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ISM France - Archives 2001-2021

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Israël -

Un court-métrage promotionnel d’un marchand d’armes israélien qualifié du « plus atroce de tous les temps »

Par

La firme Raphael Advanced Defense Systems, autorité du développement des armes d’Israël, a lancé un film promotionnel qui a été qualifié du « plus atroce des vidéos de défense de tous les temps » par Wired, une revue de vulgarisation technologique très populaire. Cette vidéo bollywoodienne, diffusée le mois passé à l’occasion de la parade aérienne indienne, met en scène des femmes, serrées dans leur sari, dansant entre des missiles ornés de fleurs, tandis qu’un homme en veston de cuir leur promet « sécurité et protection », au son d’une version sitarisée du célèbre pop song Together Forever [Ensemble, pour l’éternité].

La production de ce navet absolu a coûté non moins de 15 000 dollars, et elle a été dirigée par le metteur en scène Avishai Kfir, en Israël. Les acteurs sont de diverses origines : israélienne, géorgienne et indienne.

Un porte-parole de la firme Raphael a indiqué que cette vidéo avait eu un succès fou, en Inde…

« Raphael s’efforce en permanence de faire preuve d’innovation et de créativité, non seulement dans le domaine de la technologie de défense », a-t-il poursuivi. « Dans tout salon international, nous lançons un film qui correspond à la culture locale. Ainsi, par exemple, au Brésil, notre clip tournait autour du foot. Durant les dernières années écoulées, nous avons remporté le premier prix du design et de la production, quasiment chaque année ».

Les courageux désirant se faire une idée de ce faux pas (en français dans le texte, ndt) incroyable pourront cliquer ici.

Les bras protecteur d’Israël, autour de la taille de pays- clients féminisés et ethnicisés
Commentaire, par Rela Mazali

La principale firme d’armement israélienne, Raphael, a produit un film de promo taillé sur mesure pour un de ses principaux clients, l’Inde. Comme le montre le premier sujet (ci-dessous), racontant une partie de la réaction internationale à ce film, ce clip est une expression brutale, pour ne pas dire effrontée, de l’orientalisme raciste et sexiste d’Israël. Reflétant les perceptions des responsables de la défense israélienne, il portraiture l’Inde (et par implication d’autres clients majeurs du « tiers monde », comme la Turquie) comme un pays féminisé, sexualisé, érotisé, sous développé, totalement dépendant de la haute protection technologique virilisée d’Israël et de Raphael.

Avec son outrance, sa stupidité, et son caractère insultant, cette promo donne une démonstration éclatante du complexe de racisme et de sexisme inhérent à la militarisation d’Israël. Comme des universitaires féministes l’ont démontré, des années durant, la militarisation implique nécessairement l’ « estranéisation » d’un ennemi effrayant (généralement) ethnicisé, d’un côté, et d’un protégé vulnérable, faible et féminisé, de l’autre. Le clip commercial de Raphael dépeint à merveille ses « amis » comme des « autres » ethnicisés, féminisés et ethnicisés. Leur progrès et leur sécurité, explique le clip avec un lyrisme de jingle, résident dans le fait qu’ils succombent au charme de leur protecteur supérieur, viril et tout de cuir noir vêtu, et, bien entendu, qu’ils achètent les systèmes d’armements de Raphael…

Le lien ainsi établi entre des armes, une soi-disant sécurité et une combinatoire complémentaire de racisme et de sexisme, par conséquent, n’a rien d’une simple coïncidence. Il s’agit, bien au contraire, d’un aspect systémique de la militarisation.

Entre autres choses, la société israélienne juive (comme celle de nombreuses puissances coloniales, avant et depuis) « externalise » couramment, puis « hostilise » les sociétés palestinienne ou arabes au motif de leur oppression des femmes, citant cette donnée comme preuve conclusive de leur arriération, de leur barbarie et de leur cruauté et, inversement, en comparaison, du développement avancé et éclairé d’Israël.

Cela n’empêche que la réalité de l’Israël militarisé est celle d’une discrimination sexuée profondément ancrée. Ayant besoin de femmes faibles, vulnérables, dont le besoin de protection justifierait, soi-disant, le déploiement de la violence d’Etat organisée, la culture israélienne œuvre systématiquement et activement à affaiblir les femmes, au travers d’un large spectre de stratégies et de pratiques. L’une d’entre elles consiste à maintenir les femmes dans une pauvreté relative. Comme le montre le deuxième document (ci-après), en Israël, aujourd’hui, « le revenu moyen d’une femme salariée n’est que de 64 % de celui d’un homme faisant le même travail. » De plus, « les mères gagnent toujours moins que toutes les autres catégories de salariés, en dépit du fait qu’elles représentent une proportion de la main-d’œuvre employée plus importante que celle de toutes les autres catégories ».

L’armée, en particulier, une institution qui, bien entendu, exerce une influence énorme sur la société et la culture, en Israël, tend à « mettre les femmes dans les grades inférieurs », au travers de la structure de leurs postes et de leurs rôles militaires, ainsi que via des pratiques très largement répandues et quasi-normalisées de harcèlement sexuel. Une étude, réalisée en 2003 par l’armée elle-même, a relevé que 80 % des femmes conscrites étaient exposées à du harcèlement sexuel durant leur service militaires (article en hébreu).

Commentant un récent scandale autour de révélations selon lesquelles l’officier supérieur de la marine de guerre israélienne se rend de manière régulière dans des clubs de strip-tease, la star féministe des médias Merav Michaeli écrit, dans le troisième extrait, ci-après :

« L’armée israélienne demeure une institution dans laquelle les femmes ne bénéficient même pas d’un semblant d’égalité… une très importante majorité des femmes servant dans l’armée sont affectées à des postes subalternes, et… comme nous le savons, cela inclut des services de nature sexuelle… les militaires n’ont pas de code éthique clair, qui soulignerait la gravité du harcèlement sexuel, ni de programme éducatif pour les soldats et les commandants, qui pourraient les amener à modifier leur manière de voir le harcèlement sexuel. »

Paradoxalement, alors que des efforts de réforme ont apporté, et peuvent encore continuer d’apporté une certaine amélioration, c’est cette amélioration elle-même qui, en même temps, dissimule le rôle central, structurel, des convictions et des pratiques sexistes-racistes, en perpétuant la vision du monde vitale à l’agenda de militarisation constante propre à l’Etat juif…

Source : Haaretz

Traduction : Marcel Charbonnier

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