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Israël - 4 mars 2004
Par Jonathan Cook
C’est la première fois pourtant qu’une compagnie de l’envergure de McDonald reconnaît explicitement que parler arabe est un motif de renvoi. La décision de licencier Zinaty parce qu’elle a parlé en arabe a été confirmée par le directeur de la succursale de Ramle à Al-Ittihad, un quotidien local arabe, le mois dernier.
L’éviction d’en employé arabe au motif qu’il parle sa propre langue n’est que le sommet d’un iceberg de décennies de pratiques discriminatoires ininterrompues contre la minorité de Palestiniens employés dans les entreprises
Une photo d’Abeer Zinaty montre cette étudiante de 20 ans de l’université mixte Arabe-Juive de Ramle - au centre d’Israël - avec un T-shirt où s’inscrit ce logo "Meilleur travailleur 2003 - Le McDonald’s d’Israël".
Moins d’un an plus tard elle n’a plus d’emploi, et a été licenciée par la plus fameuse entreprise de restauration rapide au monde. Son crime, selon le directeur de la succursale : on l’a prise en train de parler arabe à un autre employé arabe.
"La manière dont a été traitée Zinaty par la direction israélienne de McDonald est l’illustration sans fard de la marée grandissante des discriminations contre les travailleurs arabes", a déclaré au journal Al Ahram Weekly, Jafar Ferah - directeur du Mossawa - groupe politique de lobbying en faveur du million de citoyens de Palestiniens.
Normalement, l’arabe est une des langues officielles de l’Etat d’Israël, mais c’est une pratique de longue date de beaucoup d’entreprises israéliennes que de l’interdire à leurs équipes.
C’est la première fois pourtant qu’une compagnie de l’envergure de McDonald reconnaît explicitement que parler arabe est un motif de renvoi. La décision de licencier Zinaty parce qu’elle a parlé en arabe a été confirmée par le directeur de la succursale de Ramle à Al-Ittihad, un quotidien local arabe, le mois dernier.
Dans une lettre ultérieure à Mossawa, le directeur des ressources humaines, Talila Yodfat, a dit que tous les employés sont informés qu’ils "ne doivent utiliser que l’hébreu quand ils parlent entre eux ou en présence des clients pour éviter des situations difficiles".
Cependant, menacé de poursuites judiciaires, Yodfat prétend maintenant qu’interdire l’arabe n’était pas une mesure raciste mais avait pour but d’éviter de possibles « erreurs de communication » entre des équipes de groupes ethniques différents.
"L’éviction d’en employé arabe au motif qu’il parle sa propre langue n’est que le sommet d’un iceberg de décennies de pratiques discriminatoires ininterrompues contre la minorité de Palestiniens employés dans les entreprises", a déclaré Wahbe Bidarne, directeur de « La voix du Travailleur », groupe de pression des employés arabes.
"Peu importe que nous parlions de petites entreprises privées, comme des restaurants, ou des institutions gouvernementales, c’est le même racisme " dit-il. "Même bien qualifiés, la plupart des Arabes ne peuvent trouver de travail - si jamais ils en trouvent - qu’en tant que journaliers pour la cueillettes des olives, le bâtiment, ou les usines".
La discrimination contre les employés arabes se renforce visiblement avec les provocations répétées contre .cette minorité de la part de personnalités publiques de haut range. Même les ministres du gouvernement accusent régulièrement la minorité palestinienne - en gros 20% de la population - de participer au terrorisme, ou de représenter, à l’égal des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, un danger pour le futur d’Israël.
Au cours d’un récent congrès de leaders israéliens, par exemple, le ministre du Trésor Benjamin Netanyahu a conclu : "Même si les Arabes s’intégrent merveilleusement parmi nous, quand leur nombre atteindra entre 35 et 40% de la population israélienne, l’Etat Juif cessera alors d’exister".
Ses commentaires intervenaient après que le gouvernement ait révélé qu’il avait des plans pour transférer une zone d’Israël appelée le Petit Triangle - proche de Cisjordanie et très peuplée de citoyens arabes - dans un futur Etat palestinien.
Au cours des derniers mois, une série d’indicateurs ont confirmé que les employés arabes sont moins bien venus que jamais dans l’économie très largement contrôlée par l’Etat.
Ce mois-ci, le bureau du procureur d’Etat a délivré sa bénédiction légale à une décision du Chef du Rabbinat de Tibériade qui a attribué la plus haute récompense casher aux établissements qui n’employaient que des Juifs.
Les restaurants de Tibériade employaient traditionnellement une grande proportion d’arabes faiblement rémunérés dans leurs cuisines.
Ceci est intervenu dans la foulée de l’éviction du directeur Arabe de la restauration à l’hôtel Nirvana sur la plage de la Mer Morte après son refus de licencier 40 employés arabes. Les patrons du Nirvana lui avaient fait clairement savoir que les clients s’étaient plaints de la présence d’Arabes dans l’hôtel. Ils avaient peur de la mauvaise publicité s’ils licenciaient eux-mêmes les employés.
Dans une autre affaire très commentée, des employés arabes de l’Institut national d’assurance de Nazareth ont signé une pétition contre le directeur de l’établissement, Moshe Nun, qui depuis son arrivée, il y a trois ans, a licencié 19 employés Arabes alors que dans le même temps il recrutait 27 Juifs.
Un rapport publié le mois dernier par le Centre Adva – un groupe de Tel-Aviv qui milite en faveur de l’égalité et de la justice sociale - a montré que 36 des pires points noirs de l’emploi en Israël se trouvent dans les zones arabes.
Même après que le gouvernement ait manipulé les chiffres pour faire baisser le pourcentage des sans emploi parmi les citoyens arabes, les Arabes sont plus de deux fois plus nombreux parmi les chômeurs que les Juifs.
La plupart des Arabes qui ont du travail ont des jobs occasionnels faiblement rémunérés. "L’économie israélienne plonge actuellement et les premières victimes en sont toujours les citoyens arabes" a déclaré Badarne. "Si un restaurant doit licencier des employés, il choisira les Arabes. Ou si les Juifs sans emploi se mettent à accepter les emplois mal payés, les employeurs licencieront les employés arabes qui sont là depuis longtemps".
En fait, le racisme sur les lieux de travail a pris place très tôt dans le mode de pensée Sioniste.
La notion de "travail hébreu" a été importée par les premiers immigrants Juifs en Palestine et aujourd’hui elle est reprise dans l’idéologie de l’Histadrut , qui est en Israël ce qui se rapproche le plus d’une fédération de syndicats
En privilégiant le travail Juif sur le travail Arabe, l’Histadrut connaît un succès qu’on mesure facilement quand on analyse le mode de recrutement des deux plus grands employeurs publics d’Israël ; la compagnie de téléphone Beseq et la compagnie d’électricité d’Israël.
Avec un effectif de 10 000 personnes, Bezeq n’emploie pas plus de 10 Arabes.
La Compagnie d’électricité avec un effectif de 14000 personnes est connue pour employer un nombre de travailleurs Arabes encore inférieur.
Les deux entreprises ont besoin d’un vaste réseau de techniciens, de comptables, de secrétaires, de réceptionnistes et de responsables pour desservir chaque ville arabe et juive, ainsi que tous les villages du pays.
Farouk Omri, directeur des ventes chez Bezeq et son plus ancien employé arabe, dit que la poignée d’employés Arabes est le legs d'une brève expérience effectuée au milieu des années 80 par le professeur principal de l'Ecole Bezeq à Jérusalem, qui formait exclusivement du personnel technique. "Cela a toujours été une situation inextricable pour les Arabes" a-t-il déclaré à Weekly. "Les Arabes rataient toujours l’examen d’entrée", explique-t’il à l'hebdomadaire.
"Si vous postuliez pour un travail chez Bezeq, ils vous demandaient si vous aviez suivi les cours de l’Ecole..
Mais les Arabes n’étaient pas autorisés à y étudier en premier lieu. Ce n’est qu’en 1983 que le directeur a finalement accepté - sous peine de se voir poursuivi pour racisme - de permettre le recrutement de deux Arabes par an : quelqu’un qui avait réussi les examens universitaires se voyait ensuite assuré d’un travail. L’Ecole a définitivement fermé en 1988 et l’admission d’Arabes chez Bezeq s’est terminée ".
Omri dit que Bezeq utilise maintenant une méthode plus subtile pour empêcher le recrutement des Arabes.
Décrétant que son activité touche à la Sécurité de l’Etat, Bezeq exige que les candidats Arabes prouvent qu’ils ont accompli leur service militaire. Presque tous les Arabes sont interdits d’armée.
"L’argument selon lequel le travail chez Bezeq est un point sensible qui touche t la sécurité ne tient pas" a déclaré Omri "Il n’y a peut-être que 50% des jobs qui puissent être analysés ainsi : ceux des techniciens employés dans les installations militaires et au Ministère de la Défense".
Les revendications sécuritaires signifient que les Arabes sont exclus de presque tout l’économie.
Les Arabes ne peuvent pas être employés dans l’industrie nucléaire - le site du réacteur de Dimona et les usines d’armes secrètes - dans nombre d’usines textiles qui fournissent les uniformes militaires, dans les nombreuses industries militaires, dans les professions du transport aérien national, dans les aéroports, les prisons – bien qu’une exception soit faite pour les Druzes qui font leur service militaire.
Même les firmes privées y compris les restaurants et les bureaux utilisent la sécurité comme prétexte pour refuser les candidats arabes.
La majorité des jobs sont aussi interdits y compris ceux qui concernent l’ingeneering et l’architecture parce qu’on les prétend liés à la sécurité. La plupart des universitaires arabes travaillent que comme professeurs, avocats ou médecins dans leurs propres communautés.
Le rapport annuel de Sikku, un groupe Juif-Arabe qui fait campagne pour l’égalité des chances, a montré que le gouvernement autorise bien de telles discriminations en s’appuyant sur des précédents.
En dépit de la campagne menée par le gouvernement du Premier Ministre Yitzhak Rabin pour recruter des citoyens arabes dans les services civils au cours des années Oslo - au milieu des années 1990 - et la législation ultérieure initiée par les membres Arabes de la Knesset pour assurer « une représentation équitable », les Arabes ne représentent que 6% des effectifs dans le service public.
La grande majorité d’entre eux est employée dans les Ministères de la Santé, de l’Environnement, des Affaires Religieuses et de l’Education, qui ont tous besoin d’arabophones pour travailler avec les villes et les villages.
Plusieurs Ministères excluent les Arabes de leurs effectifs. Le vice-Premier Ministre Ehud Olmert, responsable du Ministère des Communications, a répondu, le mois dernier, à une question de la Knesset sur le fait qu’il n’y avait pas d’Arabes dans ses services, en disant qu’aucun des candidats n’était apte.
La véritable raison, en fait, c’est que les Ministères des Communications, du Logement, des Transports et de l’Industrie considèrent que leur travail est lié à la sécurité : de grands pans de ces services préparent et mettent en œuvre l’occupation des territoires palestiniens.
De même, les Conseils d’Administration de 111 entreprises gouvernementales sont dominés à une majorité écrasante par les Juifs - toujours en contravention avec la loi israélienne.
Il n’y a que 18 Conseils d’Administration qui aient un responsable Arabe – comprenant 3% du total des postes d’administrateurs. Dans la grande majorité des cas, ces postes sont la récompense réservée aux Druzes de confiance qui ont servi dans l’armée israélienne.
Source : http://weekly.ahram.org.eg/
Traduction : CS - ISM-France
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