis sans rien.
Sa femme ne parvenait pas à arrêter les pleurs de sa fille quand des hélicoptères Apache ont envoyé des missiles derrière la maison où il vit maintenant. L’homme dit que ceci est destiné à effrayer les gens. Il m’a dit qu’ils sont aussi terrorisés par "l’avion sans pilote".
Ce sont des drones, qui , continuellement, décrivent des cercles autour des camps et des villes, bourdonnant tel des moustiques harcelant ton oreille ."Nous devenons fous".
Depuis que sa maison a été démolie, il habite pour quelques jours dans ce restaurant, mais ça tire ici si souvent que la famille ne pourrait pas rester.
Pour l’instant, il dort dans la cuisine d’une maison d’amis avec sa femme. Les enfants dorment dans un ensemble de bureaux. Sa fille mouille son lit chaque nuit et le plus souvent ne peut pas dormir. C’est un comportement logique, actuellement chez la plupart des jeunes palestiniens, d’après les organisations de droits de l’homme palestiniennes à Rafah et Khan Yunis.
Les soldats israéliens continuent de tirer dans ce quartier de Rafah, le bloc O, pas loin de la porte de Salahadeen, toutes les nuits. Les maisons, encore debout, sont inhabitables. En une seule nuit, 75 d’entre elles ont été détruites, en une autre 6, et une autre 50. D’après la municipalité de Rafah , plus de 50 palestiniens ont été tués ici la semaine dernière.
Le responsable de l’eau à Rafah, m’a raconté, avec ironie, que le nom du quartier signifie paix et rajoute que ça devrait être remplacé par guerre. Une pile de ciment gris, autrefois la demeure d’une famille, se tient à coté de la rue. Une petite tente blanche lui fait face.
C’est là que la famille vit maintenant sans mobilier, sans vêtements, sans photos familiales ; tout est quelque part, sous les gravats. Chaque jour, au moins 6 maisons sont détruites, excepté samedi, jour de congé pour les israéliens.
Dans le bloc O du quartier de Rafah, les soldats, démolissent des habitations et labourent la terre, à l’aide de bulldozers blindés, de tanks et de grues. Ils construisent un mur, 8 mètres de hauteur et 10 mètres d’épaisseur, entre Rafah Egypte et Rafah Palestine.
En 1982, ce coin fut divisé en deux, conformément aux accords de Camp-David. Un petit groupe d’activistes internationaux est posté entre les tanks et deux palestiniens, afin qu’ils puissent déboucher les bouches d’égout. S’il pleut encore, la zone sera inondée.
Pour les habitants de Rafah, l’eau la plus pure provient d’un puits à Tela Sultan, un quartier dans la partie ouest de la ville, près des colonies israéliennes qui pompent la plupart de l’eau. La zone est dangereuse. Les soldats tirent sur les enfants qui jouent dans le sable.
L’eau provenant de l’extérieur, est détournée par Israël pour sa propre agriculture dans le désert du Neguev. Le responsable municipal dit que la politique israélienne est la cause de la grave pénurie d’eau affectant la population de 130 000 âmes à Rafah.
"Si ils n’avaient pas pris notre eau, il y en aurait assez pour nous".
Les palestiniens ont obtenu l’autorisation d’Israël, de réparer quelques bâtiments de l’aéroport, détruit par l’armée israélienne l’année dernière. Autorisation qu’ils n’auront pas pour reconstruire la piste d’atterrissage.
Au checkpoint de Tufah entre le camp de Khan Yunis, où les résidents sont décrits comme des "gens n’ayant rien à perdre" et Mawasi, où je me suis dit que "la vie est morte", 300 personnes ont attendu le quatrième jour pour passer à coté de soldats israéliens lourdement armés, certains d’entre eux postés dans une tour pendant que d’autres s’amusaient, courant et sautant en plein soleil. Ils n’ont évidemment pas peur des palestiniens portant de lourds sacs de riz et tirant de l’eau.
Ceux, embusqués dans les tours à coté du checkpoint ont passé l’après-midi à tirer sur trois immeubles, déjà détruits. La zone fut calme seulement lorsque les soldats ont pris leur pose-déjeuner. J’ai été implorée par une petite fille de 10 ans avec des taches de rousseur, de m’accroupir pour éviter d’être visée.
Le matin, la pluie inonda la terre pendant que les palestiniens devaient attendre au checkpoint avant de rentrer chez eux. L’eau s’évapora, laissant poussière et chaleur intense, les gens attendaient encore. Près d’ici, se trouve la Méditerranée, encadrée par des palmiers.
C’est inaccessible pour les palestiniens, même, si finalement, ils traversent le checkpoint.
Pour aujourd’hui, 10 femmes en deux groupes de 5 ont été autorisées à passer.
Des centaines d’autres personnes, fatiguées, dégoûtées, effrayées, ne sont pas, de nouveau, autorisées à rentrer chez eux, devant repartir et quitter la zone à cause des tirs des soldats israéliens en pleine nuit.
Des familles récoltent leurs olives dans les villages intérieurs de la Bande de Gaza. Tous les arbres proches des soldats et colonies israéliennes ont été arrachés.
Il y a foule, aujourd’hui, dans les rues poussiéreuses de Rafah, les enfants rentrent de l’école, des gens vont et viennent du travail.
Entretenir les infrastructures est impossible, alors les rues ne peuvent être que crasseuses, il n’y a aucun endroit où poser les ordures, la plus grande partie de l’eau est imbuvable pour les palestiniens.
Ils mènent leur vie, sans autre choix, à l’intérieur d’un espace plus réduit chaque jour, compressé par Israël jusqu’à ce qu’ils n’aient nulle part où aller.
Article paru dans le Point d'information Palestine
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Source : www.electronicintifada.net/
Traduction : Eric Colonna
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