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Israël - 14 octobre 2010
Par Khaled Amayreh
Dimanche 10 octobre, le gouvernement israélien de droite a approuvé une proposition de loi qui obligera les citoyens non-juifs à jurer loyauté à Israël en tant qu’Etat juif. La proposition ne précise pas explicitement que les non-Juifs devront se contenter de droits et privilèges inférieurs à ceux des citoyens juifs. C’est pourtant ainsi que la nouvelle loi est comprise par la plupart des gens. Afin de contenir les critiques, les responsables israéliens ont invoqué le vieux mantra qu’Israël a toujours été un Etat juif et démocratique et que les citoyens non juifs n’ont rien à craindre. Toutefois, ce que ces responsables n’ont pas dit, c'est qu’à partir de dorénavant, Israël se définira d’abord par sa nature « juive » et, ensuite, par son caractère démocratique. En d’autres termes, dans les situations où « Juif » et « démocratique » ne sont pas compatibles, comme c’est généralement le cas, on ne doit se faire aucune illusion sur qui l’emportera.
Soyons clairs. Israël ne peut pas être réellement démocratique et talmudique en même temps, et dans les circonstances actuelles, le mieux que l’Etat juif puisse faire, c’est de faire semblant d’être vraiment démocratique ou d'utiliser la démocratie comme un simple habillage pour masquer sa nature fasciste.
C’est ce à quoi a fait allusion Ahmed Tibi, membre arabe de la Knesset, lorsqu’il a réagi à la nouvelle loi. Il a dit qu’elle signifiait d’abord et avant tout que l’Etat d’Israël est démocratique seulement pour les Juifs et juif pour les non-Juifs, en particulier les Arabes. « Il n’y a aucun pays au monde qui oblige ses citoyens à jurer fidélité à une idéologie ou à un engagement partisan. Israël fait la preuve qu’il n’est pas égalitaire et qu’il est de fait démocratique pour les Juifs et juif pour les Arabes. »
Cibler les Arabes
La nouvelle loi semble viser tant l’importante communauté arabe en Israël, qui constitue plus de 23% de la population d’Israël et s’accroit à un taux plus élevé que le taux de natalité juif, que les millions de réfugiés palestiniens, déracinés de leurs maisons et de leurs villages en 1948 et qui revendiquent leur rapatriement dans ces maisons et ces villages dans ce qui est maintenant Israël.
Pour ce qui concerne la communauté arabe en Israël, la nouvelle loi semble leur dire que leur existence en tant que citoyens en Israël ne peut être garantie pour l’éternité et qu’ils pourraient avoir à chercher une « réalisation nationale » ailleurs, c’est-à-dire dans un futur Etat palestinien. Autrement dit, la nouvelle loi brandit la menace du transfert à la face des 2 millions de Palestiniens considérés comme des citoyens israéliens « à part entière ».
Dans tous les cas, la nouvelle loi affirme la nature juive d’Israël, surtout au détriment de la démocratie. C'est ce qu’on lit entre les lignes : « Israël est avant tout un Etat juif, et si vous n’êtes pas juif, ne vous attendez pas jouir de droits et de privilèges pleins. » En dernière analyse, si un citoyen non-juif aspire à la pleine égalité, il ou elle devra se convertir au judaïsme orthodoxe (les autres courants du judaïsme ne sont pas acceptés) ou quitter le pays.
En ce qui concerne les réfugiés palestiniens qui aspirent à revenir chez eux, la nouvelle loi leur dit que ce n'est même pas la peine de rêver d’un rapatriement en Israël. Cela perpétuerait le conflit israélo-palestinien et le rendrait insoluble au moins pour de nombreuses décennies à venir.
Il ne fait aucun doute que l’approbation de cette loi explicitement fasciste constitue l’« infrastructure juridique » d’une possible déportation des citoyens palestiniens d’Israël pour résoudre le problème israélien de croissance démographique.
Les dirigeants israéliens, dont le Premier Ministre Benjamin Netanyahu, demandent systématiquement que l’Autorité palestinienne reconnaisse Israël en tant qu’Etat juif. Israël n’a jamais vraiment explicité de façon satisfaisante ce que « Etat juif » était supposé vouloir dire. Toutefois, si l’on prend les déclarations des responsables israéliens pour argent comptant, « Etat juif » implique qu’Israël a le droit, au moins à un moment donné dans le futur, d’expulser ses citoyens non-juifs vers l’Etat palestinien à venir.
Ainsi, malgré la pléthore de déclarations en faveur ou contre la nouvelle loi, il est clair que son but ultime est la réalisation de ce qu’on appelle le « transfert ». Pour les non initiés, le transfert n’est pas un terme linguistique innocent désignant le déplacement d’une population d’un endroit à un autre. Dans le contexte palestinien, cela signifie rien moins qu’un nettoyage ethnique génocidaire.
Depuis 1948, Israël procède, vague après vague, au nettoyage ethnique des Palestiniens. Aujourd’hui, le nettoyage ethnique est étayé par une infrastructure juridique solide qui permettra aux sionistes d’utiliser la nouvelle loi comme un mantra dont l’invocation justifie chaque crime imaginable contre le peuple palestinien. Par conséquent, Israël va pouvoir accélérer le processus de retrait de la citoyenneté aux « Arabes israéliens » au motif qu’Israël est un Etat juif et que les non-Juifs qui souhaitent rester en Israël doivent prendre leur parti de leur statut inférieur de citoyens de deuxième ou de troisième classe.
Kahana justifié !!!
Au début des années 1970, un rabbin fasciste qui avait émigré des Etats-Unis, nommé Meir Kahana, a été élu à la Knesset. Il expliquait que judaïsme et démocratie étaient totalement incompatibles et qu’Israël devrait décider s’il voulait être juste une autre démocratie occidentale ou un véritable Etat juif.
Kahana, qui a écrit un livre intitulé « Ils doivent partir », appelait à l’expulsion de la plupart ou de tous les Palestiniens d’Israël et des Territoires occupés de Cisjordanie , de la Bande de Gaza et de Jérusalem Est. Un des disciples actuels de Kahana, Ben Ari, membre de la Knesset et député du Bloc d’Union Nationale, a crié victoire, disant que « 20 ans après la mort de Kahana, le Likoud admettait que le Rabbin avait raison. » « Il est rafraichissant d’entendre le gouvernement Likoud, qui hantait le Rabbin Kahana, vouloir que les Arabes signent un serment de loyauté. On admet aujourd’hui que ce que le Rabbin Kahana déclarait il y a 20 ans était correct et approprié. »
Après l’adoption de la dernière loi, de nombreux Israéliens craignent que ce ne soit que le début et qu’une question de temps avant que d’autres lois draconiennes ne soient votées, qui feront d’Israël un Etat officiellement fasciste.
Certaines lois talmudiques voient les non-Juifs comme des animaux et leur attribuent le rôle de « porteurs d’eau et de scieurs de bois » au service de la « race supérieure » ou « peuple élu ». En effet, des ministres à l’esprit talmudique, comme Y’akov Ne’eman, déclarent ouvertement qu’ils ne prendront pas de repos tant qu’ils ne verront pas Israël régi par les lois du Talmud.
D’autres ministres laïques, comme Isaac Herzog, fils de l’ancien président israélien Haim Herzog, parlent de fascisme. « Nous sommes sur une pente extrêmement dangereuse, » a déclaré Herzog. « Il semble que le fascisme soit en train de dévorer les marges de notre société. »
Il semble que le fascisme soit en train de dévorer bien plus que les simples marges de la société israélienne et qu'il soit déjà devenu un courant dominant.
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Khaled Amayreh
14 octobre 2010